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Les exploits de Rocambole ou les Drames de Paris

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Un soir, vers quatre heures, une chaise de poste roulait au grand trot sur une route du Nivernais.C’était pendant l’automne de l’année 184., c’est-à-dire vers la fin du mois d’octobre. À cette saison, rien n’est splendidement beau comme le centre de la France, et surtout cette partie du Nivernais qui touche au département de l’Yonne et fait partie de l’arrondissement de Clamecy.Les pâturages passent alors du vert sombre de l’été au vert plus tendre et presque jaune qui annonce les gelées prochaines. Les bois commencent à se dépouiller, et ces grands peupliers mélancoliques qui bordent le canal et la rivière d’Yonne s’inclinent au souffle des premières bises.

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I
I Un soir, vers quatre heures, une chaise de poste roulait au grand trot sur une route du Nivernais. C’était pendant l’automne de l’année 184., c’est-à-dire vers la fin du mois d’octobre. À cette saison, rien n’est splendidement beau comme le centre de la France, et surtout cette partie du Nivernais qui touche au département de l’Yonne et fait partie de l’arrondissement de Clamecy. Les pâturages passent alors du vert sombre de l’été au vert plus tendre et presque jaune qui annonce les gelées prochaines. Les bois commencent à se dépouiller, et ces grands peupliers mélancoliques qui bordent le canal et la rivière d’Yonne s’inclinent au souffle des premières bises. Cependant l’air est tiède encore, et le ciel sans nuages ; à peine, au matin, une brume diaphane couvre-t-elle les prés et les marécages pour s’évanouir au lever du soleil ; tandis que, vers le soir, elle redescend lentement du sommet des collines et s’allonge dans les vallées transparentes et dorées par les derniers rayons du couchant. La chaise de poste dont nous parlons, traversait en ce moment un des sites les plus pittoresques et les plus sauvages de ce beau pays, – une vallée au fond de laquelle couraient en méandres infinis et côte à côte : la rivière, – œuvre de Dieu, – le canal, – œuvre des hommes. La vallée était encaissée par deux chaînes de collines couvertes de bois, ces bois immenses qui touchent au Morvan ! Çà et là, du milieu des roches moussues et des arbres verts dont l’eau baignait les dernières racines, on voyait surgir un clocher rustique, une église toiturée en ardoises, un village où le chaume dominait la tuile ; parfois une de ces belles ruines féodales respectées par hasard en 1793, et dont l’âpre b***e noire ignore encore l’existence. La grande route allongeait son ruban bleuâtre au bord du canal, côtoyant les maisonnettes des éclusiers et passant au bas des villages, presque tous étagés à mi-côte au milieu d’un fouillis de chênes et de vignes, avec une verte ceinture de prés. Dans la chaise de poste dont la capote était renversée en arrière, un homme et une femme tenaient au milieu d’eux un bel enfant de quatre ans, aux cheveux blonds, à l’œil bleu, qui babillait sans relâche, questionnait son père et sa mère, et s’extasiait sur le bruit des grelots résonnant au collier des quatre vigoureux percherons qui emportaient l’aristocratique attelage. Le père de l’enfant était un homme jeune encore, pouvant avoir trente-sept ou trente-huit ans, grand, brun, les cheveux noirs et les yeux bleus. Sa figure, un peu sévère, était encore d’une grande beauté, beauté qui devenait presque juvénile, lorsque le bel enfant attachait sur lui ce regard profond et charmant, plein de curiosité naïve et de respectueuse admiration, qui n’appartient qu’à la première jeunesse. La mère avait vingt-cinq ans peut-être ; elle était blonde, un peu pâle, avec un sourire où le bonheur se révélait par la mélancolie. Elle ressemblait à l’enfant comme la rose épanouie ressemble au bouton naissant. L’enfant était assis entre eux ; chacun le tenait d’une main ; chacun passait une autre main derrière lui. Et ces deux mains s’enlaçaient en une affectueuse étreinte. Ce gage de