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La fraternité

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Les fraternités universitaires peuvent receler de nombreux secrets...

Pour élucider malgré lui le mystère d’un crime dont il ignore tout, un jeune homme se fait introniser dans le club le plus select de Cambridge.

Sur fond de campus novel et d’amours impossibles, un premier roman vertigineux.

EXTRAIT

« Hans, je veux que tu fasses tes études ici, tu auras une place et une bourse, je m’occupe de ça. En échange, tu deviendras membre d’un club. Tu n’en as sans doute jamais entendu parler. Tu seras membre du Pitt Club. »

Elle me regarda, dans l’attente d’une réaction.

« Désolé », dis-je sans raison, mais Alex ne releva pas.

Dans la cour, les Asiatiques se photographiaient maintenant en train de faire des bonds. Le déclencheur de l’iPad semblait trop lent, les jeunes femmes bondissaient et bondissaient encore.

Alex reprit la parole, très calme.

« Ton rôle est de découvrir ce que les boxeurs de l’université font là-bas. Tu boxes toujours, n’est-ce pas ?

– Désolé, mais je ne comprends rien, dis-je.

– Je sais, ça peut paraître bizarre. Il s’agit d’un club pour les jeunes hommes qui sont ici, à l’université, et qui se croient meilleurs que les autres.

– Un club ?

– Une sorte de fraternité. Vieille de plusieurs siècles.

A PROPOS DE L'AUTEUR

Takis Würger, né en 1985, est un journaliste d’investigation allemand, correspondant de guerre et rédacteur pour Der Spiegel. Il a effectué pour ce journal des reportages en Afghanistan, en Irak, en Ukraine, au Bangladesh ou encore en Egypte. Un reportage sur les soldats allemands en Afghanistan lui vaut le Deutsche Reporterpreis et le CNN Journalist Award. C’est à Cambridge, où il a étudié l’histoire des idées et boxé pour l’équipe de l’université, que Takis Würger puise l’inspiration pour son premier roman, Der Club, véritable best-seller en Allemagne, aujourd’hui traduit aux éditions Slatkine & Cie.

