Chapitre I-2

2009 Words
La deuxième chose que Jerry remarqua était que l'homme était émasculé. Il avait également plusieurs bananes écrasées dans la bouche et le numéro " 1X " était scarifié sur son ventre. ― Son visage est complètement méconnaissable, son agresseur s'est acharné sur lui, observa Kate qui venait d'entrer, qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur lui pour le moment ? ― Et bien, vu l'hypostase cadavérique, notre victime est décédée ici sans être bougée, et comme il n'y a plus de rigidité cadavérique, et vu la température de son foie, il est donc mort depuis plus de 36 heures. Et vu l'état de sa tête je pense qu'il a succombé à une hémorragie cérébrale. Mais ça, c'est l'autopsie qui nous le confirmera. En tout cas ce type a ramassé. Je n'aurais pas aimé être à sa place. Un policier en civil revêtu d'un gilet sans manche où était inscrit police scientifique prenait en photo la dépouille puis il dit aux deux policiers qui venaient de rentrer qu'il lui faudrait de l'aide pour bouger le corps. Kate invita son collègue à se rendre utile. Jerry se mit à côté du lit et bascula le corps sur le côté ce qui fit relâcher les gaz corporels. Jerry réprima une nausée mais ne perdit pas pieds le temps que son collègue prenne le nombre suffisant de photos. Il eut la mauvaise surprise de découvrir une batte de base-ball rentrer jusqu'à la moitié dans l'anus de ce dernier. ― Bordel que c'est dégueulasse ! s'écria Jerry. Je ne veux même pas savoir comment il a fait pour la lui rentrer. ― Sûrement l'objet contondant qui a servi à lui saccager le visage, exprima le jeune en faisant signe à Jerry de replacer le cadavre. ― Visiblement aucun objet n'a été subtilisé, lança Kate. Subtilisé, Kate et ses mots littéraires. ― Je ne pense pas. Le tueur n'était pas là pour ça, regardez sa montre, elle vaut le prix du terrain que je souhaiterais acheter avec ma femme, et il ne l'a même pas volée. ― Ah ouais, ton terrain ce n'est toujours pas signé ? demanda Jerry. Le technicien se tourna vers lui. ― Et ben non, figure-toi que le géomètre est super pointilleux, et la vieille d'à côté à... Kate se racla la gorge et fit les gros yeux aux deux hommes. ― Donc à part les objets qui ont servi à le mutiler, rien n'a disparu ? Le jeune réfléchit. ― Ah si ! Il possédait un ordinateur. Il n'est plus là. ― Comment pouvez-vous en être certain qu'il ne l'a pas mis en réparation par exemple ? ― C'est un PC, les fils ont été arrachés et il ne manque que la tour. Du salon, ils purent entendre le chef d'équipe qui pestait contre un de ses hommes, ce qui attira l'attention de Kate. ― Tu as quarante-cinq minutes de retard Backerman ! Et comment se fait-il que tu ne décroches pas quand on t'appelle sur ton téléphone ? Tu es en procès contre Apple ? Le jeune trentenaire déposa sa mallette de travail sur le parquet et l'ouvrit pour en sortir des gants en latex. ― Mon portable était en silencieux. Kate tendit l'oreille et sortit de la chambre où elle se fit rattraper par son collègue qui n'en pouvait plus de l'odeur qui continuait d'émaner du cadavre. ― Je ne m'attendais pas à ce qu'il soit dans un état pareil, le type a dû morfler quand on lui a rentré... Il s'interrompit en constatant qu'elle ne l'écoutait pas. ― Bon allez viens, on va procéder à une petite enquête de voisinage. Ils passèrent à côté du chef qui n'en finissait pas de sermonner le policier qui ne faisait guère attention aux reproches de son supérieur. Jerry continuait d'émettre des théories sans que Kate ne prête d'attention particulière à ce qu'il disait, elle était captée par une autre chose. Quand ils passèrent juste à côté du jeune homme, Jerry aperçut le regard de Jimmy, c'est alors qu'il fit le rapprochement entre le retard de Kate et le sien. Il se tourna vers elle et ouvrit la bouche pour la taquiner une nouvelle fois, mais celle-ci le coupa dans son élan. ― Si tu l'ouvres, je n'hésiterai pas à faire usage de mon arme. Bouche toujours ouverte, il se ravisa durant quelques secondes mais une fois dans les escaliers il ne put se contenir davantage. ― Tu n'as quand même pas osé ? Pas lui ! Il est super moche ! Elle souffla. ― Jerry quand je voudrai te demander ton avis avant de faire l'amour avec un homme, je te le ferai savoir, en