Audrey et Jean m'aidèrent à m'asseoir sur une chaise tandis que le médecin allait chercher la boîte de premiers secours. Toujours aucun mot n'avait été échangé entre nous.
En nous voyant entrer le médecin nous demanda ce qu'y nous amenait mais voir le sang lui avait suffit comme réponse. Il me dit donc de m'asseoir avant de disparaître quelques instants.
Pendant ce court laps de temps Jean garda la tête fixée sur ses chaussures tandis qu'Audrey me caressait la tête avec douceur tout en guettant mes yeux du regard.
Pour la remercier de cette infime tendresse et aussi pour m'excuser de l'avoir entraînée là dedans je lui souris avec douceur. Elle me rendit mon sourire avec peine et continua à me caresser les cheveux telle une mère aimante.
Elle s'était sentie en sécurité ici et j'avais tout détruit. Je savais que nous n'allions pas rester en sécurité ici bien longtemps mais je n'avais quand même pas voulu briser son bonheur de si tôt et avec une telle violence.
Je me sentais extrêmement coupable. À cause de moi son visage enfin repose allait vite retrouver ses cernes et l'enfant dans son ventre avait plutôt besoin d'une mère en pleine forme et reposée.
Je n'eus cependant pas le temps dans les exprimer mes sentiments car le médecin réapparut dans la pièce et tira une chaise pour s'asseoir près de moi. Il me fit me tourner pour qu'il puisse voir mon dos et je l'entendis retenir sa respiration sous le choc.
S'il était choqué par ces marques cela voulait dire qu'il n'avait encore jamais soigné personne qui s'était fais fouetter auparavant. Or s'il travaillait ici depuis longtemps cela voulait dire que la duchesse n'avait encore jamais fouetté personne ou alors plus vraisemblablement qu'elle ne les avait jamais soignés.
Je n'avais pas vraiment la force d'y réfléchir là tout de suite.
"Attention ça va piquer. Tu es prêt?"
Le médecin n'avait pas menti. Je ne m'étais encore jamais fais soigner après un coup de fouet mais cette douleur ne m'était pas non plus inconnue. En effet certaines personnes aimaient nous lancer du sel sur le dos après nous l'avoir ouvert. Je supportais donc plus ou moins bien le désinfectant.
Jean n'osait toujours pas me regarder mais il n'avait pas lâché mon bras une seule fois de tout le long. Et une fois toutes mes plaies traitées le médecin me demanda comment je me sentais.
"Pas trop mal.
-Je vais te prescrire des pilules à prendre trois fois par jour au cas où. Tes bandages doivent être changées toutes les heures pour l'instant. Reviens me voir demain et je te dirai si tu peux arrêter de les changer. L'idéal serait que ton dos ne soit pas expansé à de l'eau pendant les prochaines 24 heures. Ne prends donc pas de douche ce soir à part si tu penses pouvoir le faire sans te mouiller le dos. Au cas où c'est mieux si tu n'en prends pas du tout.
-Merci. Je vais aller directement me coucher je pense.
-On va rester avec lui. Pour l'aider à changer ses bandages.
-C'est gentil mais je peux le faire tout seul.
-Ce n'était pas une question."
Audrey me regardait d'une manière qui me poussa à ne rien répliquer. Le médecin reprit:
"Quelqu'un vous attend dehors.
-Qui ça?
-Un certain comte de Langfier. Je peux le laisser entrer?"
J'ignorais qui cela pouvait bien être mais s'il était ici c'était pour une bonne raison. Je hochais donc la tête. Le médecin sortit de la pièce et ce fut le garçon de 16 ans avec qui j'avais parlé qui apparut à sa place. Il prit une chaise et s'assit en face de moi en ignorant complètement les autres personnes présentes dans la pièce.
"Ça te fait mal? demanda-t-il en désignant mon dos.
-Un peu.
-Je peux voir?
-Pour l'instant je dois garder les bandages. Qu'est-ce que tu fais là?
-Je t'attendais au lieu de rendez-vous mais comme tu n'es pas venu je me suis dis qu'il s'était sûrement passé quelque chose. C'est vrai que tu t'es fais fouetter?
-Oui. 300 fois."
