Chapitre 2

2667 Words
Chapitre 2 Eh oui, je savais où le trouver, mais me connaissant comme personne, il savait bien qu’il ne risquait pas de me voir frapper à sa porte. Il m’avait lancé une manière de défi et, stupidement ou orgueilleusement, appelez ça comme vous voulez, il n’est pas dans mes gènes d’appeler au secours à la première difficulté. Je n’en ai pas dormi de la nuit. Je me suis levée avant le jour et je me suis jetée rageusement sur mon vélo d’appartement pour la séance de gymnastique que je m’impose tous les matins. Quand pantelante et ruisselante de sueur je me suis arrêtée hors d’haleine, j’ai pris ma douche et je me suis habillée. Pendant que le café se faisait, je suis sortie chercher une baguette toute chaude à la boulangerie qui est de l’autre côté de la venelle. Mon voisin le boulanger cuit toujours sur feu de bois et, dès l’aurore, toute la venelle sent la bonne odeur du pain sortant du four. Puis j’ai acheté le journal au tabac d’en face et je suis revenue prendre mon petit déjeuner sous la véranda. Le jour se levait, un jour gris annonçant par un ciel bas qu’il ne fallait pas espérer voir le soleil de la journée. Après une caresse à Mizdu j’ai fermé ma porte à clé et je suis sortie. J’ai traversé les halles, longé l’Odet qui coulait paresseusement entre ses quais de pierre, et poussé la porte du commissariat. Le brigadier Martin qui terminait son service de nuit a pointé l’index vers le plafond en un signe explicite: — Il est là? Martin a agité sa grosse tête grise avec conviction. Le patron était dans son bureau. Martin a ajouté sur le ton de la confidence: — Il vous a demandée! — Déjà! ai-je dit en montant l’escalier quatre à quatre. J’ai gagné le bureau que je partage avec le lieutenant Fortin et j’ai accroché mon duffel-coat à la patère. Ce vêtement tout terrain est un peu mon bleu de travail. Il en a vu de dures, il a trempé dans l’eau de mer, roulé dans la boue, s’est accroché aux ronces, aux barbelés. Il m’a parfois servi de sac de couchage et m’a même protégée des morsures des chiens. Malgré toutes ces épreuves, il tient le coup. C’est de la bonne qualité bretonne. Puis Jean-Pierre Fortin est arrivé et, comme d’habitude, il m’a fait la bise. C’est le seul homme au commissariat qui ait ce privilège, hors les occasions exceptionnelles comme le jour de l’an ou les départs en retraite, bien entendu. — Paraît que le vieux est de retour, m’a-t-il dit. — Oui, c’est ce que m’a dit Martin. — Il t’a demandée? — Oui. — Tu sais ce qu’il veut? — Comment le saurais-je? — Oh! m’a dit Fortin, tu t’es levée du pied gauche, toi. J’ai protesté: — Pas du tout! — Alors, qu’est-ce qu’il y a? Je l’ai regardé déplier placidement l’Équipe sur son bureau. J’ai beau assister à ce cérémonial tous les jours que Dieu fait, ça m’énerve. Qu’est-ce qu’il peut bien trouver à ce foutu canard? — Pourquoi c’est toujours moi qu’on demande, Jipi? Fortin a haussé ses puissantes épaules en signe d’ignorance. Puis il s’est plongé dans son journal. Quelles que soient les urgences, aucune n’a priorité, pour Fortin, sur la lecture de son journal sportif. Les attentats de Madrid, le tremblement de terre à Téhéran, les krachs boursiers ou les scandales politiques passent après l’état de la cheville de Zidane ou les dernières nouvelles du transfert de Barthez à Marseille. J’ai secoué son journal pour le taquiner: — Je t’ai posé une question! Il a levé sur moi un regard agacé; visiblement, il ne m’avait pas entendue. — Hein? — Pourquoi le patron ne t’appelle-t-il