La belle inconnue

Partie 7

Point de vue de Majid : 

_ Tu sais qu'ici c'est le milieu de la nuit ? Peste chérif après avoir décroché mon appel, alors qu’il m’a fait attendre une éternité. 

Je sais bien que là-bas, c'est le milieu de la nuit actuellement et d'habitude je cherche rarement à me confier ou des conseils, même de mon meilleur ami. Pour moi un homme doit être indépendant, prendre ses propres décisions et après assumé les conséquences. Traitez-moi de prétentieux ou comme bon vous semble. Moi j’aime faire tout par moi-même quitte à faire beaucoup de bêtises ; mon activité favorite. 

J'ai beau avoir vingt-quatre ans, être PDG d'une si grande société, être adulé et avoir impressionné plus d'un ; je n'arrive quand-même pas à me séparer de mon côté enfant gâté et insouciant. Il suffit de me voir dans certaines situations pour deviner ma vraie nature même si je m'efforce à la cacher. Je suis jeune, riche et beau, pourquoi le cacher même ? Pourquoi ne pas profiter de la vie ? Certains diront que je suis arrogant et prétentieux, mais quelqu'un qui a grandi dans le milieu où moi j'ai grandi, sait que c'est tout à fait normal. Je n'ai pas connu que le bonheur, l'abondance et la facilité. Oh que non ! 

Certes j'ai eu à étudier dans les plus prestigieuses écoles et universités du monde, j'ai vécu dans les plus grandes villes du monde et beaucoup d'autres choses que je ne pourrai citer. Des choses qui sont le rêve et la vie parfaite pour certaines personnes, sauf que moi je n'ai rien demandé de tout ceci. S’il m’était donné la possibilité de choisir, j'aurais préféré grandir dans une famille ordinaire, avec une mère qui m'aime, qui s'inquiète pour moi, qui me corrige. Une mère qui m'aurait vu grandir, qui m'aurait surveillée la nuit quand j'étais malade, une mère soucieuse et avenante, en une phrase, une mère qui aurait fait son boulot de mère. 

Avoir des frères et sœurs, me chamailler avec eux, les protéger, les aimer et choyer, leur offrir tout ce dont ils auraient eu besoin. Mais la vie en a décidé autrement. Je ne reproche rien à mon père, au contraire je lui dois tout. Ce rôle de mère que je réclame, les frères et sœurs, il a combiné tout ceci et a joué leurs rôles, je ne me suis jamais senti délaissé ou mal aimé, il a fait de moi son petit prince comme il aime tant m'appeler. 

Et toute cette situation ne m'avait jamais dérangé, ou du moins jusqu'à ce que je rencontre ma belle inconnue et sa petite famille.  Je me rends maintenant compte qu'en fait, l'argent ne fait forcément pas le bonheur. Car j'ai beau faire les neuf chiffres par an, avoir des villas et même des manoirs un peu partout dans le monde, avoir une collection de voiture, un avion personnel etc. Il y aura toujours ce vide dans mon cœur et dans ma vie, un vide que je n'arrive pas à combler. Et même si toutes les autres personnes que j’ai eu à côtoyer, filles comme garçons, m'ont fait croire que la vie que je mène est la vie rêvée de tout un chacun, cette fille, Rachida, m'a fait comprendre le contraire et c'est bien pour cette raison que j'appelle chérif à une heure pareille. 

Pour une fois dans ma vie il y a une situation qui m'échappe, que je n'arrive pas à gérer et avec mon égocentrisme démesuré, cela me fou en rogne, je n'aime pas ne pas avoir le contrôle sur quelque chose, c'est plus fort que moi. 

_ Oui et à vrai dire je m'en fou, c'est samedi et j'étais persuadé que tu étais sorti te défouler. Pourquoi cela n'est pas le cas ? Tu te ramolli ? Rétorquais-je à Chérif. 