Le garçon siffla.
"Et tu as supporté tous ces coups sans t'évanouir? T'es vraiment trop fort."
Un petit rire m'échappa. Personne à part ce garçon ne m'avait encore jamais regardé avec admiration après que je me sois fais fouetter.
"Je pensais que tu avais vu le spectacle. Tout le monde avait l'air passionné.
-Oh, tu sais bien que ce qui amuse les adultes n'a jamais été très intéressant pour moi. Alors quand je les ai vus tous fixer un endroit je me suis dis que ça servait à rien que j'aille voir. J'allais sûrement trouver ça ennuyant puis j'ai entendu les chuchotements comme quoi un esclave se faisait fouetter. J'ai tout de suite pensé à toi. Mais je n'ai pas pu venir voir. La foule était beaucoup trop dense. Personne ne voulait me laisser passer.
-Oh t'as pas raté grand-chose."
Il haussa les épaules.
"Tu avais quelque chose à me dire?"
Soudain il se redressa fière de lui.
"J'ai découvert des choses croustillantes pendant mon enquête.
-Ah oui?"
Le garçon ouvrit la bouche comme pour parler mais soudain il remarqua que nous n'étions pas seuls et il se tut.
"T'inquiète pas tu peux parler devant eux.
-On est sûr qu'on peut leur faire confiance?"
Audrey rit.
"Il nous connaît depuis bien plus longtemps que toi. C'est peut-être nous qui devrions te poser cette question."
Le garçon haussa les épaules convaincu.
"Par contre de quelle enquête est-ce qu'il parle, Thomas?"
Je pinçais les lèvres?
"Qu'est-ce que tu as fais?
-Il voulait savoir où sont passés les anciens esclaves du château."
Les yeux d'Audrey passaient du garçon à moi perplexe.
"Oui, je trouvais ça étrange que les esclaves que la duchesse achetait disparaissaient tous au bout d'un an maximum parce que apparemment elle les laissait partir. Quelque chose clochait.
-Pourquoi ne m'en as-tu pas parlée?
-Je ne voulais pas t'embêter avec ça. Tu avais l'air tellement épuisée et quand j'ai vu à quel point tu étais heureuse ici... Je ne pouvais pas détruire ça."
Audrey soupira.
"Tu n'aurais quand même pas dû garder tout ça pour toi. Nous sommes dans le même bateau, Thomas. Alors oui j'étais heureuse de me sentir enfin à l'abri mais ce bonheur ne vaut rien s'il est bâti sur un mensonge.
-Je suis désolé.
-Je comprends pas de soucis. Mais promets moi dorénavant de ne plus rien me cacher.
-C'est promis."
Soudain contre toute attente Jean prit la parole:
"Qu'est-ce que vous allez faire?"
Ayant presque oublié sa présence il nous fallut une seconde pour lui répondre.
"Je ne sais pas encore. Nous étions à peu près en sécurité ici jusque là alors je me disais que fuire pouvait attendre jusqu'à ce que j'ai découvert le secret de la duchesse mais vu ce qu'il s'est passé ce soir nous devons peut-être partir immédiatement.
-Vous pouvez venir chez moi si vous voulez.
-C'est gentil de proposer mais tes parents aussi sont des aristocrates. Rien ne nous dis qu'ils ne nous traiteront pas comme des esclaves aussi."
Jean craqua d'un coup. Il lâcha mon bras et dans un râle se prit la tête dans les mains.
"Vous n'avez nul part où aller. Vous n'avez pas d'argent, rien. Comment vous allez faire? Et Audrey est enceinte. Vous ne pouvez pas vous enfuir ce serait trop compliqué. Je pensais que la duchesse laissait partir les esclaves mais après ce que j'ai vu je ne sais plus quoi croire. On s'est tous fais berner. Elle n'a jamais laissé partir les esclaves. Elle les a tous frapper jusqu'à la mort. Et si vous aussi elle voulait vous tuer? Ou peut-être elle attend juste qu'Audrey ait accouché. Dans ce cas nous avons encore quelques jours devant nous mais pour Thomas rien n'est sûr. J-
-Jean. Calme toi. Respire. Nous n'avons encore aucune preuve de ce qu'il se passe ici alors ne nous emportons pas dans des hypothèses inquiétantes. Nous allons déjà nous reposer. Prendre une bonne nuit de sommeil. Je ne pense pas qu'après le nombre de coups que j'ai eu la duchesse veuille encore se défouler. Nous avons donc un peu de temps pour nous décider de quoi faire.
