Entre deux mondes

657 Words
Le soleil filtre doucement à travers les rideaux clairs de ma chambre. J'étais déjà réveillé depuis longtemps, mais je n'avais pas envie de bouger. Le silence de cette maison n'était pas le même que celui de la forêt. Ici, il avait quelque chose de calme, d'envelopper. Pas d'oiseaux aux feuilles chants espiègles, pas de bruissements de ou de murmures des autres fées dans l'air. Juste une paix… étrange, presque inquiétante. Une voix frappa doucement à la porte. — Néryn ? Tu es réveillé ? Je peux entrer ? C'était Arlen. — Oui. Il entre en souriant, comme toujours. Il portait un pantalon simple et une tunique légère, beige pâle, nouée à la taille. Ses cheveux bruns, un peu trop longs, tombaient en mèches rebelles sur son front, et ses yeux noisette pétillaient comme s'il n'avait jamais eu une seule pensée morose. — On va s'occuper des plantes du jardin. Tu viens avec moi ? Je haussai les épaules, mais il savait déjà que ça voulait dire oui. Le jardin était à l'arrière de la maison, et rien qu'en sortant, je fus frappé par l'odeur de la terre, du romarin, du thym, des fleurs jaunes aux formes étranges. Arlen me mit une petite pelle dans les mains. — Ces plantes-là, sur les utiliser pour les thés de guérison. Celles-ci pour les potions de sommeil. Tu veux les sentir ? Je hochai la tête. Certaines dégageaient des parfums doux, d'autres piquants. Une odeur rappellera celle des feuilles humides dans la forêt après une averse. Une mémoire douce-amère remontée. — Chez vous, vous avez des jardins aussi ? demanda Arlen en arrosant une plante à grandes feuilles. — Pas comme ça. Les plantes poussent autour de nous. Sur les chants. — Vous les… chantez ? Je hochai la tête. Je savais que ça paraîtrait bizarre. — Les fées ne coupent pas. Elles demandent. Si une plante accepte, elle se donne. Arlen resta un instant figé, les yeux écarquillés. — C'est beau… Ça fait rêver. Il s'agenouilla à côté de moi pour observer une graine que je venais de planter. — Et toi, t'étais quoi, là-bas ? Une soigneuse ? Une… verte ? Je serrei la tête. — Rien de tout ça. J'étais une petite main. Il parut hésiter, comme s'il ne savait pas ce que ça signifiait exactement. Je le regarde du coin de l'œil. Il n'osa pas demander. J'étais reconnaissant pour ça. — Ici, tu pourrais devenir autre chose, tu sais. Ce n'est pas figé. Je ne répondis pas. L'après-midi passe doucement. Arlen me laissa seul pour vaquer à d'autres tâches. Je retourne dans ma chambre. L'air était tiède. La lumière du soleil dessinait des traits dorés sur le sol de bois. Je m'assis près de la fenêtre. Je sortais le livre que j'avais récupéré sur l'étagère le premier jour, mais mes yeux glissaient sur les mots sans les lire. Mes pensées dérivaient vers Lyam. Un cours. Un échange. Pourquoi ? Pourquoi moi ? Je n'étais pas spécial. Juste… une erreur. Une anomalie née d'un arbre qui ne m'avait pas voulu. Et pourtant, demain, il allait me parler. M'enseigner. Me considérer, peut-être. Je regarde mes mains. Mes doigts, légèrement argentés sous la lumière. Mes ailes étaient invisibles pour l'instant, répondues, comme si mon corps lui-même voulait se faire oublier. Et pourtant, j'étais ici. En vie. Dans un monde nouveau. Un monde vaste, inconnu, dangereux, peut-être. Mais plein de possibles. Je murmurai, à moi-même à la pièce, à l'air tiède : « Peut-être que je suis quelque chose… même si je ne sais pas encore quoi. » Mes doigts effleurèrent la feuille séchée glissée sous mon oreiller. Une relique de l'Arbre-Mère. Elle était si fragile maintenant, presque transparente. Mais elle avait survécu. Comme moi. Je m'allongeai, regardant le plafond. Un léger sourire naquit sur mes lèvres. Pas de joie. Mais de reconnaissance. Peut-être qu'au bout de cet échange, je ne serais plus seulement une anomalie. Peut-être que je deviendrais… quelqu'un.
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