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Yulia
Prisonnière. Captive.
Alors que je suis clouée au lit sous le poids du corps musclé de Lucas, la réalité de ma situation m’apparaît plus clairement que jamais. Mes poignets sont attachés au-dessus de ma tête et mon corps est envahi par celui d’un homme qui m’a menée à la fois en enfer et au paradis. Je sens la verge de Lucas se ramollir en moi et mes yeux brûlent de larmes contenues tandis que je suis allongée là, le visage tourné pour éviter de le regarder.
Il m’a prise et une fois de plus je l’ai laissé faire. Non, je ne l’ai pas seulement laissé faire, je l’ai pris dans mes bras. Tout en sachant à quel point mon geôlier me déteste, je l’ai embrassé de mon plein gré en m’abandonnant à des rêves et à des fantaisies qui n’ont pas leur place dans ma vie.
Je me suis abandonnée à mon désir pour un homme qui me détruit.
J’ignore pourquoi Lucas ne l’a pas encore fait, pourquoi je suis dans son lit au lieu d’être suspendue et torturée dans un hangar, brisée et ensanglantée. La situation où je suis n’est pas celle à laquelle je m’attendais quand les hommes d’Esguerra m’ont conduite ici hier et que j’ai réalisé que l’homme dont je croyais avoir causé la mort était encore en vie.
Il est vivant et il est déterminé à me châtier.
Lucas bouge légèrement au-dessus de moi et se soulève un peu si bien que je sens l’air frais de la climatisation sur ma peau humide de sueur. Mes muscles intimes se contractent quand sa verge se retire et je m’aperçois que j’ai vraiment mal entre les jambes.
Je serre la gorge, et mes yeux me brûlent de plus belle.
Ne pleure pas. Ne pleure pas. Je me répète cette phrase comme un mantra en m’obligeant à contrôler mes larmes. C’est plus dur que cela ne devrait l’être et je sais que c’est à cause de ce qui vient de se passer entre nous.
De la douleur et du plaisir. De la crainte et du désir. Je n’ai jamais imaginé que cette combinaison puisse être aussi dévastatrice, jamais réalisé pouvoir rebondir après avoir plongé dans les abîmes de mon passé.
Je n’ai jamais imaginé pouvoir jouir immédiatement après m’être souvenue de Kirill.
La seule pensée du nom de mon entraîneur me serre encore davantage la gorge, ces affreux souvenirs menacent de refaire surface.
Non, arrête ! N’y pense pas.
Lucas se remet à bouger, il lève la tête et je pousse un soupir de soulagement quand il détache mes poignets et se dégage. Je commence à avoir moins mal aux yeux et je respire à pleins poumons, j’en avais bien besoin.
Oui, c’est ça. J’ai seulement besoin de prendre mes distances à son égard.
En continuant de respirer avec avidité, je tourne la tête pour voir Lucas se lever et enlever son préservatif. Nos yeux se croisent et je devine une certaine confusion qui se mêle à la froideur de son regard gris-bleu. Mais un instant plus tard, cette émotion a disparu et son visage à la mâchoire carrée est redevenu aussi dur et aussi implacable que d’habitude.
— Lève-toi ! Lucas tend la main vers moi et m’attrape par le bras. Allons-y ! Il me tire du lit. Je tremble trop pour résister et j’avance tant bien que mal tandis qu’il me tire dans le couloir.
Quelques instants plus tard, il s’arrête devant la porte de la salle de bain.
— As-tu besoin d’y aller ? demande-t-il et je hoche la tête en lui sachant gré de me l’avoir proposé. J’ai besoin de plus d’une minute, il me faudrait une éternité pour me remettre, mais si je n’ai qu’une minute de tranquillité je l’accepte volontiers.
— Ne fais pas de bêtise, dit-il quand je ferme la porte et je prends son avertissement au sérieux, me contentant d’aller aux toilettes et de me laver les mains aussi vite que possible. Même si je pouvais trouver quelque chose pour l’attaquer, je n’en aurais pas la force pour le moment. Je suis épuisée, à la fois sur le plan physique et sur le plan émotionnel, mon corps me fait presque aussi mal que mon âme. Tout ce qui vient de se passer est insoutenable : la brève intimité que j’ai cru sentir entre nous, la manière dont il est brusquement redevenu froid et cruel, et mes souvenirs se combinant avec un plaisir dévastateur.
Sans oublier le fait que Lucas m’a possédée alors qu’il a cette autre fille, la brune qui m’épiait par la fenêtre.
