LES NOCES DE LA MAFIA

POINT DE VUE DE DANIELA La journée a encore été longue, et je traîne mes pieds dans la rue déserte en me demandant ce que j’ ai bien pu faire dans une autre vie pour mériter ce genre de routine . Serveuse, baby - sitter, dog - sitter, caissière ... Si un jour on me donne une médaille pour avoir tout essayé, je la mériterai sans hésiter . En resserrant mon manteau contre moi, je peste intérieurement contre ce fichu vent glacial . Le genre de vent qui vous donne l’ impression d’ être dans un congélateur géant . Je lève les yeux vers les étoiles, comme si elles allaient me répondre . Daniela : Un peu de répit, s’ il vous plaît ? Mais non, rien . Elles brillent là - haut, indifférentes, comme si elles me disaient : « Débrouille - toi, ma grande . » Je m’ arrête devant une vitrine et jette un coup d’ œil à mon reflet . Mes cheveux bruns en bataille forment une couronne sauvage autour de mon visage . Mes yeux noisette pétillent encore, malgré la fatigue, et mes lèvres pleines esquissent un sourire moqueur . Daniela : Pas trop mal pour quelqu’ un qui vient de survivre à une horde de clients horribles . Mon regard descend sur mon corps . Mes formes généreuses sont toujours là, bien visibles, même sous mon manteau . Je soupire . Parfois, elles attirent un peu trop l’ attention, mais bon, ce n’ est pas comme si je pouvais les laisser dans un placard avant de sortir . Je reprends mon chemin et arrive enfin devant mon immeuble . C’ est vieux, c’ est délabré, mais c’ est chez moi . Je farfouille dans mon sac pour trouver mes clés . Ces fichues clés... Je finis toujours par perdre trois minutes à les chercher . Quand elles finissent par apparaître, je pousse un cri de victoire . Daniela : Ah - ha ! Vous ne m’ aurez pas ce soir ! En entrant, je ferme la porte derrière moi et balance mes chaussures dans un coin . Mon sac atterrit sur la chaise bancale de la cuisine . J’ allume la lumière, et le spectacle habituel s’ offre à moi : un appartement minuscule, des meubles d’ un autre siècle, et des murs qui auraient bien besoin d’ un coup de peinture . Mais c’ est mon petit royaume, et je m’ en fiche si ça ne ressemble pas à un palace . Je me dirige vers la salle de bain, laissant une traînée de vêtements derrière moi . Daniela : Daniela, tu devrais être plus ordonnée, dis - je en imitant la voix de ma défunte mère . Une petite pique d’ émotion me traverse, mais je la repousse . Pas le moment pour ça . Sous la douche, l’ eau chaude est une bénédiction . Je ferme les yeux et laisse mes pensées vagabonder . Parfois, je me demande comment j’ ai fait pour arriver là . Perdre mes parents à 19 ans a été une claque monumentale . Ils étaient tout ce que j’ avais . Pas de famille proche sur qui compter, à part Mia, ma cousine . Et encore, à l’époque, elle vivait déjà en Italie, à des milliers de kilomètres de moi . J’ai dû tout gérer seule. L’ héritage, les factures, les responsabilités . Pas d’ université pour moi, juste une longue série de petits boulots . Mais malgré tout, je suis encore debout . Oui, la vie m’ a mis des coups, mais moi, je riposte . Toujours . Daniela : Allez, Danila, tu es une survivante, je murmure en sortant de la douche . En enfilant mon vieux pyjama préféré, je me sens déjà mieux . Je prépare un bol de céréales – mon repas de championne – et m’ installe sur mon canapé . La télé est allumée sur une série idiote, mais ça me va . Je ris toute seule à une blague idiote, et pour un instant, j’ oublie les galères . Puis mon téléphone vibre sur la table basse . Je tends la main, et en voyant le nom de Mia s’ afficher, un sourire illumine mon visage . Mia est la seule famille qu’ il me reste, et nos conversations, même tardives, sont toujours un rayon de soleil dans ma journée . Daniela : « Mia ! » je décroche, pleine d’ entrain . « Qu’ est - ce que tu fais debout à cette heure ? » Elle rit doucement de l’ autre côté . Mia : « Dany ..