Eadlyn
De retour d’une longue journée inattendu d’entraînement et de cours d’Alchimie, d’Astronomie, d’Enchantements et d’Histoire, je retourne dans ma chambre. Mes muscles endoloris protestent à chaque mouvement tandis que je me traîne jusqu’à ma salle de bain. Jodie m’aide à retirer mes vêtements sales avant que Maisie me guide vers la baignoire remplie d’eau chaude parfumée à la cannelle. Un soupir d’aise m’échappe alors que je me glisse dedans. Lily m’apporte un plateau sur lequel trônent une tasse de thé ainsi qu’une tartelette aux fraises et une autre chocolat – banane.
— De quoi tenir jusqu’au dîner, murmure-t-elle d’un ton conspirateur.
Je ris discrètement. Une douce musique retentit dans le fond. Prenant une inspiration, je profite de mon goûter déséquilibré, mais réconfortant, pendant que mes servantes s’affairent autour de moi. Les portes de la salle de bain s’ouvrent sur Mrs. Thompson.
— Il va falloir faire vite, nous n’avons que deux heures devant nous. (Je fronce les sourcils, confuse.) Les délégations des Royaumes d’Yr Alban et de Lloerg ne vont pas tarder à arriver pour les Festivités de Samhain qui vont se dérouler sur plusieurs jours, m’explique-t-elle.
Sur ce, elle frappe dans ses mains afin que nous nous activions. Je m’empresse de finir mon goûter. Cheveux lavés et corps rincé, je sors de la baignoire. Jodie me sèche les cheveux tandis que je revête un peignoir avant de retourner dans la chambre, où je me retrouve nez à nez avec Aden.
— Laissez-nous, ordonne-t-il à mes servantes et Mrs. Thompson qui viennent de sortir de la salle de bain.
Elles s’exécutent sans se faire prier. Aden me retire le fin tissu exposant mon corps nu à sa vue. Mon cœur bondit dans ma poitrine. Sans attendre, il me saisit par les hanches et me porte jusqu’au lit. Il se penche vers moi, se déshabillant rapidement. Il écarte mes cuisses à l’aide de son genou et me pénètre d’un puissant coup de rein. Mes doigts se referment sur les draps doux et frais, tandis que ma tête bascule en arrière.
— Aden…, je gémis.
Le lit craque sous les assauts fougueux et précipités de son corps qui claque contre le mien, alors qu’il me culbute sans Merci. Ses râles rauques et profonds se mêlent aux crépitements du feu dans la cheminée. Je me mords la lèvre inférieure pour étouffer mes cris. Ses doigts s’enfoncent dans la chair tendre de mes hanches. Nos regards se croisent. Du coin de l’œil, je vois une ombre furtive se déplacer dans la pièce. Qu’est-ce que…Je tourne la tête, mais Aden retient mon attention en scellant ses lèvres aux miennes. Mes jambes fermement refermées autour de sa taille, je l’attire à moi et glisse mes mains dans ses cheveux. Nos corps tremblent, sur le point de se laisser absorber par la jouissance.
— Tywysoges…
Son souffle saccadé caresse ma peau. Dans une dernière poussée, il se cambre au-dessus de moi, continuant d’aller et venir en moi, déversant sa semence. Mes muscles crispés voluptueusement, mon corps cramponné au sien, je me perds dans les méandres du plaisir. Après un b****r furtif, il se retire et se laisse rouler sur le côté. Nous nous tournons sur le flanc, face à face, nos regards ancrés l’un à l’autre.
— Comment vous sentez-vous ? me demande-t-il d’une voix rauque, légèrement éraillée.
Je m’étire en grimaçant :
— Un peu endolorie. (Il sourit. Une lueur inquiète parcourt furtivement ses yeux.) Est-ce que tout va bien ? (Il m’embrasse le front et se relève. Je me redresse sur les coudes, confuse. Il revêt ses vêtements à la va vite.) Aden…
— Vous êtes La Clé de la Lumière.
Mon cœur ratte un battement.
— Qu…Quoi ?
Il s’assoit au bord du lit :
— Vous souvenez-vous, hier soir, de la remarque que vous m’avez faite sur la Mer Mystérieuse ?
