Choisie par les Rois-Dragons

Quand j'étais enfant, ma grand-mère me racontait des histoires. À l'époque, je n'y pensais pas beaucoup. Je pensais que ce n'étaient que des histoires. En grandissant, j'ai vite réalisé qu'elles n'étaient pas de grandes fantaisies et des contes de fées, mais des souvenirs de son passé, des souvenirs de nos ancêtres avant que notre monde ne tourne au désastre. Vous voyez, ce qui vient de la légende, peu importe à quel point l'histoire devient exagérée, il y a toujours une part de vérité. Il suffit de distinguer la fiction du fait. Ma grand-mère me racontait des histoires de l'Élu, celui qui nous sauverait tous. Quand j'étais plus jeune, je croyais que ce qu'elle disait était vrai. Qu'un jour, quelqu'un naîtrait, comme l'avait prédit l'Oracle, quelqu'un qui pourrait sauver nos âmes et nous reconnecter à notre magie. Une fois que j'ai grandi et que j'ai vu le monde se dérouler autour de moi, je n'ai plus cru au salut. L'Élu semblait être plus une prière plutôt qu'une réalité. Un rêve que nous voulions désespérément voir se réaliser. Quelque chose pour lequel nous avons tous prié. Quelque chose dans lequel nous devions trouver de l'espoir quand il n'en restait plus. Alors que nos ancêtres nous ont tourné le dos, comment pouvions-nous croire à ce prétendu salut ? D'autant plus que nous n'avons été témoins que de morts et de carnages depuis la Grande Guerre. Rien d'autre que la douleur et la pauvreté. Je croyais autrefois aux histoires, je priais pour le mystérieux Élu qui débarrasserait notre monde de son mal. Maintenant, je le vois pour ce qu'il est vraiment, juste un rêve d'espoir. Un conte de fées hors de portée. Une histoire pour créer de l'espoir. L'espoir est dangereux ; il vous fait croire que les choses vont s'améliorer. J'ai cessé de m'accrocher à l'espoir quand j'ai vu de mes propres yeux qu'il ne causait rien d'autre que de la peine. Lorsque le soulèvement a eu lieu il y a douze ans, toutes les créatures Fées ont combattu aux côtés des elfes et des anges pour essayer de réparer les erreurs de nos ancêtres de la grande guerre, essayant de rétablir l'équilibre là où il était censé être. Mes parents faisaient partie de ceux qui ont combattu courageusement. J'avais neuf ans à l'époque. Ma grand-mère m'a cachée dans le bunker sous notre maison, promettant de veiller sur moi s'ils ne revenaient pas. Seulement, quand nous sommes remontées, le monde avait changé, et ma vie aussi. Mes parents étaient partis. Pas une seule personne ayant combattu dans la guerre n'a survécu. Pas d'Elfes, pas de Fées, pas d'Anges. Même les humains ont été en grande partie anéantis, y compris l'Oracle. Sa mort a été le plus grand coup dur, car avec elle, nous avons perdu non seulement des vies, mais notre magie. Je faisais partie d'une espèce en danger d'extinction. Il ne restait presque plus de Fées. Quelques-uns se cachaient, mais nous faisions de notre mieux pour rester dans l'ombre, essayant de passer inaperçus. Je n'avais jamais rencontré un autre Fée en dehors de ma grand-mère, pourtant, je refusais de croire que nous étions les seuls restants. Nous étions maintenant au bas de la chaîne alimentaire, juste à côté des humains. Gouvernés par le Royaume des Dragons. Le Royaume des Dragons était différent de tous ceux qui l'avaient précédé, et ceux qui régnaient étaient impitoyables et cruels. Personne n'était autorisé à entrer ou à sortir sans leur accord. Je n'ai jamais quitté la ville, forcée de me cacher parmi ceux qui vivent ici, espérant que nous restions inaperçus. Parce qu'être Fée était une sentence de mort. Si vous étiez attrapé et découvert, vous priiez pour que votre mort soit rapide et non pas la mort tortueuse que tant d'autres ont été forcés de subir lors du soulèvement. Au sommet de la chaîne alimentaire se trouvaient les Dragons, puis les Lycans et les Vampires. Nous étions autrefois juste avant les Elfes et les Pixies, puis les