_ Hey salut Majid ! Oui je vais bien merci et toi ? Le boulot aussi se passe à merveille. c*****d. 

Après cette réplique, je n'ai pas pu m'empêcher de rigoler, très fort même. Chérif est vraiment cinglé même s’il y a quand-même un avantage de l'avoir, il arrive toujours à me faire rire peu importe la situation. Je lui laisse donc le temps de finir sa folie et ceci lui a pris un bon moment, il fallait que je le calme. 

_ He ho c'est pour aujourd'hui ou dans un an ? Dis-je un peu agacé par son comportent plus qu’enfantin. 

_OK le revoilà, le Majid grincheux avec ses sauts d'humeurs. Déjà que tu étais censé rester une semaine et aujourd'hui cela fait dix jours depuis que tu es parti, et pendant tout ce temps je n'ai eu de tes nouvelles que deux fois.  Là tu me déranges au milieu de la nuit avec ton air sérieux ? Qu'est-ce qui se passe ? 

Shot il parle trop lui, il ne peut pas abréger ? C’est vrai qu’il a un peu, un tout petit peu raison, j'ai mis plus de temps que prévu et je ne lui ai pas vraiment donné de nouvelles depuis que je suis ici. Mais j'ai mes raisons et c'est surtout une habitude, sans oublier qu'il m'avait fait promettre de mettre une croix sur Rachida avant mon départ et Dieu a fait qu'elle soit la première personne sur qui je suis tombé après mon atterrissage. Mettez-vous un instant à ma place, j'avais même rêvé de retrouver cette fille et ce rêve était enfin devenu une réalité. Je ne pouvais quand-même pas rater cette chance, la chance de la connaître et maa Sha Allah je n'ai vraiment pas été déçu. C’est une fille belle aussi intérieurement qu'extérieurement, avec elle je n'arrive plus à me reconnaître, je dis et fais des choses qui m'étonnent beaucoup de moi. 

La preuve, il a fallu que je m'invente une vie le jour où je l'ai trouvé au bord de la route, et je ne sais pas si c'était un autre hasard ou le destin. Parce que depuis que je l'avais aperçu le jour de mon arrivé à Dakar, je l'avais encore une fois perdue de vue. J’avais tout fait pour la revoir, je partais même chaque soir l'attendre à l'endroit où elle s’était rendue ce jour-là, en espérant la revoir mais elle ne venait pas, et j'avais même fini par me convaincre que j'avais juste rêvé ou qu'elle n'était pas réelle. 

Alors quand je l'ai revue ce jour-là au bord de la route, je n'ai pas vraiment réfléchi avant d'agir, j'ai juste foncé, je n'en revenais pas que ça soit bien elle dans ma voiture, à mes côtés. Elle était encore plus belle que dans mes souvenirs et son rire ? Juste pour ça je suis prêt à déclencher la troisième guerre mondiale s’il le faut, vous voyez ? Je perds la raison et cela me fait flipper. 

Mais le vrai problème, la raison de mon appel, c'est le mensonge que je lui ai raconté, comme quoi je suis stagiaire. La première fois ça avait bien marché car après cette confidence elle était devenue moins méfiante et plus détendue. On avait même échangé et surtout nous avions beaucoup rigolé, je n’en revenais pas du tout du fait qu'elle soit là, avec moi. 

Mais plus le temps passe, plus je la côtois et moins j’arrive à lui mentir. Je regrette de l’avoir fait, cette fille est bien trop différente de celles que j’ai l’habitude de côtoyer et un peu trop bizarre aussi, mais elle me plaît, énormément même. Donc si je ne veux pas la perdre, je dois agir et vite car j'ai l'impression qu'elle s'éloigne de moi, elle est devenue trop distance et méfiante ces derniers jours et cela me fou en rogne. 

Je prends donc le temps de tout expliquer à chérif et bien évidemment qu'il s'est emporté dès que j'ai parlé d'elle vu que je ne lui avais pas dit que je l'ai revue, mais il a fini par se calmer et me laisser continuer jusqu'à la fin. 