leur amour semblait avoir prolongé cette lune de miel, si courte d’ordinaire, et qui pour eux paraissait ne devoir point finir. Or, cet homme et cette femme, dont l’élégant négligé de voyage, les deux laquais assis derrière la chaise et la façon aristocratique de courir la poste trahissaient la haute position sociale, n’étaient autres que le comte et la comtesse de Kergaz revenant d’Italie et se rendant dans leur belle terre de Magny-sur-Yonne, où ils comptaient passer l’arrière-saison, pour ne rentrer à Paris que vers la mi-décembre. M. le comte Armand de Kergaz avait quitté Paris huit jours après son mariage avec mademoiselle de Balder. Les enchantements de ce premier amour s’étaient déroulés pour eux au bord de la mer Sicilienne, sous les ombrages d’une villa louée par le comte à Palerme. Ils y avaient vécu six mois, tout un hiver, la saison du froid noir et du verglas en France, celle des chauds rayons et des brises printanières là-bas. Puis ils étaient revenus à Paris habiter cet hôtel si vaste et un peu froid de la rue Culture-Sainte-Catherine. Mais là, le changement d’air et peut-être quelques amers souvenirs avaient agi d’une façon fâcheuse sur la santé de madame de Kergaz. La frêle jeune femme était tombée malade, assez gravement pour inquiéter ses médecins, qui lui avaient ordonné de retourner en Sicile. Armand de Kergaz était donc parti, ramenant la jeune mère, car Jeanne était grosse de sept ou huit mois alors, sur cette terre de Sicile où le soleil est si doux pour ceux qui souffrent. L’influence du climat béni n’avait point tardé à se faire sentir. Jeanne était promptement revenue à la santé, plus belle, plus jeune que jamais. Son enfant était né à Palerme ; les verts rameaux d’un sycomore avaient ombragé son berceau, le murmure de la vague d’azur resplendissant au soleil avait été la première chanson qu’il eût entendue. Et comme l’air tiède et parfumé de cette belle contrée était salutaire à ce cher nourrisson, bien que la comtesse se fût rétablie à la fin de la première année, ils s’étaient oubliés à Palerme pendant trois autres années encore. Cependant, un jour, le mal du pays, ce mal bizarre et si commun en même temps, était venu frapper à leur porte. Au milieu des pins d’Italie, des lauriers-roses et des sycomores, sur cette terrasse de leur villa qui dominait au loin la mer bleue comme un saphir sans fin, en écoutant cette plainte éternelle et si douce à l’oreille du flot qui roule sans relâche le sable doré de la grève, les deux jeunes époux, que le bonheur avait fait oublieux si longtemps, se souvinrent de notre France. Ils ne songèrent point à Paris d’abord, à cette grande et moderne Babylone où ils avaient aimé et souffert, mais ils se souvinrent de cette belle et poétique contrée nivernaise où M. de Kergaz avait acheté, à son premier retour, une terre seigneuriale, et dans laquelle il s’était reposé quinze jours avant d’aller demander la santé de sa femme aux chaudes haleines du Midi. Ils songèrent à ce joli castel, perdu sous un massif de grands chênes, entouré d’un parc immense, devant lequel s’étalait une verte prairie ; à ces bois touffus et pleins de vagues murmures, sous les hautes futaies desquels retentissait en automne l’éclatante fanfare des veneurs morvandiaux ; et comme partout où ils étaient ensemble le bonheur était revenu, comme il leur souriait partout sous l’aspect de leur chérubin blanc et rose... ils partirent. Ils s’embarquèrent pour Naples, traversèrent l’Italie dans toute sa longueur, visitèrent rapidement Rome, Venise et Florence, suivirent la route de la Corniche, et rentrèrent en France par le département du Var, cette Italie en miniature. Quinze jours après, ils roulaient sur cette grande route du Nivernais où nous venons de les retrouver, et n’étaient plus, vers quatre heures du soir, qu’à cinq ou six lieues du château de Magny. – Jeanne, ma bien-aimée, murmurait Armand, contemplant sa jeune femme avec amour, tandis que ses doigts jouaient avec la blonde chevelure bouclée du petit Gontran, ne regretterez-vous point notre villa de