-Mais..."
Audrey posa une main sur l'épaule de Jean qui était visiblement dans tous ses états.
"Ça va aller.
-Je ne veux pas qu'il vous arrive quelque chose...
-Il ne nous arrivera rien. Pas tant que Thomas est là.
-Bon vous avez fini? Vous voulez bien écouter ce que j'ai découvert maintenant? demanda le garçon."
Nous nous tûmes tous attendant ses révélations. Le garçon aimait visiblement être au centre de l'attention car il se redressa de toute sa hauteur et chercha ses mots un moment avant de commencer:
"Au début j'ai parlé avec un vieux monsieur qui m'a dis que la duchesse était réputée pour acheter de nouveaux esclaves tous les ans parce que ses anciens esclaves mourraient à la tâche. Or comme Thomas n'avait pas l'air d'être dans un mauvais état et elle l'a quand même laissé venu au bal donc je me suis dis que ce ne devait pas être ça. J'ai donc interrogé d'autres personnes qui m'ont tous environ dis la même chose avec des variantes. Dans toutes les histoires la duchesse était dépeinte comme quelqu'un de strict, d'autoritaire, de froid, d'imposant etc. Et quand j'y pense elle a vraiment l'air de l'être. Je ne l'ai pas non plus vue des milliards de fois et quand je la voyais ce n'était jamais de bien près. Et quand elle donnait des discours ou des trucs comme ça je n'écoutais jamais donc je suis peut-être pas le mieux placé pour la décrire mais...
-C'est important pour ton histoire?
-Pardon. Je me suis emporté. Je voulais juste dire que je comprenais d'où venaient ces histoires vu à quel point la duchesse est froide et sans expression. C'est comme si elle était un robot. Je ne l'ai jamais vue sourire ou froncer les sourcils ou même pleurer. Mais encore une fois je suis pas le mieux placé parce que je ne la connais pas s-
-Bon passons."
Le garçon se racla la gorge.
"Pardon. Donc comme cette histoire ne m'avait pas convaincu j'ai essayé de prendre une autre approche et au lieu de demander aux gens combien elle achetait d'esclaves tous les ans et ce qu'ils devenaient j'allais leur poser des questions sur la duchesse en elle-même. Pas vraiment sa personnalité parce que visiblement tout le monde était d'accord pour dire qu'elle était froide mais sur ses passes temps etc. Et qui de mieux pour répondre à ces questions que des gens qui la connaissent bien?
-Tu es donc allé voir des membres du personnel.
-Pas tout de suite d'abord j'ai laissé une dernière chance aux invités. Mes parents me parlaient souvent d'un certain Révérend Russel qui aimait par dessus tout les plantes présentes dans le jardin de la duchesse. Il vient donc souvent pour récolter des plantes médicinales avec l'accord de la duchesse. J'ai donc essayé de trouver ce révérend mais il y avait beaucoup trop de monde alors j'ai fini par abandonner et me tourner vers le personnel. Ces derniers avaient une vision assez différente mais en même temps proche de celle des aristocrates en ce qui concernait la duchesse. Ils la trouvaient assez distante et ils ne la voyaient presque jamais mais ils ne disaient pas qu'elle était froide. Ils avaient l'air de bien l'aimer ou de s'en fiche totalement.
-Oui le personnel est très reconnaissant de pouvoir travailler ici et comme ils ne voient jamais la duchesse elle est plus un mythe qu'une personne réelle ici.
-Je leur ai donc demandé qui est-ce qui passait du temps avec la duchesse et ils me parlèrent d'un certain Cédric et Louis qui étaient tout le temps avec elle. Le Louis en question était apparemment à ses cotés même pendant le bal donc je ne pouvais pas aller le voir. J'ai donc commencé à chercher Cédric mais comme j'ignorais à quoi il ressemblait j'abandonnais aussi.
