II

2856 Mots
IIAélys, dès les jours suivants, commença de suivre une règle protocolairement établie. Le matin, après la messe entendue dans la chapelle du palais, elle prenait sa leçon d’équitation avec l’écuyer du palais, puis faisait, seule, une promenade dans les jardins. Après quoi, elle travaillait à quelque ouvrage d’aiguille, en la compagnie de Mme de Sucy, jusqu’au moment du déjeuner, toujours pris en tête à tête avec le prince. Le repas terminé, Lothaire l’emmenait dans le salon de musique, la faisait jouer seule ou avec lui, puis ensuite chanter. Quand il la quittait, elle avait quelques moments de solitude, jusqu’à la promenade en voiture où l’accompagnaient toujours la dame d’honneur et le comte Sareczy, auxquels se joignait parfois soit la comtesse Brorzen, soit la comtesse Sareczy. Au retour, on servait le café chez la princesse Jutta, dans le jardin d’hiver ou dans quelque pavillon des jardins. Après quoi, Aélys se retirait chez elle, lisait, dessinait ou faisait de la musique. Puis le dîner était servi dans la grande salle à manger aux lambris sculptés comme une dentelle. Le prince et sa femme le prenaient en compagnie de la princesse Jutta et des personnages de leur suite. Tous, ensuite, passaient dans le salon des Nymphes. Le prince, parfois, jouait au billard ou aux échecs ; le plus souvent, après quelques instants de conversation, il se retirait dans son appartement. Aélys n’osait l’imiter. La princesse Jutta, très aimable, la retenait. On lui demandait de se faire entendre au piano et de chanter. Mais, sur ce dernier point, elle avait reçu interdiction formelle de Lothaire. – Refuse, car je ne veux pas que tu abîmes ta voix, lui avait-il déclaré. Aélys se demandait quelle influence défavorable pourrait avoir sur cette voix déjà bien formée le fait de chanter pendant une demi-heure, de temps à autre, dans le salon des Nymphes. Mais comme il lui importait peu d’opposer un refus à la princesse Jutta, qui lui demeurait toujours antipathique, elle n’avait pas cherché à connaître le motif de cette volonté de Lothaire et s’y conformait strictement. Ce programme quotidien de la journée à Sôhnthal subissait parfois quelques variations, soit par une réception intime ou officielle, un concert donné dans la galerie Dorée, ou bien par les chasses qui étaient la distraction favorite du prince Lothaire. Une douzaine de jours après son installation à Sôhnthal, Aélys assista à l’une d’elles. Son éducation d’écuyère n’étant pas terminée, elle la suivait en voiture. La bonne comtesse Sareczy, sur sa demande, avait pris place près d’elle. Mais l’hallali impressionna si fortement la jeune princesse qu’elle donna l’ordre au cocher de retourner en arrière et d’aller attendre le retour du prince et de sa suite près du pavillon de chasse, où était préparé le déjeuner. Des tables se trouvaient dressées dehors, dans l’espace découvert qui s’étendait devant le petit bâtiment, et une autre pour les princes à l’intérieur de celui-ci, dans la salle pavée de marbre blanc et noir dont les murs boisés de vieux chêne étaient ornés de trophées cynégétiques. Aélys, la comtesse Sareczy et la dame d’honneur s’assirent à l’entrée du pavillon, sur un banc où les valets avaient disposé de moelleux tapis. La conversation languissait, la jeune princesse faisant visiblement effort pour la continuer. La comtesse Sareczy, parfois, jetait sur elle un coup d’œil de discrète compassion. Combien elle était délicieuse, pourtant, cette princesse Aélys ! Quelle adorable vision de jeunesse et de charme, dans cette robe de voile rose, avec la grande capeline de tulle blanc sous laquelle paraissait plus délicat ce visage ravissant, tout encadré des boucles légères aux tons d’or ardent !... Mais il n’y avait en ce moment, sur l’expressive physionomie, que mélancolie pensive – et comme une sorte d’inquiétude. La vieille dame étouffa un soupir en pensant : « Pauvre belle petite