Chapitre 5

1506 Mots
Pdv d’Anjel Deux heures plus tard On est toujours assises au même endroit, exactement comme tout à l’heure — sauf que maintenant, on a de la glace pour accompagner le drame. Fraise pour Érina, chocolat pour moi. Et honnêtement ? Le bonheur, c’est ça. Miam. — On rentre à quelle heure déjà ? demande Érina, la cuillère encore dans la bouche. — Dix-huit heures, dis-je en consultant l’écran de mon portable. Il reste une heure. — Parfait, on à largement le temps. — Mmh, ouais. On peut savourer la paix. Je reprends une cuillerée. Douceur. Silence. Tranquillité. — Anjel… c’est pas pour t’affoler, murmure Érina en fixant quelque chose derrière moi… mais le pire menteur du monde marche droit sur nous. — Le pire menteur ? Qui… ? Oh non. Attends. Me dis pas que… Brad !? — Lui-même. Prépare toi ma sœur. — J’ai eu ma dose de drama pour aujourd'hui, sérieux… soupiré-je. Il y a des jours où je me demande si ma bonne étoile ne fait pas des siestes non déclarées. Et pas des petites hein. Des siestes de six heures minimum. Des pas approchent. Je me retourne, déjà épuisée mentalement, et… yep. C’est Brad accompagné de je ne sais qui. — Hey les filles ! Ça gaze ? lance Brad, comme si on était ravies de le voir. — Ça l’était… jusqu’à l’arrivée d’un parasite. Dis-je en croisant les bras. — Eh, parle pas comme ça de mon pote, meuf, grogne l’autre. Pardon ? Il croit vraiment m’intimider ? — Je parle comme je veux. Et mêle-toi de ce qui te regarde. Il ouvre la bouche, prêt à répondre, mais Brad le retient. — Calme-toi, Tom. Tu fais pas le poids face à elle. Tom, lui, cligne des yeux, vexé. — Mec, me dis pas que t’as peur de cette meuf ? — Tu ferais mieux d’écouter ton pote si tu tiens à ton visage, dis-je froidement. — Ok, stop, intervient Érina. Brad, dis ce que t’as à dire et dégage. Vous êtes pas les bienvenus. — Je veux simplement lui parler, dit-il en ME pointant du doigt. — Dommage, moi j’veux pas te parler. Bye. — Qui t’es pour lui dire quoi faire ? crache l’autre énergumène micro-puissant. Je sens un courant électrique monter en moi. — On a pas élevé les poules ensemble, alors baisse d’un ton, rétorqué-je. Brad, tiens ton petit toutou en laisse avant que je le renvoie à la niche. Je vois Tom devenir rouge. — Qui tu traites de toutou, c*nnasse ? il crache en se plantant devant moi. Oh. Le bébé chien montre les dents. — Monsieur est vexé. Qu’il est mignon. — Ça suffit, tu vas lui parler maintenant ! hurle-t-il en m’attrapant par le poignet. Très. . Mauvaise. Idée. J’entends Érina lâcher un “Oh merde…”. Brad recule. Littéralement. Je ferme les yeux, inspire, prête à lui refaire le portrait quand— — QU’EST-CE QUI SE PASSE ICI ? Cette voix. Grave. Autoritaire. Chaude. Je pivote. Liam. Il ne me regarde même pas. Ses yeux — verts, toujours aussi intenses — sont rivés sur la main de Tom qui enserre mon poignet. Une veine bat sur sa tempe. Et dans son regard ? Un orage en construction. Et bon sang… pourquoi je trouve ça si attractif ? Je croit que j'ai officiellement perdu deux ou trois neurones. — Petit, si j’étais toi, je la lâcherais, dit un blond musclé derrière Liam. Sinon tu rentres pas entier chez toi. Tom lâche immédiatement et j’arrache ma main. Je remarque que Liam n’est pas seul : – un blond clair, regard sérieux, vibe “protecteur pragmatique” – un géant blond foncé, yeux bleu clair, sourire insolent version “j’adore le chaos” Tom déglutit. Brad fixe le sol. Moi, j’essaye de garder l’air digne. Spoiler : j’échoue. Lamentablement. — Vous avez un souci ? demande Liam, lentement, dangereusement. Tom se renfrogne. Brad l’attrape par le bras. — On… on y va. On voulait juste discuter. — Next time, venez discuter sans poser les mains, dit calmement Liam. Le ton. Mon dieu. Même moi j’ai eu envie de m’excuser. Ils dégagent enfin. L’air redevient respirable. Liam se tourne vers nous. — Ça va ? vous n’avez rien ? — Ça va, répondis-je, un peu trop vite. La tête de béton a survécu, t’inquiète. Un sourire presque imperceptible relève le coin des lèvres de Liam. — Vous chantez ? demande le blond géant, curieux. — Ouais, répond Érina en souriant. Vous voulez rester avec nous ? — Carrément, dit le blond sérieux. — J’ai toujours rêvé d’être une