_ Tu es sérieux Majid ? Ok je ne vais pas te juger vu ton état, mais ça ne t’est pas passé par la tête que tu lui cache déjà quelque chose de plus dangereux ? Me lance-t-il le ton plein de reproches, faisant allusion à l’accident. 

_ Je sais Chérif et je comprends aussi ta réaction, c’est juste que cette fille est trop différente, elle préfère les gens pauvres, wallah je ne rigole pas. C’est vrai qu’au début je lui ai juste menti pour éviter de me faire duper par une autre fille matérialiste, mais je te l'ai dit, il a fallu que je lui dise que j'étais un simple stagiaire et sans un sou pour qu'elle accepte de me parler. 

Ma phrase semblait choquer Chérif parce qu’il a mis du temps à me répondre et c’était compréhensible. La plupart des filles te fuient quand tu leurs dis que tu es sans un sou, mais elle c'est le contraire et ce n'est pas du tout facile à croire, même moi je me surprends à me demander est-ce que ce n'est pas un piège qu'elle me tend ? Peut-être qu'elle sait que je suis l'homme qui l'a percuté et qu'elle agit de cette façon pour se venger. Rohh je deviens vraiment parano. 

_ Tu tiens vraiment à elle ? 

Me demande-t-il avec un sérieux que je ne lui connais que rarement. 

_ Euh comment ça ? 

_ Arrête de m'énerver Majid. On est ami depuis l'enfance et c'est bien la première fois que tu te confies à moi et surtout pour une fille. Ta fierté a toujours pris le dessus sur tout, alors je me dis que si tu l’as fait aujourd'hui et surtout vu ton état, il y a forcément quelque chose. Et aussi si elle est vraiment comme tu me l’as décrit, elle doit être une perle qu’il faut à tout prix conserver. 

Il a raison, je ne sais pas pour qu'elle raison et surtout pourquoi elle. J’ai connu des filles belles, brillantes, riches, issues de bonne famille et surtout qui feraient tout pour m'avoir, mais je n'avais jamais ressenti pour aucune autre ce que je ressens pour cette fille. Avec Rachida tout est différent et nouveau. Même à notre première rencontre qui était tout sauf agréable et même sans la connaître, elle m’a fasciné et a pris ma tête et mon cœur en otage. 

Je ne dirais pas que j'ai eu le temps de bien la connaître en si peu de temps, au contraire je n'arrive pas à la cerner du tout. Mais la connaitre, la côtoyer, sont les choses que je désire le plus actuellement. 

_ Je crois que oui chérif, avouais-je presque dans un murmure, et ne me dis surtout pas... 

_ Hey je n'allais rien dire du tout, rassure-toi, je suis même trop contenu de voir qu'après tout ce temps mon meilleur ami a toujours un cœur. Une fille qui a pu te mettre dans cet état? On doit faire tout pour la garder. 

_ Tu sais que je ne rigole pas? Dis-je alors que je m'efforçais pour ne pas ricaner. 

_ Moi non plus amigos et c'est pour cela que je te conseille de lui dire toute la vérité, car si elle est vraiment comme tu le dis, elle ne te le pardonnerait pas si jamais elle arrivait à l'apprendre par quelqu'un d'autre. 

Si elle est vraiment comme je le dis ? Rire, cette fille est un Majid au féminin et rien que son regard peut te remettre les pendules à l'heure. Jusque-là, même un homme n'avait pas réussi à m'intimider comme elle le fait, j'ai toujours été le leader mais avec elle, je suis plutôt un follower. Elle est trop indépendante comme fille, un peu fière, trop directe, autoritaire et surtout, elle n'a besoin de personne ou en tout cas ne le montre pas. Elle n'est pas du tout impressionnée par le matériel ou l'argent d'un homme. Elle est plus que mystérieuse, peut-être que je devrais l'appeler "la belle mystérieuse" ouais ça lui va bien. 