jamais? ai-je articulé en détachant mes mots. Il m’a regardée de ses bons yeux de chien fidèle qui ne comprend pas pourquoi son maître adoré le rudoie soudain et, comme j’attendais une réponse, il a laissé tomber comme une évidence: — Mais parce que je ne suis pas chef! Tu es capitaine, Mary, et moi lieutenant. Faut respecter la voie hiérarchique. Et il a ajouté comme pour lui-même: — Sans ça, à quoi ça sert les grades? J’ai lâché le journal: — Ben tiens! Le manque d’ambition du lieutenant Fortin est légendaire dans le commissariat. Sa devise: « pour vivre heureux, vivons cachés ». Son but, ne jamais se faire remarquer, ni en bien, ni en mal. La pire catastrophe qui pourrait lui arriver serait d’être nommé capitaine et déplacé dans un autre commissariat. Ici il a ses marques: il connaît comme sa poche cette ville où il est né. Il entraîne les équipes de jeunes au club de rugby, fait de la musculation tous les jours et de la plongée l’été, avec ses copains et, en tous temps, s’occupe en bon papa de ses trois petites filles. Mais, je dois le reconnaître, il m’assiste avec beaucoup d’efficacité dans mes enquêtes. Dans son dos, des jaloux ricanent: sans Mary Lester, tout ce que Fortin est capable d’arrêter, c’est l’autobus. D’abord c’est parfaitement faux, je l’ai vu à l’œuvre dans les campements de manouches et dans les quartiers chauds. Et moi, Mary Lester, que serais-je sans Fortin? Je vais vous le dire: je serais morte depuis longtemps! Le téléphone s’est mis à sonner. Fortin, évidemment, n’a pas fait un geste pour décrocher. Je ne l’attendais pas. Puisque je suis le chef, je me suis dévouée. Comme de bien entendu, c’était le commissaire Fabien. — Allô, Mary? — Bonjour patron. — Bonjour. Pouvez-vous monter jusqu’à mon bureau? — Tout de suite, patron. J’ai raccroché et je suis sortie en lançant à Fortin: — C’est reparti! Et, avant de refermer la porte, j’ai encore dit: — Ne te surmène surtout pas trop! Il ne m’a même pas entendue. • Le commissaire Fabien — que le lieutenant Fortin appelle irrévérencieusement « vieille France » ou « le vieux » lorsqu’il est sûr d’être hors de portée d’écoute du patron — était, à son habitude, vêtu avec une recherche un peu désuète. Je m’attends toujours à voir fleurir un œillet à la boutonnière de son impeccable complet gris. Un œillet rose comme en arborent les détectives de Scotland Yard dans les romans d’Agatha Christie. — Vous avez l’air en pleine forme, patron. Il m’a tendu sa petite main sèche et ferme, aux doigts tachés de nicotine: — Merci. — Passé de bonnes vacances? Il a fait: « humph… » et j’en ai déduit qu’il n’avait pas eu le loisir de se bâfrer de confits d’oie ni des excellentes spécialités des Landes. Sa femme l’accompagnait, veillant au grain, décomptant les calories de chaque plat, disposant avant chaque repas sur une petite soucoupe un assortiment de pilules homéopathiques à titre d’apéritif. Puis il m’a regardée et m’a demandé à brûle-pourpoint: — Aimez-vous les îles? J’ai répété, surprise: — Les îles? Quelles îles? Son petit œil bleu s’est éclairé: — Les îles d’eau douce. Je le sentais prêt à me prendre en flagrant délit d’ignorance géographique, je ne lui laissai pas cette joie: — Les îles de la Loire? — Non pas! les îles de marais. — Comme la Brière? — Vous connaissez la Brière? Il affectait une surprise admirative. — Ça n’a rien de savant, dis-je. N’est-ce pas une région marécageuse, quelque part entre La Baule et Redon. J’ai lu quelque chose là-dessus quand j’étais jeune, un gros roman