Mélanie

1960 Words
Mélanie est une jeune femme de 25 ans. Elle a le teint basané, les cheveux aux douces boucles de couleur rappelant celle de la canelle qui caressent ses clavicules. Ses yeux, quand on s'y perdait, donnaient l'illusion de se noyer dans un mélange homogène du chocolat et du lait. Et sa dentition peut hypnotiser tout être vivant à des kilomètres à la ronde quand elle la met en évidence. On dirait que la petite souris qui se chargeait de récupérer ses dents de lait avait fait une recommandation spéciale auprès du grand architecte de l'univers de manière à parfaire le sourire de la jeune fille dont la peau brillait sous le soleil. Quand Mélanie souriait, peu importe la saison dans laquelle on était, on a instantanément l'impression de se trouver au printemps. Le dépôt inépuisable de mélanine, comme la surnommait souvent son père, est manifique, et c'est le moins qu'on puisse dire. Et pourtant, on ne peut pas en dire autant de sa vie. Elle a du renoncer à son rêve de toujours: Devenir jardinière, ou architecte paysagiste. Son entourage lui en a tellement tenu des propos décourageants qu'elle s'est resignée à ranger ce rêve au fond d'un tiroir. “De quoi vas-tu donc vivre?”, “Ni la jardinerie, ni l'architecture paysager ne pourra te ramener du pain sur ta table en Haiti!”, lui disait-on souvant, sa mère y compris. Elle s'est donc lancée dans la construction. Elle est une jeune ingénieure civile et fait partie d'une firme de construction. “Au moins ainsi, j'ai une chance d'influencer la façon de construire ici-bas pour les forcer à respecter mère nature!” se disait-elle pour s'efforcer à aimer ce qu'elle fait. La majeure partie de sa famille vit à l'étranger. Elle ne vit qu'avec sa petite sœur, du côté de sa mère, dont elle s'occupe. Son père est mort en lui laissant une vraie fortune. Quatre comptes en banque remplis de tunes. Elle était sa seule héritière. Il était un grand et excellent acteur qui a finit en réalisateur international. Il était vraiment la fierté haïtienne dans le domaine du cinéma. Et pourtant Carmène, la mère Mélanie, l'a quitté parce qu'à l'époque de leur relation, Marcus n'était qu'un pauvre diable qui jouait dans des séries YouTube pour presque rien. Si seulement Carmène savait jusqu'où il irait dans sa carrière, elle l'aurait plus soutenu au lieu de constamment lui faire une scène. Mais Carmène n'était pas du genre à souffrir patiemment avec un homme. Elle est à son 4ème mariage. Du côté de la vie personnelle de Mélanie, c'est... Disons compliqué... Elle partage sa vie avec un jeune homme assez déroutant depuis bientôt quatre ans. Pourquoi Carlos? N'a-t-elle pas trouvé mieux? Ce sont les questions que se pose tout le monde, exceptée apparemment sa meilleure amie Shannah. Allez savoir pourquoi! Carlos est mignon et charmeur, ça on les lui accorde, mais on ne peut s'empêcher de se demander pourquoi. Et le pire c'est qu'on ne peut pas se baser sur une chose précise pour justifier sa réticence face à cette relation. C'est tout un ensemble de trucs, tout un package. Mais comme le dit la citation: Le coeur a ses raisons que la raison elle-même ignore. Pourtant, il y a bien des fois où l'on se demande est-il vraiment nécessaire de se fier à ces soit-disants raisons dont la logique elle-même n'est pas au courant. Voilà! C'était un topo bien détaillé de Mélanie. Plongeons à présent en elle. * Point de vue de Mélanie: Je lasse mes bottes de travail, puis je me lève de mon lit et me regarde une dernière fois dans le miroir. C'est bon, je crois que j'ai fini. Je me rends d'un pas assuré vers la cuisine. Je prends une tasse sur l'étagère et me sers du café. Je mets quatre pains tranchés au toaster et attends qu'ils grillent en soufflant sur