Palerme, notre chère terre promise, dans ce solitaire et silencieux château où nous allons ? – Oh ! non, répondit Jeanne ; partout où vous êtes, partout où ma main est dans la vôtre, n’est-ce point la terre promise ? – Ange, dit tout bas le comte, vous m’avez rendu si heureux, que Dieu me fera tort peut-être de ma part de paradis. En France ou en Italie, vivre avec vous et auprès de vous, c’est mieux que la terre promise, c’est le ciel ! Et le comte pressa dans sa main la main blanche et mignonne de Jeanne ; tandis que, réunis par une commune pensée et un même élan, ils se penchaient tous deux sur le front de l’enfant et y déposaient un double b****r, confondant ainsi leurs chevelures. – Si vous le voulez, ma chère âme, continua M. de Kergaz, nous passerons tout l’automne à Magny, et ne retournerons à Paris que vers le mois de janvier. – Ah ! je le veux bien, répondit Jeanne ; ce vilain Paris est si noir, si triste ! On s’y souvient de tant de secousses ! Armand tressaillit. – Ma pauvre Jeanne, dit-il, je vois un pli se former sur ton front, ton œil s’emplir d’une vague inquiétude... et je te devine... – Mais non, répondit-elle, vous vous trompez... Mon Armand bien-aimé... le bonheur est-il inquiet ? Elle lui envoya, en parlant ainsi, son meilleur sourire, ce sourire demi-rêveur qui semblait dire : le calme du cœur, c’est un peu de mélancolie. – Ah ! c’est que, continua Armand, je me souviens qu’à Palerme, parfois, un nom fatal et maudit errait souvent sur vos lèvres. – Andréa ! fit Jeanne avec une émotion subite. – Oui, Andréa. Je crains, me dites-vous, l’infernal génie de cet homme ; notre bonheur doit le poursuivre comme un remords. Mon Dieu ! s’il allait nous apparaître ici... – Oui, murmura la comtesse, je vous dis cela, en effet, mon Armand ; mais c’est que j’étais folle alors, que j’oubliais combien vous êtes noble et fort, et qu’auprès de vous je puis toujours vivre sans rien redouter. – Tu as raison, enfant, répliqua M. de Kergaz ému. Je suis fort pour te défendre, fort parce que je t’aime, fort parce que Dieu est avec moi et qu’il m’a fait ton protecteur. Jeanne attacha sur son mari ce regard plein de confiance de la femme qui a une foi profonde en l’homme dont elle a fait son appui. – Je sais bien, reprit Armand, que mon frère Andréa est un de ces hommes, heureusement fort rares, qui ont fait de notre société un champ de bataille sur lequel ils brandissent l’étendard du mal ; je sais que son génie infernal a été lent à se décourager ; que la haine qu’il m’a vouée, et qui était si violente déjà, a dû s’accroître de toute la grandeur de sa défaite dans cette lutte où il a osé te disputer à moi. Mais rassure-toi, enfant ; il vient une heure où le démon, las de combattre en vain, se retire pour ne plus reparaître ; et cette heure a sonné depuis longtemps sans doute pour Andréa, car il nous a laissés en paix, renonçant à jamais à poursuivre une inutile vengeance. Et Armand ajouta, après un silence : – Le lendemain de notre mariage, ange bien-aimé, j’ai fait remettre, par Léon Rolland, 200 000 francs à ce frère dénaturé, l’engageant, par une lettre, à quitter la France et à passer en Amérique, où il trouverait l’obscurité, l’oubli et peut-être, le repentir... Dieu a-t-il touché cette âme rebelle et coupable ? Je l’ignore. Mais depuis quatre années, cette police infatigable que j’ai organisée à Paris pour faire un peu de bien, et dont j’ai donné en mon absence la direction à notre bon et excellent ami Fernand Rocher, cette police a pu constater que mon frère Andréa avait quitté la France et n’y avait point reparu... Peut-être est-il mort. – Armand, murmura Jeanne avec douleur, ne faisons point ce vœu impie. Le comte mit un b****r au front de sa femme. – Mais, dit-il, pourquoi nous attrister ainsi par des souvenirs déjà lointains, et desquels nous séparent les quatre années de bonheur qui viennent de s’écouler ? Vivons heureux, ma chère âme, les yeux fixés sur notre enfant, et continuons à faire un peu de bien, à soulager ceux qui souffrent. Armand ajouta en lui-même : – À punir ceux