de Châteaubriant, je crois. Il s’est esclaffé: — Chateaubriand? Vous vous trompez mon petit! Chateaubriand a écrit le Génie du christianisme et des trucs comme ça… Je déteste qu’on me dise « mon petit », et ça a dû se voir dans mon regard. Et puis, est-ce qu’on dit, en parlant de Chateaubriand, qu’il a écrit « des trucs comme ça? » J’ai respiré fort pour évacuer la cinglante réponse qui voulait sortir et j’ai dit de ma voix la plus séraphique: — Je ne parlais pas de François-René, Monsieur, mais d’Alphonse… — Ah! a-t-il fait déconfit. Ils étaient deux? J’ai réprimé un sourire: — Oui, mais pas comme les Dumas. Il m’a regardé sans comprendre et a répété: — Les Dumas? — Oui, les deux Alexandre, le père et le fils. Comme les Dupont et Dupond ! Il a eu un mouvement agacé de la main et a demandé: — Qu’est-ce que vous me racontez là? Je le voyais qui s’emballait. J’ai fait une moue innocente. — Simple précision littéraire. Il a furieusement haussé les épaules et il a pris une cigarette. — On est dans un commissariat ici, capitaine, pas dans une bibliothèque! Il ne s’agit pas de littérature, mais de faits divers. — Oh, mais ça se rejoint souvent! Le commissaire me regarda par en dessous, me soupçonnant peut-être de me moquer mais je restai sérieuse comme un pape. — Que se passe-t-il dans ces îles d’eau douce? — C’est le bordel! Il y a une espèce de Zorro qui parcourt les marais en faisant toutes sortes de conneries. J’ai soupiré: — Ça me rappelle quelque chose. Le commissaire m’a regardée d’un œil faussement naïf: — Ah oui? À mon tour je l’ai fixé: — Oui, Monsieur. Et pour tout vous dire, je sors d’en prendre! — Mais vous en avez l’expérience, Mary. J’ai failli lui répondre comme Zazie: expérience, mon… mais je me suis arrêtée. On ne parle pas ainsi au divisionnaire Fabien. J’ai soupiré: — Que se passe-t-il donc, dans ces foutus marais? On y a trouvé du pétrole? — Manquerait plus que ça! a dit Fabien. Dès qu’ils voient une irisation sur leurs canaux, les indigènes crient à la marée noire. J’ai froncé les sourcils: — Les indigènes? Le commissaire se croyait-il revenu au bon temps des colonies? Fabien a allumé la cigarette qu’il triturait d’une main nerveuse au briquet de bureau en faux argent massif et a eu un geste désinvolte de la main, moitié pour chasser la fumée, moitié pour évacuer le mot « indigène » qui n’est plus très bien en cour. — Oui, enfin, les habitants du lieu. Des drôles de clients à ce qu’on m’a dit. — Qu’ont-ils de particulier? Nouveau geste désabusé de la main: — Paraît qu’ils veulent vivre comme au Moyen Âge. Leurs maisons sont couvertes de paille… J’ai corrigé: — De chaume? — Si vous voulez. C’est pas pareil? — Non, le chaume, c’est du roseau. — Pff… a fait le commissaire en exhalant une bouffée de fumée. Et il a ajouté: — Ils se baladent dans leurs marais où une grenouille ne trouverait pas son têtard sur des pirogues… Il parut rêver un moment et me fixa soudain en disant d’un ton incrédule: — Et ils ne veulent pas aller habiter ailleurs! — Pourquoi iraient-ils habiter ailleurs s’ils se trouvent bien ainsi? — Il paraît qu’il y a un projet de réhabilitation des marais piloté par le conseil régional… — Un projet de réhabilitation, répétai-je, c’est bien, ça! Le commissaire Fabien se méfie de moi bien plus quand j’abonde dans son sens que quand je discute un point de vue. Il me regarda d’un air soupçonneux puis laissa tomber: — Ouais… — Si je comprends bien, quelques technocrates en mal de notoriété ont entrepris de faire le bien de