— J’avoue que ça m’attriste un peu… mais l’essentiel, c’est que Yannick n’est pas seul. Je suis là, et je le soutiens.
Mon fils, c’est tout ce que j’ai de plus précieux. Je donnerais ma vie pour lui. Son bonheur passe avant tout.
— Et qui est sa fiancée ? Mayah m’avait dit qu’il était en couple, mais je ne savais pas que ça allait aussi vite.
— Oui, il était en couple… mais ils ont rompu. Il a découvert qu’elle le trompait, alors il a décidé de tout arrêter. Quant à la femme qu’il va épouser, je n’en sais pas trop. Tu sais, il a une fiancée, Sonia, mais cette idée ne l’enchante pas particulièrement.
— Je suis désolée d’apprendre qu’il s’est séparé de sa copine…
— Ne le sois pas, cette fille n’était pas faite pour lui, répondis-je sèchement.
— Ah… eh bien, je crois que c’est Sonia qu’il va épouser. Je l’ai vue tout à l’heure. C’est une fille superbe.
Je trouvais Fatiha un peu trop curieuse, mais je n’y prêtai pas attention. Ce qui comptait, c’était que Yannick se marie.
— Elle est gentille, oui. Mais Yannick ne l’aime pas. Il dit qu’il va épouser quelqu’un d’autre, mais il ne m’a pas donné de nom.
Fatiha resta silencieuse un moment, les yeux fixés sur moi, puis dit :
— Tu crois que ça pourrait être Mayah ?
Je restai figée. Ainsi, voilà pourquoi elle posait autant de questions. Elle pensait à sa fille.
— J’en sais rien… mais pourquoi tu dis ça ?
— Eh bien… ils sont très proches.
C’est vrai, je ne peux pas le nier. Yannick et Mayah sont très proches. Il la voit comme sa petite sœur, mais… Fatiha n’a pas complètement tort. Après ce qu’il a vécu avec Jasmine, il pourrait bien se tourner vers elle.
— Leur relation est ambiguë, je ne vais pas mentir. Mais Yannick m’a toujours dit qu’il la considérait comme sa petite sœur.
— Et Mayah aussi me dit cela. Mais tu sais comme moi que l’amitié entre un garçon et une fille, c’est rarement aussi simple…
Je soupirai. Il fallait bien que quelqu’un dise la vérité.
— Tu sais que la rupture avec son ex vient d’un b****r échangé avec Mayah, le soir de son anniversaire.
Fatiha ouvrit de grands yeux, visiblement choquée.
— Qu’est-ce que tu dis là ?
— Et ce n’est pas tout…
— Quoi d’autre ? demanda-t-elle, la voix plus tendue.
Je pouvais lire la peur dans ses yeux. Elle redoutait ce que j’allais dire.
— Apparemment, Yannick avait aussi ses mains sur les fesses de Mayah ce jour-là.
Cette fois, elle fut sans voix. Choquée. Déconcertée. C’est dur d’entendre ça sur sa propre fille, je le comprends… mais elle avait besoin de le savoir.
Je n’ai rien contre Mayah, mais elle a franchi certaines limites, et après m’avoir manqué de respect ici même, dans ma maison, je ne pouvais plus me taire.
— Ce n’est pas possible… Mayah ne ferait jamais ça ! murmura-t-elle.
— Fatiha, ce sont des jeunes. Ce genre de choses arrive. Il ne faut pas dramatiser, dis-je en essayant de calmer le jeu.
— Elle m’a juré qu’elle le considérait comme un frère. Et faire ça alors qu’il était en couple ? C’est irrespectueux !
— Leur relation m’a toujours laissée perplexe. Mais honnêtement, je ne serais pas contre si c’était Mayah qu’il choisissait d’épouser… Tant que ce n’est pas Jasmine, je suis soulagée.
— Je suis vraiment étonnée d’entendre tout ça. Tu m’excuses… je dois rentrer.
Elle se leva brusquement. Je fis de même. Elle était encore sous le choc, c’était évident. Elle ne pensait pas que sa fille pouvait être impliquée dans ce genre d’histoire.
— Fatiha, ne t’en fais pas. Mayah est encore jeune, et les jeunes font des erreurs.
— Merci, mais… Mayah n’est pas comme ça. Nous lui avons transmis des valeurs. Je suis sûre que c’est ce voyou qu’elle fréquente qui l’influence.
— Mayah est en couple ? demandai-je, surprise.
Voilà une révélation que je ne m’attendais pas à entendre.
— Cela veut dire qu'elle trompe son copain avec Yannick... Je suis dépassée. Cette petite est capable de tout, et elle ose venir me faire la leçon.
— Oui, avec un certain Jordan. C'est un voyou, ni moi ni son père n'acceptons qu'elle le fréquente.
— Je suis vraiment contente pour toi, Fatiha.