qui ont attiré sur leur tête de justes châtiments. Car, à cinq cents lieues de Paris, le comte avait poursuivi sa grande œuvre de réparation sociale, y dépensant les deux tiers de son immense fortune, et associé en cela à Fernand Rocher. Nous verrons tout à l’heure quel auxiliaire le comte et la comtesse de Kergaz avaient trouvé, pour les seconder, dans la personne de cette Madeleine repentante qui s’était nommée la Baccarat, et qui, à cette heure, n’était plus qu’une humble sœur de charité. La chaise de poste continuait donc à rouler au grand trot, tandis que M. de Kergaz et sa femme causaient ainsi, lorsque le postillon cria rudement un gare ! fortement accentué qui attira l’attention des jeunes époux et leur fit porter les yeux devant eux. Un homme, dans une attitude d’immobilité complète, était en travers de la route en cet endroit assez rétréci. – Gare ! répéta le postillon. L’homme ne bougea point, bien que les premiers chevaux fussent près de l’atteindre. Alors le postillon, pour éviter un malheur, arrêta brusquement son attelage. – Cet homme est ivre, sans doute, dit M. de Kergaz... Et se tournant vers un des deux laquais assis derrière la chaise : – Germain, dit-il, descends, et range ce pauvre diable de façon qu’il ne lui soit fait aucun mal. Le laquais obéit, mit pied à terre et s’approcha de l’homme étendu sur la route. Cet homme, qui était nu-pieds, vêtu de haillons et le visage couvert d’une grande barbe inculte, paraissait évanoui. – Pauvre homme ! murmura la comtesse émue jusqu’aux larmes... il est peut-être tombé d’inanition... Et elle mit vivement dans les mains de son mari un flacon de sels qu’elle portait suspendu à son cou, disant en même temps à l’autre laquais : – Vite ! François, vite ! cherchez dans le coffre, vous trouverez une bouteille de malaga et des aliments. Armand s’élança à terre et courut au mendiant évanoui. C’était presque un jeune homme, et son visage amaigri par la souffrance conservait les traces d’une grande beauté. Sa barbe et ses cheveux étaient d’un beau blond doré, et ses pieds nus ensanglantés par les ronces, ses mains brûlées par le hâle étaient cependant d’une exquise délicatesse de formes. Le comte envisagea cet homme et jeta un cri de stupeur : – Mon Dieu ! murmura-t-il, quelle étrange ressemblance ! on dirait Andréa... Madame de Kergaz avait imité son mari ; elle était descendue de voiture, et, comme lui, elle s’était approchée du pauvre mendiant... Comme lui, elle jeta un cri d’étonnement. – On dirait Andréa !... répéta-t-elle. Il était pourtant peu vraisemblable que le baronet sir Williams, l’élégant vicomte Andréa, en fût arrivé de chute en chute jusqu’à mendier par les chemins, sans chaussures et presque sans vêtements, puis à tomber mourant d’inanition. En tout cas, si c’était lui, il avait été rudement éprouvé par les privations de toute nature, à en juger par ce visage hâve, amaigri, où la souffrance avait mis sa fatale empreinte. Et pourtant, c’étaient bien là ses traits, ses cheveux blonds, sa taille. Armand lui fit respirer le flacon de sels tandis que les deux laquais le relevaient. Le mendiant fut long à rouvrir les yeux ; enfin il poussa un soupir, et balbutia quelques mots à peine intelligibles. – Il faisait chaud... balbutia-t-il... j’avais bien faim... je suis tombé... En parlant ainsi, le mendiant, que M. de Kergaz et sa femme continuaient à regarder avec une anxieuse curiosité, promenait autour de lui des yeux hagards... Tout à coup il les fixa sur Armand, manifesta aussitôt une sorte de terreur, essaya de se dégager des mains des laquais qui le soutenaient toujours, et voulut fuir... Mais il avait les pieds enflés par la fatigue d’une longue route, et il ne put faire un pas... – Andréa ! s’écria Armand, dans le cœur duquel s’élevait un sentiment de compassion profonde... Andréa, est-ce vous ? – Andréa ? répéta le mendiant d’une voix égarée, que me parlez-vous d’Andréa ? Il est mort... Je ne le connais pas... Je me nomme Jérôme le mendiant... Et il parut être pris d’un tremblement convulsif, ses dents se prirent à