LXX
Les Jardins de Ker-Is
Un patron de barque et son mousse étaient allés tous deux à la pêche. À mi-chemin de la côte aux Sept-Îles, ils jetèrent l’ancre. Il faisait si chaud qu’au bout d’une heure le patron s’endormit.
C’était le moment du reflux.
La mer baissa tellement que la barque finit par se trouver à sec.
Grande fut la surprise du mousse en voyant tout à l’entour non pas des goémons, mais un champ du petits pois. Il laissa dormir le patron, sauta à terre et se mit à cueillir le plus qu’il put de cosses vertes. Il en emplit la barque.
Quand le patron se réveilla, la mer avait monté. Il fut tout étonné de voir la barque pleine de petits pois et le mousse qui s’en régalait.
– Qu’est-ce que cela signifie ? demanda-t-il en se frottant les yeux, persuadé qu’il avait la berlue.
L’enfant conta la chose.
Le patron comprit alors qu’ils avaient mouillé dans la banlieue de Ker-Is, là où les maraîchers de la grande ville avaient autrefois leurs cultures.
(Conté par Jeanne-Marie Bénard. – Port-Blanc.)
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Ma mère a vu la ville d’Is s’élever au-dessus des eaux. Ce n’étaient que châteaux et tourelles. Dans les façades s’ouvraient des milliers de fenêtres. Les toits étaient luisants et clairs, comme s’ils avaient été de cristal. Elle entendait distinctement les cloches sonner dans les églises et le murmure de la foule dans les rues.
(Conté par Jeanne-Marie Bénard. – Port-Blanc.)
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À Lomikel (Saint-Michel en Grève), les jours de très grande marée, quand la mer déchale au loin, on voit poindre encore au-dessus des sables, la « croix rouge » qui surmontait le plus haut clocher de la ville d’Is.
(Marguerite Philippe. – Pluzunet.)
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Lorsque le jour de la résurrection sera venu pour Ker-Is, le premier qui apercevra la flèche de l’église ou qui entendra le son des cloches deviendra roi de la ville et de tout son territoire.