1.1
-Bim bam
À répétition résonnait au loin, pas étonnant il était six heures, et vue qu’aujourd’hui c’est jeudi c’est sans doute l’abbé Étienne qui fait sonner les cloches pour annoncer l’heure des Laudes. Je suis debout depuis plusieurs 5h et je suis prête depuis quinze minutes, je n’attendais que ce moment. Cette semaine c’est l’abbé Ambroise qui est chargé des Laudes, alors je me lève très tôt le matin pour pouvoir être à l’heure et bien préparer. C’est lui mon père spirituel et c’est aussi lui qui m’a administré tous mes sacrements, du baptême à la confirmation quand j’étais à l’orphelinat. De plus c’est chez lui que je me confesse la plupart du temps, il est très gentil. Mais ce n’est pas pourquoi je me lève tôt pour être à l’heure, or mis le fait que je l’admire beaucoup et que je tiens à lui donner une bonne image de mois, il y a aussi le fait que j’aime l’entendre chanter les psaumes et les cantiques. Il a une très belle voix et surtout son enseignement est plein de sagesse. Il sait nous faire désirer le ciel, car qu’y a-t-il de plus précieux que le ciel ? Rien. Tout ce que nous avons sur cette terre est éphémère et comme il le dit souvent, notre vie sur terre est comme l’épreuve qu’on doit réussir pour avoir accès au ciel. Et je compte y aller surtout entraîner avec moi le plus grand nombre possible. J'espère qu'un jour, je serais consacré sœur du sacré cœur de Jésus. C’est la même congrégation que celle du père Ambroise et au fond de moi, je prie le ciel que l’on ne m’envoie pas trop loin de lui. Il est pour moi un modèle et mon admiration pour lui n’a de borne que ma foi en Dieu. Il est tellement bon et tellement pieux, j’espère qu’il sera canonisé après sa mort, car il mérite la sainteté.
– Sœur Kiria, tu es prête ? Demande Solène ma cochambriaire. Ou ma camarade de chambre si vous préférez. Elle est postulante et est arrivé ici, il y a un an, moi, c'est ma quatrième année, normalement, je prononce mes vœux temporaires dans moins de six mois donc je suis son aînée. C’est plaisant D’être considéré comme aînée quelque part et être respecté en tant que tel. À l’orphelinat jusqu’à ma dernière année, j'étais considéré comme un rebut personne ne voulait être ami avec moi et personne ne me respectait. Si tu ne voulais pas être celle qui torture les autres, tu es celle qui se fait torturer par les autres. Alors, j'acceptais les tortures, car faire le mal à son prochain est proscrit par les saintes écritures. Aujourd’hui, je leur ai toutes pardonnée. Toutes celles qui m’ont fait du mal. Et j’ai même dû me confesser pour avoir un jour penser du mal d’eux, car combien de fois, on a offensé Dieu, mais dans sa grande miséricorde il nous a pardonné alors, je me dois de pardonner aussi à tous ceux qui m’offense comme il nous l’a demandé
- Oui Solene, je suis prête, on peut y aller. Dis-je en me levant du lit. Je pris ma bible et j’ajustai mon voile
Après la prière et les offices religieuses, je me suis rapproché du père Ambroise pour le saluer, je n'ai pas pu le faire depuis le début de la semaine.
- Soeur Kiria, comment tu vas ?
- Je vais bien mon père merci et vous ?
- Je vais bien par la grâce de Dieu. Je t’ai aperçu depuis le début de la semaine, mais tu n’es pas venu me dire bonjour.
- Pardon mon père. Dis-je honteuse. Je ne voulais pas vous déranger. Avec le père Ambroise, je calculais toujours tout, ce qui n’était pas le cas avec les autres, j'essayais de me retenir de ne pas trop en faire, je ne sais pas pourquoi je le faisais c’était naturel. Peut-être était-ce toujours dans mon désir de l’impressionner ou était-ce dû à mon admiration pour lui, je n’en ai aucune idée.
- Tu ne me déranges jamais mon enfant de plus, nous entrons bientôt dans le temps du carême prière partage et pénitence. Est-ce que tu te sens prête pour ce temps fort de la vie Chrétienne ?
- Oui mon père, je vais me confesser avant mercredi prochain, pour pouvoir être dans le bon état d’esprit.
- Tu pourras venir me voir dimanche après la messe et je vais te confesser. Je tenais aussi à te voir pour t’informer que c’est ma dernière semaine ici à la paroisse. Lundi, je vais m’envoler pour le Mozambique. J’irais en mission là-bas pour deux ans. Deux ans ? Pensais je. C’était trop long.
