Je m'approche du bruit

788 Words
Point de vue Léna L’obscurité m’engloutit peu à peu. Là-bas, entre les arbres, quelque chose bouge. Je n’arrive pas à voir ce que c’est, mais chaque fibre de mon corps me hurle de faire demi-tour. Mon cerveau répète : NON, LÉNA, rentre. Mais mon instinct… lui… me pousse à avancer. J’ai cru distinguer une silhouette. Blessée ? Perdue ? Ou peut-être… un psychopathe en liberté. Ma raison me supplie de reculer, mais mon cœur bat comme un tambour : Tu dois y aller, Léna. Je plisse les yeux pour percer la nuit et m’avance encore. Chaque pas m’éloigne un peu plus de la sécurité, et je sais que j’ai dépassé la limite autorisée. Mais t’es complètement folle, Léna ! Et si c’était un taré armé ? Comment je me défends ? Un froissement. Les buissons s’agitent sur ma droite. Je retiens ma respiration, m’approche… vide. Pas un bruit, pas un souffle. Je reprends ma marche, mais cette fois, je sens… quelque chose. Un regard. Lourd. Fixe. Ça me transperce. Je m’arrête net. L’air autour de moi semble plus dense. Et puis… un souffle. Contre ma nuque. Chaud. Réel. Je n’ose pas me retourner. Moi : Qui que vous soyez… dites-moi si vous allez bien… s’il vous plaît ? Ma voix tremble, ridicule. Franchement, Léna… tu parles toute seule dans une forêt. Peut-être que c’était une biche… ou un écureuil… Oui, sûrement. Je fais un pas pour repartir, mais un grognement grave et rauque me cloue sur place. Mes muscles se figent. Un chien… un chien prêt à m’attaquer. Moi : D’où… d’où viens-tu, chien ? Si je me retourne… ne me tue pas. Je pivote lentement… et mon souffle se coupe. Ce n’est pas un chien. C’est un loup. Un loup gigantesque, d’au moins quatre mètres de haut, le pelage blanc comme la neige, les yeux d’un bleu intense, presque irréel. Mon cœur explose dans ma poitrine. Je le fixe. Il me fixe aussi. Il n’avance pas. Et… je ne sais pas pourquoi… je n’ai pas peur. Il est beau. Non… il est majestueux. Sa présence écrase tout. Son regard me transperce, comme s’il fouillait dans mon âme. J’en oublie que je suis seule, dans une forêt sombre, face à une créature qui pourrait m’arracher la gorge en un instant. Moi : Bonjour, toi… Est-ce que tu as un problème ? J’ai entendu du bruit… Mais… qu’est-ce que tu es ? Tu… tu vas me manger ? Ses lèvres retroussent, révélant des crocs blancs et luisants. Je recule d’un pas. Moi : Désolée… je t’ai vexé ? Il avance. Lentement. Son souffle chaud caresse ma peau. Il renifle mes bras, mes mains, mes jambes… puis me donne un coup de langue qui me fait frissonner jusqu’à la colonne vertébrale. Ensuite, il s’allonge, plaçant sa tête presque à hauteur de la mienne. Il ne parle pas. Mais je sens qu’il me comprend. Moi : Je m’appelle Léna. Dommage que je ne connaisse pas ton nom… Tu es magnifique. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai envie de te faire confiance. Tes yeux me le disent. Je marque une pause. Mes mains tremblent légèrement. Moi : Je dois retrouver mes amies… elles vont s’inquiéter. Ne t’en fais pas, je ne dirai rien à personne. Mais… j’aimerais qu’on se revoie. Tu peux m’accompagner jusqu’à la rivière ? Je suis complètement perdue. Ses yeux bleus se plantent dans les miens. Il se redresse… et incline légèrement la tête. Puis, à ma stupeur, il s’abaisse, comme pour m’inviter à monter sur son dos. Non… c’est pas vrai… Et pourtant, me voilà, juchée sur un loup géant, mes mains enfoncées dans son épais pelage blanc. C’est si doux… comme du velours chauffé au soleil. L’air frais fouette mon visage tandis qu’il avance, puissant, sûr, sans hésitation. Je ne me sens plus seule. Je sens une chaleur m’envahir, comme un lien invisible qui se tisse entre nous. Des picotements me parcourent, de la nuque jusqu’aux doigts. Je serre mes bras autour de lui, enfouis mon visage dans sa fourrure. Nous arrivons au pont. Il s’arrête. Je descends à contrecœur. Je le regarde. Il me regarde. Ce silence entre nous est plus fort que toutes les paroles. Je lui promets, d’une voix basse mais ferme : Moi : Je reviendrai. À chaque pleine lune. Je te le promets. Je traverse le pont. Mais à chaque pas, je sens mon cœur se serrer. Pourquoi je me sens… connectée à lui ? Pourquoi ce besoin presque douloureux de rester près de lui ? C’est un loup. Pas un homme. Et pourtant… quelque chose, au fond de moi, me crie qu’on se connaît depuis toujours. Je jette un dernier regard par-dessus mon épaule… et mon corps le réclame déjà.
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