couverture-3

2021 Words
Dans cette foule dense qui se déhanche sans se soucier de ce qui se passe aux alentours, nos deux corps se rapprochent et entrent en collision presque par obligation, manque d'espace. Ce contact me provoque une sensation étrange. Enivrante et intimidante à la fois. Un contact avec un mi-ange mi-démon. — Bien, je vois que tu as lu ma carte. Et moi à qui ai-je affaire ? dit-il d'une voix grave et sensuelle, mais d'un ton sérieux, me sortant de ma transe. — Je...m'appelle...euh… Lucie. Lucie Carmon. C’est impressionnant le trouble qu’il sème en moi. J’en oublie même comment je m’appelle. Tu parles d’une idiote ! — Alors, à bientôt...Lucie. Son souffle qui frôle mon oreille quand il prononce mon prénom m'envoie directement un long frisson dans tout le corps. Mais j'ai à peine le temps d'en prendre conscience qu'il me lâche le poignet et s'en va, me laissant là, en plan, pour la deuxième fois de la journée. 3 Lucie. La sonnerie de mon réveil se met à chanter, me tirant une plainte de mécontentement. La nuit a été plutôt courte. Nous sommes partis de la boîte à quatre heures, exténués d’avoir dansé et ri comme des fous. Je me lève péniblement, manquant de marcher sur Gypsie, mon sacré de Birmanie, ma seule compagnie. Mais pourquoi je m’oblige à mettre ce satané réveil pendant mes jours de repos ? Ah oui, pour ne pas passer ma journée au lit, à dormir et à rêvasser. Remarque, c’est bien comme ça que la Belle au bois dormant a trouvé son prince charmant. Pourquoi ça ne marcherait pas pour moi ? Je traîne mes pieds jusqu’à la cuisine où je me fais chauffer un chocolat chaud. Dehors, le temps est plutôt couvert, il va sûrement pleuvoir. Moi qui pensais aller me promener dans le parc à côté, prendre un peu l’air comme j’aime le faire quand je ne travaille pas. Je suis bonne pour rester à la maison. Je vais en profiter pour ranger et faire un peu de ménage. D’avoir un chat à poils longs, c’est bien, mais quand les poils restent sur lui ! Sur la table est posé le papier avec le numéro de ce Davis. Immédiatement, des flashs de cette nuit me reviennent en mémoire : ce regard perçant, sa main qui me retient, sa voix, son parfum enivrant, mon corps contre le sien… Réveille-toi Lucie ! Il a peut-être une belle gueule, mais ça reste un sacré connard. Ma conscience m’énerve, c’est une rabat-joie. Sans plus réfléchir, j’attrape mon téléphone et compose le numéro inscrit. Ça sonne. « Davis Preston, laissez-moi un message et je vous rappellerai. Ou pas. » Merde, c’est le répondeur, je déteste ces machins-là. En même temps, ça me soulage. Ça m’évite de lui parler directement. Je laisse un message. « Bonjour, c’est Lucie…euh…je vous appelle pour ma voiture…euh…bon vous pouvez me rappeler sur ce numéro. » Mais quelle cruche. Je crois qu’on ne peut pas faire plus niais. De toute façon, c'est fait, il ne me reste plus qu’à attendre qu’il me rappelle. S'il le fait. Pour passer le temps, je vais faire travailler mon aspirateur. Davis. La vibration de mon téléphone me réveille. J'ouvre un œil en direction de l'heure : treize heures trente. p****n! Qui est-ce qui me dérange à cette heure-là? Je grogne en m’étirant longuement avant de sortir du lit, la tête complètement dans le coaltar. J’attrape un caleçon et l’enfile. Je suis un peu vaseux, sûrement dû aux excès de cette nuit encore. Ça fait un bien fou de se détendre et d’oublier l’espace de quelques heures cette vie de merde qui est la mienne. Mais le retour à la réalité est toujours difficile. Je déteste ça ! Je vais me faire couler un café pour émerger de ce brouillard. Pendant qu’il se fait, j’observe le temps dehors par la grande baie vitrée qui donne dans la cuisine ouverte sur le salon. Le ciel est couvert et quelques gouttes de pluie commencent à tomber. Fait chier, quel temps de merde ! Tant pis, je vais comater sur le canapé. Quel programme alléchant ! Perdu dans ma contemplation de la ville derrière la vitre, je sursaute légèrement quand je sens soudain deux petites mains glisser sur mon torse puis un corps tout chaud se coller contre mon dos. — Déjà debout, chaton ? me dit une voix féminine encore ensommeillée. D’où elle sort celle-là? Ah oui ! L’Opium. Je me rappelle vaguement l’avoir ramené à la maison après