Préface
Bien des tribus ont été anéanties, rayées de la surface de la Terre-mère depuis 1492, date à laquelle Christophe Colomb abordait les rivages des Caraïbes. Mais nombre de nations amérindiennes ont survécu et peuplent les trois Amériques, toujours debout et bien vivantes…
Depuis plus de 500 ans, les Indiens combattent pour survivre. Pas toujours avec des armes ! De nos jours, certains luttent à coup d’avocats et de procès, comme les Lakotas{1} aux États-Unis, pour reconquérir leurs montagnes sacrées, les Black Hills, qui leur ont été volées il y a 150 ans. D’autres ont mené de véritables guérillas, tels les Zapatistes au Mexique. Nombreux sont ceux qui revendiquent la restitution de leurs terres, comme les peuples de Guyane. Pourtant tous sont les véritables natifs de ce continent ! Imaginons que nous européens ayons été dépossédés de nos pays par des conquérants venus de l’autre côté de la planète, que nous aurions été pour la plupart d’entre nous massacrés, et les survivants parqués dans des « réserves », quelques lopins de terre minuscules et arides de notre grande Europe ! Plus de nation française, ni espagnole, ni italienne, ni allemande. On nous interdirait de parler notre langue natale, de pratiquer nos traditions et nos religions, on nous déposséderait de nos richesses, de tout ce que nous aimions. C’est pourtant le sort de toutes les tribus du continent américain, dans le passé, et encore à l’aube de ce nouveau millénaire, où nombreuses sont celles qui doivent se battre. Les génocides se succèdent (actuellement au Brésil) sans jamais de fin… Les droits des natifs sont bafoués, voire inexistants dans bien des pays d’Amérique.
Aux États-Unis, certaines nations attirent l’attention des médias, d’autres sont très discrètes, quelques-unes sont riches comme la petite tribu des Pequots avec leur immense casino, mais la grande majorité est pauvre, d’autres encore viennent d’être reconnues, mais nombre d’entre elles resteront dans l’oubli, voire condamnées à disparaître. Les misères sont leur lot quotidien, la drogue, l’alcool, la malnutrition, les violences sous toutes ses formes, avec en prime nombre d’Indiens emprisonnés et soumis à une justice plus rigoureuse que les autres communautés.
Malgré ces cinq siècles de génocides, de persécutions, de déculturation, les natifs continuent à lutter pour exister, et se sont relevés. Ils revendiquent leurs droits, fiers d’être ce qu’ils sont, le courage en prime. Les religions amérindiennes et leurs traditions sont pour la plupart d’entre eux le moteur de leur renaissance, et leur force. Peut-être leur salut pour l’avenir ? Si de nos jours l’alcool, la drogue, les violences ne passent plus dans certaines familles, certaines générations ou certaines communautés, ce sont grâce à leurs rituels d’antan, à leur spiritualité. Les Amérindiens peuvent concilier internet et les pow-wow : passé et futur se conjuguant au présent.
Dans ce roman, ce sont les Lakotas oglalas{2} qui sont mis en scène. De nos jours, ils vivent sur la réserve de Pine Ridge dans l’État du Sud Dakota, la deuxième en superficie (la plus grande réserve est celle des Navajos). C’est une des réserves les plus pauvres des États-Unis avec une large majorité d’Oglalas vivant sous le seuil de pauvreté. Le taux de chômage avoisine les 80 %, l’espérance de vie est bien inférieure aux autres communautés du pays, le taux de suicide supérieur, notamment chez les jeunes, les violences conjugales et les viols sont courants. La malnutrition est le lot de nombreuses familles, et les maladies comme le diabète sont prédominantes. L’alcool fait des ravages et cause un nombre élevé de syndromes d’alcoolisation fœtale (SAF) et ses effets, ainsi que d’autres formes de maladie mentale. La drogue et les gangs sont de mise, instaurant une certaine insécurité dans les parties isolées de la réserve. Nombre de Lakotas vivent dans le dénuement, dans des maisons délabrées, trop petites, non isolées, certaines encore à notre époque sans eau ni électricité. Dans cette région des Badlands (Mauvaises terres), les conditions climatiques sont rigoureuses. Les familles vivent d’allocations, souvent insuffisantes. En 1999, suite à la venue du Président Clinton à Pine Ridge, un programme d’avoir fiscaux, pour la création d’entreprise, avait été décrété, mais ce renouveau économique met du temps à s’instaurer, quelques sociétés se sont créées, mais insuffisamment face au nombre d’Indiens sans emploi. Bien des natifs sont tentés de quitter la réserve pour les villes de Rapid City et autres, mais la discrimination raciale est une réalité et une barrière.
Malgré tous ces maux, ils résistent toujours, comme d’antan où l’armée les massacrait.
Les Amérindiens sont environ 3 millions aux États-Unis, soit moins 1 % de la population. Il y a plus de 300 réserves pour 550 tribus reconnues.