— Celle derrière laquelle il y a une île qui semble cachée ? je l’interroge, perplexe.
— Oui. Cette île, c'est le Royaume d’Iwerddon, disparu après la Guerre des Quatre Éléments, lors de laquelle il s’est retrouvé opposé aux royaumes de Cymru, Lloerg et Yr Alban. On raconte que cette barrière est renforcée par des créatures mythiques qui hantent les eaux environnantes, et que seule La Clé de la Lumière, descendante directe de la famille Royale Den Loch, saura les amadouer et d’ouvrir la barrière qui protège l’île.
— D’accord, mais qu’est-ce que cela… (Je m’interromps. Un frisson me parcourt l’échine alors que la vérité s’impose à moi.) Impossible, je souffle.
Je bondis du lit et commence à arpenter la pièce tout en enfilant ma robe de chambre. Des images de la clairière me reviennent à l’esprit, se mêlant à une phrase lointaine, tel un murmure incessant. Yr Allwedd. La Clé de la Lumière. Je me rassois. Aden me prend les mains.
— Comment est-ce possible ? Mon père est un Cymurien, il est né et a vécu toute sa vie ici. Et ma mère…
— Votre mère était enfant de changelins dont les parents, vos grands-parents, étaient originaires du Royaume d’Iwerddon, m’interrompt-il avec douceur. Quant à Tom Calden, il n’est ni plus ni moins que votre père adoptif. Votre père biologique était Lancelot d’Iwerddon, fils de la Princesse Ygritte, victime collatérale de cette guerre impitoyable, tout comme son fils, d’une certaine manière.
Je ferme les yeux. Aden reste parfaitement immobile et silencieux le temps que je digère l’information.
— Il faut que j’aille au village, maintenant.
— Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, objecte-t-il, ni le bon moment.
— Je suis d’accord.
Je tressaute. Une femme à la beauté envoûtante, presque inhumaine, se tient devant nous. Elle s’approche, une fiole dans chaque main.
— Les Festivités pour Samhain ne vont pas tarder à commencer. Pendant trois jours, toutes les barrières établies quelles qu’elles soient vont être levées, ce qui signifie notamment que rien n’empêchera les Strigoï de se jeter sur les villages humains si l’envie leur prend. (Je frissonne.) Votre entrevue avec votre père devra donc attendre, ajoute-t-elle en me tendant l’une des fioles. (Je l’attrape machinalement.) Par ailleurs, étant donné le retard que vous avez pris en grandissant dans l’insouciance de votre statut jusqu’à présent, vous allez avoir beaucoup à apprendre en peu de temps.
— Excusez-moi, mais qui êtes-vous ? je la questionne.
— Ceridwen. (Elle ponctue sa réponse d’une révérence théâtrale, puis donne l’autre flacon à Aden.) Quant aux raisons de ma présence ici, ce n’est pas votre problème. Contentez-vous de boire cette potion et vous mettre à la tâche. Le plus vite vous concevrez un héritier, le mieux ce sera.
Sans me laisser le temps de répondre, elle sort de la pièce. Aden ouvre sa fiole et l’avale d’une traite. Je le regarde faire avant de l’imiter. À peine ai-je le temps de la reposer qu’il me tire à lui. D’un geste habile, il inverse nos positions, son corps entre mes jambes.
— Pourquoi parle-t-elle de concevoir un héritier ? je le questionne.
— Parce que… (Un bras de chaque côté de ma tête, il se penche vers moi. Mon corps frémit au contact de sa verge dressée contre mon bourgeon de chair.) C’est le devoir de tout futur Roi et toute future Reine de concevoir pour assurer la succession.
*
Aden
Nos ébats improvisés terminés, je fais revenir Jodie, Maisie et Lily pour qu’elles aident Amanda à se préparer rapidement. Pendant ce temps. Je fais un crochet par mes appartements pour troquer ma tenue contre un costume : pantalon rouge bordeaux, accompagné d’une veste blanche ornée de boutons et d’épaulettes dorées. Une ceinture assortie au pantalon et des gants blancs viennent compléter l’ensemble.