Bref, je crois que je vais faire ce que mon ami m'a conseillé et lui dire qui je suis vraiment étant donné que je dois bientôt rentrer et que je n'ai pas envie de la perdre. Je sais qu'elle va m'en vouloir ou au pire des cas m'ignorer parce qu'elle a, il faut s'attendre à tout. Je ne sais même pas si je lui plais, même comme un simple ami, elle ne laisse rien apparaitre en tout cas. Et après ceci si tout se passe bien Dans Sha Allah, je lui dirais pour l'accident aussi et pour finir avec ses mensonges. 

Je promets donc à mon ami de remédier à cela au plus vite, puis nous restons un bon moment à parler de tout et de rien avant qu'il ne me raccroche au nez pour enfin dormir. 

Je peste un moment avant de descendre à la piscine de l'hôtel pour essayer de profiter de mon dimanche et par la même occasion essayer de trouver un moyen de dire à Rachida la vérité. Je n'arrête pas aussi de me demander pour quelle raison elle me fuit ces temps-ci, elle ne répond ni à mes appels, ni à mes messages et s'il y a bien une leçon que j'ai retenue avec elle, c'est qu'il ne faut pas débarquer chez elle sans prévenir. 

Mon Dieu elle me rend fou ! Je décide de la rappeler encore une fois pour voir mais ça sonna encore dans le vide. Finalement je lui laisse un message, vu que demain je ne serais pas à Dakar, je n'aurais donc pas le temps de la voir et tout lui expliquer, en espérant que ce ne soit pas déjà trop tard. 

Point de vue de Rachida : 

Couchée sur Mouctar et les pieds suspendus sur le mur, je me chamaille avec Djibril comme toujours. Nous n’avons jamais échangé deux phrases sans nous prendre la tête, ce mec, je ne dirais même pas qu'il est fou mais qu'il n'a pas de tête, même si je l'aime beaucoup. Une tête pleine de bêtises mais un cœur en or maa Sha Allah. 

Comme tous les dimanches, j'ai fait la cuisine, et on s'est bien régalé. Actuellement nous sommes en train de digérer chacun à sa façon. Djibril est avec ma machine, la sienne et mon disque dur externe entrain de copier des séries; c'est l'une des passions que nous partageons lui et moi, sur passe notre vie à regarder des films opposés à Mouctar, qui n'a presque rien en commun avec nous et tout autre d'ailleurs. Des fois même je me demande commenter qu'ils ont fait pour être meilleur ami depuis leur enfance, ils n'ont presque rien en commun. Il y a de ces moments où, quand Djibril commence sa folie, je surprends Mouctar le regarder comme s'il était de la rencontre, pourtant je n'ai jamais vu une amitié aussi vraie que la leur, c'est le genre d'amitié rêvé de tous. 

_ Regarde. 

Je me retourne pour lui faire face, puis je saisi le téléphone qu'il me tend. Je vois qu'il se retient de rire, ça veut dire que je vais rire aussi. 

Après avoir pris le téléphone, je constate qu'il est sur snap like always. Je regarde la story qu'il me désigne et comme je l'avais prédit, après avoir fini de la regarder j’étais pliée de rire. Non mais je me demande ce qui se passe dans la tête de certains individus. 

_ Mais il est bête ou il est bête ? Dis-je toujours MDR. 

_ Non il est bête. Ajoute-il. 

Rire collectif. Voilà ce qui arrive quand je suis avec eux. Alors que certaines personnes se demandent si je parle, si je rigole ou même si je souris, j'aimerais juste qu'elles me voient entourée de ces personnes, ceux que j'aime vraiment et qui m'aiment comme je suis. 

Nous continuâmes à regarder des snaps les uns aussi fou que les autres et en rire aux larmes jusqu'à l'heure de la prière de Asr, et comme d'habitude c’est Mouctar qui mena la prière. Après ceci chacun de nous a rejoint sa place dans un silence complet. 