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[Hans]
[Hans]Dans le sud de la Basse-Saxe, il y avait sur les hauteurs du Deister une forêt et, dans cette forêt, une maison en meulière où avait jadis habité un garde forestier, jusqu’à ce qu’une série de hasards et un emprunt bancaire la fassent passer entre les mains d’un couple, qui s’installa là pour que la femme puisse y mourir en paix. La femme avait un cancer, des dizaines de petits carcinomes logés dans les poumons, comme si on lui avait tiré dessus à la chevrotine. Le cancer était inopérable et les médecins disaient ne pas savoir combien de temps il restait à la femme, si bien que l’homme mit un terme à son activité d’architecte pour rester auprès d’elle. Lorsqu’elle se trouva enceinte, l’oncologue conseilla d’interrompre la grossesse, mais le gynécologue confirma qu’une femme atteinte d’un cancer du poumon pouvait parfaitement enfanter. Et elle enfanta un petit nourrisson maigre aux membres frêles et à la crinière noire. L’homme et la femme plantèrent un cerisier derrière la maison et prénommèrent leur fils Hans. C’était moi. Dans mes souvenirs les plus lointains, ma mère vient à ma rencontre, pieds nus dans le jardin. Elle porte une robe jaune en lin et, autour du cou, une chaîne en or rose. Quand je repense à ces années-là, les premières de ma vie, l’été touche toujours à sa fin, et c’est comme si mes parents passaient leur temps à faire la fête, à boire de la bière dans des bouteilles brunes tandis que nous, les enfants, nous buvons une limonade qui s’appelle Schwip Schwap. C’est le soir, je regarde les autres enfants jouer à chat, je me sens presque normal et les ombres sur le visage de ma mère ont disparu, mais c’est peut-être aussi la lumière du feu de camp. En général, j’observais les autres depuis le fond du jardin, là où broutait notre cheval. Je voulais le protéger, je savais qu’il avait peur des inconnus et qu’il n’aimait pas les caresses. C’était un pur-sang anglais, un ancien cheval de course que ma mère avait acheté à un boucher chevalin. Dès qu’il voyait une selle, il faisait mine de ruer. Quand j’étais petit, ma mère m’installait à califourchon sur son dos et, plus tard, j’ai fait avec lui des chevauchées dans la forêt en me tenant à la force des cuisses. La nuit, quand je regardais le jardin par la fenêtre de ma chambre, j’entendais ma mère qui parlait au cheval. Ma mère connaissait toutes les plantes de la forêt. Quand j’avais mal à la gorge, elle me préparait un sirop avec du miel, du thym et de l’oignon, et les douleurs disparaissaient. Une nuit où je lui avais confié ma peur de l’obscurité, elle me prit par la main pour m’emmener dans la forêt. Elle me dit qu’elle ne pourrait pas vivre si elle savait que j’avais peur, ce qui m’inquiéta un peu parce que j’étais plutôt craintif. En haut, sur le chemin de crête, les lucioles s’envolaient des branches et se posaient sur les bras de ma mère. Chaque soir, à travers les lames du plancher de ma chambre, j’entendais sa toux. Le bruit me berçait. Et puis mes parents m’annoncèrent un jour que le cancer avait cessé de se propager : les rayons qu’on avait faits à maman après l’accouchement avaient été efficaces. Je retins le mot « rémission » sans savoir ce qu’il signifiait. Au regard qu’avait ma mère en le prononçant, il semblait que c’était une bonne chose. Elle me dit qu’elle mourrait un jour, mais que personne ne savait quand. Je pensai : tant que je n’aurai pas peur, elle restera en vie. Je ne jouais jamais. J’étais occupé à regarder le monde. L’après-midi, j’allais dans la forêt et j’observais les feuilles qui frémissaient sous la caresse du vent. Quelquefois, je restais assis près de mon père debout devant l’établi, et je le regardais tourner le bois de chêne, je sentais l’odeur des copeaux frais. J’enlaçais ma mère quand elle faisait de la confiture de groseilles blanches et je collais mon oreille à son dos quand elle toussait. Je n’aimais pas l’école. J’avais appris l’alphabet en un rien de temps et j’aimais les nombres parce qu’ils étaient mystérieux, mais chanter des chansons ou fabriquer des fleurs en papier n’était pas mon fort. Par la suite, quand on nous demanda d’écrire des histoires, je compris que l’école pourrait peut-être m’aider. J’écrivais des textes sur la forêt, sur les visites de ma mère chez le médecin et, grâce aux histoires, le monde m’était un peu plus familier. Grâce à elles, je créais un ordre sinon invisible pour moi. Avec mon argent de poche, j’achetai un journal intime et je me mis à écrire chaque soir. Je ne sais pas si j’étais un bosseur et, si oui, je m’en fichais. À l’école, il y avait plusieurs groupes : les filles, les footballeurs, les handballeurs, les guitaristes, les Allemands de Russie, ceux qui habitaient les belles maisons blanches près de la forêt. Je n’aimais pas les jeux de ballon et je ne jouais d’aucun instrument, notre maison n’était pas une de ces maisons blanches et je ne parlais pas le russe. Pendant les récréations, les filles venaient se mettre à côté de moi et, quand ils s’en aperçurent, les garçons de ma classe rigolèrent, si bien que je préférais le plus souvent passer la récréation caché derrière un aquarium, seul. Pour mon huitième anniversaire, ma mère proposa aux autres parents de déposer leurs enfants chez nous. Assis devant le gâteau marbré, je ne disais rien, j’étais nerveux et je me demandais si les enfants deviendraient mes amis. Cet après-midi-là, nous avons joué à cache-cache. J’ai couru me cacher dans la forêt et j’ai escaladé un châtaignier. On n’irait pas me chercher là-haut, pensais-je, ravi. Je suis resté toute la journée dans l’arbre et je ne suis rentré que le soir. J’étais fier que personne ne m’ait trouvé. J’ai demandé à mes parents où étaient les autres enfants. Ma mère a dit que je m’étais trop bien caché et elle m’a serré dans ses bras. Toute ma vie, je serais trop bien caché. Quand j’avais dix ans, les garçons, à la récréation, jouaient