Sirènes. Juste en bas se trouvaient les humains. Maintenant, nous étions juste à côté d'eux, les charognards de ce monde, prenant ce qui restait après que les autres ont rejeté ce qu'ils ne voulaient pas. Les Fées sans magie auraient aussi bien pu être humains. Nous ressemblons à des humains sauf pour nos yeux, chacun unique à notre lignée. Les miens étaient de la couleur de l'améthyste, comme la lignée de ma mère. Ma lignée était presque complètement éradiquée. Nous étions autrefois parmi les plus grandes familles de Fée, aidant à gouverner parmi notre espèce. Ma lignée, autrefois royale, est maintenant disparue, tout comme nos ancêtres, ne laissant que moi et ma grand-mère. Ma grand-mère disait que notre lignée était autrefois parmi les Fées royales, que nos ancêtres avaient accompli de grandes choses. Maintenant, j'étais la dernière de notre lignée et peut-être la deuxième dernière Fée. Une fois que je partirai, c'est fini. La survie de ma lignée repose entièrement sur mes épaules. Oui, l'avenir ne semblait pas brillant pour ma famille, bientôt vouée à disparaître. Mon vingt et unième anniversaire approchait. J'avais redouté ce jour aussi longtemps que je me souvienne, le jour où ils viendraient me traquer et me traîner au château. Il n'y avait pas beaucoup d'opportunités d'emploi pour les Fées, tout comme pour les humains. Les Fées n'étaient désormais plus qu'un souvenir lointain auquel les gens refusaient de croire, alors nous nous déguisons en nous fondant dans la masse des humains. La plupart des humains étaient vendus dans le commerce du sexe ou vendus en esclavage, à moins, bien sûr, que vous ne soyez attrapé et prouvé être Fée. Ainsi, vous ne gagniez que le droit de mourir douloureusement pour les péchés de vos ancêtres. C'est pourquoi il n'y a plus de Fée. C'est pourquoi ma grand-mère et moi restons dans l'ombre, nous fondant parmi les humains, afin de rester inaperçus. Avoir vingt et un ans est un jour important pour les créatures Fées. C'est le jour où notre magie est censée se manifester. Aucune Fée n'a été trouvé depuis le soulèvement, en tout cas, pas à ma connaissance. On dit que, lorsque nous avons perdu la guerre, puis l'Oracle, cela a provoqué la colère des destins, et ils ont rejeté les Fées, nous dépouillant de notre magie. Les ancêtres nous ont tous tourné le dos. Ma grand-mère disait que c'était pour essayer d'empêcher l'extinction de notre espèce, mais moi, je crois qu'ils nous ont simplement abandonnés. Le fait d'être confiné dans l'ombre, bien qu'il s'agisse d'une existence sans espoir, était probablement pour le mieux. Rester impuissants signifiait que nos véritables capacités ne pouvaient pas être exploitées par les forces maléfiques qui sévissaient désormais dans notre monde. De nos jours, les Dragons et les Vampires convoquent tous les humains le jour de leur anniversaire. Les humains faisaient la queue et se tenaient devant les dirigeants, qui décidaient finalement de leur sort. Si vous montriez une quelconque capacité magique, ils vous tuaient instantanément, que vous soyez Fée ou pas. Et s'ils n'étaient pas sûrs ? Eh bien, vous mourriez quand même. Ma grand-mère disait que cela allait à l'encontre de tout ce en quoi elle croyait. Que la magie était sacrée et devait être célébrée, pas condamnée à mort pour son existence. Dans une semaine, ils me convoqueraient. Ma grand-mère et moi sommes restées cachées dans l'espoir que je reste inaperçue. Ma grand-mère a catégoriquement refusé de les laisser me trouver. Elle ne pouvait pas imaginer que je sois vendue au plus offrant. Pourtant, au fond de moi, je savais qu'elle était impuissante à les arrêter. Bien sûr, elle avait du pouvoir, la seule Fée sur terre avec une magie ancienne qui coulait encore dans ses veines. La magie qui nous avait permis de survivre. Pourtant, sa magie s'amenuisait lentement. Elle finirait par disparaître. Alors, nous ferions vraiment face à notre perte.