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1218 Mots
Les festivités finies, Aikon me raccompagne jusqu’à mes appartements. Une fois loin des regards, je laisse ma main glisser de son bras à la sienne et l’entraîne derrière moi. Nos rires résonnent autour de nous tandis que nous grimpons les marches quatre à quatre. Arrivés en haut, je profite de l’absence des regards jugeurs et indiscrets pour l’embrasser. Ses bras se referment autour de ma taille et me tirent contre lui. Nos lèvres jouent ensemble, accélérant par moments, ralentissant par d’autres. Je gémis, frémis, frissonne, brûle d’un désir ardent prêt à m’enflammer toute entière. Il me pousse contre le mur. Son corps collé contre le mien, ses mains glissent de ma taille jusqu’à mes… — Altesse, Majesté ! Nous sursautons en même temps. Fiona se tient devant nous, le regard réprobateur et les poings sur les hanches. — Je ferais mieux d’y aller, déclare Aikon. (Il attrape ma main, les lèvres étirées en un sourire presque imperceptible :) A demain, chère fiancée. Il m’embrasse le dos de la main puis adresse un signe de tête à ma servante que je suis à contrecœur. Fatiguée par cette journée et les dix minutes de réprimande de Fiona, c’est avec grand plaisir que je finis enfin par m’installer confortablement sous les couvertures. — Bonne nuit Altesse. — Bonne nuit Fiona. Elle m’adresse un sourire et sort de la pièce. La porte refermée, je tente de trouver le sommeil, mais c’est sans compter sur les événements de la journée et tous les moments passés avec Aikon qui ne cessent de se rejouer dans mon esprit. Décidée à ne pas perdre inutilement mon temps à attendre le sommeil qui refuse de venir, j’attrape la petite lampe de poche rangée dans le tiroir de ma table de nuit tout en enfilant une robe de chambre et des chaussons. Un drôle de frisson me parcourt la colonne vertébrale tandis que je m’aventure dans le couloir plongé dans la pénombre. A cette heure-ci tout le monde est couché. Seuls quelques gardes postés çà et là demeurent éveillés. Je les évite sans grande difficulté jusqu’à la bibliothèque dont je prends soin de refermer la porte derrière moi. Parcourant la pièce du regard, j’examine les étagères de plus près. Repensant aux éléments clés de la discussion avec ma tante, je décide de commencer par la lecture d’un énorme volume ancien aux reliures et pages dorées, intitulé L’Histoire des Trois Îles. — Sgeul mor nan tri eileanan. Je bondis manquant de faire tomber mon livre au passage. Annaëlle et Eva se tiennent face à moi, le sourire aux lèvres. — Vous m’avez fait peur, je les réprimande à voix basse. (Je prends une profonde inspiration et ajoute :) Que faîtes-vous ici ? — Nous t’attendions, répond Annaëlle. Ma mère nous a parlé de votre échange et… — Te connaissant, nous étions prêtes à parier que tu n’attendrais pas pour commencer ton investigation, la coupe Eva m’arrachant le livre des mains. (Elle le remet en place.) Avec nous, tu n’as pas besoin de perdre du temps avec ces vieux pavés tout poussiéreux. D’un geste du menton, elle pointe une table ronde entourée de quatre chaises et située dans un coin. Nous nous regroupons autour. Le plateau s’ouvre en deux et coulisse sur les côtés. Une carte dessinée avec précision apparaît, éclairée par une douce lumière blanche qui met en avant un bout de certains continents ainsi que trois îles : Tir Nan Elves, Tir Nam Madadh-Allaidh et Tir Nam Bean Si. La première est la principauté des Elfes. La seconde, la terre des Loups Garous. La dernière, la terre des Banshee. Chaque principauté a son propre peuple et chaque peuple des dons qui lui sont propres. Les Elfes disposent d’une puissance hors norme et maîtrisent les éléments. — À savoir qu’il y a quatre familles maîtresses par élément, m’explique Annaëlle. Même si ce sont les gènes paternels qui déterminent le sexe de l’enfant, comme chez les humains, le gène du pouvoir se transmet par la mère. Par exemple, si un Elfe du feu se marie avec une Elfe de l’eau, leurs enfants seront des Elfes de l’eau. — Garçon et fille ? Elle acquiesce. — La race des Elfes existe depuis bien plus longtemps que celle des Hommes. Selon la légende, ils auraient été créés par A’Chiad Aon, le Premier Être à avoir jamais existé dans le but de contrebalancer la simplicité humaine. — « La simplicité humaine » ? je répète haussant un sourcil. — C’est ainsi qu’est présenté la chose. Nombreux parmi nous considèrent que les humains sont inférieurs intellectuellement. — Ils passent leur temps à se faire la guerre pour des raisons plus bêtes les unes que les autres, intervient Eva. D’où le fait que le Roi Lycaon soit responsable de l’existence des Loups Garous. Le Roi Lycaon… — Un Roi quelque peu marteau qui a offert de la nourriture humaine à ses hôtes, parmi lesquels se trouvaient des Elfes, lors d’un banquet il y a des siècles de ça. (Je grimace.) Les grecs ont mythifié cette histoire en remplaçant les Elfes par leur dieu suprême, Zeus. Dans tous les cas, la fin de l’histoire reste la même : Lycaon s’est vu transformé en loup-garou et le gène s’est transmis aux générations après lui. — Et d’après ce qu’on dit, ils sont très performants au lit, précise Eva. Je roule des yeux au ciel. — Qu’en est-il des Banshee ? L’ombre d’un sourire se dessine sur le visage d’Annaëlle : — Ce sont des fées dont les cris sont présages de mort. Peuple métamorphe, elles peuvent prendre plusieurs formes : celle d’une belle femme vêtue d’un linceul, celle d’une femme pâle en robe blanche avec de longs cheveux roux, celle de la « femme argent », celle d’une vieille femme aux yeux rouges effrayants avec de longs cheveux blancs et vêtue d’une robe verte, ou encore celle d’une femme vêtue de noir avec de longs cheveux gris et le visage couvert d’un voile. — Elle a oublié de te préciser que ce ne sont là que celles que nous appelons les Teachdairean a’Bhais, intervient Eva. Les Messagères de Mort. Nous les voyons très rarement, car elles passent la majorité de leur temps dans le monde des Humains, dissimulées dans le brouillard afin de prévenir les plus méritants d’un événement tragique à venir et tourmenter les plus malveillants. Je resserre instinctivement mon châle autour de mes épaules. — Qui sont les autres ? — Les Enchanteresses. Elles disposent d’une grande beauté et de pouvoirs comme la possibilité d’influencer le futur, par exemple. Tous les dix ans, une vingtaine d’entre elles sont désignées pour parcourir le monde des Humains et choisir une quarantaine de nouveau-nés à qui octroyer des dons. Je fronce les sourcils : — Pourquoi faire ? — Se reproduire. D’après ce qu’on dit ce sont… Annaëlle l’interrompt : — Les êtres surnaturels les plus fragiles. Même si elles semblent nous surpasser, il n’en demeure pas moins qu’elles sont dans l’incapacité de procréer et de se reproduire. Ce qui les met en seconde position sur la liste des cibles de Michael Foley. Mon cœur bondit à l’entente du nom de mon paternel. — Qui est en première position ? je l’interroge. Une lueur grave illumine son regard : — Toi. ** ** ** ** **
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