CHAPITRE 3

1126 Mots
Soudain, Stella perçut une autre odeur quelque chose de singulier.Comme une abeille attirée par le miel , son corps tout entier était aimanté par cette fragrance. Elle devait découvrir d’où elle provenait. Elle se lança à travers les sapins, courant à perdre haleine, guidée par cet instinct inexplicable. Là, au détour d’un tronc, se tenait un mâle immense. Ses yeux d’un vert clair brillaient d’une intensité féroce. — C’est donc toi***, dit-il mentalement. Son loup, à elle, hurlait déjà dans sa tête : mate. Il s’approcha lentement, tournant autour d’elle, l’observant sous toutes les coutures. Il semblait fasciné autant par son odeur que par son apparence. Stella, elle, n’avait jamais ressenti ça. Jamais. Il frotta doucement son pelage contre le sien, comme pour s’imprégner d’elle. Mais ce simple contact ne lui suffisait pas. Il reprit forme humaine. Sa voix grave, autoritaire, s’imposa à elle : — Prends forme humaine, je veux te voir. Sans protester, elle obéit. Tous deux se retrouvèrent nus, debout dans le froid. — J’ai une maison non loin d’ici. Viens, on s’y réchauffera, proposa l’inconnu. Son corps était massif, musclé, ses épaules larges, sa mâchoire carrée. Il dégageait une aura de mauvais garçon et pourtant, c’est ce qui le rendait encore plus attirant. Et ce regard , il lui rappelait Damien. Peut-être parce qu’il ne quittait plus ses pensées depuis qu’elle avait appris son retour. Mais était-ce raisonnable de le suivre ? Flora avait disparu. Et s’il y était mêlé ? Elle écouta sa raison. — Non. Je retourne dans mon clan. Il la fixa, un peu surpris. Puis hocha la tête : — D’accord allons-y alors. Stella cligna des yeux. Deuxième choc. Cette fois, c’était elle qui ne comprenait pas. — J’irai partout où tu seras. Tu es à moi, pas besoin de te le dire. Le ton était calme, mais son regard si intense qu’il lui donna la chair de poule. Elle déglutit. ***************************************************** — Bonjour monsieur, bienvenue à La Parisienne. Clark baissa les yeux sur le badge. Émilie Lawson. Mais il reconnut immédiatement la femme en face de lui. — Laurie c’est toi ? Elle ne se trompait pas. C’était bien lui, Clark. Celui qui fut autrefois son secrétaire ,celui à cause de qui la confiance entre elle et Damien s’était effondrée. Elle le croyait mort . Et pourtant, il était aussi vivante qu’elle . Un poids se libéra de sa conscience car le poids d’un cadavre lui était retiré . Sans réfléchir, Laurie fit le tour du comptoir et se jeta dans ses bras.Clark resta figé, incapable de réagir. Lui qui pensait ne plus jamais croiser son regard. — Laurie, je te croyais morte. — Non. Laurie Miller est morte. Celle que tu vois maintenant, c’est Émilie Lawson. Il la scruta avec insistance. Le temps l’avait rendue encore plus belle. Comme un vin précieux, elle s’était bonifiée avec les années. — Mais… comment ? Pourquoi tu n’as jamais… Dit Clark bégayant presque . Nate lui avait raconté toute l’histoire. Comment Matie lui avait fracassé le crâne avec une pierre. Comment sa mort avait été constatée. Comment elle avait été enfermée dans une chambre froide. Elle avait organisé tout cela ? Il l’avait clairement sous-estimée la croyant fragile, naïve. — Écoute je veux rester morte. Cette nouvelle vie me convient. Promets-moi, au nom de notre ancienne amitié, de ne rien dire. Il restait figé, ébahi. Que faire ? Si Nate apprenait qu’elle était en vie reprendrait-il sa traque ?Et pouvait-il dissimuler une telle vérité à l’homme qu’il aime ? Il aperçut au loin l’homme avec qui il avait rendez-vous, prêt à quitter l’hôtel. Il l’interpella, quittant Laurie sans lui donner de réponse. Laurie vit son monde s’effondrer. Elle venait de faire une erreur impardonnable. Elle aurait dû se comporter comme une inconnue. Depuis des années, elle utilisait une mixture à base de plantes, préparée par Martine, sa voisine âgée, pour masquer son odeur naturelle. Cela suffisait à tromper même les loups les plus sensibles. À moins de l’approcher de très près, il était presque impossible de dire si elle était humaine ou werewolf . Elle dissimulait également, sous un maquillage méticuleux, la morsure que Damien lui avait laissée. Il l’aurait suffi à Laurie de le regarder sans le reconnaître. Il aurait cru à une ressemblance troublante.Mais non, elle avait, par un simple geste irréfléchi, confié son destin à un homme qu’elle ne connaissait pas réellement . Que faire, maintenant ? Elle devait démissionner. Trouver un autre emploi. Peut-être changer de pays.Elle et ses enfants n’étaient plus en sécurité.Mais comment faire tout cela sans argent ? Elle n’avait plus qu’une prière , que Clark fasse comme s’il ne l’avait jamais vue. Et puis elle ne l’avait jamais revu depuis ce fameux jour.Celui où elle s’était réveillée nue, sur lui. Elle n’avait pas osé chercher à savoir s’il avait survécu. Elle craignait trop de découvrir que Damien l’avait tué. Et s’il lui en voulait ? Et s’il était devenu un fugitif à cause d’elle ? Les loups d’Europe le traquaient sûrement encore, Damien surtout. Perdue dans ses pensées, elle se laissa tomber dans un fauteuil, la tête entre les mains. ***************************************************** Tout était fin prêt pour le voyage. Damien et Charlie montèrent à bord du jet privé. Damien avait fait refaire toute la décoration de l’appareil. Pourtant, malgré les nouvelles couleurs, les nouveaux matériaux, il ne pouvait s’empêcher de la voir partout. Chaque détail réveillait son souvenir. Huit ans déjà qu’elle était partie, et pourtant, pour lui, rien n’avait vraiment changé. Le vol se déroula dans un silence pesant. Chacun enfermé dans ses pensées. Damien, concentré sur son ordinateur, tenta d’occuper son esprit avec du travail. Il ne resterait qu’une semaine à New York, juste le temps de remettre un peu d’ordre, avant de retrouver sa solitude. Pour Charlie, ce voyage était une bouffée d’oxygène. L’occasion de souffler, d’éloigner les fantômes du quotidien.L’absence d’enfant à la maison devenait insupportable. Il voulait être père. Il ne blâmait pas Sam , il savait que ce n’était pas de sa faute mais c’était difficile. Terriblement difficile. Après une escale rapide pour faire le plein, le jet reprit aussitôt son envol. Ils atterrirent alors que le ciel se teintait de jaune pâle, annonçant discrètement l’approche de la lune. Ils descendirent dans un hôtel que Damien venait tout juste d’acquérir.Les travaux de rénovation commenceraient bientôt. Il comptait le rebaptiser Colman , pour qu’il rejoigne la lignée prestigieuse de ses autres établissements. Ils prirent naturellement une suite chacun. Dès le lendemain, Damien commencerait à courir à gauche et à droite pour les formalités, les inspections, les décisions de chantier. Mais pour l’instant, il ne pensait qu’à une chose dormir. Dormir pour retrouver un peu de force. Dormir pour oublier, ne serait-ce qu’un instant, les ombres du passé.
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