mon café. J'ai l'habitude de voir dans les films que les étrangers prennent une tasse de café et un morceau de biscuit pour toute une journée de travail. Moi il en est hors de question de jouer à ça. Il sonnera dix heures et je serai déjà en route vers la cafétéria du chantier. Je n'attends même pas midi. Je ne joue pas à qui résistera le plus avec mon estomac moi. Les pains prêts, je les tartine de beurre et m'assois sur le tabouret de mon coin-repas. J'attrape mon portable et compose le numéro de Carlos. Après trois sons, il décroche: "Allo! fait-il d'une voix rauque. -Bonjour chéri, comment tu vas? lui demandai-je affectueusement. -Bah je ne sais pas encore puisque tu viens tout juste de me tirer de mon sommeil. Pourtant, Ninie, je t'ai déjà dit qu'il n'était pas nécessaire que tu m'appelles avant d'aller bosser. On peut très bien se parler au millieu de la journée, ce n'est pas un mal. -Hé! Mais arrêtes Carlos. Je voulais juste te dire bonjour! -Pfff! ok. Bonjour chérie. C'est bon? -Laisse tomber... Tu comptes faire quoi aujourd'hui? -Rien de spécial. Je vais juste passer du temps avec mes potes. -Dis Carl, pourquoi tu n'as plus cherché de travail depuis que tu as été licencié? La crise est maintenant terminée. Beaucoup d'entreprises embauchent en ce moment, lui dis-je sagement. -Dis Mel, pourquoi tu te mêles ainsi de ma vie? me demande-t-il le ton haussé. -Parce que je suis ta petite amie et ça m'en donne tous les droits. T'as souvent tendance à l'oublier, lui répondis-je sur le même ton. -Ah d'accord, j'ai compris. Tu as l'impression que tu m'entretiens alors que tu soutiens juste ton petit-ami dans un moment difficile, comme ferait toute bonne copine. Tu sais quoi? Je te ramène la voiture quand tu rentreras de travail, me crache-t-il de but en blanc. Non mais je rêve! Comment peut-il? -Qu'est-ce que tu racontes comme sottise?! J'ai pas vou... Allo? " Et merde! Il m'a raccroché au nez. J'y crois pas! Non mais il le fait exprès! Comment a-t-il osé penser que je lui reproche quelque chose? Vivianne, ma soeur, entre dans la cuisine en baillant. Elle remarque ma présence et me sourit. "Salut frangine. Alors tu n'es pas encore partie? -Alors c'est à cette heure que tu te lèves pour aller à la fac Vivi? De plus, tu es là, zen, tu ne te dépêches même pas, lui dis-je d'un ton menaçant. -Mais calmes-toi meuf! Je n'ai cours qu'à 10 heures aujourd'hui alors destresses! Elle a raison, je suis sur les nerfs. Je prends une longue respiration. -Désolée! lui lançai-je en faisant une grimace. -T'inquiètes! J'aimerais juste ne pas être aussi grognon que toi quand je travaillerai, se moque-t-elle." Je pouffe de rire. Je me lève, remplis un verre d'eau du robinet, puis me rends au salon. J'attrape ma fleur de compagnie, Lilie, et l'arrose affectueusement. «Si seulement Carlos pouvait prendre soin de moi comme moi je prends soin de toi», soufflai-je désespérée. C'est vrai qu'avec Carlos, ça n'a jamais été rose. J'ai l'impression que cette relation me fatigue plus que toute autre chose. Mais Carlos, moi je l'aime. Je n'oublierai jamais qu'il m'a sauvé la vie quatre ans de cela. C'est à partir de là que mon amour inconditionnel s'est formé pour lui. Peu importe à quel point c'est difficile et compliqué, je me battrai pour lui... pour nous. Bon! Je dépose Lilie et prends mon sac. "I'm out! criai-je à Vivianne. -Bye ma belle! me crie-t-elle en retour. " Je ferme la porte derrière moi et me rends sur le trottoir d'où je hèle un taxi moto. Il s'approche de moi, je lui dicte l'adresse, puis je chevauche la motocyclette. Nous sommes partis. Vingt-cinq minutes plus tard, j'arrive sur mon lieu de travail. Je lâche un soupir, puis foule le sol du chantier. Marvens s'approche de moi tout