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L'Étrangère aux yeux d’or

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Un « mal invisible » se répand sur la planète et vient ronger un village du sud de la France.

Joana, descendue de la montagne pour vendanger, épouse Pélestieu Cabérac, un riche propriétaire terrien. Quelques années plus tard, la jeune femme disparaît inexplicablement. Le commissaire Cobuz, fin limier de la P.J., est chargé de l’enquête.

Lorsqu’on découvre le corps de Joana flottant à la surface de l’étang, le mystère s’épaissit encore, d’autant plus que sa chevelure a poussé anormalement. On soupçonne aussitôt la coiffeuse, héritière des pratiques en sorcellerie de sa grand-mère, de connaître l’assassin.

À l’image d’Anaïs, le village recèle de personnages tous plus insolites les uns que les autres, de ces êtres qui gardent farouchement en eux un secret. À commencer par le veuf, Cabérac, ainsi que sa gouvernante, Chincha, mais encore Jean de Baume, le gardian amoureux d’Anaïs, ou Nino, le sauvageon du palus… Cependant, au-delà de la fascination, une seule question importe pour Cobuz, qui peine à résoudre cette affaire : qui a tué Joana ?

Cet ouvrage met en scène un mystérieux crime qui fait jaillir de nombreux secrets pour une intrigue palpitante !

EXTRAIT

Chaque être garde en lui un secret qu’il ne communique à personne. Anaïs aime se dire qu’elle est encore trop jeune pour avoir un secret bien à elle, le secret d’un amour, par exemple. Elle est encore sous le coup de la mort de la mère et du père. Elle ne pense pas à son avenir. D’ailleurs, qui pourrait lui offrir un amour véritable dans ce trou perdu ? Jean de Baume est robuste et doux à la fois, mais il lui donne trop souvent l’impression de ne savoir comment s’y prendre. Et puis, depuis quelques jours, elle se sent perdue, seule, abandonnée par le monde entier. Elle pleure dans la cuisine quand Pierrot n’est pas là, qu’elle est toute seule. Que va-telle faire de sa vie ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jean-Pierre Védrines est originaire du sud de la France. Il rédige ses premiers poèmes à l’âge de douze ans. Les recueils se succèdent et les prix se suivent : Prix Froissart (1971), Grand Prix de poésie des Ecrivains Méditerranéens (1993), Prix Gaston Baissette (1998), Prix Roger du Teil (2007), Prix des Beffrois (2007), Prix de poésie de la ville de Dijon (2013).

En 2004, il commence à publier des romans. S’il emprunte les traits de ses personnages à son milieu familial, son imagination, elle, se nourrit des liens profonds qu’il entretient avec le Sud méditerranéen. Elle est sans cesse influencée par les éléments de la nature -le vent -, mais aussi l’eau étrange des étangs et les longues étendues de sable des rivages du golfe qu’il parcourait enfant alors que sa famille campait dans les dunes.

Aujourd’hui, il est Président de l’association littéraire La main millénaire et dirige la revue du même nom qu’il a fondée en 2011. Il vit à Lunel, à côté de Montpellier.