créature ! Quelle pitié ! » Des sons de trompes, des galops de chevaux annoncèrent l’arrivée des chasseurs. En tête apparurent le prince et la comtesse Brorzen. Lothaire sauta à terre et s’approcha de Sidonia pour l’aider à descendre. Aélys s’était levée, faisant quelques pas au-devant de son mari. Rapidement, son regard enveloppait celui-ci et la comtesse, dont le costume de drap sombre mettait en valeur la beauté blonde. Sidonia semblait radieuse, et une lueur de triomphe s’alluma dans les yeux qu’elle dirigeait vers Aélys. – T’es-tu trouvée fatiguée, mon enfant ? Lothaire se tournait vers sa femme, avec ce petit sourire de douceur railleuse qui lui donnait envie de bondir de colère, surtout quand il y joignait ce genre d’appellation « mon enfant, petite fille », dont il se servait maintenant souvent. Elle répondit sèchement : – Pas du tout... Mais le spectacle de cette pauvre bête à bout m’était trop pénible. – Voilà une sensibilité bien fâcheuse ! Il faudra essayer de t’en corriger. – Je crains que ce ne soit impossible. – Mais si, tu t’y feras... Nous avons eu là une fort belle chasse, n’est-ce pas, Sidonia ? – Parfaite, Altesse ! Le regard de la belle Brorzen s’assombrissait. Le prince venait de prendre la main d’Aélys, une petite main rétive qu’il glissait impérieusement sous son bras. – Déjeunons, maintenant. J’ai fort grand appétit. Et toi, Aélys ? – Non, je n’ai pas faim, dit-elle du même ton froid. Il jeta sur elle un rapide regard, qui semblait chercher à pénétrer le mystère de cette petite figure fière et frémissante. Puis il emmena la jeune femme jusqu’au pavillon, où les rejoignit presque aussitôt la princesse Jutta, toujours intrépide écuyère, en dépit de son âge. Les Brorzen, père et fille, étaient invités à prendre place à la table princière. Aélys eut le désagréable voisinage du comte, dont l’empressement de plus en plus doucereux et les regards trop admirateurs n’étaient pas fait pour diminuer l’aversion qu’il inspirait. En face d’elle, la jeune princesse voyait Lothaire s’entretenir constamment avec Sidonia, sa voisine de gauche. Il semblait en verve, montrait une gaieté railleuse, plaisantait aimablement avec la comtesse, dont les yeux bleus, sans cesse levés sur lui, témoignaient d’une amoureuse adulation. Pas une fois, il n’adressa la parole à la toute jeune femme vêtue de rose qui, d’un air sérieux et froid, échangeait quelques mots avec le comte Brorzen ou la princesse Jutta, en dérobant sous les longs cils foncés un peu baissés les éclairs jaillis de ses merveilleuses prunelles fauves, trop expressives. Le repas terminé, le comte Brorzen quitta le pavillon pour donner l’ordre d’amener les chevaux. La princesse Jutta sortit la première. Lothaire, près de la porte, s’attardait à causer avec Sidonia. Aélys cherchait du regard son ombrelle et se souvint de l’avoir déposée dans la pièce voisine, aménagée en salon de repos. Elle y entra, prit l’ombrelle et s’approcha d’une porte ouverte. Devant elle s’ouvrait une allée sinueuse... Et tout à coup lui vint le désir de s’enfoncer dans la solitude de la forêt. Oui, être seule, un peu de temps... fuir cet entourage qui, à si peu d’exceptions près, ne lui inspirait qu’indifférence ou aversion... ne plus voir, surtout, ce Lothaire et cette comtesse Brorzen... Une petite main nerveuse serra violemment le manche de l’ombrelle. Au coin des lèvres d’un rose délicat se formait un pli d’amertume et de souffrance... Puis, avec une légèreté qui rappelait le petit elfe de Croix-Givre, Aélys bondit hors du pavillon et s’enfonça dans l’ombre fraîche de l’allée. On la chercherait, dans un instant... quand viendrait pour elle le moment de remonter en voiture. Tant pis ! Elle avait une irrésistible envie de liberté, comme une prisonnière longtemps tenue en geôle. Il n’y avait que douze jours, pourtant, qu’elle vivait à Sôhnthal... Douze jours passés dans la contrainte, dans le souci constant de