… Je voulais te parler . » Je fronce les sourcils . Son ton est différent, presque hésitant, et ce n’ est pas dans ses habitudes . Daniela : « Hé, qu’ est - ce qui se passe ? T’ as l’ air bizarre . Tout va bien ? » Mia : « Oui, oui, tout va bien ..… enfin, je crois . » Elle inspire profondément avant de continuer . « Écoute, j’ ai une grande nouvelle à t’ annoncer . » Je me redresse sur le canapé, intriguée . Daniela : « Je t’ écoute . Vas - y, lâche le morceau . » Mia : « Je vais me marier . » Je reste figée, ma cuillère de céréales suspendue en l’ air . Daniela : « PARDON? Tu vas quoi ? » Mia : « Me marier, » répète - t - elle avec un petit rire, mais je détecte une pointe de nervosité dans sa voix . Je cligne des yeux, essayant de comprendre . Daniela : « Attends une seconde . Tu es sérieuse ? Toi, Mia, celle qui réfléchit trois semaines pour choisir une couleur de vernis, tu te maries ? Avec qui ? Pourquoi je ne savais pas que tu étais en couple ?! » Elle éclate d’ un rire cristallin, mais je sens qu’ elle attendait ma réaction avec un peu d’ appréhension . Mia : « Oui, je suis sérieuse ! Il s’ appelle Pablo, et ..… il est merveilleux . Tu vas l’ adorer, je te le promets . » Je reste silencieuse une seconde, le temps de digérer l’ information . Daniela : « Bon, d’ accord . Félicitations ! Mais sérieusement, Mia, c’ est quoi cette histoire de mariage surprise ? Je ne savais même pas que tu fréquentais quelqu’ un sérieusement . » Mia : « Parce que .… » Elle hésite, et je peux presque la voir se tordre une mèche de cheveux, ce qu’ elle fait toujours quand elle est nerveuse . Mia : « J’ attendais d’ être sûre avant de t’ en parler . Mais Dany, je suis tellement heureuse . Pablo est l’ homme parfait . » Je ne peux m’ empêcher de sourire à sa voix emplie de bonheur . Daniela : « Eh bien, si tu es heureuse, c’ est tout ce qui compte . Félicitations, Mia . » Elle rit doucement, mais son ton se fait plus sérieux . Mia: « Merci, Dany . Mais il y a une chose ..… Je veux que tu viennes en Italie pour m’ aider à organiser le mariage . » Je reste bouche bée . Daniela : « L’ Italie ? Mia, c’ est super, mais tu sais bien que je ne peux pas . Les billets d’ avion coûtent une fortune, et j’ ai mon loyer ici . Qui va payer mon appartement pendant que je joue les assistantes wedding planner à l’ étranger ? » Mia : « Dany, ne t’ inquiète pas pour ça, » dit - elle avec insistance . « J’ ai tout prévu . Le billet est déjà acheté, et pour ton loyer, je m’ en occupe aussi . » Je plisse les yeux, méfiante . Daniela : « Attends une minute . Tu t’ es mise à gagner au loto ou quoi ? » Mia : « Non, idiotie ! Pablo veut aussi que tu sois là, alors il a tout pris en charge . Tu n’ as rien à payer . » Je reste silencieuse, troublée . C’ est génial qu’ elle pense à moi, mais quelque chose dans tout ça me paraît ...… étrange . Daniela : « Mia, t’ es sûre que c’ est une bonne idée ? Je veux dire, ce Pablo, il est vraiment bien ? Et pourquoi il tient tant à ce que je sois là ? » Elle répond avec un ton plus sérieux, mais toujours chaleureux . Mia : « Parce que tu es ma cousine, ma meilleure amie, et la seule personne sur qui je peux compter à 100 % . Tu sais que ta présence est importante pour moi, Dany . S’ il te plaît, dis oui . » Je soupire, sachant pertinemment que je ne pourrais jamais lui dire non . Daniela : « Bon, d’ accord . Je viens . Mais je te préviens, si je découvre quoi que ce soit de louche, je te traîne par les cheveux jusqu’ à l’ autel moi - même . » Elle éclate de rire, et je me surprends à rire aussi . Malgré mes doutes, son bonheur est contagieux . Et puis, après tout, qui refuserait un voyage en Italie ? Mia : « Merci, Dany . Tu es la meilleure ! Je t’ enverrai tous les détails du vol demain . » Après avoir raccroché, je reste un instant immobile, le téléphone toujours en main . Un mariage en Italie ? C’ est clairement l’ aventure que je n’ attendais pas . Et quelque chose me dit que ma vie va devenir beaucoup plus compliquée que je ne le pensais .