chapitre 4
1129 Words
Pdv de Liam
Je retourne vers le terrain en faisant rebondir le ballon du bout des doigts, mais je sens déjà les regards insistants de mes potes.
Ils attendent. Ils préparent quelque chose.
Ça se voit dans leurs têtes de clowns.
— Alors ? demande Noah, sourire carnassier.
— Alors quoi ?
— Alors elle. La fille. Celle qui t’est littéralement tombée dans les bras. Celle que t’as regardée comme si t’avais vu un gâteau. Ne mens pas.
Je roule des yeux.
— Mec, calme-toi. C’était une collision, pas une déclaration d’amour.
— Collision ? répète Noah.
— COLLISION ?! s’étrangle Thomas.
— Collision, oui.
— Liam. Elle a atterri dans tes bras comme dans un film romantique, insiste Noah. Tu veux quoi de plus ? Qu’il pleuve des pétales ?
Les gars éclatent de rire. Moi aussi un peu, même si je fais semblant d’être blasé.
— Donc, reprend Thomas en dribblant, elle est mignonne ou pas ?
Je fais tourner le ballon entre mes doigts.
La vérité ?
Elle n’est pas juste mignonne.
Elle est… intriguante.
Une vibe bizarre. Un truc que j’arrive pas à définir.
Comme si je l’avais déjà vue quelque part — mais je sais pas où.
Et c’est exactement le genre de sensation que j’aime pas. Ça met mes pensées en désordre.
— Elle est… intéressante, répondis-je vaguement.
Noah explose.
— “Intéressante” = tu l’aimes bien. Traduction universelle. T'es foutu mec.
— Non.
— Si.
— Vous êtes lourds.
— Oui, répond Thomas, mais on s’en fout.
Je lève les yeux au ciel.
— Et puis, ajoute Noah, tu l’as rattrapée comme un prince charmant. J’ai même senti une musique romantique derrière moi.
— C’était mon téléphone, débile, dit Thomas. Tu m’as pris mon portable pour regarder t****k.
Ils se chamaillent pendant que je tire un panier sans trop y penser.
Le ballon file parfaitement — swish.
Et pourtant, j’arrive pas à me sortir son visage de la tête.
Sa surprise.
Ses yeux.
Sa façon de parler trop vite quand elle stresse.
Et son sarcasme.
— Liam, dit Thomas soudain, en s’approchant de moi.
— Quoi encore ?
— Tu vas aller lui reparler ?
— Pourquoi j’irais ?
— Parce que tu souris comme un mec qui veut y retourner, répondit-il, poignée dans les cheveux.
Je masque mon expression.
— On verra.
Mais intérieurement…
Ouais.
Je sais que je vais y retourner.
Peut-être pas pour lui parler.
Peut-être juste pour l’observer de loin.
Pour comprendre pourquoi elle me laisse cette impression bizarre.
Pdv d'Anjel
Je suis toujours au terrain vague, assise sur l’herbe avec Érina, encore un peu sonnée par l’épisode “collision + bras musclés + odeur vanille-sport”.
Je suis censée respirer normalement.
Sauf que non.
Mon cœur a décidé de faire de la zumba.
— Donc, dit Érina avec un sourire carnivore, tu penses quoi de ce beau gosse cosmique ?
— T'es pas sérieuse ? C'était un accident, je souffle en levant les yeux au ciel.
— Un accident qui t’a rattrapée par la taille ? Han, le meilleur type d’accident.
Je lui lance un regard noir. Elle ricane.
Et là…
Mon téléphone vibre.
Je regarde l’écran.
Dylan appelle.
Merde.
Pas maintenant.
Pas ici.
Pas alors que mon cerveau est déjà en plein chaos sentimental.
— Tu décroches ? demande Érina.
— Je veux pas.
— Tu devrais.
— Je veux pas.
— Anjel.
— OK OK, j’y vais…
Je respire un grand coup et décroche.
— Oui ?…
— Anjel… faut qu’on parle.
Je ferme les yeux.
— Dylan, pas maintenant, s’il te plaît.
— Je t’en supplie. Deux minutes. Juste deux.
Je regarde Érina.
Elle me fait un petit signe “vas-y, t’es forte”.
Je m’éloigne un peu, marche jusqu’à un coin plus calme, près des rochers.
Le vent souffle.
Le ciel devient un peu orange.
— Qu’est-ce qu’il y a ? demandé-je finalement.
Il inspire longuement.
Je reconnais ce son.
C’est celui qu’il fait quand il essaie de ne pas pleurer ou de ne pas hurler.
_ Tu me manquai.
_ Arrête ! On est plus ensemble donc arrête.
— Pourquoi ?
Je ferme les yeux encore plus fort.
— Tu le sais, Dylan…
— Non. Je comprends pas.
— J’avais plus de sentiments amoureux.
— Mais ça veut dire quoi “plus” ? Tu m’aimais avant. On était bien. On riait. On s’embrassait. On…
— Oui. Avant.
— Alors pourquoi ça disparaît ?! C’est pas normal, Anjel.
Je me mords la lèvre, exaspéré
— Ça arrive, Dylan. L’amour, c’est pas une dette. Ça part parfois.
— Pas pour moi ! lâche-t-il, presque brisé. Moi, je t’aime encore. Je t’aime comme un fou. Comme un imbécile. Et ça me tue que toi… toi tu t’en fiches.
Je sens mon cœur se serrer un instant.
Pas par amour.
Par compassion.
— Je me fiche pas de toi, murmuré-je.
— Alors reviens. Je ferai ce qu’il faut. Je changerai. Je—
— Non, Dylan.
Le silence tombe.
Un silence lourd, coupant, qui s’accroche à ma peau.
— Je ne t’aime plus comme ça. Je suis désolée.
Un souffle. Puis :
— Je peux pas accepter ça.
— Tu devras.
— T’es cruelle.
— Non. Honnête.
Il respire encore. Comme si chaque mot lui arrachait un morceau.
— Est-ce qu’il y a quelqu’un d’autre ? demande-t-il soudain.
Je cligne des yeux.
Il me prend vraiment pour ce genre de fille ?
— Non. Personne, dis-je.
— Alors… pourquoi tu me laisses ?
Je prends le temps de répondre, calmement.
— Parce que rester avec quelqu’un qu’on n’aime plus, c’est la pire trahison qu’on puisse lui faire.
Silence.
Érina m’observe de loin. Et met un pouce en l'air.
Dylan renifle.
— Si je t’appelle demain, tu répondras ?
— Non.
— Après-demain ?
— Non plus. Tu n'avanceras pas si tu me colles trop. On doit prendre nos distance pour tourné la page.
— Donc… c’est vraiment fini.
— Oui.
Il reste un moment sans rien dire.
— D’accord. Alors… je te laisse.
— D’accord.
— Bonne soirée, Anjel.
— Bonne soirée, Dylan.
Je raccroche.
Je respire.
Une énorme vague de fatigue me traverse.
Je retourne vers Érina, qui me tend les bras sans un mot.
— C’est fini ? dit-elle doucement.
— Oui. Cette fois… vraiment fini.
Elle me serre contre elle.
Et dans ce silence-là, je repense au sourire de quelqu'un.
Pas Dylan.
Liam.
Et je déteste ça.
— Tu penses à lui, avoue, dit Érina sans même me regarder.
— PAS DU TOUT !
— Mh mh.
— Je pensais au… ballon.
— Bien sûr.
Elle rit.
Je soupire.
Et le soleil continue de descendre, tranquille, comme si ma vie n’était pas en train de partir en freestyle.
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