ne rien laisser voir de ses impatiences, de ses froissements, de la souffrance mêlée de colère qui la serrait au cœur, surtout quand, en sa présence, Lothaire manifestait ses sentiments à l’égard de Sidonia. Pourtant, elle savait bien qu’il l’aimait, depuis longtemps, depuis l’enfance. Elle savait à l’avance qu’Aélys de Croix-Givre ne serait que l’épouse supportée par déférence pour le vœu paternel. Aussi était-il fort raisonnable d’éprouver tant de révolte devant la désinvolture avec laquelle Lothaire affichait son indifférence pour sa femme. Elle devrait même se trouver satisfaite d’une telle attitude, elle qui avait repoussé avec tant d’indignation les témoignages de fausse tendresse qu’il semblait prêt à lui donner... comme à Croix-Givre. Oui, ainsi, du moins, il était franc... et elle aimait mieux cela. De même, tout à l’heure, quand il se fâcherait contre elle, pour cette escapade qui allait faire scandale dans ce petit cercle de cour, si formaliste. Elle préférait de beaucoup les plus durs reproches à cette sorte d’indulgence railleuse qu’il adoptait à son égard, et surtout à certaine douceur à la fois brûlante et veloutée, parfois aperçue dans son regard, fugitive mais si intense qu’elle en demeurait longtemps frémissante, saisie d’un effroi auquel se mêlait la plus troublante émotion. « Qu’il se fâche !... qu’il se fâche donc ! » songeait-elle en secouant énergiquement sa tête bouclée, comme elle le faisait aux jours de son enfance, quand elle échappait à la surveillance de dame Véronique – tel cet après-midi d’été où elle avait subrepticement gagné le Château-Vert « pour voir le petit prince ». D’ailleurs, elle avait un but à cette promenade en forêt. Ce matin, en venant en voiture au pavillon, elle avait aperçu non loin de celui-ci une maison de garde. Or, elle voulait la retrouver pour s’informer près de ses occupants de l’endroit où habitaient les Heller. Car il ne fallait pas songer à s’adresser au prince pour obtenir ce renseignement. Elle se souvenait trop bien de la façon dont il accueillait déjà autrefois les moindres allusions aux humbles serviteurs traités par lui avec le plus dur mépris. Mais que les chemins s’enchevêtraient, dans cette forêt ! C’était bien pire qu’à Croix-Givre... Vraiment, n’allait-elle pas se perdre dans ce dédale ? Au bout de quelque temps, elle dut s’avouer que ce résultat était atteint. Elle ne se rendait plus du tout compte dans quelle direction pouvait se trouver la petite maison forestière, et pas davantage le pavillon de chasse. « Je finirai toujours bien par sortir de cette forêt, d’un côté ou de l’autre, ou par rencontrer quelqu’un pour me remettre en bon chemin, pensa-t-elle philosophiquement. Là-bas, « on » sera furieux, mais pas inquiet. Je n’ai donc qu’à marcher tranquillement, au hasard. » Mais aucune possibilité de renseignement ne s’était encore présentée, quand le jour commença de décliner, l’ombre d’envahir la forêt. Aélys, si bonne marcheuse qu’elle fût, se sentait fort lasse et devenait un peu inquiète. L’approche de la nuit changeait l’aspect de la forêt. Aélys se souvenait que Lothaire avait parlé de bêtes sauvages qui y vivaient encore. Le moindre bruit, maintenant, lui donnait un petit frisson. Elle sentait en outre, sur ses épaules couvertes d’une robe légère, la tombée de la fraîcheur nocturne. Cette partie de la forêt, creusée de ravins, parsemée d’exhaussements rocheux dus à quelque lointain bouleversement du sol, présentait pour la marche de grandes difficultés. L’agilité d’Aélys avait raison d’obstacles qui eussent paru à d’autres insurmontables ; mais la jeune femme se demandait avec effroi comment, dans l’ombre envahissante, elle allait pouvoir continuer d’avancer. Depuis un moment, elle entendait un bruit familier pour elle : celui que produit un torrent dans le grand silence des bois. Bientôt, en effet, elle se trouva au bord d’une rivière encaissée entre deux berges