gens qui ne leur demandent rien, à grands frais et malgré eux. — Allez, souffla le commissaire découragé, toujours votre mauvais esprit! — Quel mauvais esprit? demandai-je. Il ne me répondit pas. — Et ces troubles, dont vous ne m’avez d’ailleurs pas expliqué la nature… Le commissaire fit un geste vague de la main, d’un air de dire: « On verra ça plus tard… » — Ces troubles, repris-je, se passent en milieu rural. — On ne peut plus rural, dit le commissaire en écrasant sa cigarette à demi consumée dans le cendrier de bureau. Il sortit une nouvelle cigarette de son paquet et la roula entre ses doigts, semblant se demander s’il était raisonnable de l’allumer sitôt après l’autre. Après réflexion, il soupira et la renfonça dans son paquet qu’il remit en poche. — Alors, dis-je, c’est à la gendarmerie d’enquêter. — Tout à fait. C’est d’ailleurs le major Blain, de la compagnie de gendarmerie de Plainchamp, qui s’occupe de cette affaire depuis ses débuts. — Et il a besoin des renforts de la police nationale? — Non. Il n’en a pas besoin. Du moins, il n’a rien demandé. — Alors? — Comme vous le savez, le ministre ayant fait de la collaboration entre la gendarmerie et nos services son cheval de bataille, ses services ont suggéré à Graissac de détacher un de ses hommes sur cette affaire. — Suggéré, dis-je. — Oui, vous comprenez les sens de ce mot dans la bouche d’un attaché du ministère? — Tout à fait. Ordonné aurait été plus approprié n’est-ce pas? — Sans aucun doute, dit le commissaire. Je voyais d’où venait le coup. Je persiflai: — Et ce bon Graissac n’ayant pas d’homme disponible a demandé à son vieux camarade de promotion, le divisionnaire Fabien, de détacher le capitaine Lester à Plainchamp. Fabien ne résista plus et alluma une nouvelle cigarette. Je lui fis les gros yeux: — Si votre femme vous voyait! — Ma femme… dit-il, ma femme… Il balaya l’image d’un revers de main avec la fumée et revint à ses préoccupations: — Vous acceptez cette mission? Je demandai, de mon air le plus candide, rien que pour l’agacer un peu plus: — Je croyais qu’on avait requis un homme? Ça marchait à tous les coups. — Un homme! dit Fabien avec un geste brusque de la main qui projeta de la cendre sur son gilet, un flic, capitaine Lester. Vous m’avez bien compris! Il me regardait d’un air de reproche en chassant de la main les cendres qui s’étaient déposées sur son beau gilet. Je me mis à rire: — Comme si je savais vous refuser quelque chose, patron! Il parut rasséréné et il écrasa ce qui restait de sa cigarette dans le cendrier. J’avais dû lui donner mauvaise conscience. — Il se passe de drôles de choses dans les marais de Brière, Mary. — Des morts? demandai-je. — Pas encore, dit le commissaire d’un air lugubre. Il ajouta, toujours sombre: — Du moins, pas à notre connaissance. Je le regardai, intriguée: comment, s’il y avait des morts, pouvait-on l’ignorer? Il répondit à la question avant que je la lui pose. — Avec tous ces marais… Et, comme je le regardais de plus en plus curieusement, il a ajouté: — De tout temps il y a eu des disparitions dans ce pays. Des gêneurs pour la plupart, qu’on ne revoyait plus. J’ai demandé: — Des gêneurs? Pouvez-vous préciser? — Généralement des agents des douanes, des gardes-chasse trop zélés, a répondu le commissaire. Les gens du marais n’ont jamais aimé qu’on mette le nez dans leurs affaires. — Voulez-vous dire qu’on les a coulés dans la vase, un poids aux pieds, pour nourrir les anguilles? — Ce n’est pas impossible, a-t-il concédé. — Vous me faites