XXVI LE PRESSENTIMENT. Depuis près d’un mois que miss Mary avait formé le projet de se rendre au rancho de la Ventana, elle avait songé cent fois, mille fois, à la première entrevue qu’elle aurait avec Antonia, et elle s’était tracé son rôle à l’avance ; elle avait pesé et calculé les paroles qu’elle devait dire, étudié sa contenance, réglé jusqu’à ses moindres mouvements ; elle ne voulait rien livrer au hasard. Antonia, brusquement arrachée à sa solitude et à ses pensées, et nullement prévenue de la visite qu’elle allait recevoir, arrivait, au contraire, complètement désarmée ; tout l’avantage était donc du côté de l’Américaine ; ce fut pourtant l’opposé de ce que l’on eût été en droit d’attendre qui eut lieu. Surprise, éblouie et dominée par le calme et limpide regard, par la radieuse