souriant. "Bonjour Belle, bien dormi? me demande-t-il jovialement. -Bonjour Marvens. Super merci et la tienne? -Très bien. Prête pour une belle journée de travail ? -Et comment ?! lâchai-je hypocritement accompagné d'un sourire forcé. Marvens est le directeur de projet. Et Bon Dieu qu'il me tape sur les nerfs! En fait, tout de ce metier me tape sur les nerfs. Je déteste salir mes mains si ce n'est qu'avec de la terre. De la terre pour planter, pour concevoir de beaux jardins... Non mais ma vie est merdique quoi! Bon! Je me lance d'un pas décisif vers mon bureau en saluant sur mon chemin le contremaître et les ouvriers. Je dépose mon sac et m'assieds sur mon siège. J'attrape les plans et les lis de manière nonchalante. Pour la énième fois de ma vie je me pose cette question: qu'est-ce que je fous là ? Je veux voir du vert bordel! Que je voie la vie en vert je m'en fous mais je veux voir du vert dans ces satanés plans. Est-ce que je suis la seule par ici à ressentir des frissons quand je traverse une allée parsemée de grands arbres? Ces genres de moments sont magiques. Pouvoir ressentir ce genre de sentiments, être éblouis devant la majesté des arbres, assister au réveil d'une fleur, écouter le chant serein de mère nature. Et imaginer que tu as le pouvoir de créer une merveille pareille avec seulement tes deux mains et de la patience, pour moi, c'est juste jouissif quoi ! On intègre tellement peu l'aménagement paysager dans les projets de construction en Haïti. Et pourtant, il y a des plantes qui sont enivrantes. Si elles sont dans un endroits publics, c'est presqu'impossible pour quelque de ne pas y revenir encore et encore. Je lâche un soupir. Bon moi, faut que je me bouge. Je me sers un verre d'eau que je bois d'un trait, puis je sors de mon bureau avec la chemise contenant les plans. Je parcours le chantier minutieusement pour m'assurer que la distribution des pièces a été bien exécutée. Je tombe sur une erreur assez dérangeante. p****n c'est pas possible! "Qui a fait ça ? criai-je à l'égard des travailleurs. Ils se regardent tour à tour sans me répondre. Le contremaître s'approche. -Quel est le problème Madame? me demande-t-il. -Tu me le demandes? Sérieusement? Explique-moi pourquoi dans ce poteau, le côté gauche est plus rempli que le côté droit? -Ah ça ! Ce n'est rien, on rattrapera ça au crépissage, me lance-t-il. -Ah c'est ainsi que vous faites? Alors laisse-moi te dire qu'il n'y a pas de ça ici. Que deux maçons s'en occupent maintenant. -Mais... -Que deux maçons s'en occupent maintenant, Joseph, dis-je plus fermement." Je tourne les talons. "Dès qu'elles sortent à peine de la fac, elles croient tout savoir. J'ai près de vingt-cinq ans dans ce metier moi sans même avoir besoin de m'asseoir sur un banc de la fac! entendis-je grogner derrière moi le contremaître. Je me retourne et plisse mon front en le regardant droit dans les yeux. -Oui, je viens de boucler mes études, et le nombre de temps d'experience que tu as ne me regarde pas. JE suis la responsable de ce chantier et c'est ce qui compte. Je peux apprendre de toi, mais c'est pas parce que je suis plus jeune que tu ne peux pas apprendre de moi également. Pourquoi bacler un travail quand on peut tout autant le bien faire? Alors tu peux dire ce que tu veux, mais à la fin de la journée je veux voir ce poteau refait et bien fait. Et s'il y en a d'autres de ce genre, refaites-les avant même que je m'en aperçoive. " lui lançai-je le ton assuré. Mais qu'est-ce qu'ils croient ? Que parce que je suis jeune et une femme je vais les laisser me marcher dessus? Je suis la responsable, j'ai des rapports à donner. Alors ils vont devoir me respecter de gré ou de force.
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