-C'est moi ou aucune de tes pistes n'était concluante?
-Attendez la fin. Comme je n'avais trouvé personne d'intéressant à interroger j'ai décidé d'aller faire un tour du château. Je me suis dis que peut-être que les personnes dont elle était proche n'étaient pas venus au bal. Si elle avait quelque chose à cacher elle aurait sûrement préféré que ce genre de personnes restent loin des invités.
-Mais oui, Missy...
-Qui?
-Elle connaît la duchesse depuis son enfance. J'avais moi-même pensé à l'interroger mais je n'ai pas eu le temps d'aller la voir. Et les autres moments elle est trop occupée dans la cuisine. Et puis au début je ne voulais pas non plus aller voir la personne dont la duchesse était là plus proche. J'avais peur que ça ne remonte à son oreille.
-Bah je ne suis pas allé voir Milie ou Mindy ou je sais pas qui mais j'ai trouvé des gardes!"
Le garçon marqua une pause pour faire monter le suspense.
"Je me suis dis que s'ils étaient postés partout dans le château ils devaient voir les déplacements de la duchesse. Mais les gardes n'étaient pas très bavards. Apparemment ils n'avaient pas le droit de bouger ni parler. De toute façon les membres du personnel m'avaient dis que la duchesse passait le plus clair de son temps dans sa chambre donc ce n'était pas si intéressant comme piste.
-J'y avais cru une seconde...
-Mais justement c'est là que je me suis dis que si elle reste dans sa chambre c'est que si elle a quelque chose à cacher ça doit être là!
-Tu es entré dans la chambre de la duchesse? nous demandâmes surpris.
-Personne n'a le droit de s'aventurer dans son aile.
-Non je n'ai pas fais ça. Fin j'ai essayé mais les gardes m'ont vite dissuadé. Mais je me suis dis que si elle reste dans sa chambre peut-être qu'elle sort sans que personne ne s'en rende compte. Il doit donc y avoir un passage secret."
Jean souffla.
"On est pas dans un film d'action."
Cette remarque fut royalement ignorée par le garçon qui continua comme si de rien n'était.
"Je suis donc allé me poster sous son couloir et j'ai cherché où il pourrait y avoir un passage secret. Et j'en ai trouvé un!
-Quoi? Vraiment?
-Eh oui."
La fierté irradiait le visage du garçon.
"Dans le couloir sous l'aile de la duchesse il n'y a aucun garde et derrière une des peintures se trouvent des briques. Si vous poussez la bonne brique alors la porte s'ouvre et elle donne sur un escalier qui monte."
Je crus que mon menton allait tomber. Je n'avais jamais pensé à chercher un passage secret. Toutes ces nuits que j'avais passées à arpenter les couloirs et je n'avais encore rien remarqué de tel.
"Tu es monté?
-Non, je suis de suite revenu dans la salle de bal. Je voulais qu'on y aille ensemble avec Thomas.
-C'était derrière quelle peinture?
-Je sais plus trop. Hum il y avait de l'eau, et... Non en fait c'était pas de l'eau mais c'était bleu. Peut-être un ciel? Je sais pas... Mais de toute façon je n'ai pas remis la peinture à sa place donc vous trouverez les briques en question sans problème.
-Tu n'as pas remis la peinture? Mais s'ils remarquent qu'elles n'est plus là alors la duchesse saura que nous avons découvert son passage secret et elle va poster des gardes devant.
-C'est pas ma faute. Je pensais que nous allions tout de suite aller voir donc ça servait à rien de remettre la peinture.
-Il faut vite la remettre en place."
Jean proposa d'accompagner le garçon et ils coururent vers la peinture en question nous laissant Audrey et moi. Les garçons réapparurent au bout d'une bonne dizaine de minutes nous assurant que tout allait bien à présent et que personne avait remarqué que la peinture avait été posée par terre.
Nous ne pouvions pas y aller de suite vu mon état et le bal allait bientôt ce finir en plus de ça donc nous préférions ne pas prendre de risques. Le garçon fût déçu de ne pas pouvoir découvrir ce qu'il se cachait en haut des escaliers mais je lui promis de le lui écrire par lettre. Il me donna donc son nom et dû retourner dans la salle de bal parce que ses parents le cherchaient.
