10 : Dereck

1400 Words
- Je me pose quand même une question, dis-je à James pendant que nous mangeons nos hot dogs près du lac. - Laquelle ? - Pourquoi avoir laissé tes sentiments prendre le dessus en sachant pertinemment ce qu'il en était ? - Tanya... Je ne t'ai pas reconnu avant qu'on se batte. Quand je t'ai vu, ta beauté m'a bouleversé. Tout ça m'a renversé de plein fouet. Dereck ne m'avait jamais dit que tu étais dans notre lycée. Cet abruti m'a laissé croire qu'il s'entichait d'une humaine... - Comment ça ? - Tu ne l'as peut-être jamais vu, mais lui n'a jamais loupé un seul de tes entraînements depuis le jour où il t'a croisé dans les couloirs. - Pourquoi il est toujours tendu comme un string ? - T'es sérieuse ? Tu n'as pas une petite idée ? - Non. Je ne vois pas ce qui peut pousser quelqu'un à être aussi glacial. Sérieux, il m'a décroché trois sourires en huit jours ! - Tanya, t'es exaspérante ! Souffle James. Dereck a eu dix-huit ans en janvier et depuis ce jour-là, son loup le pousse à te réclamer et te revendiquer ! Mais avec ta situation c'était impossible. Il fallait attendre que ta louve se présente. Et quand enfin, tu le rencontres, tu t'intéresses à tout le monde, sauf à lui ! Comment tu crois qu'il vit le fait de voir sa femme dans les bras d'un autre ? Il a déjà du mal à supporter que moi, je sois proche de toi, et soyons honnête, il est tout à fait conscient de mes sentiments pour toi, alors imagine Max ou Mathis... - Je comprends, bien que, sérieux, je ne vois pas ce qui aurait pu me donner envie d'aller vers lui avec sa tête permanente qui avait envie de me tuer. Mais je dois faire mon deuil de ma relation avorté avec Mathis, dis-je les larmes aux yeux. - Tu l'aimes ? - Je pense que oui, même si je ne crois pas non plus être amoureuse de lui. Je pense que c'est ce qui me sauvera. En-tout-cas, je tiens énormément à lui, peut-être autant qu'à toi... James me prend dans ses bras. - J'aurais dû voler ton cœur avant lui, ça aurait été plus facile pour toi. - Non, parce que Dek t'aurait tué, littéralement. Et je ne supporterais pas de te perdre à nouveau. Même Célia n'a jamais été aussi précieuse à mon cœur que toi... Nous restons à discuter au bord du lac, se remémorant nos souvenirs d'enfants jusqu'à ce que ce soit l'heure pour lui de retrouver l'équipe pour l'échauffement et la préparation d'avant match. En arrivant devant les vestiaires, Dereck est là. Il vient à notre rencontre et fait comprendre à James qu'il peut y aller. - Ton billet pour le match, me dit-il en me tendant un ticket. Ta place est réservée. - Merci, hésité-je en prenant le billet. - Je te laisse le champ libre pour la soirée. Mais n'oublie pas que je suis là si tu as besoin de moi... Il m'embrasse sur le front, laissant mon corps se recouvrir de frissons puis retourne à l'intérieur sans se retourner. Le match ne débutant que dans une heure, il n'y a encore personne dans les gradins. Je trouve rapidement ma place au premier rang avec un sceau de popcorn et une boisson, ainsi qu'un sweat à capuche. Je m'installe et envoie un texto à Célia. Moi : Salut p*****e, je suis déjà sur place, je te réserve un siège, bouge ton cul de me rejoindre ! Célia : Ok, babe. J'arrive ! Juste derrière, je reçois un message de Mathis. Mathis : Salut mon cœur, faut que je te parle. Paraît que t'es là ? Moi : Oui, je suis déjà dans les gradins. Mathis : J'arrive. J'attends deux minutes et je le vois débarquer, déjà en tenue. Je me lève et lui tends les bras. Il me serre très fort. - J'avais besoin de te voir, me dit-il en me reposant. Je voulais pouvoir te laisser partir à ma façon. Je ne sais pas quoi dire, j'ai la gorge qui se serre et les yeux qui se remplissent de larmes. - Ce que je vais te dire m'arrache le cœur, mais... Il faut