un bel avenir, ai-je dit, sarcastique. Il a aussitôt ajouté, lénifiant: — Oh! c’était autrefois… — Vous me rassurez, ai-je dit, acide. En somme la région est pacifiée? — Sans aucun doute, a dit Fabien. La gendarmerie est en charge du dossier, mais le ministère souhaite que la police nationale soit associée à l’enquête. Je regardai Fabien: — Et, si je comprends bien, la police nationale, c’est moi. Le commissaire acquiesça en hochant la tête, les yeux mi-clos. — Vous en faites partie, n’est-ce pas? Depuis ma démission, puis ma réintégration, il semble en douter parfois. Je confirmai: — Absolument. Donc le commissaire Graissac, directeur des polices urbaines de Nantes, se voit prié de mettre un officier de police à disposition de la gendarmerie de Plainchamp. Le commissaire me regardait attentivement, se demandant où ce discours allait nous mener. J’en souriais intérieurement en poursuivant : — Comme tous les flics de sa génération, le commissaire Graissac a une poussée d’urticaire dès qu’on lui parle de la gendarmerie. Fabien eut un mouvement de protestation que je stoppai: — Attendez, je n’ai pas fini. D’un autre côté, un directeur des polices urbaines peut difficilement faire fi des « recommandations » du ministère de l’Intérieur, alors il a une idée: il va demander à son vieux copain Fabien de lui détacher cette empêcheuse de tourner en rond de Mary Lester. Cette fois le commissaire protesta: — Capitaine, vous allez trop loin! Vous l’ai-je dit? quand il me donne mon grade, c’est soit qu’il est très fâché, soit qu’il fait semblant de l’être. Cette fois, il faisait semblant. — Graissac, poursuivis-je, satisfait donc aux « conseils » de son ministère tout en balançant dans les pattes des gendarmes celle qu’il considère toujours comme une emmerdeuse de première. Un cadeau empoisonné, en quelque sorte. — Non! Non! Non! protesta Fabien. Vous n’avez pas le droit de dire ça! Je vous assure que Graissac vous tient en très haute estime! Je persiflai: — Je n’en doute pas. À condition que j’évolue loin de son champ d’action. Qu’importe, patron, je vais y aller, dans vos marais. — Ce ne sont pas « mes » marais, protesta Fabien. — D’accord. Je vais aller à Plainchamp et me présenter au chef de brigade en disant que vous me détachez auprès de lui le temps de cette enquête. — Pas moi! dit Fabien. Graissac. N’oubliez pas, c’est Graissac qui vous envoie! — Faudra-t-il que je passe prendre ses ordres à Nantes? — Ce ne sera pas nécessaire, il m’a transmis tous les documents utiles. Le commissaire sortit, comme par magie, un dossier de son tiroir et me le tendit: — Tenez, présentez-vous au major Blain qui commande la brigade de gendarmerie de Plainchamp. Je le pris avec un air faussement résigné car, lorsqu’on me présente une nouvelle affaire, je suis comme un gamin devant ses paquets de Noël: j’ai hâte de voir ce qu’ils contiennent. Et, dans ce cas, j’ai beau feindre l’indifférence, ça ne trompe personne, et surtout pas le divisionnaire Fabien. — Il est bien sûr de lui, ce Graissac, dis-je tout de même. — L’intuition, dit Fabien. Je répétai: — Intuition mon… J’en restai là, une fois encore je gardai pour moi la réplique de Zazie. Je pris le dossier épais de deux centimètres comme s’il pesait vingt kilos et je me levai en soupirant: — Vous et votre camarade d’études, vous faites quand même une belle paire d’hypocrites! — Dans votre genre vous n’êtes pas mal non plus, me répondit Fabien avec un sourire patelin.
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