Avec Jean et Audrey nous décidâmes d'aller dans la chambre de la duchesse le lendemain midi pendant qu'elle mangeait. En attendant nous devions nous coucher et nous reposer. Audrey et Jean proposèrent de rester avec moi mais je leur assurais que je pouvais très bien me débrouiller tout seul et que si ça allait pas j'allais les appeler.
Le médecin repassa une fois pour me changer mes bandages puis les autres m'accompagnèrent dans ma chambre et m'aidèrent à m'allonger. Je ne pouvais dormir que sur le ventre à cause de la douleur donc une fois étendu Audrey posa la couverture sur moi avec douceur.
Je n'avais pas pris de douche et ne m'étais pas changé. Je voulais juste dormir. Au diable changer les bandages toutes les heures j'allais bien dormir et les changer le matin venu.
Je ne pensais pas que les autres allaient beaucoup dormir cette nuit et pourtant nous étions tous épuisés. Mais ils partirent quand même dans leurs chambres ayant hâte de tourner une page sur cette journée riche en émotions.
Une fois ma porte fermée je fermais mes yeux et essayais de vider mon esprit pour que le sommeil puisse venir. Je m'endormis sans que je m'en rende compte quand soudain je fus réveillé par quelque chose.
Au départ je ne comprenais pas ce qu'il m'avait réveillé. J'essayais de me rendormir sans perdre de temps quand j'entendis de nouveau un bruit sourd. Quelqu'un toquait à ma porte. C'était ça qui m'avait réveillé la première fois aussi.
Je n'avais pas spécialement envie d'avoir de la visite. Surtout si c'était le médecin qui voulait changer mes bandages. Je refermais donc mes yeux me disant que la personne allait finir par partir en ne me voyant pas ouvrir la porte. Sauf que la personne était plus têtue que prévue.
Après quelques autres toquements je finis par souffler et me levais tant bien que mal. Enfin je glissais plus de mon lit qu'autre chose avant de me diriger vers la source du bruit.
Quand j'ouvris ma porte je crus que je rêvais. Devant moi se tenait la duchesse. Je la regardais de haut en bas et ne pus m'empêcher d'exprimer mon dégoût à l'idée de la voir.
Elle portait encore sa robe de bal mais avait défais son chignon pour simplement attacher ses cheveux en queue de cheval. Elle se tenait devant moi droite comme un pic attendant que je lui dise d'entrer. Sauf qu'au lieu de cela je décidais de lui claquer la porte au nez. Elle n'était qu'un monstre elle ne méritait pas mon intérêt.
Je commençais donc à retourner vers mon lit fatigué quand j'entendis la porte s'ouvrir derrière moi. Je me retournais donc indigné et c'est alors que je remarquais qu'elle tenait le fouet dans sa main gauche.
"Tu y as pris goût c'est ça? Tu crois vraiment que je vais me laisser faire? Tout à l'heure tu as pu me fouetter seulement parce que les autres m'avaient forcé à me mettre à genoux. Sinon j'aurais continué à te tenir tête tu le sais très bien."
Sans un mot la duchesse me tendit le fouet. Je le regardais ne comprenant pas ce qu'elle me voulait.
"Tu veux que je le gardes en tant que souvenir peut-être? Merci mais je ne suis pas du genre sentimental.
-C'est ton tour.
-Quoi?
-300 coups. À toi de me les asséner.
-A moi? Tu veux que je te fouette à mon tour?"
Elle se contenta de hocher la tête déterminée. Décidément j'avais du mal à suivre. Pourquoi est-ce qu'elle voulait que je la fouette? Elle avait vraiment fais tout ce chemin à ma chambre rien que pour ça?
"Tu viens pour te moquer de moi c'est ça? Et bien j'espère que tu t'es bien amusée. Parce que crois moi t-
-Fouette moi je te dis.
-Tu es sérieuse?"
Elle hocha la tête et rapprocha le fouet de ma main. Mais je ne le pris pas. Je ne pouvais pas. L'idée de la voir souffrir elle aussi me faisait envie mais je ne pouvais me résoudre à prendre cet outil dans mes mains. J'en étais incapable. Tout ce que je pouvais faire était de me reculer en fixant l'objet et en secouant la tête.
