Love & Redemption

1814, Londres  - Mère, je n'ai point l'intention de m'opposer à ton choix. Je connais lady Cecilia depuis que nous sommes enfants, je suis persuadé qu'elle fera une bonne duchesse. - C'est une bonne nouvelle mon fils. Je tiens à te prévenir que la jeune femme a sûrement changé. Cela doit bien faire dix ans que tu ne l'as pas vu Wen. - En effet, reconnut Owen d'un hochement de tête. Je me rappelle seulement d'une charmante enfant. Désormais, elle doit avoir...vingt ans ? Ces derniers mots étaient un mensonge. Cecilia Hartley, fille unique du comte de Foxborne était une petite fille échevelée, curieuse et rêveuse. Charmante ? Personne n'aurait utilisé ce mot pour la décrire. Toujours le visage et les mains pleines de terre. Véritable garçon manqué, elle faisait le compagnon de jeu parfait pour son petit frère. Cependant, il ne pouvait décemment pas la décrire ainsi à sa mère. - Parfait. Son bateau a déjà débarqué à Portsmouth. Elle arrivera à Londres dans l'après-midi. Juste à temps pour le bal donné par la vicomtesse de Hauleigh. Je compte sur toi pour lui faire la meilleure des impressions. On raconte qu'elle a déjà refusé la main d'un prince. Le duc se demandait comment la jeune femme avait évolué ? En tant que fille unique du comte de Foxborne, Cecilia Hartley devait, désormais, être en tout point similaire aux autres débutantes qu'Owen Baxton, duc de Graywsorth avait rencontré dans sa vie. Serait-elle de la catégorie des débutantes gâtées et précieuses ou plutôt le genre de demoiselle arrogante, pensant tout connaître et tout savoir. La dot conséquente qui accompagnait la jeune Cecilia saurait palier à tout défaut de personnalité qu'on pourrait lui trouver. - Ne t'inquiètes pas, je serai le plus merveilleux des hommes. Après tout, ne suis-je pas le parti le plus convoité de la Saison ? - N'en fais pas trop non plus, rit-elle en lui donnant une tape sur le bras. Charles t'attend à l'écurie pour votre balade. Soyez prudents mes fils. - Oui, mère. Quant à toi, cesse de te soucier inutilement. - Ce n'est jamais inutile lorsque je me soucie de ton frère et de toi. Le duc de Graysworth déposa un b****r sur le front de sa mère avant de quitter la pièce. Il rejoignit les écuries où l'attendait déjà son frère. - As-tu pris le temps de t'échauffer Charlie ? se moqua le duc, insistant bien sûr ce surnom que son frère détestait si bien. - Je suis encore un fringant jeune homme, contrairement à toi vieillard. - Nous n'avons que deux ans de différence. - Cela est déjà bien trop mon vieux, la trentaine s'approche à grand pas de toi. A ce propos, le bruit court que tu as mis de côté ta maîtresse. - Tu es déjà au courant ? s'étonna Owen en talonnant sa monture. - Évidemment, comme toutes les jeunes femmes à marier. Tu vas te retrouver avec un essaim d'abeilles autour de toi. Le début de la Saison risque d'être sacrément mouvementé. J'ai hâte de voir cela… - Peu m'importe. Ma maîtresse m'ennuyait et maman souhaite me voir marier avec la fille du comte de Foxborne. - Cecilia Hartley, une femme d'une grande beauté, d'après ce que j'ai entendu. De longs cheveux bouclés, de la couleur d'un feu ardent alliés à des prunelles bleues comme un ciel d'été et un sourire des plus charmeurs. - Une belle femme en somme, conclut-il. Si belle que tu en deviens poète. - Il me faut bien cela pour charmer ces dames, à défaut d'avoir le titre. D'après les dires de certains hommes, Cecilia est une magnifique jeune femme ensorcelante, dotée d'un caractère…piquant. Elle a même refusé la main d'un prince en Italie, où je ne sais quel autre contrée qu'elle a visité durant ces dix dernières années. - Ensorcelante, tu dis ? Ce n'est pas le souvenir que j'ai gardé d'elle. Sauf pour son tempérament. - Ils te reviendront peut-être quand tu la reverras. À moins que ton cerveau soit aussi lent que ta monture, hurle le frère de duc avant de lancer sa monture au galop. - Montre-lui ce que tu as dans le ventre Naïade. Owen effleura des talons les flancs de sa jument qui n'attendait qu'un signe de sa part pour s'élancer à la suite de l'étalon. En quelques instants, les deux animaux se retrouvèrent côte à côte. Les deux frères se regardèrent puis Owen montra un arbre au loin comme ligne d'arrivée. Il talonna à nouveau sa jument qui atteignit l'arbre en tête, l'étalon plusieurs mètres derrière lui. - Ma Naïade, félicita le duc en la gratifiant de quelques caresses. Comment se déroule ta défaite ? - Hadès a seulement besoin de s'entraîner, c'est encore un jeune étalon. Ta jument est plus âgée