Ce matin-là, je me réveillai avec un battement étrange au creux de la poitrine. Quelque a choisi entre la nervosité et l'impatience. Il faisait encore un peu de frais dans la pièce, mais la lumière douce filtrante par la fenêtre me donnait envie de sourire. Aujourd'hui, je voulais faire un effort. Un vrai. Versez-lui. Verse-moi.
Je glissai hors du lit, les pieds nus sur le parquet lisse, les ailes encore froissées par le sommeil. J'hésitai un instant, puis quittai la chambre en silence et traversai le couloir jusqu'à celle d'Arlen. J'avais besoin de lui… surtout pour quelque chose d'aussi délicat.
Je toquai doucement.
— Entre, chantonna sa voix joyeuse depuis l'intérieur.
J'ouvris timidement la porte. Il était en train d'ajuster une chemise à motifs devant le miroir.
— Néryn ! Bien dormir ? s'exclama-t-il en se retournant avec un grand sourire.
— Oui… euh… j'ai besoin de ton aide, murmurai-je, en triturant nerveusement le bord de ma tunique.
— Aide pour… ? Il haussa un sourcil, intrigué. Tu veux que je t'enseigne la danse des omégas en chaleur ou... ?
— Non ! m'écriai-je, les joues en feu. Versez… une habitude. J'aimerais… être un peu plus… joli. Enfin… je veux dire… quelque chose de mignon, mais… pas trop…
Ma voix se perdit dans ma gorge tandis que je baissais les yeux, les joues brûlantes.
Arlen ouvre de grands yeux ronds, puis éclata de rire.
— Aaaah, je vois ! Monsieur veut faire effet ce matin ! Quelqu'un a un petit rendez-vous sentimental ?
— Ce n'est pas un rendez-vous, protestai-je à demi-voix, fuyant son regard taquin.
Il me prend la main et m'entraîne vers l'armoire avec un air déterminé.
— On va trouver quelque chose de parfait. Mignon. Subtilement séduisant. Le genre de tenue qui dit « je suis adorable mais regarde encore une fois et tu tomberas amoureux ».
Je le laisse faire, un peu intimidé par son enthousiasme, mais secrètement rassuré. Finalement, il me fit enfiler une chemise en lin crème, légèrement évasée au bas, avec un petit col rond, et un pantalon souple assorti. Mes ailes ressortaient légèrement dans le dos, et la coupe soulignait ma silhouette frêle, presque aérienne.
—Parfait. Tu es à croquer. Même un Alpha en pierre fondrait devant toi.
Je rougis, mais je souris aussi.
Nous descendîmes ensuite prendre le petit-déjeuner. La maison était paisible, baignée par les parfums de pain chaud et de fruits mûrs. Quand j'entrai dans la salle à manger, mon regard tomba aussitôt sur Lyam.
Il était là, assis à sa place habituelle, les cheveux encore un peu humides, vêtus de noir comme toujours. Il tourna la tête en sentant notre présence, et quand nos regards se croisèrent, il m'adressa un petit sourire discret.
Sans réfléchir, je lui souris en retour.
Mon cœur battait plus vite. Je prends une inspiration discrète et, sans attendre de réponse d'Arlen, je contournai la table et les vins m'asseoir à côté de lui. Je sens la chaleur monter à mes jouets à mesure que je rapproche de ma chaise.
Il ne dit rien, mais je sens ses yeux sur moi. Je me concentre sur mon assiette, piquant distraitement des morceaux de fruits, tout rouge, mais incapable d'arrêter de sourire. C'était stupide. Ridicule, même. Et pourtant… je me sentais bien.
Pendant un long moment, nous mangeâmes en silence. Parfois, je sentais son regard se poser sur moi. Quand je tourne timidement la tête, il représente calmement son repas. Mais ses lèvres semblaient retenir un sourire.
Ce n'est qu'après que je remarque enfin une absence étrange.
Je jetai un œil autour de la pièce, fronçant les sourcils.
— Où est Lioran ? demandai-je en me tournant vers Lyam. Il… il ne vient pas manger ?
Lyam s'essuya doucement les lèvres avec sa serviette, avant de répondre d'un ton tranquille :
— Il est rentré chez lui. Hier soir.
Je clignai des yeux, surprise.
- Oh.
