Chapitre 13

1464 Mots
Flaviana accepte finalement la proposition de Ruggerio, bien qu’avec une légère hésitation. Il lui donne rendez-vous pour le lendemain à 13h. — C’est pendant ma pause, précise-t-elle. Et j’ai une réunion juste après. — Ce type te paiera plus que ton job minable, répond Ruggerio sans détour. Tu veux survivre ou rester dans ta galère ? Elle ne répond pas, mais son silence vaut acceptation. De retour chez elle, Flaviana s’allonge sur le canapé, l’esprit agité. Ce n’était pas vraiment de l’argent qui l’avait motivée jusque-là. Elle avait couché par désir, par plaisir, jamais contre paiement. Cette fois, c’était différent. Elle ne savait même pas ce que cet homme attendait réellement d’elle. Le lendemain, elle se lève tôt, soigne son apparence et met dans son sac une tenue de rechange. En arrivant au cabinet, elle sent tout de suite les regards pesants des autres employées. Certaines la fusillent du regard. Elle fait comme si de rien n’était. Le patron la fait appeler dans son bureau. Il l’attend, installé avec un sourire qu’elle connaît trop bien. — Tu es radieuse aujourd’hui, Flaviana. Je me disais justement qu’on n’avait pas eu un petit moment ensemble depuis ton embauche... Elle lève les yeux vers lui, impassible. — Ce qui s’est passé la première fois ne se reproduira pas. Je réalise parfois des fantasmes, mais une seule fois. Le sourire du patron s’efface peu à peu. Il croise les bras, l’air contrarié. — Si tu tiens à ton poste, tu devrais faire un effort. J’ai des attentes. Tu me dois ce confort. Flaviana serre les dents mais ne répond rien. Elle se lève calmement et quitte le bureau sans un mot de plus. En regagnant son espace de travail, elle passe devant celui de Silvano. Sa porte est entrouverte. — J’ai entendu, dit-il sans se lever. T’as bien fait. Faut pas te laisser traiter comme ça. Elle s’arrête, le regarde. Un léger sourire étire ses lèvres. — Merci. Elle ne comprend pas trop pourquoi, mais elle se sent en confiance quand elle parle avec Silvano. C’est différent. Il ne lui tourne pas autour. Il l’écoute. Et, surtout, il la respecte. À la pause, le patron insiste de nouveau, plus lourdement cette fois. Il tente de la retenir dans son bureau, prétextant qu’ils ont "quelque chose à régler entre eux". — On peut avoir juste un moment, Flaviana ? murmure-t-il en se rapprochant. Mais elle lui adresse un regard glacé. — J’ai une pause. Et j’en ai besoin. Pas de toi. Elle sort sans se retourner. Elle rejoint Ruggerio devant le club encore fermé. Il est adossé à sa voiture, une main dans la poche, l'autre tenant une cigarette à moitié consumée. Lorsqu’il la voit, il reste figé quelques secondes. Flaviana porte une robe fendue couleur bordeaux, moulante, élégante et terriblement sexy. — Bordel, souffle Ruggerio. Tu vas le rendre fou. Il avance d’un pas, comme pour l’embrasser, mais elle pose une main sur son torse et le repousse doucement. — Ne recommence pas. Je veux pas que tu me brises encore le cœur. Ruggerio sourit avec une touche d’amertume. — C’est pas ton cœur que j’ai brisé. C’est le mien. Elle détourne les yeux. Ils montent ensemble dans sa voiture, une berline noire luxueuse, et s’éloignent du club. Le trajet se fait en silence, jusqu’à ce qu’ils arrivent devant un hôtel cinq étoiles, au marbre blanc immaculé et aux dorures discrètes. Dans le jardin intérieur, au bord d’une piscine turquoise bordée de palmiers, un homme les attend. Il est grand, élégant, la cinquantaine raffinée, habillé d’une chemise en soie beige ouverte sur une peau mate, parfaitement bronzée. Il porte des lunettes de soleil de luxe et fume un cigare lentement. — Flaviana, je te présente Son Altesse Cheikh Khalid Al-Zahir, un homme d’affaires émirati influent, dit Ruggerio en posant une main sur l’épaule de Flaviana. Le Cheikh lève les yeux, un sourire discret aux lèvres. — Enchanté, Flaviana, dit-il dans un français aux accents subtils. — De même, murmure-t-elle, troublée par la puissance tranquille qui se dégage de lui. Ruggerio s’éloigne en les laissant seuls. — Je vous attendrai à l’intérieur, ajoute-t-il en jetant un dernier regard à Flaviana. Elle inspire profondément et se tourne vers le Cheikh. La vraie rencontre peut commencer. Dans le calme feutré de la terrasse, le Cheikh Khalid apprend à la connaître. Il pose des questions simples mais directes, avec un regard