Ma gorge se serre une fois de plus et j’étouffe un sanglot. Je ne sais pas pourquoi cette dernière pensée est la plus douloureuse de toutes. Je n’ai aucun droit sur mon geôlier. Au mieux, je suis son jouet, sa chose. Il jouera avec moi jusqu’à ce qu’il se lasse puis il me brisera.
Il me tuera sans la moindre hésitation.
Tu es à moi, a-t-il dit en me baisant et pendant un bref instant, j’ai pensé, qu’il était sincère. J’ai pensé qu’il était aussi attiré vers moi que je l'étais vers lui.
J’avais visiblement tort.
Mes yeux se mouillent et se brouillent et je les ferme et les rouvre pour essayer de chasser mes larmes. Le visage qui me fixe dans la glace est émacié et affreusement pâle. Deux mois passés dans la prison russe n’ont pas arrangé mon apparence. Je ne sais même pas pourquoi Lucas a envie de moi en ce moment. Sa petite amie est infiniment plus jolie avec son teint doré et ses traits enjoués.
Un coup brutalement frappé à la porte me fait sursauter.
— La minute est finie. La voix de Lucas est dure et je sais que je ne peux plus reculer le moment de me retrouver face à lui. En respirant profondément pour me calmer, j’ouvre la porte.
Il se tient là et il attend. Je pense qu’il va me conduire ailleurs, mais à la place il entre dans la salle de bain.
— Entre ! dit-il en me conduisant vers la douche. On va se laver.
On ? Il vient avec moi ? Mes entrailles se nouent, la peau me brûle à cette pensée, mais j’obéis. Je n’ai pas le choix, mais même si je l’avais, le souvenir des semaines dans la prison de Moscou où j'ai été privée de douches est encore horriblement vif dans mon esprit.
Si mon geôlier veut que je prenne cinq douches par jour je le ferai avec plaisir.
La cabine de douche est assez spacieuse pour nous deux, la vitre qui l’entoure est propre et moderne. En général chez Lucas tout est propre et moderne, complètement différent du minuscule appartement de l’époque soviétique où j’habitais.
— Ta salle de bain est agréable, dis-je bêtement quand il ouvre les robinets. Je ne sais pas pourquoi je choisis ce sujet de conversation là, mais j’ai besoin de penser à autre chose. Nous sommes ensemble sous la douche tous les deux nus, et même si nous venons juste de coucher ensemble je ne peux m’empêcher de le fixer. À chacun de ses mouvements, ses muscles saillants se gonflent encore plus et ses bourses lourdes pendent entre ses jambes, là où sa verge à demi raidie brille avec des traces de sperme. Ce n’est pas le premier homme que j’ai vu nu, mais c’est de loin le plus beau.
— La salle de bain te plaît ? Lucas se retourne vers moi en laissant couler l’eau sur son dos trapu et je m’aperçois que je ne suis pas la seule à ressentir l’intense charge sexuelle dans l’atmosphère. Je la constate dans le regard aux lourdes paupières qui me parcourt de haut en bas avant de revenir à mon visage ainsi que dans le mouvement de ses grandes mains qui se replient comme pour se retenir d’aller vers moi.
— Oui. Je m’efforce de garder un ton neutre comme si ça n’avait pas d’importance de se retrouver ici avec lui qui m’a baisée comme un fou et a provoqué chez moi une telle myriade d’émotions. J’aime bien la simplicité de ton style.
Un style qui offre un agréable contraste avec la complexité de celui qui habite ici.
Il me fixe, dans cette lumière ses yeux pâles sont plus gris que bleus et je m’aperçois que contrairement à moi il n’a pas envie de penser à autre chose. Il veut que nous prenions une douche ensemble pour une raison précise et cette raison devient évidente quand il m’attire vers lui et me met avec lui sous l’eau qui coule.
— Baisse-toi. Tout en me donnant cet ordre, il appuie sur mes épaules. Mes jambes se replient, je suis incapable de résister à la force de ses mains sur moi, et je me retrouve à genoux devant lui, le visage à la hauteur de son sexe. Son large dos bloque presque toute l’eau, mais quelques gouttelettes m’atteignent quand même et m’obligent à fermer les yeux tandis qu’il m’empoigne par les cheveux et rapproche mon visage de sa verge qui se raidit.
— Et si jamais tu me mords… Il ne termine pas sa menace, mais je n’ai pas besoin de détails pour deviner que ça ne serait pas une bonne idée. Je voudrais lui dire que ce n’est pas la peine de me prévenir, que je suis trop épuisée pour me battre en ce moment, mais il ne m’en laisse pas le temps. Dès que mes lèvres s’ouvrent, il enfonce sa verge dans ma bouche et va si profondément que je m’étrangle presque avant qu’il la retire. À court de souffle, je m’appuie sur ses jambes dures comme le fer et il revient plus lentement cette fois-ci.
