PROLOGUE
La porte de l’appartement claqua violemment, Victoire entra en trombe.
— Adèle, Adèle ! Je l’ai vu, j’ai vu David ! Je suis certaine que c’était lui !
Victoire venait de monter les escaliers quatre à quatre, elle était à bout de souffle. Pliée en deux, elle se tenait les côtes.
— Qu’est-ce que tu racontes ? s’étonna Adèle.
— C’était lui, j’en suis sûre ! Je l’ai vu en bas de chez toi !
Victoire reprit sa respiration avant de continuer.
— Je venais de garer ma voiture, je remontais la rue tout en fouillant dans mon sac pour en sortir mon téléphone. Je ne regardais pas devant moi, un homme m’a bousculée, j’ai levé les yeux et je l’ai vu…
— C’est impossible Vic, David est mort.
— C’est pour ça que je ne me suis pas retournée tout de suite. Ça ne pouvait pas être lui ! Le regard de cet homme m’a rappelé vaguement quelqu’un sans que, sur l’instant, je sois capable de dire qui, mais quand j’ai entendu sa voix…
— Parce que, tu lui as parlé ?
— Non, après m’avoir bousculée, il s’est excusé. Derrière moi, j’ai entendu « Pardon madame ! » et j’ai nettement reconnu sa voix. Mon sang s’est glacé. J’ai stoppé net. Quand je me suis retournée, j’ai vu de dos un homme hirsute dans un vieux pardessus élimé. J’ai eu un doute, un moment d’hésitation, et puis j’ai fait demitour pour le rattraper, je voulais en avoir le cœur net. Il a tourné à droite au coin de la rue mais lorsque je suis arrivée au croisement, il n’était plus là.
— Et c’est tout ?
— Non, bien sûr ! Laisse-moi finir… Sur le coup, j’ai pensé que ce n’était pas possible, que je devais sûrement faire erreur… J’allais revenir sur mes pas, quand à nouveau je l’ai aperçu qui sortait du local à poubelles de l’immeuble voisin. Je l’ai observé. Même taille, même carrure, même démarche, barbu, un peu voûté, un peu usé, mais je suis certaine que c’était lui.
— Que faisait-il dans le local à poubelles ?
— Il fouillait… ça ne m’était pas apparu tout de suite, c’est en le regardant mieux que j’ai compris que c’était un clochard.
— Tu as croisé un SDF qui ressemblait vaguement à David, voilà tout ! Je te rappelle que la police a formellement identifié les débris du bateau.
— Je te rappelle qu’on n’a jamais retrouvé son corps !
— On retrouve rarement un corps, quand il périt au milieu de l’Océan Atlantique… tu ne te souviens pas ? Ce sont tes propres mots ! Pourquoi remuer tout ça aujourd’hui ?
— Je sais que tu as beaucoup souffert de sa disparition, tu as longtemps espéré son retour, tu ne voulais pas croire à sa mort, tu disais toujours qu’il allait revenir, et moi je t’affirmais le contraire, tu…
— Arrête Vic, arrête ! J’ai longtemps souhaité le voir réapparaître, c’est vrai, mais c’est fini tout ça ! C’est derrière moi, j’ai tourné la page. Ça fait six ans maintenant ! Je ne veux pas revivre le même calvaire ! Tu n’as pas le droit de me faire ça, juste parce que tu as croisé le regard d’un homme qui lui ressemble !
— Adèle… il ne lui ressemble pas… C’EST LUI !
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DISPARITION