pénétrant, presque déstabilisant. Flaviana répond avec assurance, maîtrisant ses gestes et son sourire. — Je viens souvent en Italie pour des affaires, dit-il en croisant les jambes. Mais cette fois-ci, je reste une semaine entière. Et je veux de la compagnie… Disons, agréable. — Je peux être très agréable, murmure Flaviana avec un demi-sourire. Le Cheikh incline légèrement la tête, appréciant la réponse. — Je n’en doute pas. Il lui glisse quelques compliments sur son élégance, sa prestance, son regard. Rien de trop appuyé, mais suffisamment flatteur pour faire naître un frisson subtil sur sa peau. Puis, calmement, il dit : — Viens, montons à ma chambre. On sera mieux pour parler. Elle hoche la tête, le suit sans un mot. L’ascenseur les mène directement à la suite présidentielle. Immense, décorée avec goût, ouverte sur une vue panoramique de la ville. Flaviana est impressionnée, mais ne le montre pas. Une dizaine de secondes après leur entrée, la porte s’ouvre de nouveau. Ruggerio entre. Il jette un œil rapide à Flaviana, puis s’adresse au Cheikh : — Vous avez besoin de moi ou je vous laisse en tête à tête ? Le Cheikh se tourne vers Flaviana, comme pour lui laisser le choix. Elle garde le regard fixé sur lui, sans répondre immédiatement. — Reste, dit-elle finalement à Ruggerio, sans vraiment savoir pourquoi. Le Cheikh Khalid esquisse un sourire amusé, puis s’installe sur un large canapé en cuir. Il verse un verre d’un liquide ambré et en tend un à Flaviana. — Détends-toi. Je ne suis pas un monstre. Je veux juste te connaître… comme une amie. Ou peut-être plus. Tout dépend de toi. Alors qu’ils étaient toujours assis dans le salon lumineux de la suite, dans un silence tendu, Cheikh Khaled se leva calmement et attrapa une valise posée à côté du fauteuil. Il l’ouvrit sans cérémonie. Des liasses de billets, impeccablement rangées, en remplissaient l’intérieur. Flaviana écarquilla les yeux. — Prends ce qui te revient, dit-il tranquillement en tendant la moitié de la somme à Ruggerio. Ruggerio s’avança avec empressement, les yeux brillants d’avidité. Il prit l’argent comme un enfant saisit un jouet désiré depuis longtemps. — Tu sais que tu peux compter sur moi, Cheikh, dit-il en souriant largement. Puis il se tourna vers Flaviana, son sourire se fit plus lourd, plus chargé de sous-entendus. — Tu es à lui maintenant, lui dit-il en désignant le Cheikh. Il peut faire ce qu’il veut. Et sans attendre de réponse, il s’éclipsa, satisfait. Flaviana resta figée un instant, partagée entre colère et incompréhension. Le Cheikh Khaled referma la valise, puis prit l’autre moitié des billets et les tendit à Flaviana. — C’est pour toi. Ce n’est qu’un début. Si tu joues bien ton rôle, tu recevras plus. Beaucoup plus. — Mon rôle ? demanda-t-elle en prenant l’argent, encore sous le choc. — M’accompagner. Aux rendez-vous, aux sorties, aux soirées d’affaires. Être là, élégante, silencieuse quand il faut, brillante quand je le demande. — C’est… tout ? Le Cheikh Khaled capta son regard et sourit légèrement. — C’est tout. Flaviana le fixa, à la fois soulagée et troublée. — Vous ne… demandez rien d’autre ? Pas de…? Il sourit plus largement, devinant sa pensée. — Le sexe, Flaviana, je peux l’avoir où je veux, quand je veux. Ce n’est pas ce que je cherche chez toi. Je veux une présence. Une femme de confiance. Loyale. Belle, bien sûr… mais surtout loyale. Il se pencha légèrement vers elle. — Et si un jour j’ai envie de plus, je te le dirai. Mais ce jour n’est pas aujourd’hui. Flaviana ne sut quoi répondre. Pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait désirée pour autre chose que son corps. C’était presque plus perturbant. Flaviana rentra chez elle ce soir-là encore bouleversée, mais le cœur étrangement léger. La valise pleine d’argent posée dans un coin de la chambre lui paraissait irréelle. Elle passa la nuit à réfléchir. Pas à ce qu’elle ferait avec cet argent, mais à ce qu’elle refusait désormais de tolérer. Le lendemain matin, après une douche rapide et un café noir, elle enfila un jean brut et une chemise blanche. Elle prit une petite partie des billets, les glissa dans une enveloppe, et sortit. Elle déposa l’argent à la banque, puis envoya une belle somme à ses parents, sans un mot, juste un transfert anonyme au nom de leur fille. A suivre
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