star, plaisante le géant. Je lève les yeux au ciel mais je souris. Ils s’assoient. On sort la petite enceinte. On lance des sons. Et le terrain vague se transforme en scène improvisée. --- Pdv de Liam Anjel. Je retiens son prénom sans même essayer. Et maintenant, elle est assise en face de moi, une glace au chocolat à moitié fondue dans la main, en train de chanter faux mais avec une énergie qui ferait se lever un mort. Je devrais me concentrer sur la musique. Ou sur les paroles. Ou sur mes potes qui chantent comme s’ils passaient un casting. Mais non. Mes yeux reviennent toujours vers elle. Je repense au moment où j’ai vu Tom l’attraper. Mon corps a bougé avant ma tête. Je pensais pas réagir comme ça. C’était… instinctif. Un truc que je m’explique pas. Et puis y’a sa façon de le regarder, tranquille, insolente, le menton levé : clairement, elle n’a pas besoin de moi pour se défendre. Mais j’avoue que j’aurais volontiers écrasé Tom dans le sol — juste un peu. — Liam, tu chantes ou tu fais une déclaration d’amour silencieuse ? taquine Noah, le géant blond. Je lui lance un regard noir. Il éclate de rire. Anjel relève la tête. Nos regards se croisent. Une seconde. Puis deux. Puis trois. Elle détourne les yeux, mais je vois le rouge monter sur ses joues. Intéressant. On chante encore une trentaine de minutes, on rit, on se moque, on rate des notes, on improvise des chorégraphies nullissimes. Le soleil descend, la lumière devient dorée. Elle se reflète dans les cheveux d’Anjel. Je pourrais rester là des heures. Mais l’heure tourne. On marche tous vers le parking, les filles devant, nous trois derrière. Une partie de moi se dit que la soirée était plus cool que prévu. L’autre partie est encore bloquée sur la manière dont Tom a failli finir enterré vivant. Par Anjel. Cette fille n’a clairement pas que du caractère. Elle a un volcan sous la peau. Elle rigole avec son amie, tranquille, comme si elle n’avait pas menacé un mec de le plier en deux il y a dix minutes. Je me dis que leur taxi ne doit pas être loin. Et puis un bip retentit. Un gros bip, grave, métallique. Les phares d’une énorme moto noire s’allument. Et Anjel… avance vers elle. Je fronce les sourcils. Attends. Quoi ? Elle sort une clé de sa poche. Appuie encore dessus. La moto répond. Je m’arrête net. Mes potes aussi. On a l’air de trois idiots au milieu du parking. — Attends… c’est… c’est pour elle ? murmure Max. Anjel passe la main sur le guidon comme si conduire un monstre mécanique qui coûte la peau des fesses était dans la liste “courses du lundi : œufs, pain, moto de bad boy”. — Tu plaisantes… souffle Noah, les yeux écarquillés. Elle tourne la tête vers nous, l’air parfaitement innocente. Puis elle met un casque. Calmement. Comme si elle s’apprêtait à aller acheter des tomates. — Mec… me regarde Noah. Elle… conduit ça ? Je crois que mon cerveau a juste décidé de fermer boutique. Je la regarde monter sur la moto. Elle se positionne avec la fluidité d’une pro. Aucune hésitation. Aucun stress. Et là… l’amie rousse, Érina, monte derrière elle comme si c’était une routine. Elle enroule ses bras autour de sa taille, ajuste son propre casque. La moto rugit. Je lâche un petit : — p****n… Personne ne dit rien. Personne ne respire. On est trois statues vivantes. Elle relève sa visière. Nos regards se croisent. Ses yeux brillent d’une étincelle que je n’arrive pas à décrire. — Bonne soirée, dit-elle avec un sourire en coin. Elle tourne la poignée. La moto bondit en avant. Et elles s’éloignent. On reste plantés là comme trois NPC bloqués après un bug. Max finit par souffler : — Liam… t’as vu ce que je viens de voir ? — Non, mec… dis-je doucement. Je crois pas. — Elle… elle conduit une moto plus chère que ma bagnole. — Et elle a l’air de pouvoir t’éclater la mâchoire avec deux doigts, ajoute Max. Je soupire, la main dans les cheveux. — Ouais… et bizarrement… c’est ça le plus flippant. On reste un moment silencieux. Et je sais pas pourquoi… Mais j’ai l’impression que c’est pas la dernière fois qu’elle nous cloue sur place.
Lecture gratuite pour les nouveaux utilisateurs
Scanner pour télécharger l’application
Facebookexpand_more
  • author-avatar
    Écrivain
  • chap_listCatalogue
  • likeAJOUTER