Chapitre 3 – Le Dressage

974 Words
Damon Elle me défie. Même là, fragile, éreintée, à la limite de l’effondrement, elle me défie. Cette étincelle d'insoumission dans ses yeux me consume d'un désir brut. La plupart des êtres s'effondrent à la première morsure. Elle, non. Elle se cabre, intérieurement, même si son corps trahit déjà ses limites. Je la ramène dans mon domaine d’un pas sûr, traversant la forêt comme un spectre noir. Alina pèse peu dans mes bras, son souffle léger effleurant ma gorge. Mais cette fragilité n'est qu'une illusion. Je le sais. Je l'ai vu. Mes hommes, tapis dans les ombres des arbres, se figent à mon passage. Aucun ne bronche. Aucun n'ose croiser mon regard. Ils savent mieux que quiconque que quand je suis dans cet état – excité, affamé, dangereux – il vaut mieux rester loin. Les grandes grilles de fer forgé grincent dans un murmure sinistre à mon approche. Mon domaine. Mon sanctuaire. Mon piège. Un manoir colossal surgit au cœur de la forêt, ses pierres sombres suintant l’austérité, les grandes fenêtres masquées de verre noir reflétant la pâleur de la lune. C’est ici qu’elle apprendra. Ici que je la façonnerai. Élias m'attend au sommet des marches, son regard perçant glissant immédiatement sur Alina. Son front se plisse, mais il reste silencieux jusqu'à ce que je passe devant lui. — Alors c’est elle ? dit-il d’un ton neutre. Je ne réponds pas. Je monte les marches, Alina toujours lovée contre moi, aussi vulnérable qu'une colombe dans la gueule d'un loup. — Tu es sûr que c’est une bonne idée ? persiste Élias, sa voix basse effleurant la nuit. Elle est trop fragile. Trop pure pour ce que tu es devenu. Je m'arrête. Je pivote lentement vers lui, mon regard le traversant comme une lame froide. — Elle survivra, dis-je d'une voix glaciale. Élias me fixe, impassible, mais il sait que discuter serait inutile. Je pousse la porte d’un coup d’épaule et pénètre dans mes quartiers. Alina gémit faiblement lorsque je la dépose sur le lit immense, ses doigts s’accrochant inconsciemment à ma veste. Je sens son corps lutter même dans l’inconscience. Comme si elle savait déjà ce qui l’attendait. Je reste un instant à l’observer, Élias silencieux derrière moi. Sa robe déchirée révèle la douceur de sa peau. Une pureté intacte. Des marques rouges ourlent ses bras, souvenirs de notre chasse dans la forêt. Un mélange de culpabilité et de fierté m’envahit. — Si elle meurt, murmure Élias derrière moi, ce sera une perte inutile. Je me penche au-dessus d’elle, écartant doucement une mèche de ses cheveux, effleurant du bout des doigts la courbe délicate de sa joue. Elle frémit. Même inconsciente, elle répond déjà à moi. — Elle ne mourra pas, dis-je doucement. Je ne le permettrai pas. Élias soupire lourdement, puis quitte la pièce sans un mot de plus. Je reste seul avec elle. Ma proie. Mon futur. Je m'assieds lentement au bord du lit, observant la montée et la descente rapide de sa poitrine. Son visage est une œuvre d’art cruelle : innocence mêlée à une beauté ravageuse. Je frôle son cou du bout de l’ongle, traçant la ligne sensible de sa gorge jusqu’à sa clavicule. Elle gémit. Un son faible, plaintif. Soudain, ses yeux s’ouvrent. Dorés. Immenses. Terrorisés. Elle recule aussitôt, se pressant contre la tête du lit comme un animal pris au piège. — Ne… ne me touche pas, souffle-t-elle, la voix tremblante. Un sourire étire lentement mes lèvres. — C’est un peu tard pour ça, petite louve. Elle serre les draps entre ses doigts, son regard lançant des éclairs malgré sa peur. — Lâche-moi ! crache-t-elle, sa voix fêlée par la panique. Je ris doucement, un son grave qui roule dans ma gorge. Je me penche, plantant mes genoux de chaque côté de ses hanches, l’enfermant sous moi sans même la toucher. Juste assez proche pour qu’elle sente la chaleur de mon corps, assez loin pour qu’elle se consume dans cette proximité sans jamais pouvoir y échapper. — Je t’ai sauvée, soufflé-je près de son oreille. Mon souffle caresse la naissance de sa nuque, et elle frissonne. — Tu es à moi maintenant. — Je ne suis pas à toi ! Ses yeux brillent de larmes. Mais pas seulement de peur. Je la sens, cette tension électrique entre nous. Ce frisson interdit. Je penche la tête, mon nez frôlant sa tempe, inspirant profondément son odeur de terre, de forêt et de sang chaud. — Vraiment ? Je descends lentement ma main le long de son bras nu. Chaque frôlement est une promesse. Chaque contact, un rappel de son impuissance. — Si tu étais libre, tu m’aurais griffé, frappé, hurlé, n’est-ce pas ? Je souris plus largement en sentant son souffle se saccader, son cœur tambouriner contre sa poitrine. — Pourtant tu restes là. Tu frissonnes… mais tu ne fuis pas. Ses doigts tremblants se posent sur mon torse dans une tentative pathétique de me repousser. Je saisis son poignet, doucement, fermement. — Je ne te forcerai pas, murmuré-je d’une voix soyeuse. Je n’en ai pas besoin. Ton corps viendra à moi. Volontairement. Irrémédiablement. Elle secoue la tête, un sanglot silencieux secouant ses épaules. Je la relâche, me redressant lentement, sans la quitter des yeux. Elle s’effondre contre les oreillers, ses membres raidis par la peur et par cette autre émotion qu’elle n’ose pas nommer. Je me lève sans hâte, me dirigeant vers la porte. Sa voix, faible, me parvient dans un souffle. — Pourquoi… Pourquoi fais-tu ça ? Je me retourne, mon regard brûlant de possessivité. — Parce que tu es née pour m’appartenir. Je souris lentement, terriblement. — Et demain… je commencerai à te prouver pourquoi. Je referme la porte derrière moi, laissant son odeur, son frisson, et la promesse de sa capitulation s’imprimer dans l’air lourd de ma chambre. Le jeu est lancé. Et je ne perdrai pas.
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