donc plus expérimentée dans quelques années, Hadès devra la tirer pour qu'elle le suive. Naïade piaffa, comme si elle avait compris l'insulte du jeune homme. Le duc se mit à rire en menant sa jument en direction du domaine. - Tu as entendu sa réponse. Malgré son âge, Naïade reste une jument extrêmement rapide. Bien plus que ne le sera jamais Hadès. - Nous verrons cela dans un ou deux ans, conclut Charles en lançant sa monture au trot. Arrivés au château, le duc abandonna sa monture entre les mains d'un palefrenier afin de se changer pour travailler dans son bureau. Occupé par la gestion de ses domaines, Owen ne vit pas la journée passer jusqu'à ce que Higgins lui rappelle le bal. Owen prit un bain puis laissa son valet le raser. Pour cette soirée, la duchesse douairière avait fait confectionner un costume dans différentes nuances de brun, censé rehausser parfaitement l'émeraude de ses yeux. Du moins, selon les dires de sa mère. Owen, lui, n'avait qu'un objectif en tête, séduire Lady Cecilia Hartley vite et bien. Il ne souhaitait pas passer des mois à minauder. Au plus vite, cette affaire serait conclue, au plus tôt, il pourrait se reconcentrer sur ses affaires. Fin prêt, il jeta un coup d’œil satisfait au miroir puis descendit au salon où son frère patientait déjà. - Wen, tu risques à nouveau de briser quelques cœurs ce soir. - Je suis sûr que tu ne seras pas en reste Charlie. Les deux frères étaient en train de rire de leurs taquineries quand leur mère les rejoignit dans une robe aux reflets bleu nuit. Veuve depuis quelques années, lady Mary Baxton mettait un point d'honneur à se montrer sous son meilleur jour. - Maman, tu es tout simplement sublime !s’exclama le jeune frère du duc. - Merci mon chéri. Êtes-vous prêts mes enfants ? - Oui mère ! répondirent-ils communément, tels de véritables enfants de chœur. - Parfait, dans ce cas, nous pouvons y aller. Higgins leur ouvrit la porte devant laquelle le cocher patientait déjà. Laissant sa mère et son frère discuter, Owen était plongé dans ses ses pensées, réfléchissant à ses futures retrouvailles avec lady Cecilia. Arrivés devant la demeure des Hauleigh, le duc aida la duchesse douairière à descendre du véhicule, suivi par son frère. On les annonça dans la salle de bal puis ils entrèrent, les regards braqués sur eux. Comme l'avait averti Charles, toute la société avait eu vent de sa séparation avec sa maîtresse et le regardait d'un œil curieux Toutes les jeunes femmes de bonne famille parurent s'éveiller, bien que le duc ne s'attarda pas sur cette agitation. Concentré sur son objectif, son regard perçant se déplaçait sur l'assistance, à la recherche de sa future femme. Toutefois, il ne vit aucune femme rousse, la mode étant au blond peut-être s'était-elle teinte les cheveux... Il se rapprocha de sa mère pour lui parler discrètement. - Miss Cécilia est-elle présente en ce moment ? murmura-t-il à son intention. Je ne la vois nulle part. - Pas encore mon fils. Serais-tu à ce point impatient de la voir ? Son père était décédé depuis trois ans à peine. Owen s'habituait enfin à ses nouvelles responsabilités. Cependant, il devait faire son devoir ducal et offrir un héritier au duché de Graysworth. Son devoir accompli, il retrouverait aisément le lit d'une nouvelle maîtresse. Il allait donner un tout autre genre de réponse à la duchesse douairière quand on annonça l'arrivée du comte de Foxborne. Le silence tomba sur l'assemblée quand miss Cecilia apparut derrière ses parents. La description de Charles ne lui rendait décidément pas justice. Ses cheveux avaient une couleur hypnotisante avec leurs reflets brillants comme un feu ardent, parfaite opposition avec son regard d'un bleu glacial et pourtant si captivant. Bien malgré lui, il ne put détacher son regard de cette femme. Une peau d'albâtre, légèrement hâlée qui semblait d'une douceur inégalée. Couleur inhabituelle pour une débutante, le vert intense de sa robe lui seyait à merveille, mettant en valeur ses courbes voluptueuses. Le menton haut, elle balaya la salle de son regard avec l'assurance d'une femme consciente de sa beauté sans en abuser. Lorsque leurs yeux se croisèrent, le duc sentit ses reins s'embraser de façon inattendue. Soudainement, il n'eut plus qu'une seule envie : la soustraire aux regards admiratifs des autres hommes présents et la faire sienne. Sa bouche pulpeuse s'incurva dans un sourire qui ne semblait destiné qu'à lui tandis qu'une lueur séductrice s'alluma dans le regard de miss Cecilia, comme si elle devinait ses pensées et les partageaient.