— J'avais exactement le même problème avec l’ex de Yannick. Ne t’en fais pas, ils finiront bien par se séparer, surtout quand elle comprendra que ce n’est qu’un bon à rien.
— J’y vais, Neslihan. Merci de m’avoir prévenue.
Elle s’en va. Je crois qu’aujourd’hui est mon jour de chance. D’abord, Yannick qui se sépare de sa copine, puis Fatiha qui découvre enfin le vrai visage de sa fille. Mayah qui s’est permise de venir chez moi pour me manquer de respect… mais le destin a bien fait les choses. Sa mère saura la remettre à sa place.
Je remonte dans le salon. J’ai demandé à la servante d’appeler Sonia. Je dois l’informer de la bonne nouvelle. J’ai fait ce que j’avais à faire, la balle est dans son camp désormais.
•|•
Point de vue de Yannick
Trois heures plus tard, alors que je venais à peine de m’endormir, la porte de mon bureau s’ouvre brusquement. Un groupe de personnes entre, joyeux et bruyants.
— SURPRISEEEEEE !!
Je me redresse, encore à moitié assoupi, et je vois Khalis, sa femme, Mayah, sa copine Naelle, ainsi que quelques employés du bureau. Ils tiennent des cadeaux et un gâteau. Je suis pris au dépourvu. Ce n’est pas mon anniversaire.
— Bon retour parmi nous, mon frère ! lance Khalis. C’est Mayah qui a eu l’idée de te faire une petite surprise pour fêter ton retour.
Je dois admettre que ça m’a fait sourire. Mayah… elle ne cessera jamais de m’étonner. Elle est vraiment spéciale.
— Merci… Je n’avais pas le moral, mais vous avez réussi à me redonner le sourire.
— Je propose qu’on aille dans la salle de réfectoire pour fêter le retour du patron ! s’exclame Khalis.
Ils commencent tous à sortir du bureau, en direction de la salle de réfectoire.
Point de vue de Mayah
Je suis extrêmement en colère, mais je me dis que ça ne vaut pas la peine de m’énerver. Pourtant, je ne peux pas laisser passer ça. Je connais les intentions de mère Neslihan. Elle a dit tout cela à ma mère uniquement pour se venger de moi, parce que je suis allée la voir pour lui dire de laisser Yannick aimer la femme qu’il veut. Je ne savais pas qu’elle oserait aller aussi loin.
Quand ma mère est rentrée, elle m’a crié dessus. Elle a même insinué que je couchais avec Yannick. J’ai été profondément blessée. J’ai essayé de m’expliquer, mais elle ne m’a laissé aucune chance. Neslihan a réussi à la retourner contre moi. Et comme si ce n’était pas suffisant, elle me tient pour responsable de la rupture entre Yannick et Jasmine.
D’ailleurs, j’ai été choquée d’apprendre qu’ils avaient rompu. Je n’y croyais pas. Il fallait absolument que j’en parle avec Yannick, mais il ne me répondait pas, ce qui me stressait encore plus. Alors j’ai appelé Jasmine. Elle a décroché, en pleurs. Tout ce qu’elle m’a dit, c’est que Neslihan avait réussi à détruire leur relation.
J’étais outrée. Comment peut-on faire une chose pareille ? J’avais tellement de peine pour eux. Neslihan est vraiment mauvaise. Elle a réussi à semer le chaos autour d’elle, juste par rancune.
J’ai continué d’appeler Yannick, encore et encore, sans réponse. C’était insupportable. Finalement, j’ai appelé Khalis, qui m’a appris que Yannick était au bureau.
Je suis sortie de la maison, malgré l’interdiction de ma mère. Il fallait que je voie Yannick. Il devait être au plus mal. J’ai proposé à Khalis qu’on lui organise une surprise, pour lui montrer qu’il n’était pas seul. Je suis allée chercher Naelle, nous avons acheté le gâteau, et Khalis s’est chargé du reste.
Tout s’est déroulé comme prévu. Et même si Yannick n’avait pas le moral, je crois que la surprise lui a fait plaisir. J’ai vraiment hâte qu’on puisse parler tous les deux, seuls, en privé. Il faut qu’on mette les choses à plat.
Une fois dans le réfectoire, nous nous sommes installés à table. Je voulais m’asseoir à côté de lui, mais Naelle m’a devancée. Je ne sais pas à quoi elle joue, mais je ne suis pas d’humeur. Et Yannick non plus, ça se voit.
Pendant que les autres se servaient, Yannick et moi étions les seuls encore assis à la table. Son regard était vide, totalement éteint. Je pouvais ressentir sa douleur, comme si elle vibrait autour de lui. C’était insupportable pour moi. Je déteste le voir dans cet état, impuissant, comme s’il portait le poids du monde sur les épaules.
À suivre…