Chapitre 1

1915 Words
1 Dix-huit mois plus tôt J’ai dix-sept ans quand je le rencontre pour la première fois. J’ai dix-sept ans et je suis folle de Jake. ― Nora, allons-y, ce n’est pas intéressant, me dit Leah. Nous regardons le match, assises sur les gradins. Un match de football américain. Je n’y connais rien, mais je fais comme si ça me plaisait parce que ça me permet de le voir. De le voir tous les jours s’entraîner sur ce terrain. Évidemment, je ne suis pas la seule à regarder Jake. C’est l’attaquant de l’équipe et le garçon le plus sexy qui soit, en tout cas, le plus sexy du quartier d’Oak Lawn, à Chicago, dans l’Illinois. ― Si, c’est intéressant, lui dis-je. Le football, c’est super ! Leah roule des yeux. ― Ben voyons ! Alors, va lui parler ! Tu n’as pas ta langue dans ta poche, pourquoi ne pas faire en sorte qu’il te remarque ? Je hausse les épaules. Jake et moi ne fréquentons pas les mêmes gens. Il est toujours entouré de majorettes qui lui font les yeux doux et je l’ai observé assez longtemps pour savoir qu’il préfère les blondes de grande taille aux petites brunes. Et d’ailleurs pour le moment ça m’amuse de m’en tenir là et d’être simplement attirée par lui. Et je sais ce que je ressens. Du désir. Qui vient de mon système hormonal, tout simplement. Je ne sais pas si la personnalité de Jake me plairait, mais il est clair que j’aime le regarder torse nu. À chaque fois qu’il passe près de moi, je sens mon cœur battre la chamade tant il m’excite. Je brûle de l’intérieur et j’ai envie de me tortiller sur mon siège. Et je rêve de lui la nuit. Des rêves sexy, des rêves sensuels, je rêve qu’il me tient la main, qu’il me touche le visage, qu’il m’embrasse. Nos corps se touchent, se frottent l’un contre l’autre. Nous enlevons nos vêtements. J’essaie d’imaginer comment ça serait de faire l’amour avec Jake. L’an dernier, quand je sortais avec Rob, on a failli aller jusqu’au bout, mais je me suis aperçue qu’il avait couché avec une autre fille à une fête après avoir trop bu. Il s’est répandu en excuses quand je lui ai demandé ce qu’il en était, mais je ne pouvais plus lui faire confiance et nous avons rompu. Et maintenant, je suis bien plus prudente avant de sortir avec quelqu’un, tout en sachant que tous les garçons ne sont pas comme Rob. Mais Jake est peut-être comme lui. Il a tellement de succès, ce doit être un coureur. Quoi qu’il en soit, la première fois que je ferai l’amour je voudrais vraiment que ce soit avec Jake. ― On devrait sortir ce soir, dit Leah. Entre filles. On pourrait aller à Chicago pour fêter ton anniversaire. ― Mon anniversaire n’est que dans une semaine. Je le lui rappelle tout en sachant qu’elle a marqué la date sur son calendrier. ― Et alors ? On peut anticiper. Je lui souris. Elle a toujours tellement envie de s’amuser. ― Je n’en suis pas sûre. Et s’ils nous mettent de nouveau à la porte ? Ces fausses cartes d’identité ne sont vraiment pas super… ― On ira ailleurs. On n’a pas besoin de retourner à Aristote. Aristote était de très loin la boîte de nuit la plus cool de la ville. Mais Leah avait raison, il y en avait d’autres. ― D’accord, lui dis-je. Allons-y ! On va anticiper. Leah vient me chercher à 21 heures. Elle s’est habillée pour sortir en boîte, un jean noir moulant, un débardeur noir en lurex, des cuissardes à talon haut. Sa chevelure blonde éclaircie par un balayage est parfaitement lisse et lui tombe en cascade dans le dos. Par contre, je porte encore mes baskets. J’ai caché mes escarpins dans le sac à dos que je laisserai dans la voiture de Leah. Un gros pull dissimule le petit haut sexy que j’ai mis. Je ne suis pas maquillée et j’ai une queue de cheval. C’est pour n’éveiller aucun soupçon que je quitte la maison comme ça. Je dis à mes parents que je vais passer la soirée avec Leah chez une autre copine. Ma mère me sourit et me dit de bien m’amuser. Maintenant que j’ai presque dix-huit ans, j’ai la permission de minuit. Enfin, c’est tout