— Bien, c’est bien… Il desserre un peu les mains de mes cheveux tandis que je ferme les lèvres autour de sa grosse verge et que je creuse les joues en la suçant. Exactement comme ça, ma belle… Étrangement ses paroles d’encouragement me brûlent jusqu’au plus profond de moi-même. Je suis encore mouillée de notre marathon de sexe et je sens cette moiteur en serrant mes cuisses l’une contre l’autre pour essayer d’avoir moins mal.
Ce n’est pas possible, je ne le désire pas à nouveau. Mon sexe est irrité et gonflé, j’ai mal partout à cause de sa brutalité. Et je me souviens aussi des ténèbres qui m’ont envahi, des souvenirs qui ont failli m’engloutir. Être avec un homme tel que lui, être complètement à sa merci et savoir qu’il veut me châtier, c’est le pire des cauchemars pour moi, et pourtant avec Lucas rien de tout cela ne semble avoir d’importance.
Je suis tout de même excitée.
Il m’empoigne par les cheveux tout en allant et venant dans ma bouche et en trouvant son rythme, je fais de mon mieux pour détendre les muscles de mes joues. Je sais faire une bonne pipe, et je mets mon savoir-faire en pratique en prenant ses bourses à deux mains et en le suçant avec les lèvres.
— Oui, c’est ça. Sa voix est pleine de désir. Continue !
Je lui obéis en serrant plus fort ses bourses et en le prenant encore plus loin au fond de ma gorge. Étrangement, ça ne me gêne pas de lui donner ce plaisir. J’ai beau être à genoux, depuis que je suis arrivée ce matin, c’est la première fois que je maîtrise la situation. Je le laisse faire ça, et ça me donne un certain pouvoir, bien que je sache que c’est assez illusoire. Je suis sa prisonnière, pas sa petite amie, mais pour le moment, je peux faire comme si je l’étais et que l’homme qui a enfoncé sa verge dans ma bouche me considère autrement que comme un objet sexuel.
— Yulia… Il gronde mon nom, ce qui renforce cette illusion puis s’enfonce jusqu’au bout et d’épais jets de sperme giclent dans ma gorge. Je me concentre sur ma respiration pour ne pas m’étrangler en l’avalant, mes mains serrent toujours ses bourses qui se tendent.
— C’est bien, murmure-t-il en me laissant avaler chaque goutte, puis il caresse mes cheveux, jamais il n’a encore fait preuve d’une telle douceur. Je devrais être humiliée par son approbation, mais cette petite marque de tendresse me ravit, j’en ai si désespérément envie. Je suis fatiguée, si fatiguée que je ne veux qu’une chose, rester comme ça, le sentir me caresser les cheveux et m’abandonner au néant.
Mais bien trop vite, il m’aide à me relever et quand j’ouvre les yeux l’eau jaillit sur ma poitrine au lieu de mon visage. Lucas ne dit rien, mais quand il verse du gel de bain dans sa main et me frictionne ses gestes continuent d’être caressants et réconfortants.
— Penche-toi en avant, murmure-t-il en s’approchant derrière moi et je m’appuie sur lui, je pose la tête sur ses larges épaules tandis qu’il me lave devant, ses grandes mains me savonnent les seins, le ventre et entre les jambes, là où j’ai mal. Je m’aperçois à demi qu’il prend soin de moi, et je commence à rêver en fermant les yeux et en goûtant ses marques de gentillesse.
Mais bien trop vite, je suis lavée et il recule d’un pas pour me rincer avec la douche. Je vacille légèrement, mes jambes me portent à peine, et Lucas ferme le robinet et me conduit au-dehors.
— Viens, on va te mettre au lit. Tu ne tiens pas debout. Il m’enveloppe d’une épaisse serviette et me prend dans ses bras pour me porter dans la chambre. Tu as besoin de dormir.
Il me porte dans la chambre et me pose sur le lit.
Je cligne des yeux en le regardant, j’ai du mal à réfléchir. Il ne va pas m’attacher sur le sol à côté du lit ?
— Tu vas dormir avec moi, dit-il en répondant d’avance à ma question. Je cligne de nouveau les yeux, je suis trop fatiguée pour essayer de comprendre ce que cela veut dire, mais déjà il a pris une paire de menottes dans le tiroir de la table de chevet.
Avant de me laisser deviner ses intentions, il m’en met une au poignet droit et attache l’autre au sien. Puis il se couche et s’allonge derrière moi et se serre contre moi en posant sa main menottée sur mon flanc.
— Dors, me murmure-t-il à l’oreille, et je m’exécute en sombrant dans le réconfort et la chaleur de l’oubli.