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I-1
La mère a cessé de vivre. Le père gémit, puis il sanglote. — Marie, Marie ! Dans la cuisine, Anaïs prend son jeune frère dans les bras. Elle le berce tout en fredonnant à son oreille une comptine d’enfant. Une douleur aiguë traverse sa poitrine. Elle a mal. Elle a froid. Elle voudrait pleurer, mais elle ne le peut pas. Pierrot s’est endormi. Elle le serre sur son sein, l’embrasse sur la joue. La mère ne le verra pas grandir. Elle a quitté ce monde pour celui des ombres. À tout jamais disparue du monde des vivants. Elle était bien plus jeune que le père, la mère. Toujours heureuse de vivre. Au lever du jour, le père réveille Anaïs en la secouant. Elle entend le train siffler au loin dans les champs. Le père lui demande d’aller chercher le pain et le lait, et de préparer le petit déjeuner pour le petit. Quand elle revient à la maison, il fait plein jour. Elle pose les commissions sur la table, puis elle réveille son frère. Il dort en suçant son pouce. Doucement, elle murmure à son oreille : — Pierrot. Le petit se réveille, il entoure le cou de sa sœur de ses bras menus. Elle le serre tendrement contre elle. — Ton lait est chaud. Le père, assis à la table, a les yeux gonflés de chagrin. Il ne regarde pas ses enfants. Il boit une gorgée de café, se coupe un morceau de pain. C’est à ce moment-là que l’abbé Reboul arrive. Le père se lève. Il grogne quelques mots dans sa moustache. Le curé ne dit rien. Il paraît concentré sur quelque chose d’invisible. Il marche à pas lents vers la chambre où la mère repose. Il marmonne des prières tout en agitant son encensoir. Pierrot serre encore plus fort le cou d’Anaïs. La jeune fille a coupé une tartine de pain qu’elle a beurrée. — Mange ! Elle verse le lait dans le bol du petit. Puis elle s’assoit, l’enfant sur ses genoux. Pierrot se saisit du bol et boit une gorgée. Le prêtre dans la chambre parle dans une langue qu’Anaïs ne comprend pas. Quand il sort, le père a les yeux rougis. Il s’effondre à l’autre bout de la table et sanglote en cachant son visage dans ses mains. Le curé part sans se retourner. Sans un mot pour les enfants. Le lendemain de l’enterrement, Anaïs conduit Pierrot à l’école. Le petit lui demande si c’est elle qui viendra le chercher le soir. Elle fait signe de la tête que oui. Après, elle continue son chemin jusqu’au magasin de Mme Cécilia où elle est apprentie coiffeuse. Mme Cécilia est vietnamienne. Son visage est mystérieux pour Anaïs. Elle a entendu dire que Mme Cécilia était très riche. En plus, elle est belle et souriante. Anaïs admire sa poitrine tendue sous son chemisier à fleurs roses, ses mains fines et douces, sa silhouette galbée. Pour le moment, Anaïs n’a pas appris grand-chose. Elle lave la tête des clientes. Le premier jour, prenant la jeune fille par les épaules, avec douceur, Mme Cécilia a murmuré d’une voix mélodieuse à son oreille : « Je t’apprendrai le métier. » Mais cela fait six mois qu’Anaïs travaille et elle lave toujours la tête des clientes. Après, elle balaie les cheveux qui sont tombés sur le parquet. Ses copines qui vont au lycée la regardent de haut. Elle sent bien qu’elle n’est pas de leur monde. Quelques-unes se moquent d’elle en riant, « la Favantine », disent-elle, « la coiffeuse ». Cela l’attriste. La mère n’est plus là pour la consoler, alors elle relève la tête. Elle se dit : « Elles ne valent pas mieux que moi. » Les mères de ses camarades viennent se faire coiffer chez Mme Cécilia. C’est elle qui leur lave la tête. Elle prend un malin plaisir à leur projeter de la mousse dans les yeux. Les mères crient. Mme Cécilia intervient : — Voyons, Anaïs ! Anaïs s’excuse. Puis les mères passent sous le casque avec leurs bigoudis. Souvent Mme Cécilia leur offre le café et leur propose de lire une revue afin qu’elles patientent. Quand elles quittent le salon de coiffure, les mères sont frisées comme des moutons. Pierrot est assis dans la classe. La jeune coiffeuse arrive tout essoufflée. L’institutrice attend les parents. En voyant Anaïs, elle s’écrie d’une voix douce : — Pierre ! L’enfant se lève et se précipite dans les bras de sa sœur. L’école est toute petite avec un espace