_ Rash dis-moi qu'elle série prendre stp. Me demande Djibril. 

_ Tu as déjà la machine et le disque non ? Choisis toi-même. 

_ Oui mais raconte-moi une série que tu as regardé et que tu as aimé. 

_ Ça sert à quoi de regarder si je te raconte tout ? 

_ Mais… 

_ Djibril Please fou moi la paix, soit tu copie soit tu laisses. 

_ Pourquoi tu t'emportes ? C'est tout à fait logique ma question. 

_ Ah ouais ? 

_ Hey les enfants c'est bon maintenant, j'en ai marre de vos gamineries. Intervient Mouctar comme toujours. Il est vraiment le seul saint d’esprit de ce groupe, et il faut toujours qu'il nous surveille comme des gamins et ça marche à tous les coups. 

_ Tu es sûr que tu ne veux pas venir avec nous à la journée culturelle Guinéenne ? Me redemande Mouctar pour la énième fois. 

Je ne crois même pas que sa question mérite d’être répondu. Il connaît déjà ma réponse, alors je me demande pourquoi il insiste. Ça ne me gêne pas d'être considérée comme la fille orgueilleuse qui ne participe à rien du tout, même pour sa propre communauté, tant que cela me permet de rester loin des hypocrites ça me va parfaitement bien. 

Je suis guinéenne et fière de l'être mais ça ne signifie pas que tous mes amis doivent aussi être des guinéens. Déjà eux, ils ont eu la chance d'être tous ou presque dans la même école alors que moi non, nous ne suivons pas les mêmes formations et nous n'avons pas la même vie. Les garçons je peux les supporter mais les filles? Impossible. Je n'ai absolument rien contre elles, c'est juste que nous n'avons pas la même vie, la même vision, les mêmes défis et les mêmes mais. 

Ne dit-on pas que ce sont les oiseaux de mêmes espèces qui volent ensemble ? Cette phrase résume absolument tout. Et s’il y a une chose que moi Rachida je ne peux pas cautionner, c’est bien l’hypocrisie. Aujourd'hui A et B sont amis et passent leur temps à parler de C, demain c'est C et A qui sont amis et parlent B et ainsi de suite, tu ne comprends rien et vaut mieux ne pas essayer. 

Des fois, Amina vient dans ma classe pendant les heures de pause et reste plus d'une heure à me parler de leur clan. Surtout quand la petite amie de Mouctar a voulu devenir proche de moi, c'était le déclic pour elle. Elle ne savait pas que moi j'ignorais même que Mouctar avait une copine, c'est par un pur hasard si on s'est rencontré ce soir-là, à l'anniversaire de Mouctar. Je sais que si ça ne tenait qu'à lui je n'allais jamais apprendre pour elle, déjà que tout le monde raconte qu'elle est plus âgée que lui et que c'est une fille de mœurs légères, mais moi c’est le genre de choses qui m'importe vraiment peu. Mouctar c'est mon ami, il est mature et sait ce qu'il veut donc je ne vais jamais me mêler de sa vie privée, jamais. 

Et si la fille a voulu se rapprocher de moi c’est juste parce qu'on lui avait parlé de moi et qu'elle voulait être sûre que je ne vais pas piquer son mec, et bien évidemment, j’ai laissé faire. Je n’avais rien à me reprocher et j’ai toujours aimé me faire ma propre opinion sur une personne. Et certes elle avait un comportement pas très catholique mais au fond c’était une fille avec un cœur en or. 

Bref, je n'ai pas envie d'aller à cette journée pour différentes raisons que je ne pourrai citer intégralement, je me contente juste de confirmer encore une fois à mon ami que je n'irai pas. 

_ C'est qui le mec que tu fréquentes actuellement Rachida ? Me questionne Djibril. 

Je me retourne pour le regarder avec surprise. De quel mec il me parle ? 