souvent à un jeu de ballon de leur invention, si bête et v*****t qu’il ne pouvait être le fruit que d’un cerveau malade ou immature. Il s’agissait d’aller déposer un ballon de l’autre côté du terrain, tous les moyens étant bons pour empêcher l’équipe adverse de faire de même. Un jour, peu avant les grandes vacances, l’un des garçons était resté chez lui à cause des oreillons. Comme il leur manquait un joueur, les autres m’ont demandé si je voulais jouer. L’idée me paniquait parce que les enfants transpiraient et que je n’aimais pas leur transpiration, et puis je savais que je n’étais pas doué pour rattraper les balles. J’ai refusé, mais ils ont dit qu’ils ne pouvaient pas jouer sans moi. Pendant quelques minutes, j’ai donc arpenté le gazon dans un sens et dans l’autre, heureux de si bien me débrouiller pour ne pas avoir le ballon. Un camarade de classe m’a crié de me donner un peu plus de mal, sans quoi ils perdraient tous à cause de moi. Peu après, un joueur de l’équipe adverse s’est avancé dans ma direction avec le ballon, il était déjà en quatrième et bien plus costaud. J’avais toujours été malingre, et ce garçon, qui faisait partie de l’équipe régionale de rugby, se dirigeait droit sur moi. À toute vitesse, j’ai tenté de déterminer où se trouvait le point faible de ce corps qui me fonçait dessus, puis je me suis jeté de tout mon poids sur son genou droit et je lui ai brisé la rotule. Accroupi près du garçon, je lui ai dit que j’étais désolé, mais il m’entendait à peine. Il criait trop fort. Plus tard, on l’a emmené à l’hôpital en ambulance, et ses amis ont voulu me passer à tabac, alors je me suis échappé, j’ai escaladé un peuplier et je me suis assis tout en haut, dans les branches fragiles. Je n’avais jamais peur de tomber. Les enfants se sont regroupés au pied de l’arbre et m’ont jeté des mottes de terre glaise qu’ils avaient prises dans un champ voisin. À mon retour de l’école, mon père, occupé dans l’atelier à poncer un morceau de bois, a levé la tête. Le directeur de l’école l’avait prévenu par téléphone. Depuis le début, je m’étais répété que tout ça n’était pas si grave, il ne m’était rien arrivé, après tout, mais en voyant mon père, je me suis soudain senti en sécurité et j’ai fondu en larmes. Il m’a pris dans ses bras, et j’ai gratté la terre qui avait séché sur ma chemise. Mon père était un peu comme moi, il ne parlait pas beaucoup, et je n’ai pas souvenir de l’avoir vu jouer au ballon. Mais il était différent de moi, aussi. Il riait fort et longtemps, et le rire avait creusé de petites rides dans sa peau. Ce jour-là, au dîner, il a posé à côté de mon assiette deux gants de boxe noirs en cuir de bœuf. Dans la vie, a-t-il dit, les choses sont généralement dans des tons de gris, mais parfois, il n’y a de choix qu’entre le bien et le mal, et quand le plus fort fait souffrir le plus faible, ce n’est pas bien. Il a déclaré qu’il m’inscrirait au club dès le lendemain. J’ai pris les gants de boxe et j’ai senti la douceur du cuir sous mes doigts. Mes parents avaient de la visite durant ces semaines et nous n’étions pas seuls à table, la demi-sœur de ma mère était avec nous. Elle vivait en Angleterre, parlait à peine allemand et passait presque toutes ses journées dans la forêt. Je l’aimais bien, même si je la comprenais mal quand elle racontait quelque chose. Ma mère m’avait expliqué que sa demi-sœur avait des orages dans la tête et que je devais être gentil avec elle, alors, chaque jour, au bord de la mare aux canards, je lui cueillais un bouquet de soucis d’eau que je déposais sur sa table de nuit. Et un jour, près de l’église, j’ai volé sur un pommier une pomme grosse comme mes deux poings et je l’ai glissée sous son oreiller pour lui faire une surprise. Jusqu’à l’âge de huit ans, je n’avais pas eu de tante. Et puis mon grand-père est mort et ma mère s’est découvert une demi-sœur en Angleterre. Elle était le fruit d’une liaison, mon grand-père ne l’avait jamais reconnue comme sa fille. Après sa mort, ma mère et ma tante s’étaient finalement rapprochées malgré toutes leurs différences, à commencer par leur physique : ma mère était grande et le jardinage lui avait musclé les avant-bras ; ma tante était menue, presque frêle, un peu comme moi, et elle avait – ce que je trouvais formidable à l’époque – les cheveux coupés ras. Le soir où mon père déposa les gants de boxe sur la table, ma tante continua à manger son pain sans rien dire. Devant elle, j’avais un peu honte d’avoir l’air si faible, et je m’étonnais qu’elle-même ne paraisse pas faible du tout, alors qu’elle était de petite taille, elle aussi, et qu’elle avait dans la nuque une petite croûte qui semblait ne jamais guérir. La nuit, elle venait parfois dans ma chambre et s’asseyait par terre à côté de mon lit. Aujourd’hui, quand je ne parviens pas à dormir, il m’arrive de regarder par terre à côté du lit, et si je tourne la tête très vite, j’ai pendant un instant le sentiment qu’elle est encore assise à mes côtés. Ce soir-là, elle resta un long moment assise sur le plancher à me regarder. J’avais un petit peu peur parce que ça me semblait étrange. Elle a pris ma main et l’a serrée dans la sienne, elle avait des mains de petite fille. Elle m’a parlé en allemand, son niveau était bien meilleur que ce que j’avais imaginé, elle avait un accent rigolo, mais je n’ai pas ri. « Quand j’avais ton âge, c’était pareil pour moi, a-t-elle dit. – Pourquoi ? – Pas de père. – C’était une raison suffisante ? – À l’époque, oui. » Nous sommes restés longtemps ainsi. Je me représentais combien une vie sans père devait être difficile et, du pouce, je lui caressais le dos de la main. « Ils t’ont fait mal, les autres ? », ai-je demandé. Elle a respiré profondément, serré ma main encore un peu plus fort et prononcé ensuite cette phrase que je n’avais jamais entendue jusqu’alors : « S’ils te touchent, viens me voir. Je les tuerai. »

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