une danse torride, mais après, plus rien. Faut dire que j’étais bien déchiré ! Mais de là à ne plus me souvenir de ce que j’ai fait avec cette femme, ça craint. Heureusement, c’est rare. Je suis vite rassurée face à la vision de ses yeux cernés et dégoulinants de maquillage, ses cheveux en bataille et sa bouche en cœur. Je n’ai pu lui procurer que du bonheur. C’est la seule chose de bien dans laquelle j’excelle. Les faire monter au septième ciel. Même si moi, je n’y prends plus autant de plaisir. Pas d’attache, pas de sentiment, que de la b***e et ça me convient. Mais d'ailleurs, qu’est-ce qu’elle fiche encore ici? Je lui attrape les mains alors qu'elles commençaient à se faufiler dans mon caleçon puis me retourne vers elle, le regard noir. — D’une, j’ai horreur qu’on me donne des surnoms niaiseux et de deux, rentre chez toi ! Elle est à poil en plus. Mes yeux parcourent rapidement son corps exposé. Bon, faut l’avouer, elle est appétissante avec sa poitrine taille XXL. Mais j’ai tellement la tête en vrac que je ne suis pas sûr d’arriver à b****r. — Oh ! Mon lapin s’est levé du mauvais pied ce matin. Laisse-moi arranger ça… Elle m'énerve avec ces surnoms à la con! Je la fusille du regard mais elle n’y prête pas attention. — Dis donc, il ne me semble pas que je t’ai baisé comme un lapin cette nuit ! Enfin, je crois. En fait, je n’en sais rien et… je m’en branle royalement. — Non, en effet. Tu avais plutôt le rôle d’un bel étalon. Ah, voilà. Le contraire m’aurait étonné, quand même. Elle ne se départit pas de son sourire mielleux et ça me gave. Ma patience commence à atteindre ses limites. Doucement, elle se met à genoux, se léchant les lèvres, prête à me prendre dans sa bouche. Oh non ma belle, je ne suis pas d’humeur ce matin. D’habitude, je me serais laissé faire avec plaisir mais là, depuis quelque temps, j’en ai moins envie. Je suis fatigué, lassé. Toutes les mêmes, c’est ennuyeux. Je la repousse en lui sommant de partir, sur un ton ferme parce qu’elle ne se décide pas et minaude toujours. Il n’y a rien qui m’agace plus ! Je file sous la douche, je laisse l’eau couler sur mon corps, laver toute trace de ma nuit et soulager mon mal de crâne lancinant. Mais le résultat n’est pas spectaculaire. En sortant, je constate avec plaisir qu'elle est partie. Ouf. Je regarde mon téléphone. Il y a un appel en absence et un message vocal : « Bonjour, c’est Lucie…euh…je vous appelle pour ma voiture…euh…bon ben vous pouvez me rappeler sur ce numéro. » Lucie… Ah oui…Je me rappelle d’elle. Des yeux verts couronnés d’or, une chevelure châtain qui appelle mes mains à se glisser dedans, son sourire timide…Et cette p****n de robe indécente qu’elle portait ! Je n’avais qu’une envie, lui arracher et la plaquer contre le mur, de goûter à cette bouche sexy et de la posséder, violemment. Je n’ai pas été très tendre avec elle lors de notre première rencontre. Mais son air choqué m’a beaucoup amusé. Et désarmé. Sans savoir pourquoi, cette fille me tente et vu la façon dont elle me regardait, je ne lui suis pas indifférent. Je sens que je vais pouvoir m'amuser un peu et je m'en réjouis d'avance. Pour une fois, c’est moi qui pars en chasse. Pour le moment, le ciel se dégage. J’en profite pour sortir. 4 Lundi 5 Mai. Lucie. Une douce lumière filtre à travers les rideaux. Je sens la chaleur du soleil se poser sur mon visage comme une caresse. Je me réveille lentement, le sourire aux lèvres, encore bercée par les brumes du sommeil et mes visions nocturnes. J’ai rêvé de ce beau regard noisette toute la nuit. Et c'était fort agréable. Il me fixait comme un prédateur, prêt à sauter sur sa proie pour la dévorer. Il se rapprochait de moi et m’emprisonnait contre son corps, en m’embrassant fougueusement. Exquise sensation. Sa langue explorait ma bouche, pendant que ses mains parcouraient mes formes avant de s’attarder sur mon intimité. J'étais haletante, complètement offerte à cet homme inconnu, mais tellement sexy. C’était le diable en personne, mais je m’en fichais. Je me laissais emporter par la danse de nos corps… Le souvenir de ce songe me laisse dubitative. C’est bien la première fois que je fais ce genre de rêve. Mais ce n’est pas pour me déplaire, bien au contraire. C’est donc dans la bonne humeur que