Un sentiment étrange me traverse. Un soulagement… presque coupable. J'ignorais pourquoi. Mais mon cœur, lui, semblait avoir compris quelque chose que ma tête refusait encore d'admettre.
Je m'étais à peine calmé que la voix d'Arlen résonna, joyeuse et enjouée, rompant le calme du repas :
— D'ailleurs, Neryn, si tu es libre aujourd'hui, que dirais-tu d'aller faire un peu de shopping en ville avec moi ? Tu sais, trouver d'autres tenues mignonnes, plus variées ? Ça te ferait du bien de sortir un peu, non ?
Je relève la tête, surprise, puis tourne timidement mon regard vers Lyam.
— C'est… c'est possible ? demandai-je, comme si j'attendais une permission.
Lyam s'était arrêté de manger. Il nous observe un instant tous les deux, puis hocha la tête avec un léger sourire.
— C'est une bonne idée, dit-il simplement. Tu devrais découvrir un peu plus le monde en dehors de la meute. Et avec Arlen, je suppose que tu ne risques pas grand-chose.
Arlen leva les yeux au ciel, faussement vexé.
— « Je suppose » ? Je suis l'oméga le plus responsable de toute cette maison, je te signale !
Lyam ne relève pas, mais un amusement tranquille flotte dans son regard. Puis, après avoir bu une gorgée de thé, il se tourne vers moi, ses prunelles sombres se posent directement sur les miennes.
— Mais évitez de trop traîner, ajouta-t-il d'un ton calme. Et surtout, évitez les alphas trop collants.
Je rougis jusqu'aux oreilles. Arlen éclata de rire.
— Ooooh, t'est jaloux ! Attention, Neryn, tu es probablement sous protection rapprochée !
— Arlen, gronda doucement Lyam.
— Je n'ai rien dit, chef, répondu à l'oméga en faisant mine de sceller ses lèvres.
Je baissai les yeux sur mon assiette, incapable d'arrêter de sourire. Mon cœur battait très vite, et je ne savais pas si c'était la perspective de sortir ou simplement ce que Lyam venait d'insinuer… Même sans me toucher, il avait cette étrange manière de poser des frontières invisibles autour de moi.
Des frontières qui… me plaisaient un peu trop.
Alors qu'Arlen s'activait joyeusement pour finir son petit-déjeuner et me parlait déjà des boutiques qu'il comptait me montrer, je sentais le regard de Lyam se poser à nouveau sur moi. Je tourne la tête et croisai ses yeux. Il avait ce calme contenu, cette présence tranquille mais solide, presque immobile au milieu de toute l'agitation d'Arlen.
— Neryn, dit-il doucement.
Je sursautai légèrement.
— Oui… ?
Il attendit que je sois pleinement tourné vers lui. Son regard s'était légèrement adouci. Il ne souriait pas, mais une chaleur discrète flottait sur ses traits.
Il se lève lentement de sa chaise et se pencha à mon niveau, à peine plus près que d'habitude. Sa voix se fit basse, presque murmurée.
— Tu n'allais quand même pas oublier de me faire un bisou, si ?
Je reste figé, incapable de répondre. Mon cœur rata un battement. Arlen s'était arrêté net, une cuillère suspendue dans sa main et un sourire suspendu à ses lèvres.
— Un… un bisou ? répétai-je, confus et terriblement rouge.
Lyam n'a répondu pas tout de suite. Il attendait, silencieux, les yeux plantés dans les miens. Pas moqueur. Pas insistant. Juste… sincère.
Alors, hésitent, je me penchai lentement en avant. Mon cœur battait la chamade. Mes lèvres tremblaient. Et avec une douceur presque timide, je dépose un rapide b****r sur sa joue.
— Voilà…, murmurai-je, incapable de le regarder.
Lyam reste immobile une seconde. Puis je sens sa main effleurer ma nue, douce, chaude, rassurante.
— Merci, dit-il. Bonne promenade, Neryn.
Je hochai la tête sans un mot, et Arlen, visiblement enchanté de la scène, me saisit doucement par la main pour m'entraîner vers la sortie.
— Allez, mon petit cœur battant, on va te trouver une tenue qui lui coupera le souffle au prochain dîner.
Je jetai un dernier regard vers Lyam en sortant. Il me regardait encore.
Et, pendant tout le trajet jusqu'en ville… j'avais encore la sensation de sa joue contre mes lèvres.