claquer et à s’entrechoquer, il tenta un suprême effort pour se dégager et s’enfuir. Mais ses forces le trahirent, l’évanouissement le reprit et il s’affaissa mourant. – C’est mon frère ! s’écria le comte, qui déjà, à la vue de cet homme réduit à ce honteux et lamentable état, avait oublié tous ses crimes pour ne plus se souvenir que d’une chose, c’est que les mêmes flancs les avaient portés tous les deux. – C’est votre frère, Armand ! répéta madame de Kergaz que la même pensée et la même compassion animèrent. Le mendiant, évanoui de nouveau, fut placé dans la chaise de poste et le comte dit au postillon : – Nous ne sommes plus qu’à trois lieues de Magny ; crève tes chevaux, mais arrive en trois quarts d’heure. La chaise repartit, rapide comme l’éclair. Elle entrait bientôt dans la grande allée de tilleuls qui conduit au perron du château. Quelques minutes plus tard, le mendiant rouvrait les yeux ; grâce à des soins empressés, il se trouvait non plus sur la route, mais dans le lit d’une élégante chambre à coucher. Un homme et une femme étaient anxieusement penchés sur lui, écoutant l’avis d’un médecin qu’on avait envoyé quérir en hâte. – Cet évanouissement, disait le docteur, a eu pour cause première l’absence trop prolongée d’aliments, corroborée par une longue marche. Les pieds sont enflés. Il a dû faire au moins vingt lieues depuis hier. – Andréa, murmura M. de Kergaz en se penchant à l’oreille du mendiant, vous êtes ici chez moi... chez votre frère... chez vous. Andréa, car c’était bien lui, continuait à le regarder avec des yeux hagards, effrayés. On eût dit qu’il croyait faire un rêve étrange, et cherchait à repousser quelque horrible vision. – Frère... répéta M. de Kergaz d’une voix émue et caressante, frère... est-ce bien vous ? – Non, non... balbutia-t-il, je suis un mendiant, un vagabond sans feu ni lieu... un homme que la justice divine poursuit, que le remords assiège à toute heure... Je suis un de ces grands coupables qui se condamnent volontairement à parcourir le monde sans relâche, portant avec eux le fardeau de leur iniquité. M. de Kergaz poussa un cri de joie. – Ah frère, frère, murmura-t-il, tu t’es donc enfin repenti ? Il fit un signe à sa jeune femme, qui sortit, emmenant le docteur. Alors Armand, resté seul au chevet du vicomte Andréa, lui prit affectueusement la main et lui dit : – Nous avons eu la même mère, et s’il est vrai que le repentir est entré dans ton cœur... – Notre mère ! interrompit Andréa d’une voix sourde, j’ai été son bourreau... Et il ajouta avec un accent d’humilité profonde. – Frère, quand je serai un peu reposé, quand mes pieds désenflés me permettront de continuer ma route, vous me laisserez partir, n’est-ce pas ?... Un morceau de pain, un verre d’eau... Jérôme le mendiant n’a pas besoin d’autre chose... – Mon Dieu ! murmura M. de Kergaz, dont le noble cœur battait d’émotion, en quelle misère horrible es-tu tombé, pauvre frère ? – En une misère volontaire, dit le mendiant, courbant humblement le front. Un jour le repentir est venu, et j’ai voulu expier tous mes crimes... Les deux cent mille francs que je tenais de vous, frère, je ne les ai point dissipés. Ils sont déposés à la Banque de New York. Le revenu en est versé dans la caisse des hospices... Moi, je n’ai besoin de rien... Je me suis condamné à m’en aller par le monde, demandant la charité, couchant dans les écuries et les granges... souvent au bord du chemin... Peut-être qu’à la longue, Dieu, que je prie nuit et jour, finira par me pardonner. – C’est fait ! répondit le comte. Au nom de Dieu, frère, je te pardonne et te dis que l’expiation est suffisante... Et M. de Kergaz, enlaçant Andréa dans ses bras, ajouta : – Mon frère bien-aimé, veux-tu vivre sous mon toit, non plus comme un vagabond, non plus comme un coupable, mais comme mon ami ; mon égal, le fils de ma mère, l’enfant prodigue que ramène le repentir et à qui tous les bras sont ouverts ? Reste, frère ; entre ma femme et mon enfant, tu seras heureux, car tu es pardonné...

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