de jeux aménagé à l’aide de modules de bois. Tout en marchant, Pierrot serre la main de sa sœur. Il ne dit rien, mais Anaïs ressent qu’il est heureux qu’elle soit là. Elle voudrait lui parler, mais elle ne trouve pas ses mots. Sur le cours, le vent tourbillonnant fouette les platanes et les feuilles mortes jonchent le pavé. Ils font une halte chez l’épicier pour acheter une salade et du jambon. Quand ils ouvrent la porte de la maison, le silence les étonne. Le père n’est pas là. Pierrot a faim et dévore la tartine beurrée saupoudrée de chocolat qu’Anaïs vient de lui préparer. Quand la nuit est tombée, Anaïs fait réchauffer la soupe. Pierrot grimace : — Je n’aime pas la soupe de pois cassés. Anaïs le gronde. — Pour grandir, il faut manger de la soupe. Tu veux rester un bébé ? Pierrot pleurniche. — Je veux des épinards, ça donne des forces. Ça rend costaud comme Popeye. Anaïs roule de gros yeux. — Tu crois que c’est le moment de faire le difficile ? L’enfant se tait. Il avale une cuillerée de soupe. Quand le père rentre, Pierrot s’est endormi. Anaïs lui a raconté une histoire et l’a couché. Le père titube. Il ôte sa casquette, va au buffet, en sort une bouteille et se sert un verre de vin. Anaïs, en silence, remplit son assiette de soupe. — Pas faim, grogne le père en se mordant la lèvre. Il a la tête lourde comme du plomb. Sa main est saisie de tremblements nerveux. Ses yeux sont vides. Anaïs lui tourne le dos et, se penchant sur l’évier, plonge ses mains dans l’eau tiède. Elle nettoie les assiettes et les rince à l’eau froide avant de les faire sécher sur l’égouttoir. Elle essuie ensuite la vaisselle à l’aide d’un torchon. C’est ce qu’elle aime dans les tâches ménagères, cette liberté d’esprit que personne ne peut lui enlever. Les gestes les plus simples lui laissent le loisir de s’échapper du monde environnant. Après, elle balaie la cuisine. Si les chaussures du père ont laissé des traces, elle passe la serpillière. Les vitres, elle s’en occupe le dimanche, quand elle fait le ménage en grand. Elle achève de les nettoyer avec du papier journal. Lorsque le père va se coucher, qu’elle l’entend bientôt ronfler, elle s’occupe des habits de Pierrot. Elle a du mal à repriser les chaussettes. Elle n’a pas appris. Mais, tout de même, elle ne s’en sort pas mal. Elle n’arrive pas à lui dire ce qu’il faudrait qu’elle lui dise. Il est prostré. Il n’a goût à rien. C’est son père tout de même. Est-ce qu’il aimerait qu’elle lui prépare un civet de lapin ? Il ne lui répond pas. Il est seul dans sa douleur. Sa vie est brisée. Le Maître, Pélestieu Cabérac, lui a donné quelques jours de congés. Mais il ne fait rien. Se rend-il compte qu’il a deux enfants à élever ? Il doit retrouver ses forces, son courage. La mère n’aurait pas aimé le voir ainsi, avachi, pas rasé, en pleine détresse. Est-ce qu’elle a faibli, elle ? Elle a tenu son foyer jusqu’au bout, sans se plaindre. Elle n’a rien concédé à la mort, pas la moindre petite miette. Elle a achevé sa vie en quelques minutes comme si la Camarde avait dû attendre que ses forces l’abandonnent, enfin, pour la prendre. Elle n’a pas dit : « es la fin », mais : « es la vida ». Le père, lui, n’a pas le courage de la mère. Il n’a pas assez de force pour faire front. La jeune fille s’inquiète. — Au moins ne te laisse pas aller ! Le père le lui promet. Le Maître le lui dit aussi, paroles banales, de circonstances : « Michel, soyez courageux, mon vieux. Pensez à vos enfants. » ll hoche la tête. Il a envie de fuir. La colère le tient. Il refuse de serrer la main que Pélestieu lui tend. Au village, on le connaît bien, Michel Favantine. C’est un bon garçon, sérieux et dévoué. La Louise l’a élevé avec tendresse. Son enfantoun, même, qu’elle l’appelait. Plus tard, quand il était grand, elle disait : « mon drôle ». — C’est la terre qui me l’a donné. Les habitants connaissent bien l’histoire de Michel. Un matin de Noël (plus personne ne se souvient de l’année), le jeune abbé Reboul trouva l’Enfantoun sur le parvis de l’église, dans une corbeille remplie de paille, tout juste vêtu pour ne pas mourir de froid. Reboul apporta sa trouvaille chez le maire qui voulut confier l’enfant à l’Assistance