Protège moi

Deux ans auparavant, -Tu n’as pas le choix Richard, tu connais très bien le sort réservé à ceux qui me trahissent. Déclare le mafieux en fixant l’homme d’une cinquantaine d’année qui travaillait pour lui et qui vient de le trahir. Dans l'obscurité étouffante de la pièce, une tension palpable flotte entre le mafieux et Richard, l'homme qui a commis l'irréparable en trahissant son patron. La lueur des néons ternes révèle le visage meurtri de Richard, alors que le mafieux, impassible, le fixe d'un regard glacial. -Je suis désolé, je n’ai pas pensé aux enjeux patron. Tout ça m’a dépassé. S’exprime Richard, une lueur de remords dans les yeux. Il tente désespérément de justifier son geste, de plaider pour son pardon mais en vain. Le mafieux ricana en se levant de sa chaise. Les paroles de regret ne sont qu'une faible lueur face à la colère implacable du mafieux -Qu’as-tu gagné à me trahir ? Tu as perdu ta femme, ils l’ont tué sous tes yeux abrutis ! Et maintenant c’est ta vie que tu vas perdre. -Je vous en supplie, je suis désolé, je suis vraiment désolé. -Je ne peux pas te laisser la vie sauve. Mais je n’oublie pas que tu es venu par ton propre gré pour avouer tes crimes. Alors, tout ce que je peux te donner est une dernière faveur, sauf celle de te laisser la vie sauve. L’homme impuissant, baisse la tête, il a compris, il a compris qu’il n’obtiendra jamais le pardon, qu’il ne sortira jamais, de cette pièce, vivant. Il a trahi son patron. Alors Richard se résout à demander une dernière faveur, une ultime requête pour tenter de réparer une infime partie de ses erreurs. -J’ai une dernière faveur à vous demander. -Je t’écoute. Dit le patron en se rasseyant sur sa chaise. -J’ai eu une aventure il y’a vingt-six ans de cela, avec une femme que j’avais rencontré dans un bordel. Et elle a eu un enfant. -Tu veux que je donne de l’argent à cette femme et à l’enfant ? -Non, elle est morte, mais l’enfant s’en est sorti. Elle a été déposée dans une ruelle à Brooklyn. -Magnifique, tu l’as abandonnée dans un endroit où on ne kidnappe jamais les bébés pour les trafics d’organes. Ironise le mafieux. L’homme soupire. Ensuite il continue : -Je voudrais que vous la protégiez au péril de votre vie. Ma vie contre la sienne. Elle s’appelle Isabelle Turner. -D’accord, si c’est ce que tu veux. Mais pourquoi crois-tu qu’elle soit en danger ? -Elle bosse pour le FBI. -A la bonne heure ! Je te tue et tu me mets un agent fédéral sur le cul... -Je vous en supplie, j’ai tué des enfants, vendu des femmes, bruler des familles, ça…C'est ma dernière chance de rédemption. Vous devez me promettre cela, j’ai besoin de votre parole. Le mafieux soupire décidément même après sa mort Richard lui causera des problèmes. -Je te donne ma parole. Ta vie contre la sienne. Dit-il en sortant son arme à feu et en tirant sur Richard qui ne tarde pas à tomber par terre raide et froid. C'est ainsi que sa dernière volonté, son ultime acte de rédemption, amorce le destin tragique d'Isabelle Turner, désormais lié à un pacte établi dans les ténèbres de cette pièce.