"Tu es complètement folle. Je ne te comprends pas.
-Je t'ai dis de m'assener les 300 coups. Pas de réfléchir.
-Pourquoi?
-Fais le.
-Dis moi pourquoi!"
J'avais hurlé de toutes mes forces mais la duchesse n'avait pas sursauté. Elle continuait de me fixer décidée à ressentir la même chose que moi.
"Pour te venger."
Je riais de frustration.
"Pour me venger tu dis? Elle est bonne celle là. Si tu allais venir ici pour me demander de te rendre la pareille alors pourquoi m'avoir fouetté tout court?
-Parce que je n'ai pas eu le choix!"
Elle avait hurlé. La duchesse avait hurlé et son visage s'était fendu d'impuissance. Je ne l'avais encore jamais vue ainsi. Elle avait rajeunie d'un coup et ressemblait à une enfant perdue. Mais j'étais bien trop en colère contre elle pour m'attarder sur ce détail.
"Tu n'avais pas le choix c'est ça? Pauvre petite duchesse. C'est vrai que c'est compliqué de choisir entre fouetter un esclave 300 fois ou juste être humaine. Surtout après que tu m'ais dis que je n'étais plus un esclave mais une personne parmi tant d'autres."
Son visage retrouva très vite son calme. Tellement vite que j'en avais oublié l'émotion qu'elle avait affichée quelques secondes auparavant.
"C'est justement pour ça que je veux que tu prennes ce fouet."
Je secouais la tête.
"Ça ne marche pas comme ça. Tu ne peux pas te racheter de tes erreurs en te faisant vivre la même chose. Dans les deux cas c'est toi la fautive donc tu n'es que doublement coupable.
-Je m'en fiche.
-C'est parce que tu n'arrivais pas à dormir? Pauvre petit chou. Je suis désolé que la vue de mon sang t'empêche de te reposer.
-Tu vas le faire oui ou non?
-Non. Tu ne mérites même pas que je te touche avec cet objet. Tu n'es personne Léonord. Absolument personne."
Elle baissa les yeux et pile quand je pensais qu'elle s'était renfrognée et se mit à déboutonner le haut de sa robe. Je la regardais faire sans un mot me demandant ce qu'il lui prenait. Une fois le haut de son dos dégagé la duchesse agrippa fermement le fouet et sans une seconde d'hésitation le fit claquer sur sa peau.
Ses muscles se raidirent mais elle ne cria pas et elle continua encore et encore toujours en restant debout et droite.
Quant à moi je la regardais faire impuissant et mes muscles se raidissaient en cœur avec les siens à chaque coup.
Elle ne me regardait pas dans les yeux et fixait ses chaussures. Ses jambes se mirent à trembler mais elle tenait le coup et ne ralentit pas la cadence des coups de fouet. Elle faillit tomber plusieurs fois mais elle finissait toujours par se redresser encore plus haut.
Elle s'asséna les 300 coups sans exception et une fois fini elle lâcha le fouet qui tomba au sol dans un bruit sourd. Ses jambes tremblaient maladivement mais elle ne se laissa pas s'asseoir et se contenta de reboutonner sa robe sans un mot.
Maintenant que c'était fini elle me regarda enfin dans les yeux. Elle avait les même yeux vides qu'après qu'elle m'ait asséné le dernier coup. Ce n'étaient pas des yeux vides d'humanité mais vides de vie.
"Maintenant que ça c'est fais tu dois apprendre à te battre.
-Pardon?"
J'étais décontenancé par sa capacité à reprendre la conversation comme si de rien ne s'était passé.
"Tu es pitoyable au combat. Il faut améliorer ça. Viens.
-Maintenant?"
Elle ne me répondit pas. Elle se contenta de tourner les talons et de sortir se ma chambre pensant que j'allais la suivre. Et ce fut ce que je fis.
Je ne me l'expliquais pas. Je l'avais détestée et méprisée de toute mon âme il n'y a pas si longtemps mais ça c'était comme évaporé. Je ne lui avais rien pardonnée mais j'avais envie de la suivre pour découvrir ce qu'elle me voulait.