publique. Mais son épouse l’en dissuada. — Maurin, tu n’y penses pas ! Si petit, si joli ! Porte-le chez Louise. Elle n’a pas pu avoir d’enfant. Celui-là, un jour de Noël, c’est un cadeau du Bon Dieu ! C’est ainsi que Louise Favantine donna son nom à l’Enfantoun. La mère d’Anaïs et de Pierrot, Marie, originaire du village, était la fille d’Armengau Pierregourde et de Jeanne la couturière. Elle grandit parmi les siens. Quand elle rencontra Michel Favantine pour la première fois, elle sut, tout de suite, que son homme, ce serait lui, l’enfant trouvé le jour de Noël. Le père est fatigué. Lui, Favantine, n’est pas issu d’une lignée de paysans comme le Maître. Les Cabérac, génération après génération, ont acheté les meilleures terres du village, les bois, les prés. L’Enfantoun n’a jamais connu ses parents. Il ne possède rien. Que sa force, que ses bras pour travailler. Que son cœur et son âme pour aimer. Il a été abandonné comme on l’eût fait d’un chiot ou d’une portée de chatons. Mais Martin le Borgne, le père de Pélestieu, a toujours été bon avec lui. Il lui a appris le métier de la terre, le sarclage des vignes, le sulfatage. S’il sait comment ensemencer un champ et faire en sorte qu’au printemps, le poirier, le pommier, l’abricotier fleurissent, c’est à Martin qu’il le doit. Mais Pélestieu, sans enfant, vit seul depuis la disparition de Joana, son épouse, et nul ne sait qui héritera de sa fortune. Après la disparition de la jeune femme, il s’est enfermé dans la solitude. Il a acheté des chiens pour la chasse aux sangliers qu’il traque dans le marais ou la garrigue. C’est une chasse que Pélestieu affectionne particulièrement. C’est un exercice redoutable. Il y a pris goût. La bête, robuste, est rusée. Il a perdu plusieurs chiens, éventrés au soleil couchant par un sanglier aux abois. Depuis quelques années, Pélestieu a fait de Michel son homme de confiance. Il lui a délégué de nombreuses responsabilités : gérer le personnel, acheter des chevaux, vendre le vin, ensemencer un champ. Mais aujourd’hui, après la maladie et la mort de Marie, Favantine n’est plus le même homme. Il s’adonne à la boisson, arrive en retard au travail, néglige ses enfants. C’est un mort-vivant. Et lui, Pélestieu, que fait-il pour son homme de confiance qui sombre dans l’abîme de la boisson ? Ira-t-il jusqu’à le jeter dehors avec ses enfants ? Les Favantine vivent dans la maison du régisseur. S’il les chasse, où iront-ils ? Qui viendra à leur secours ? Et la jeune fille, comment se nomme-t-elle déjà ? Pélestieu fouille au fond de sa mémoire, ravive l’image d’Anaïs. Vive ? Oui, assurément. Longue, avec des yeux brûlants. Une chevelure aussi sombre qu’une nuit piquée d’étoiles, des cheveux sur lesquels brille une lumière éclatée en mille cristaux. Ravissante, pour tout dire. Aussi belle que Marie, sa mère. Le garçon est encore un bambin. Il a de grands yeux qui semblent regarder les êtres de l’intérieur. Mais la gamine ? Pélestieu se dit qu’elle est serviable et sérieuse. Le sang généreux des filles de la terre circule dans ses veines. Souvent, de sa fenêtre, il la voyait passer quand elle allait à l’école. Une sauvage, disent les garçons du village. Belle comme le jour, mais aussi insaisissable que la truite bleue de la rivière qui, l’été, échappe sans cesse aux mains des plus rusés. Maintenant qu’elle travaille chez la coiffeuse, Pélestieu l’aperçoit le matin et en fin d’après-midi, quand elle revient de l’école avec Pierrot. C’est Chincha, sa gouvernante, la première, qui lui a parlé de la petite. Il ne se souvient plus exactement à propos de quoi. Peut-être était-ce au sujet de la mort de la mère. Chincha, c’est la seule employée qu’il ait gardée quand il a hérité de la propriété à la mort de son père, Martin le Borgne. C’est elle qui l’a élevé, l’a soigné quand, enfant, il était malade. Elle nettoie, lave, repasse, recoud, rapièce, prépare les repas. C’est ce qu’on appelle dans la langue courante une « maîtresse femme ». Ce jour-là, Chincha lui a dit : — Cette petite est ravissante. Et courageuse avec ça. Elle est pareille à la forêt. Dans ses cheveux naissent des étoiles de neige et de feu.

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