rocheuses couvertes d’arbrisseaux et de ronces. Un vieux pont étroit, habillé de lierre, était jeté d’un bord à l’autre. Et au-delà se dressait une grande maison noire, élevée d’un étage, qui s’accolait à une tour carrée aux fenêtres garnies de barreaux de fer. Derrière cette demeure s’élevait une sombre falaise à pic, couronnée par une épaisse végétation forestière. Ce qui restait encore de jour permit à Aélys de distinguer d’un coup d’œil ces détails. Elle pensa avec un soudain espoir : « Peut-être ce logis est-il habité ? » Et, très vite, elle s’engagea sur le pont. Mais elle s’aperçut presque aussitôt que l’extrémité de celui-ci était fermée par une grille. Vainement, elle essaya de l’ouvrir. Alors, elle appela, à plusieurs reprises. À un moment, elle eut la vision d’une silhouette derrière les grilles d’une fenêtre du rez-de-chaussée. Mais la porte cloutée de fer rouillé demeura close. Aélys revint sur ses pas. En dépit de son énergie, le découragement la gagnait. Maintenant, il ne fallait plus songer à errer dans la forêt. Mieux valait s’installer pour la nuit non loin de cette demeure. Au matin, elle essaierait encore de retrouver sa route. À l’instant où elle prenait cette résolution, son nom retentit, répété à plusieurs reprises : « Aélys ! Aélys !... » Enfin, on la cherchait ! Bien vite, elle cria, le plus fort qu’elle put. Et, peu après, Lothaire bondissait hors de la futaie jusqu’à la jeune femme. Il la saisit avec une sorte de violence, en disant d’une voix basse et comme frémissante – de colère, pensa Aélys, malgré tout impressionnée de se sentir seule avec ce terrible prince qui avait le geste si prompt pour le châtiment : – Pourquoi es-tu partie ? Que faisais-tu ici ? Aélys essaya de se dégager de ces bras qui l’enserraient si fort que la respiration lui manquait presque. – Je voulais faire un petit tour dans la forêt... et je me suis perdue... Laissez-moi... vous me faites mal ! Elle rejetait en arrière, d’un mouvement brusque et farouche, son visage qu’effleurait un souffle ardent. Ses yeux rencontrèrent ceux de Lothaire, qui semblaient étinceler dans l’ombre crépusculaire. – Voilà une explication bien courte pour une pareille escapade ! Tu n’as donc pas songé qu’on te chercherait... qu’on s’inquiéterait ? Quel habile comédien que ce Lothaire ! Comme il savait changer les intonations de sa voix... jusqu’à leur donner les apparences de l’émotion ! Heureusement, elle ne s’y trompait plus, maintenant ! – Qu’on me chercherait, oui... mais je savais bien que l’inquiétude n’existerait pas. Et j’ai eu tout à coup le grand désir de me trouver seule dans la forêt... comme à Croix-Givre. Certainement, j’ai eu tort d’y céder... – Tu n’avais qu’à me faire part de ce désir, et je t’aurais donné un guide discret, qui t’aurait laissé l’illusion de la solitude. Mais j’espère que la leçon te servira... encore qu’elle ait pu être plus grave, car je t’ai retrouvée relativement assez vite... Mais tu parais grelotter ? Viens vite !... Nous ne sommes pas loin du palais, heureusement ! Comme il avait desserré un peu son étreinte, Aélys en profita pour s’écarter. Elle se mit à marcher près de lui, en refusant le bras qu’il lui offrait. Mais, bientôt, elle dut lui demander de ralentir le pas, car elle se sentait exténuée par sa précédente marche de plusieurs heures dans la forêt. – Oui, je vois cela, tu n’en peux plus. Eh bien ! alors... Avant qu’Aélys eût pu prévoir son dessein, il l’enlevait entre ses bras et l’emportait sans écouter ses protestations, en courant presque dans les sentiers où il se dirigeait avec une complète sûreté, puis dans les jardins, tout proches en effet. Quand il fut en vue du palais, il mit la jeune femme à terre et, sans un mot, se dirigea avec elle vers l’aile des Princesses. Au seuil du salon vert se tenait Mme de Sucy qui, à la vue d’Aélys, fit un grand geste d’action de grâces. – Veillez à ce que la princesse soit