attendant ce n'est pas encore le cas et ça ne le sera probablement jamais, alors boucle-la, tu veux ? rétorqua-t-elle en montant les marches. Jerry sortit son calepin de son blaser et sonna à la première porte. ― Je préférais la version avec Boston, lança-t-il laconiquement comme à l'attention de lui-même. Le vieillard mit quelques minutes avant d'ouvrir. Il fut surpris de voir deux personnes présentant une plaque de police. ― Monsieur, nous aurions besoin de vous poser quelques questions. Le septuagénaire acquiesça et au même moment une jeune fille blonde de quarante ans sa cadette, vêtue d'une simple nuisette assez transparente pour laisser entrevoir ses tétons, se présenta à son tour. ― C'est qui mon chou ? lança-t-elle d'une voix de crécelle qui irrita les deux agents. ― C'est la police madame. Nous venons vous poser quelques questions concernant votre voisin qui habite en dessous de chez vous. Il a été retrouvé ce matin gisant dans son sang sur son lit. A l'entente de ces mots le vieillard posa une main sur sa bouche. ― C'est glauque ça, sortit la jeune femme en s'accrochant au cou de dindon de son amant. Puis le vieillard répondit : ― Thomas était un voisin discret. Il ne posait pas de problèmes spécifiques à la copropriété. Il n'avait pas de femme, ni enfant, il était fils unique. Son père était un bon ami. Il est mort il y a plus de deux ans. Une saloperie de cancer. Jerry prit note sur son petit calepin tout en essayant de ne pas trop lorgner sur les tétons qui pointaient frénétiquement sous la nuisette rose de la pintade blonde. Il avait pu apercevoir également qu'elle ne se gênait pas, elle, pour le regarder avec insistance, un regard qui avait l'air de dire Bute le vieux et prends-moi sur le parquet. ― Vous pensez qu'il aurait pu avoir des ennemis dans l'immeuble ou même ailleurs ? Le vieillard se mit à tousser et la blonde lui tapota le dos avec un sourire naïf. ― Dans l'immeuble je ne pense pas. A part moi il ne parlait à personne et pour ce qui est des autres ennemis, Thomas était avocat, donc des ennemis il pouvait en trouver à chaque coin de rue. Après quelques banalités échangées, les deux agents saluèrent le couple insolite et poursuivirent dans les étages. Parfois ils n'eurent aucune réponse due à l'absence ou aux habitants qui refusaient d'ouvrir, et lorsque l'on déniait leur répondre, certains n'avaient jamais entendu parler de la victime ou venaient rejoindre le témoignage du septuagénaire. Kate et Jerry quittèrent l'immeuble avec le peu de renseignements qu'ils avaient pu recueillir. Jerry se tourna vers sa collègue l'air hébété. ― Tu as vu quand même que le tueur lui a arraché les couilles ? dit-il en serrant les dents rien qu'en imaginant la douleur qu'il aurait si cela lui arrivait. Ce type est complètement taré ! ― Moi ce qui m'a frappé c'est l'inscription " 1X " scarifiée sur son ventre, pourquoi ? ― Tout simplement parce que c'est peut-être le premier d'une longue série, répondit machinalement Jerry en ouvrant la portière côté conducteur. La réponse ne manqua pas de piquer au vif Kate qui pénétrait dans la voiture. ― Tu as sans doute raison. Mais alors si c'est le cas, il va vite falloir trouver la motivation de ce type pour éviter le plus de victimes possibles. ― Pourquoi voudrais-tu qu'il y ait des points communs entre les victimes ? Ce taré frappe peut-être au hasard, il assouvit juste une soif de tuer. ― Non, je ne pense pas. Il y a eu un tel acharnement à commettre ce crime que je doute fort que ce ne soit qu'un simple hasard. Jerry suggéra à sa collègue de se diriger vers un restau sympa, histoire de réfléchir en mangeant. Quand il savait qu'ils allaient réfléchir, mieux valait le faire dans un endroit propice à la réflexion. Elle se gara sur le parking du restaurant modeste dans un coin de rue de Manhattan. En sortant de la voiture, il aimait la bonne odeur de frites chaudes et de hamburgers qui émanait de l'intérieur dès que la porte d'entrée s'ouvrait. Ils s'installèrent à une table et commandèrent deux cafés accompagnés de donuts. Kate sortit son calepin et se mit à le feuilleter en essayant de décrypter les divers renseignements qu'ils avaient recueillis. Le serveur arriva avec leur commande. Les donuts maison juteux de graisse, venaient