Récompense

1249 Words
"Change !" L'ordre claqua, inflexible. Je tentais de résister un instant, mais la pression fut trop forte et mon loup se retira. Incapable de me détendre, la transformation se fit dans une douleur atroce. Serrant les dents pour ne pas geindre, je me retrouvais bientôt en position fœtale, nue et haletante sur le marbre glacial de la pièce. Mon corps endolori ne répondait pas ou du moins je refusai qu'il le fasse. Je ne voulais pas obéir, je ne voulais pas me plier à ses jeux tordus, même si je savais que je n'y échapperai pas au moins n'aurais-je pas participé volontairement. "Attache-la..." Le loup qu'elle avait récupéré sur le chemin me lia les poignets et je sentis les cordes mordre méchamment dans ma chair. Elle savait que les chaînes en argent ne seraient pas nécessaires, que je ne chercherai pas à m'enfuir. J'étais bien trop brisée pour cela. Le mâle fit passer la corde dans un anneau et me hissa jusqu'à ce que je sois presque debout. Face à moi Ivana était installé dans un fauteuil. Elle ne portait plus qu'un long peignoir transparent ne laissant rien à l'imagination de sa silhouette voluptueuse, ses yeux verts brûlants d'excitation. Derrière elle un immense miroir me renvoyait mon image tristement. Ma peau laiteuse et ferme, mes longs cheveux noirs encore en bataille suite à mon changement, mes yeux argents plutôt atypiques parmi les loups de la meute, mon corps aux formes féminines, mais néanmoins musclé de combattante. Tout cela aurait pu être flatteur si je n'étais pas encore couverte du sang de mon adversaire du menton jusqu'au ventre. Je sentais même encore son goût sur ma langue. Grimaçant à mon reflet, je détournais le regard et fermais les yeux. Je passais le plus clair de mon temps dans la peau de ma louve, en dehors de rares événements. Peu de membre de la meute me voyaient sous ma forme humaine au quotidien, ce qui m'allait très bien. La lueur de convoitise qui animait les yeux de mes tortionnaires me rappelait pourquoi je rejetais tant ma forme humaine. Je voulais qu'on me craigne, qu'on me laisse en paix et non qu'on me désire. Mon corps avait été tellement sujet aux abus que je le haïssais. Alors que je laissais dériver mon esprit en priant pour que les petits jeux de ma Luna ne durent pas trop, je sentis sa langue longer ma clavicule et se diriger vers mon sein, se repaissant du sang du loup mort. Elle joua un instant avec le mordillant et le suçant tout en se caressant. Je respirais à peine, seule manifestation physique que j'étais en vie. Ces attouchements n'étaient pas une première, je n'en avais même plus la nausée. Mon corps était fonctionnel, mais mon esprit était complètement replié auprès de ma louve. Indifférente, en sécurité. Puis soudain, elle s'écarta une expression mauvaise sur le visage. "J'ai l'impression que tu n'aimes pas ma récompense, alors peut-être préféreras-tu celle-ci ?" Elle fit un signe de tête à l'homme qui se tenait derrière moi et qu'un instant j'avais oublié. Je l'observai dans le miroir, il était déjà nu, son sexe pendant entre ses jambes me semblait repoussant malgré la perfection de son corps propre à notre espèce. Mon sang ne fit qu'un tour lorsque je vis qu’il tenait à la main un fouet garni de pointes acérées en argent. Mon cœur se mit à battre follement comme s'il cherchait à s'enfuir de ma cage thoracique. Ivana, elle, était retournée à son poste d'observation me dévorant des yeux. Je reportais alors mon attention sur le miroir et plongea mon regard dans celui de mon reflet. Ma louve, impuissante, me renvoyait mon regard. S'adressant mentalement l'une à l'autre, nous nous répétions notre mantra qui nous avait permis de survive à toutes ces années d'horreur. "Ensemble... - Toujours !" A peine avions-nous eu le temps de prononcer silencieusement notre dernier mot que le fouet lacéra mon dos. Je me mordis les joues pour ne pas leur donner la satisfaction de m'entendre crier. Ma louve, elle, me transmettait tout son pouvoir afin que je survive à cette nouvelle épreuve. Je savais néanmoins que cela ne suffirait pas à guérir complètement mes blessures. L'argent laisse des traces, mon dos déjà marqué de récompenses similaires en est le témoin. Les coups se répétaient encore et encore, m'affaiblissant chaque fois un peu plus. J'étais presque heureuse d'avoir été suspendue à cette corde, car je sentais que mes jambes étaient de moins en moins capables de me porter. Malgré ma louve qui s'évertuait à me guérir, je sentis ma conscience commencer à vaciller et ma vue se brouiller. Éreintée, je me mis à prier la déesse afin qu'elle m'aide à passer cette épreuve, bien qu'en réalité elle n'avait jamais rien fait pour se montrer clémente à mon encontre. Le désespoir est une motivation suffisante à un sursaut de spiritualité il faut croire. Alors que j'étais au bord de l'évanouissement, le dos brûlant et sanglant, les coups cessèrent. Quittant mon reflet des yeux, je reportai mon attention sur mon bourreau. Le fouet gisait à ses pieds et je grimaçai en voyant les petits morceaux de peau encore attachés aux pointes. Mais l'horreur naquît en moi quand je vis le mâle visiblement très excité s'approcher de moi, sa virilité dressée et palpitante en main. Dans mon dos, je le sentis laper avec satisfaction le sang qui s'écoulait de mes blessures, non pour me guérir, mais pour m'humilier encore un peu plus. Puis, il se plaqua contre mes fesses brusquement. Je le sentais essayer de se frayer un chemin vers l'entrée de mon intimité. De tous les abus que j'avais pu subir, c'était le seul auquel j'avais échappé jusqu'à présent. Je me crispai malgré les vagues de douleurs qui irradiaient de mon dos, mais je résistais à l'envie de me débattre dans l'espoir que cela me sauverait de cet ultime outrage. Mon intuition fut la bonne puisque la voix excitée et irritée d'Ivana claqua dans l'air. "Assez ! Viens donc me satisfaire plutôt que cette chienne." Je sentis le mâle pousser un léger soupir frustré, totalement inaudible pour la Luna. Il aurait apparemment bien aimé pousser plus loin la torture, mais ça, c'était la chasse gardée de mon tyran. Son corps se séparant du mien, je vis son torse baigné de mon sang. Il se dirigea nonchalamment vers la Luna et la pénétra violemment. Tandis que leurs cris de plaisirs se mêlèrent et montèrent en intensité, je me repliai en moi-même afin de m'épargner le spectacle et m'autorisai à perdre conscience. Je revins vaguement à moi lorsque je fus jetée sans ménagement sur le sol de mes quartiers. Sûrement le bras droit d'Ivana ou bien son favori du soir, car il était bien évidemment impensable que quiconque puisse me voir dans cet état sans l'autorisation de la Luna. Comment une marionnette brisée pourrait-elle terroriser la meute et la maintenir dans les rangs ? Comment nos ennemis nous craindraient-ils si le grand méchant monstre s'avérait être un pitoyable chien battu ? Les rares personnes au courant de mon calvaire se taisaient par peur ou par loyauté, mais aussi, car elles n'avaient pas le choix, réduites au silence par ordre de leur maîtresse. Incapable de me hisser jusqu'à mon lit, je finis par me traîner jusqu'à un recoin baigné d'un rayon de lune. J'admirai un instant la pâleur iridescente de la lumière de l'astre qui se reflétait sur ma peau avant de sombrer dans un profond sommeil.
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