je me lève. Je regarde mon téléphone avec un soupçon d’espoir vite disparu. Pas de nouvelles de ce Davis. Je rêve une fois de lui et ça y est, je me fais des films. Mais le regard de feu qu’il a posé sur moi, c’était quoi ? Bref, Il m'a dit de le rappeler, mais ça serait à lui de le faire, non ? C'est lui le responsable, pas moi ! Bon, en même temps, si je veux récupérer ma voiture et ne rien avoir à payer, va falloir se bouger les fesses. Je déteste ce genre de situation. Si j'avais le caractère de Mélanie, ça serait moins problématique pour moi. Je tourne en rond dans mon petit deux pièces, en me creusant les méninges pour trouver une solution. Et comment je fais moi, sans ma voiture ? D’accord, il y a les transports en commun, mais ce n’est pas mon truc. Je ne suis pas tranquille au milieu de tous ces gens entassés. Un vol est si vite arrivé. Je suis peut-être parano mais ça, je le dois à mes parents. Quand je suis venue travailler sur Paris, ils m’ont tellement mise en garde contre tous les dangers de la capitale que je suis devenue hyper méfiante. L’heure du déjeuner arrive vite et je m’installe sur mon canapé, un plateau-repas posé sur la petite table basse en bois. Mon chat, Gypsie, vient aussitôt s’assoir sur moi et ronronne en me faisant des yeux de merlans frits. Je soupire en le voyant. J’ai vingt-trois ans, je suis seule et j’ai un chat. Ça pue la vieille fille à plein nez. Mon dieu, quelle horreur ! Non, j’ai besoin d’un homme dans ma vie. C’est juste que je n’ai pas encore trouvé celui qui me fera vibrer. Celui pour qui je serais prête à tout donner. Pas seulement mon corps. Comment fait Mélanie pour changer de mecs aussi souvent ? Pour moi, c’est inconcevable. Je suis sortie de mes pensées par la sonnerie de mon téléphone. C’est peut-être Davis ? Non, le numéro affiché ne correspond pas. Je décroche. — Bonjour, Mademoiselle Carmon, c’est le garagiste. Votre voiture est prête, vous pouvez venir la chercher quand vous voulez. Déjà ? Comment ont-ils fait en aussi peu de temps ? Bon, c’est parfait, ça m’arrange. — D’accord, j’arrive. Au fait, combien vous dois-je ? dis-je en m’attendant à une facture salée. — Les frais ont déjà été réglés. Vous ne nous devez rien du tout. — Pardon ? Par qui ? — Un jeune homme que je n'avais jamais vu avant, je n'ai pas retenu son nom. C’est vraiment étrange. Ma voiture est faite en un temps record et en plus, je n’ai rien à payer. Je n’ai pas fait de constat, donc ça ne peut pas être l’assureur. Et qui aurait déjà vu des assurances régler un problème aussi vite? Je m’habille et file la chercher, après avoir appelé un taxi pour m’y conduire. Davis. En rentrant de mon jogging quotidien, je m’affale dans le canapé et allume une clope. Courir me fait un bien fou, ça me permet d’évacuer toute cette tension en moi. D’où sort-elle ? Aucune idée, j’ai toujours eu ce besoin viscéral de me défouler. Mais ce n’est pas toujours suffisant. Alors souvent, je compte sur Bobby, un pote qui sait toujours me trouver ce dont j’ai besoin. Que ce soit en fille ou occasionnellement en substance, il connait parfaitement mes goûts. Cependant, ces temps-ci, je me sens plus fatigué que d’habitude. Pourtant, je dors plutôt bien, mais je n’arrive pas à récupérer correctement. Je crois qu'une lassitude s'est installée. Aucune envie, aucun projet. J’en ai ma claque de cette routine de merde. Mais en même temps, qu’est-ce que je peux faire ? Rien ne m’intéresse hormis le sexe et le plaisir. Alors je m’y plonge jusqu’à m’y noyer, en espérant ne jamais remonter à la surface. Mon portable sonne, je ne reconnais pas les chiffres. Sûrement une de ces filles avec qui je passe une nuit et qui en veulent toujours plus. Je ne sais pas comment elles arrivent à chopper mon numéro. C’est toujours la même chose. Tu passes une nuit de folie et elles s’attendent au mariage le lendemain. Je décroche au bout de la quatrième sonnerie. — Ouais ? réponds-je froidement. — Euh…Bonjour, c’est Lucie…euh…pardon de vous déranger …pour la voiture, du coup je l’ai récupéré au garage et… — Bien, le garagiste a donc tenu sa parole. Voilà qui est parfait, la coupé-je d’un ton beaucoup plus doux, en entendant cette jolie petite voix.
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