_ Tu fréquentes un homme ? Renchérit Mouctar. 

OK d'accord c'est quoi leur problème ? 

_ Je ne sais même pas de quoi il parle, j'ai l'air de fréquenter quelqu'un ? Je me défends comme une vraie coupable. 

Je ne sais même pas pourquoi je l’ai fait, connaissant Djibril il doit juste chercher un autre moyen de me fatiguer surtout qu'il sait qu'avec ce genre de sujet il peut parfaitement attirer l'attention de Mouctar, et il l’avait réussi avec brio car ce dernier est en train de me lancer son regard indéchiffrable que je déteste. 

Mouctar, des fois il n'agit pas seulement en tant que meilleur ami mais aussi comme le frère que je n'ai jamais eu, et depuis que je me suis faite brisée le cœur par un de ses meilleurs amis il est devenu encore plus protecteur ; quand je suis avec lui aucun homme n'ose m'approcher. 

Comme si la phrase de Djibril ne suffisait pas, je reçois au même moment un message de Majid et c'est Mouctar qui détenait mon téléphone. Lui et moi sommes tellement proche que chacun de nous connaît le mot de passe de l'autre, on se permet de décrocher les appels de l'autre et aussi de lire les textos, c'est pour cela qu'il a d'abord lit le message que j'ai reçu avant de me tendre mon téléphone. Et à voir son visage il n'était pas du tout content. 

Son message : "Hey princesse comment tu vas ? Je t’appelle depuis des jours mais aucune réponse, rassure-moi que tout va bien s’il te plait, je m’inquiète."   

Lui aussi il faut toujours qu'il choisisse le plus mauvais moment pour se montrer. Oui cela fait un moment que je ne réponds ni à ses appels ni à ses SMS, je me suis un peu éloigné de lui ces derniers temps, la cause ? Je ne sais vraiment pas. On était devenu super proche lui et moi et j’ai commencé à beaucoup l'apprécier et je crois que c’est la raison pour laquelle même je me suis éloignée. J'ai un énorme problème, surtout depuis que j'ai été trahis par la personne qui comptait le plus. L'amour, la confiance, pour moi ces choses-là ne sont jamais réciproque, il faut toujours que l’un se fasse arnaquer par l'autre et malheureusement cette personne c'était moi et j'en ai tiré des leçons. J’ai peur de m’attacher aux gens et souffrir après, donc à chaque fois que je le sens m’arriver, je fais tout pour éloigner la personne. Et c’est exactement ce que je suis en train de faire avec Majid. Je sens que je peux m’attacher à lui et je n’ai aucune envie de souffrir d’avantage, d’autant plus que je ne sais presque rien de lui. Je protège donc mon petit cœur fragile derrière mon comportement odieux et mon caractère impénétrable. Mais il ne semble pas vouloir me faciliter la tâche lui. 

Moi je cherche juste à finir mes études, avoir un job, être super riche et sortir ma mère de cette vie de galère et de problème. Je ne veux dépendre d'aucun homme. 

Majid j'avoue qu'il me plaît beaucoup mais j'ai l'impression qu'il n'est pas vraiment celui qu'il prétend être et pire encore, c'est un gars qui aime tout contrôler, qui est orgueilleux et qui adore me couvrir de biens matériels comme si je lui avais dit que j'en avais besoin. Bref, lui et moi je ne crois pas que c'est possible qu'on soit même de simples amis, on n’est pas compatible. 

J'ignore son message encore une fois et me prépare pour ma confrontation avec Mouctar, oui c'est inévitable voilà pourquoi maintenant je lui cache certaines choses, je n'aime pas quand il réagit de la sorte. 

_C'est mon cousin Majid, je t'avais dit qu'il s'était présenté la dernière fois à mon école sans prévenir non ? Il est encore à Dakar. 