Dans le couloir, je retrouve Amanda dont la prestance me laisse bouche bée. Mes yeux courent le long de sa fine silhouette revêtue d’une robe blanche aux broderies dorées, assortie à mon costume. Les courtes manches recouvrent délicatement ses épaules avant de se croiser sur son dos nu. Ses cheveux ondulés tombent en cascade autour de son visage, rendu plus lumineux grâce au maquillage.
— Trouvez-vous que cela fait trop ? demande-t-elle, un sourire amusé aux lèvres.
— Pas le moins du monde. (J’attrape sa main et la porte à mes lèvres sans détacher mon regard du sien.) Vous êtes vraiment ravissante. (Elle accueille mon compliment d’un signe de tête, les joues légèrement rougies. Les trompettes annonçant le début des festivités retentissent. Redressant le dos, je lui offre mon bras qu’elle saisit avec assurance.) Prête ?
— Oui.
Nous nous dirigeons vers la Salle de Bal, où plusieurs sièges et deux trônes ont été ajoutés sur l’estrade, aux côtés de ceux occupés par mes parents.
Le héraut annonce notre entrée :
— Leurs Altesses Royales le Prince Aden de Cymru et la Princesse Amanda d’Iwerddon.
Amanda frémit à l’entente de son titre complet. Tous s’écartent en une révérence à notre passage. Quelques rires et murmures atteignent mes oreilles tandis que nous nous frayons un chemin jusqu’à l’estrade. Nous saluons mes parents, puis prenons place sur nos trônes. A peine sommes-nous installés que la délégation de Lloerg, menée par le Roi Peter et la Reine Meredith, fait son entrée. Leurs enfants le Prince Skandar et la Princesse Alyssa suivent leurs parents. Mon père se lève pour les accueillir.
Son homologue et lui échangent une poignée de main formelle :
— En mon nom et ceux de mon épouse, la Reine Celina, de mon fils le Prince Aden et de sa cavalière la Princesse Amanda d’Iwerddon, je vous souhaite la bienvenue à la Cour de Cymru.
— Au nom de mon épouse la Reine Lagertha, de mes hommes et de mes enfants, le Prince Skandar de Lloerg et la Princesse Alyssa de Lloerg, je vous en remercie.
Les applaudissements s’élèvent aux quatre coins de la salle. Mon père s’écarte, invitant le couple royal et leurs enfants à prendre place sur les sièges qui leur sont réservées. Le reste de la délégation se mêle aux convives, non sans jeter quelques regards curieux à Amanda. La Princesse Alyssa, de trois ans sa cadette, se penche vers elle, visiblement impressionnée par la présence de l’héritière du Royaume Perdu.
Les trompettes résonnent à nouveau. Le héraut annonce l’arrivée de la délégation d’Yr Alban, composée de chefs de clans, elle est menée par le Roi Jamie, cousin de mon père, accompagné de son épouse, la Reine Gaya, cousine de ma mère, et de leur fille la Princesse Anastasia, qui me lance un regard pétillant. Mon père répète le même discours, mais cette fois, son cousin et lui échangent une accolade chaleureuse. La famille royale se joint à nous tandis que le reste de la délégation se fond dans la foule.
Anastasia prend place à mes côtés. Ses yeux balayent l’assemblée devant nous jusqu’à se poser sur mon frère, légèrement en retrait aux côtés de notre sœur.
— Je vois que votre mère continue de mépriser le fils naturel de votre père, constate-t-elle. (Jetant un coup d’œil furtif en direction de nos pères, elle ajoute :) Je compte bien utiliser toutes mes cartes pour que Nolan soit légitimisé tout comme l’a été la Princesse Shailene.
— Je vois que vous ne l’avez toujours pas oublié, je la taquine.
— Jamais.
Je ris discrètement. Les premières notes de musique résonnent. Sans attendre la moindre invitation, Anastasia se lève et marche droit vers mon frère, déterminée. Je ne peux m’empêcher de lever les yeux au ciel, amusé par son attitude résolue, bien trop franche pour une jeune fille de son rang.
— Votre cousine ne semble pas avoir froid aux yeux, remarque Amanda.
Je tourne la tête vers elle, une main tendue dans sa direction.