- Mais mon père, je prononce mes vœux temporaires le 5 juin. Je pensais que c’était vous… commençais-je sans pouvoir finir, j’étais déboussolé. C’est toujours lui que j’ai connu toutes les grandes étapes de ma vie religieuse ont été faites par lui et là, c'est un grand tournant et il part pour deux ans ? Je me sentais abandonné, comme mes parents m’avaient abandonné et comme aussi mon frère m’avait abandonné
- Je sais sieur Kiria, je vais essayer de revenir pour ta consécration. Tu sais que je tiens particulièrement à toi. Dit-il en posant sa main sur mon épaule et je me sentis fiers. Alors, il tenait à moi autant que je tenais à lui ? Tu sais qu’on ne repousse pas l’appel de Dieu ajouta-t-il de plus le Mozambique est ma terre natale, j'y suis né et j'y ai grandi avant de revenir ici dans mon pays d'origine pour entrer au grand séminaire. Alors, il me plaît d’y retourner auprès des miens.
- Je sais mon père
- C’est bien mon enfant. Dit-il en posant maintenant la main sur ma tête. Dimanche après la confession, tu viendras déjeuner avec moi et on passera la journée ensemble au presbytère. Je le regarda les yeux brillants.
- Père Ambroise. Intervint une voix au loin et on se retournait, on vit la mère supérieure. Le père Ambroise s’éloigna de moi et marcha deux pas vers elle. Je vous cherchais. Dit-elle en arrivant à son niveau.
- Je m’entretenais un peu avec la sœur Kiria concernant mon départ.
- Je me doutais bien que c’était le sujet. C’est votre petite protégée dit-elle. Et je me sentis gonflée les épaules. Soeur Kiria rejoint les autres au réfectoire, l’heure avance et bientôt, il sera l’heure des méditations quotidiennes et des lectures.
-d’accord ma soeur. À bientôt mon père. Dis-je dans une révérence avant de me lancer vers le réfectoire le cœur battant à la fois de joies et de peines. Mais Dieu saura m’apaiser pensais-je.
La fin de la semaine fut compliquée. Comment vous expliquer que j’étais partagé entre la hâte que dimanche arrive vite et le désir que ça n’arrive jamais. Oui, je voulais de cette journée autant que je t’en voulais pas. Si vous vous posez la question, non, je ne suis pas folle, j’aime juste passer du temps avec le père Ambroise, mais ce dimanche signifie aussi que je ne le reverrai pas avant beaucoup trop de temps. Je suis debout depuis bien trop longtemps. Il doit être aux environs de 4h je n’arrête pas de tourner dans le lit implorant le matin, aujourd’hui c’est dimanche, le dernier dimanche du temps ordinaire avant le début du carême, mais aussi. Mon fameux dimanche.
- Soeur Candice, tu ne dors pas ? Demanda Solene depuis son lit à l’étage du mien.
-Non Solene et apparemment toi non plus.
- Je dormais, mais les bruits que tu fais avec ta couette m'ont réveillés. Dit-elle d’une petite voix.
- Oh pardon, je ferai moins de bruits. Dis-je en prenant une position confortable. Au bout d’un moment de silence, elle reprit
- Cette semaine, c'est notre groupe qui est chargé de la cuisine. Soeur Emerance m’a laissé savoir hier que nous irons à trois faire les courses après le petit déjeuner après la messe.
- Ce n’est pas possible, je passe la journée avec le père Ambroise au presbytère. Elle se leva brusquement du lit penchant sa tête vers le bas.
- Vous ne serez que tous les deux ?
- Je ne sais pas.
- Evite de te retrouver seul avec lui.
- Et pourquoi ça ?
- Les rumeurs cours sœur kiria.
-Les rumeurs ? De quel ordre ? Demandaisje curieuse.
- Vous vous souvenez de sœur Lorette qui avait été renvoyée de couvant il y a de cela trois mois ?
- Oui, son motif de renvoi n’avait pas été divulgué, mais elle a dit faire quelque chose de grave pour être renvoyée à ce stade-là. Elle avait pourtant un niveau bien avancé. Lorette et moi n’étions pas proche, d’ailleurs ici à part Solène, je ne suis réellement proche de personne, tout comme à l’orphelinat, je n’ai pas d’amis, personne ne veut être mon amie tout comme personne n’a jamais voulu m’adopter tout comme mon propre frère n’avait pas voulu prendre ma garde.
- Il se dit qu’elle avait accusé le père Ambroise de viol,
- Doux Jesus! Solene! D’où sors-tu de telles accusations ? M’exclamais-je en me levant du lit avec fureur pour regarder Solene qui maintenant me regardait aussi essayant de sonder à travers mes yeux pour voir si j’étais en colère, mais je n’avais jamais su réellement l’être, en général ce que je percevais en moi comme colère et fureur les autres le voyaient comme si j’étais juste embêté ou perturbé. J’étais de nature très douce, un peu trop des fois.