tout juste de sortir de la friteuse ― Ce type n'a ni famille, ni amis que l'on pourrait contacter. C'est fou ça, comment peut-on vivre comme un ermite ? Jerry tint sa tasse en suspens alors qu'il s'était apprêté à en boire une gorgée. ― Tu tiens vraiment à le savoir ? Elle sentit ses joues rougir et fut gênée par sa propre question. ― Excuse-moi, parfois j'ai tendance à oublier. Et puis toi ça ne compte pas. Tu m'as moi. Il balaya de la main les excuses de sa coéquipière. ― Ne t'en fais pas, je sais, il marqua une pause. Moi aussi j'aimerais pouvoir oublier. Pour cacher sa gêne elle prit un beignet et le trempa dans son café. Elle n'aimait pas vraiment la mauvaise bouffe mais elle s'accordait quelques écarts. Et en y réfléchissant bien, les écarts, elle les faisait tout le temps à cause de Jerry. Elle se mit à croquer dans sa pâtisserie quand son téléphone se mit à sonner. ― Dépêche-toi de décrocher rouquine, pesta son collègue, ta sonnerie est nulle. Elle avala sa dernière bouchée et répondit : ― Agent Carter j'écoute. Elle sortit son stylo fétiche et se mit à écrire. Oui très bien c'est noté, merci à vous. Jerry nous avons du boulot. ― Dis-moi tout, dit-il la bouche pleine en regardant sa collègue se lever de table. ― Les collègues de la scientifique ont retrouvé son téléphone portable. Quelques heures avant sa mort il a reçu seize appels d'un dénommé Peter Hank, dont un où il a laissé un message sur le répondeur plutôt vindicatif à l'égard de notre victime. Allons interroger cet homme. Jerry se leva et but d'une traite son café chaud, il poussa quelques jurons et prit les trois donuts au chocolat qui restaient dans l'assiette puis suivit sa collègue jusqu'à la voiture. Ils toquèrent à la porte de l'appartement modeste du deuxième étage de Baxter Street où Peter Hank en personne leur ouvrirent. Il accueillit les deux policiers non d'un air surpris. ― Laissez-moi deviner vous êtes là pour Ederson ? lança-t-il en s'appuyant sur la porte. ― C'est exact, répondit Jerry en sortant une paire de menottes, d'ailleurs vous allez nous suivre. ― Quoi ? Vous rigolez j'espère ! M'emmener au commissariat juste pour des insultes c'est n'importe quoi ! Je veux faire appel à un avocat ! ― Vous aurez tout le temps de l'appeler au central. La salle d'interrogatoire était lumineuse mais froide. Les murs étaient d'un gris sale et la porte en fer était cabossée de haut en bas. Il y avait cette fameuse baie vitrée teintée, comme dans les films ou les séries. Peter, lui était assis à la table en plein milieu de la pièce, les bras tombants sur les cuisses, il fixa son verre d'eau en se demandant ce qui avait bien pu pousser les policiers à le conduire ici. Il savait que cela concernait Thomas Ederson, mais le fait d'être là pour des appels téléphoniques malveillants le surprenait. Mais il n'était pas au bout de ses surprises. Une jeune femme brune avec de grandes lunettes en blouse bleue marine entra dans la pièce avec une sorte de coton tige à la main, un écouvillon de prélèvement salivaire dans le jargon scientifique. Elle lui demanda d'ouvrir la bouche, chose qu'il fit sans rechigner. Elle passa la tige sur les parois de la bouche et enferma le relevé salivaire dans un tube. Quand elle eut terminé, elle fit un signe à ses collègues qui attendaient de l'autre côté de la vitre. Ils entrèrent tous deux, Kate s'assit sur la chaise en face de lui et Jerry se contenta de rester dans un coin de la pièce, bras croisés. ― Comment connaissez-vous Thomas Ederson ? demanda Kate sans détour. ― C'était l'avocat de Richard Gaylord. ― Et alors ? ― Ce fils de p**e a v***é ma fille. Kate regarda Jerry. Elle se rappelait pertinemment l'affaire puisque c'était elle-même accompagnée de Jerry qui avait diligenté l'enquête. ― Vous êtes le père de la petite Amanda Jackson ? ― Son beau-père. Mais j'ai rencontré sa mère alors qu'elle était enceinte de sept mois, il pointa son index sur sa poitrine, c'est moi qui ai élevé Amanda, je l'ai reconnue, c'est donc ma fille, l'amour que je lui porte n'a pas besoin de sang. Kate se passa une main dans les cheveux. ― Quel rapport avec Thomas Ederson ? La colère envahissait Peter, mais il tenta de se modérer face aux questions.
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