que je te libère. Donne-lui une chance, comme tu m'as donné la mienne. Je fais non de la tête, laissant les gouttes se déverser sur mes joues. Mathis prend mon visage entre ses mains. - Si, il le faut. Si tu le fais, je n'aurai pas de regret à faire la même chose de mon côté. Mais je ne t'abandonne pas pour autant, d'accord ? Je veux te voir heureuse... - Mais c'est toi que j'ai choisi, soufflé-je. - Je sais, et je le chérirai toute ma vie. - Embrasse-moi une dernière fois... Il n'hésite pas une seconde, m'embrasse passionnément et longuement. Puis, il s'en va, croisant Célia au passage. - Hé ! Qu'est-ce qui ne va pas, chérie ? Me demande Célia en me prenant dans ses bras. Ça ne va pas vous deux ? Je réponds silencieusement que non. Alors, elle me laisse pleurer sur son épaule. Elle me tend un paquet de mouchoirs et quand j'ai essuyé mon visage et que je me suis mouchée, elle me remaquille. - Voilà, tu es magnifique et prête à remonter en selle. '' Tu peux réclamer notre compagnon maintenant. La ferme Mia ! Je te rappelle que c'est parce que t'as pas été fichu de te contrôler qu'on en est là ! '' Les gradins se remplissent. Le soleil se couche, descendant doucement sur l'horizon et je frissonne. Je m'empare du sweat à capuche et remarque un gros numéro dix dans le dos avec SWAN écrit en dessous. - Tu viens quand même à la fête après le match ? Me demande Célia qui regarde d'un œil étrange le sweat que je porte. - Oui. Mathis et moi, nous ne sommes pas fâchés, nous ne pouvons tout simplement pas être ensemble. Le proviseur prend enfin la parole pour annoncer le début du match et les équipes sont appelées sur le terrain. Je me laisse emporter par l'ambiance et me lève avec Célia pour supporter notre équipe. - Aller les Red Lions ! Les trois joueurs les plus importants à mes yeux se tournent vers nous et souris. Ça me remplit de bonheur et m'apaise. C'est le match le plus passionnant que j'aie regardé jusqu'à présent. On est à une minute de la fin, mais on est toujours à égalité. Mathis a le ballon, mais il est à l'autre bout du terrain. Dereck se démarque, mais il est très loin. - Vas-y, Mathis ! Crions-nous d'une même voix. Son lancer est magnifique et Dereck rattrape le ballon à la perfection. Après une salve de cris de joie et d'applaudissement le silence se fait dans les gradins. Tout le monde retient son souffle, car Dereck se retrouve coincé et il ne reste plus que quinze secondes. - Tu peux le faire, Dereck ! C'est moi qui ai crié ça ? Oui, c'est bien moi, il tourne la tête vers moi, sourit et s'élance. Évitant ses adversaires tel un cobra, il marque le dernier touchdown sur la dernière seconde. Les Red Lions gagnent le match. Je suis fière d'eux. L'équipe soulève Dereck pour le glorifier, puis le repose à terre. Il enlève son casque, le confie à James et se met à courir dans notre direction, le visage rayonnant, il est d'une telle beauté... Soudain, je me retrouve au bord du terrain, je ne me souviens même pas être descendue. Il ne s'arrête pas dans son élan et me prend dans ses bras, me soulevant de terre. Un bras dans mon dos, une main sous mes fesses, mes jambes s'enroulent autour de sa taille, il enfouit son nez dans mon cou, j'enroule mes bras autour du sien et lui rend son étreinte qui me rend toute chose. Je m'écarte pour le regarder dans les yeux. Les paroles de Mathis résonnent dans ma tête : '' Donne-lui une chance, comme tu m'as donné la mienne.'' - Mien. Ce simple mot fait écho entre nous avant que ses lèvres s'écrasent contre les miennes. Tout me revient en tête, notre complicité d'autrefois et nos chamailleries ainsi que l'horreur de notre séparation alors que nous étions trop petits pour comprendre ce qui nous arrivait.
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