comme, il n’y a rien de précis. Du moment que je rentre chez moi avant que mes parents commencent à s’inquiéter ou que je leur dis où je suis, tout va bien. Une fois dans la voiture de Leah je commence à me préparer. J’enlève le gros pull, faisant apparaître le débardeur moulant que je porte dessous. J’ai mis un soutien-gorge à balconnet pour donner plus de volume à mes formes plutôt modestes. Les bretelles du soutien-gorge ont été conçues de telle manière qu’elles sont vraiment mignonnes, si bien que ce n’est pas gênant de les voir dépasser. Je n’ai pas de jolies bottes comme Leah, mais j’ai réussi à prendre en cachette ma plus jolie paire d’escarpins. Ils me grandissent d’environ dix centimètres. Comme chaque centimètre compte pour moi, j’enfile les escarpins. Ensuite, je sors ma trousse de maquillage et j’abaisse le pare-soleil pour me voir dans la glace. J’y retrouve ces traits que je connais bien : de grands yeux marron et des sourcils noirs bien dessinés dominent mon petit visage. Un jour, Rob m’a dit que j’avais un look exotique et ce n’est pas faux. Bien que je n’aie du sang latino que du côté de ma grand-mère, j’ai toujours l’air d’être un peu bronzée, et mes cils sont d’une longueur inhabituelle. Tes faux cils dit Leah, mais ils sont parfaitement à moi. Je me trouve pas mal, même si j’aimerais être plus grande. Ce sont mes origines mexicaines qui sont responsables de ma petite taille. Ma grand-mère était toute petite et moi aussi, bien que mes parents soient tous les deux de taille moyenne. Ce qui me serait égal si Jake ne préférait pas les filles de grande taille. Je ne pense même pas qu’il puisse me voir quand on passe dans le couloir, je ne suis pas dans son champ de vision. En soupirant, je mets du gloss et de l’ombre à paupières. Avec le maquillage, je n’en rajoute pas, je suis mieux en restant naturelle. Leah augmente le volume de la radio et les dernières chansons pop envahissent la voiture. Je souris et je me mets à chanter avec Rihanna. Leah se joint à moi et bientôt nous entonnons à pleins poumons les paroles de S & M. En un clin d’œil, nous arrivons à la boîte de nuit. Nous y entrons avec l’air du propriétaire. Leah adresse un grand sourire au videur et nous sortons nos cartes d’identité. On nous laisse rentrer sans problèmes. Nous ne sommes jamais allées dans cette boîte, elle est dans un quartier assez ancien, un peu décrépi du centre-ville de Chicago. ― Comment as-tu trouvé cette boîte ? ai-je demandé à Leah en criant, il faut élever la voix à cause de la musique. ― C’est Ralph qui m’en a parlé, répond-elle, et je roule des yeux. Ralph est l’ancien petit ami de Leah. Ils ont rompu quand il a commencé à se conduire d’une façon bizarre, mais quoi qu’il en soit ils continuent de se voir. J’ai l’impression qu’il se drogue. Je n’en suis pas sûre et Leah ne veut pas m’en dire davantage, elle a tort de faire preuve de loyauté envers lui. C’est le roi de l’embrouille et le fait que nous soyons venues ici sur ses recommandations n’est pas vraiment rassurant. Mais peu importe. C’est vrai que le quartier n’est pas super, mais la musique est cool et la diversité des danseurs aussi. Nous sommes venues faire la fête et c’est exactement ce que nous faisons dans l’heure qui suit. Grâce à Leah, deux garçons nous offrent un verre. Nous n’en buvons qu’un. Leah, parce que c’est elle qui conduit, et moi parce que l’alcool ne me réussit pas. Nous avons beau être jeunes, nous ne faisons pas n’importe quoi. Après avoir bu, nous allons danser. Les deux garçons qui nous ont invitées dansent avec nous, mais petit à petit nous nous éloignons d’eux. Ils ne sont pas si mignons que ça. Leah trouve un groupe de garçons plus âgés que nous et super sexy et nous nous faufilons vers eux. Elle engage la conversation avec l’un d’eux et je souris en la regardant faire. Elle est vraiment douée pour flirter. Entretemps, ma vessie m’avertit qu’il faut que j’aille aux toilettes. Alors je les