— Me feriez-vous l’honneur de cette danse ?
Elle incline la nuque :
— Avec plaisir.
Sa main dans la mienne, je la guide sur la piste où nous ouvrons la valse. Une petite foule d’admirateurs et de curieux se forme autour de nous alors que nous tournoyons avec grâce et légèreté à travers la salle, ses pas parfaitement synchronisés avec les miens, comme si nous ne faisions qu’un. D’un geste furtif de la main, j’invite les autres couples à nous rejoindre.
— Comment je m’en sors ? me demande ma cavalière, la voix légère.
— Comme une véritable princesse.
— Ça me rassure. J’avais peur de faire des faux pas, admet-elle en riant.
Je rapproche ma bouche de son oreille tout en continuant de la faire tournoyer :
— Vous avez ça en vous. Ne l’oubliez pas.
La musique s’arrête. Je lui b***e la main, mon regard ancré au sien. Les musiciens enchaînent sur une volte puis un quadrille. Nous nous prêtons au jeu, imités par mon frère et la Princesse Anastasia, ainsi que Shailene et le Prince Skandar. Les rires et les conversations des convives se mêlent aux notes entraînantes, tandis que nous tournons autour des autres couples. La musique s’achève à nouveau sous une pluie d’applaudissements. Amanda et moi échangeons une révérence.
Shailene s’empresse de nous rejoindre, joviale :
— Amanda, permettez-moi de vous présenter ma demi-sœur, la Princesse Shailene. Shailene, je te présente…
— La Princesse Amanda, ma demi-sœur. (Elles exécutent une courbette respectueuse. Shailene la prend par les mains.) Venez. Allons danser.
Amanda me jette un coup d’œil interrogateur. J’incline la tête en signe d’approbation. Le Prince Skandar et un jeune homme de la délégation d’Yr Alban les accompagnent, suivis par Nolan et Anastasia.
Le Roi Jamie profite de ce moment pour me prendre à part.
— Je sais ce qui se trame, dit-il d’une voix grave.
— Je ne vois pas où vous voulez en venir.
Un sourire de connivence se dessine lentement sur son visage :
— Vos projets pour le Royaume d’Iwerddon. Il est prévu que vous en détruisiez les barrières pour le livrer à la Merci des Entités Divines afin qu’elles obtiennent leur vengeance.
— Roi Jamie…
Il m’interrompt d’un geste de la main :
— Ne vous en faîtes pas. Je soutiens entièrement ce projet. Les Iwerddoniens méritent de payer pour ce qu’ils ont fait. Vous pouvez compter sur moi pour allier toutes les forces nécessaires aux vôtres lorsque l’heure viendra. En échange, je veux que votre frère soit légitimisé afin de pouvoir épouser ma fille et que leur première-née soit promise à votre premier-né. (J’acquiesce, conscient de la logique et de l’importance de cette alliance. Ses yeux s’arrêtent sur le Roi Peter et son épouse, en train de discuter avec leur fille.) Quant au reste, étant donné notre lien de parenté, je ne vais pas vous mentir : j’ai l’intention de me débarrasser de ces deux-là.
J’inspire lentement, le cœur battant à tout rompre.
— Sous quel prétexte ?
— Ils tiennent trop des Brigid. (Je me retourne, surpris. Morrigan s’approche d’un pas lent.) La famille royale de Lloerg ne s’est jamais endurcie depuis Y Dydd Melltigedig. Ils ont fait tout leur possible pour rester proche des humains dans l’espoir d’être à nouveau des leurs, un jour. Cela les a trop ramollis et il y a peu de chances que la situation s’améliore.
— Et que comptez-vous faire ? je demande, une pointe ironique dans la voix. Tous les éliminer ?
— Seulement les parents, répond Morrigan. Leur fille un peu limitée sera mariée au fils, également un peu limité, de l’un des clans d’Yr Alban qui soutiennent notre cause. Cela a déjà été négocié.
— Et leur fils ?
Une lueur complice parcourt ses yeux tandis que son regard se pose sur l’intéressé, en train de danser avec ma sœur au milieu d’autres couples en riant.
— Je trouve qu’ils forment un très beau couple, non ?
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