Bien sûr que je lui ai menti mais je ne voulais pas parler de ça avec lui, il va vouloir le connaitre et tout, alors que je ne suis même pas sûr de le revoir. Heureusement qu'il m'a cru donc la conversation s'est écourtée. Je voulais tuer Djibril d’avoir soulevé ce sujet, je me demande même d'où il le tient mais j’ai préféré changer de sujet. 

_ Dis Mouctar, il était comment le gars qui m'a percuté pendant les vacances ? Lui demandais-je soudain pensive. 

C'est une question qui me taraude souvent l'esprit, surtout quand mon pied se met à me faire mal, ce qui est le cas actuellement. 

_ Lol pourquoi cette question ? Tu penses toujours à lui ? Me demande-t-il à son tour, en enroulant son bras autour de mon cou avant de me tirer à lui. 

_ Arrête de rire, bien-sûr que je pense encore à lui, j'aimerais le voir et lui marcher dessus avec sa propre voiture, après je vais l'amener à l'hôpital, payer ses soins puis je vais disparaître. 

Ils éclatent de rire. Je me demande pourquoi ils trouvent ma phrase drôle. 

_ Tu sais Rash si on a utilisé le mot "accident " c'est parce-que ce n'est pas prémédité, en plus il a bien agi contrairement à d'autres. Commente Djibril avec un air sérieux. 

Je sais qu’il a raison mais je lui en veux toujours à ce gars, je crois qu'il aurait dû rester au moins jusqu'à ce que sa victime se réveille non ? Ou revenir prendre de ses nouvelles après. Les gens doivent savoir que l'argent ne peut pas tout régler, n’importe qui peut faire ce qu'il a fait, le problème c'est plutôt ce qu'il n'a pas fait et c’est pour cela que je lui en veux toujours. 

En plus de cela, mon pied, après tout ce temps, il arrive des jours où il me fait horriblement mal, tellement mal que je ne parviens pas à me rendre à l'école. Je ne l'ai pas encore dit à mes parents pour ne pas inquiéter maman, mais je trouve cela trop bizarre, une simple fracture ne prend pas plus d'un mois à guérir et en plus quand c'est guéri c'est pour de bon non ? Moi cela fait déjà six mois et je souffre horriblement, raison de plus de lui en vouloir. 

Avec les garçons nous continuons à discuter en mélangeant tout sorte de sujets et à rigoler comme si tout était rose dans notre vie, c'est le plus grand avantage d’avoir ce genre d'amis, on ne se prend pas du tout la tête quoique nous savons quand être sérieux. Et c'est ainsi que nous avons passé notre journée jusqu'à 20h, puis ils ont décidé de rentrer. Je les ai raccompagnés jusqu'en bas juste pour m’acheter une glace Sim puis remonte dans ma chambre pour attaquer mes devoirs. 

C'est vers 23h que j'ai terminé, mais entretemps j'avais appelé ma mère même si on avait parlé le matin, je voulais trop reparler à Bella cette petite capricieuse qui devient chaque jour plus turbulente. 

Au moment de me coucher je reçois un autre appel de Majid et cette fois-ci j'ai décroché, me disant que s'il insiste depuis tout ce temps ce qu'il doit vraiment tenir à moi et que peut-être je devrais revoir mon comportement. 

A l'entendre il était soulagé d'avoir pu me joindre et comme excuse j'ai dû inventer un examen super dur qui m'a pris tout mon temps. Nous avons échangé un bon moment et je le trouvais un peu bizarre, rien qu’à sa façon de parler. C’est pour cela que lorsqu’à la fin il a demandé à me voir pour me dire une chose importante selon lui, je n’ai pas été trop surprise, je m’y attendais un peu quoique je redoutais un peu cette chose. Néanmoins j'ai accepté. 

Il a proposé qu’on se voit après demain, mardi, vu que demain il doit se rendre à Saly pour un séminaire, sûrement avec son patron. Mardi je termine plus tôt que d'habitude donc ça m'arrange. Après avoir tout confirmé nous nous souhaitons bonne nuit puis il raccroche.