promptement réchauffée, madame, car la fraîcheur de la forêt paraît l’avoir pénétrée... Soigne-toi bien, Aélys. Je te dispense d’assister au dîner, ce soir. Sur ces mots, Lothaire prit la main de sa femme, l’effleura très rapidement de ses lèvres et se dirigea vers son appartement. – Altesse... quelle angoisse ! quelle aventure ! dit la dame d’honneur avec un accent dramatique... trop dramatique, jugea instantanément Aélys. – Je regrette d’avoir occasionné quelque dérangement, répliqua la jeune femme d’un ton froid, tout en entrant dans le salon déjà éclairé, dont la tiédeur parfumée lui donna un frisson de bien-être. – Un dérangement ! Dites un bouleversement, Altesse ! Pensez donc, lorsqu’on vous a cherchée en vain ! Le prince était si... si contrarié... si terriblement contrarié... Quand je l’ai vu partir lui-même à la recherche de Votre Altesse, j’ai tremblé... Un regard discrètement inquisiteur scrutait la physionomie fatiguée, altérée de la jeune princesse. Avec la même froideur polie, Aélys répondit : – Je vous remercie de votre intérêt, madame. Mais cette petite aventure – qui était un enfantillage de ma part, je le reconnais – s’est heureusement bien terminée. Remercions-en la Providence qui m’a épargné l’épreuve de passer une fort pénible nuit dans cette forêt inconnue. – Étonnante... absolument étonnante pour la présence d’esprit, la maîtrise de soi, cette petite jeune femme ! disait peu après la dame d’honneur à la princesse Jutta et au comte Brorzen, en leur rendant compte, avant le dîner, du retour d’Aélys. Il paraît bien certain que le prince lui a fait des reproches probablement très durs, mais elle n’en a rien laissé paraître... Sidonia, qui se trouvait présente à l’entretien, dit entre ses dents : – Lui en a-t-il fait ?... Qui sait ? La princesse Jutta se récria : – Comment, s’il lui en a fait ? Tu ne penses pas qu’il ait laissé passer une telle escapade, vraiment inouïe, sans traiter cette jeune folle comme elle le méritait ? Nous le connaissons trop bien pour imaginer le contraire ! – Je pense... je pense qu’elle est abominablement jolie... Sidonia se redressait, les yeux sombres, la bouche tremblante. – ... Je la regardais, pendant le déjeuner... Je me disais que, dès qu’elle le voudra, elle prendra l’homme le plus difficile... Peut-être l’indifférence du prince Lothaire n’est-elle que feinte ? Voyez comme il est parti promptement à sa recherche ! – Ceci est assez naturel. Il ne pouvait guère agir autrement, songez-y, mon enfant. – Ah ! c’est que je la hais tant ! Et je la crains... je vous dis que je la crains ! murmura Sidonia avec un accent d’âpre diversion. En entrant quelques instants après dans le salon des Nymphes où venait d’apparaître son neveu, la princesse Jutta s’informa discrètement d’Aélys. Lothaire répondit avec un léger sourire d’ironie : – La voilà rentrée au bercail... Cette petite dryade avait sans doute la nostalgie de la forêt. Maintenant, il lui faut du repos, car je l’ai trouvée exténuée. Aussi ne la verrons-nous pas ce soir parmi nous. À l’oreille de son père, qui se trouvait en ce moment près d’elle, Sidonia murmura : – Cette indulgence n’est pas naturelle chez lui ! Après une incartade aussi impardonnable !... À quoi le comte répliqua : – Mais qui te dit que cette incartade est pardonnée ? Qui te dit que si elle ne paraît pas au dîner ce soir, ce n’est point parce qu’elle est punie, comme une enfant, ainsi que paraît vouloir la traiter Son Altesse ? Sidonia hocha la tête. Elle ne paraissait pas convaincue. Mais elle se rasséréna un peu au cours du repas en remarquant l’humeur tour à tour sombre et mordante du prince, qui faisait présumer un v*****t mécontentement. Et elle se consola un peu de ne recevoir de lui pas même un regard, ce soir, en pensant à la répercussion qu’aurait cette humeur si redoutée sur la jeune coupable – la trop belle coupable.
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