laisse et j’y vais. En revenant, je demande un verre d’eau au barman. J’ai soif à force de danser. Il me le donne et je le bois d’un trait. Quand j’ai fini, je pose le verre et je lève les yeux. Ils en croisent deux autres, deux yeux bleus perçants. Il est assis à l’extrémité du bar, à trois mètres environ. Et il me regarde fixement. Je le fixe des yeux à mon tour. Je ne peux pas m’en empêcher. C‘est probablement le plus bel homme que j’aie jamais vu. Ses cheveux sont bruns et légèrement bouclés. Son visage est dur et viril, chacun de ses traits parfaitement symétriques. Des sourcils droits et sombres surplombent ces yeux étonnamment pâles. Une bouche qui pourrait être celle d’un ange déchu. En imaginant cette bouche toucher ma peau, mes lèvres, je me mets à brûler. Si j’avais tendance à rougir, je serais rouge comme une tomate. Il se lève et se dirige vers moi sans me quitter des yeux. Il marche sans hâte. Tranquillement. Il est parfaitement sûr de lui. Et pourquoi en serait-il autrement ? Il est très beau, et il le sait. À son approche, je me rends compte que c’est un homme imposant. Grand et costaud. Je ne sais pas quel âge il a, mais je devine qu’il est plus proche de trente ans que de vingt. C’est un homme, pas un garçon. Il se tient près de moi et j’en oublierais presque de respirer. ― Comment t’appelles-tu ? demande-t-il d’une voix douce. Sa voix domine la musique, ses notes graves sont audibles malgré le bruit qu’il y a tout autour. ― Nora, dis-je à voix basse en levant les yeux vers lui. Il me fascine complètement et je suis sûre qu’il s’en rend compte. Il sourit. Ses lèvres sensuelles s’entrouvrent et révèlent des dents régulières et très blanches. ― Nora. Ce nom me plait. Il ne se nomme pas alors je prends mon courage à deux mains et lui demande : ― Comment vous appelez-vous ? ― Tu peux m’appeler Julian, dit-il et je regarde le mouvement de ses lèvres. Je n’ai jamais eu une telle fascination pour la bouche d’un homme. ― Quel âge as-tu, Nora ? demande-t-il ensuite. Je cligne des yeux. ― Vingt-et-un ans. Il s’assombrit. ― Dis-moi la vérité. ― Presque dix-huit ans, ai-je admis à regret. J’espère qu’il ne va pas le dire au barman et me faire jeter dehors. Il hoche la tête comme si je venais de confirmer ses soupçons. Et puis il lève la main et me touche le visage. Doucement, légèrement. Son pouce se frotte contre ma lèvre inférieure comme s’il se demandait ce qu’on ressent en le faisant. Je suis saisie d’un tel choc que je reste là, sans bouger. Personne ne m’a jamais fait une chose pareille, me toucher d’une manière si désinvolte, si possessive. J’ai chaud et froid en même temps, et la peur me serpente le long du dos. Il n’y a pas la moindre hésitation dans ses gestes. Il ne demande pas la permission, il n’attend pas de voir si je vais lui permettre de me toucher. Il se contente de me toucher. Comme s’il avait le droit de le faire. Comme si je lui appartenais. Je respire en tremblant et je recule d’un pas. ― Il faut que je parte, ai-je murmuré et de nouveau il hoche la tête en me regardant avec une expression insondable sur son beau visage. Je comprends qu’il me laisse partir et je lui en suis misérablement reconnaissante, parce qu’au plus profond de moi-même quelque chose me dit qu’il aurait aisément pu aller plus loin et qu’il n’obéit pas aux règles habituelles. Et je me dis que c’est sans doute l’être le plus dangereux que j’aie jamais rencontré. Je me retourne et je me fraye un chemin dans la foule. Mes mains tremblent et mon cœur bat à tout rompre. Il faut que je parte alors j’attrape la main de Leah et je l’oblige à me ramener à la maison. En sortant de la boîte de nuit, je me retourne et je le vois de nouveau. Il n’a pas cessé de me fixer des yeux. Il y a une sombre promesse dans ce regard, quelque chose qui me donne le frisson.
Free reading for new users
Scan code to download app
Facebookexpand_more
  • author-avatar
    Writer
  • chap_listContents
  • likeADD