Chapitre 15

1536 Words
Chapitre 15 LE POINT DE VUE DE LÉA Mon téléphone vibre sur la table de nuit. Un message de Chloé. "Je rentre dans une heure. Tu es toujours là ? Et pourquoi Alexandre m'a envoyé un message bizarre ce matin ?" Merde. Alexandre. Chloé. Le désordre que j'ai laissé dans son appartement. — Je dois y aller, je dis à Matthieu. Chloé rentre et je dois... nettoyer mes conneries. — Je viens avec toi. — Matthieu, je ne sais pas si c'est une bonne idée. — On a dit plus de secrets. Plus de mensonges. Ça commence maintenant. On affronte tout ensemble. Je le regarde, cet homme obstiné et merveilleux qui refuse de me laisser gérer mes problèmes seule. — D'accord. Ensemble. Nous nous habillons rapidement, nos mains se cherchant constamment, incapables de rester séparés même quelques secondes. Dans le taxi vers l'appartement de Chloé, Matthieu tient ma main, la serrant comme si j'allais disparaître. — Qu'est-ce qu'on va dire à Chloé ? — La vérité. Tout. Elle mérite de savoir. — Elle va me détester. — Probablement. Au début. Mais elle t'aime. Elle comprendra. Éventuellement. J'espère avoir raison. Quand nous arrivons, Chloé est déjà là, debout dans son salon, regardant les verres de vodka vides et les vêtements d'Alexandre éparpillés. Elle se retourne quand nous entrons, ses yeux s'élargissant en voyant Matthieu avec moi. — Léa. Qu'est-ce qui... qu'est-ce qui s'est passé ici ? — Assieds-toi, je dis doucement. On doit te parler. Et nous le faisons. Nous lui racontons tout. Ma douleur. Ma vengeance. Alexandre. Notre réconciliation ce matin. Quand nous terminons, Chloé nous fixe, bouche bée. — Vous êtes tous les deux complètement fous, dit-elle finalement. — On sait. — Complètement, totalement, irrévocablement fous. — On sait aussi ça. Elle secoue la tête, puis un sourire lent s'étire sur ses lèvres. — Mais vous êtes fous l'un de l'autre. Alors je suppose que ça s'annule. — Tu ne me détestes pas ? je demande, surprise. — Oh, je suis furieuse que tu aies utilisé mon appartement pour coucher avec Alexandre. On va en reparler. Mais te détester ? Jamais. Elle s'avance, m'attirant dans une étreinte serrée. — Tu es ma meilleure amie. Tu fais des erreurs. Il en fait aussi. Elle lance un regard noir à Matthieu. — Mais si tu la blesses encore, je te tue. Compris ? — Compris, acquiesce-t-il solennellement. — Bien. Maintenant sortez de chez moi. J'ai besoin de désinfecter mon appartement. Nous partons en riant, la main dans la main. Dehors, Paris brille sous le soleil de midi. Une nouvelle journée. Un nouveau départ. — Alors, dit Matthieu en me tournant vers lui. On fait ça ? Pour de vrai cette fois ? — Pour de vrai, je confirme. Plus d'erreurs. Plus de trahisons. — Juste nous. Imparfaits mais ensemble. — Ensemble. Il m'embrasse, là, en plein milieu du trottoir, sans se soucier des regards des passants. Et pour la première fois depuis des jours, je me sens... en paix. Nous avons un long chemin devant nous. Ce ne sera pas facile. Mais avec lui, je suis prête à essayer. Parce qu'au final, l'amour n'est pas parfait. Mais il peut être vrai. Et ça, c'est suffisant. LE POINT DE VUE DE Léa Deux semaines passent. Deux semaines pendant lesquelles Matthieu et moi reconstruisons lentement ce que nous avons brisé. C'est difficile. Il y a des moments de doute, des nuits où je me réveille en pensant à Anaïs dans ses bras. Des moments où je le surprends me regardant avec une ombre dans les yeux et je sais qu'il pense à Alexandre. Mais nous tenons bon. Nous parlons. Beaucoup. De tout. De nos peurs, nos insécurités, nos erreurs. Et lentement, très lentement, nous guérissons. C'est un mardi après-midi quand Alexandre réapparaît dans ma vie. Je suis à mon bureau, concentrée sur une présentation, quand la réceptionniste m'appelle. — Léa ? Vous avez une livraison. — Une livraison ? Je descends au rez-de-chaussée pour trouver un énorme bouquet de roses blanches. La carte dit simplement : "Pense à moi. - A" Mon estomac se noue. Non. Pas maintenant. Pas alors que les choses commencent enfin à s'arranger. Je remonte à mon bureau avec le bouquet, le posant dans un coin. Chloé, qui travaille dans le même open space, me lance un regard interrogateur. — De qui ? — Alexandre, je murmure. — Merde. — Exactement. Mon téléphone vibre. Un message d'un numéro que je reconnais maintenant. "As-tu aimé les fleurs ? J'aimerais te revoir. Dîner ce soir ? - Alexandre" Je fixe le message, mon pouce planant au-dessus du clavier. Je dois gérer ça. Mettre les choses au clair. "Il faut qu'on parle. Mais pas un dîner. Un café, cet après-midi ?" Sa réponse est immédiate. "Parfait. 17h, le café près de ton bureau ?" "D'accord." Je passe le reste de l'après-midi anxieuse, incapable de me concentrer. À seize heures trente, je préviens Matthieu. "Alexandre veut me voir. Je vais lui parler, lui dire que c'était une erreur. Je voulais que tu saches." Sa réponse met quelques minutes à arriver. "Tu veux que je vienne ?" "Non. Je dois gérer ça seule. Mais merci de proposer. Je t'aime." "Je t'aime aussi. Sois forte. Et appelle-moi après." À dix-sept heures pile, j'entre dans le café. Alexandre est déjà là, installé à une table près de la fenêtre. Il se lève en me voyant, son sourire charmeur en place. — Léa. Tu es magnifique. — Merci. Je m'assieds en face de lui, gardant une distance délibérée. Le serveur prend nos commandes — un café pour moi, un thé pour lui. Puis nous sommes seuls, un silence inconfortable s'installant entre nous. — Les fleurs étaient exagérées, je dis finalement. Tu n'aurais pas dû. — Je voulais te montrer que je pense à toi. À cette nuit qu'on a partagée. Il se penche en avant, prenant ma main sur la table. Je la retire doucement. — Alexandre... — Je sais que tu étais bouleversée ce soir-là. Blessée. Mais ce qu'on a partagé était spécial, Léa. Je l'ai senti. Je sais que tu l'as senti aussi. Mon cœur se serre. Comment lui dire sans le blesser ? — Alexandre, c'était une erreur. Son sourire vacille. — Comment peux-tu dire ça ? — Parce que c'est la vérité. J'étais ivre. En colère. Je voulais faire mal à quelqu'un qui m'avait fait mal. Et tu étais là. Je vois la douleur traverser son visage. — Ce n'est pas juste un rebond, Léa. On pourrait avoir quelque chose de bien ensemble. Laisse-moi te le prouver. — Non. Je suis désolée, mais non. — C'est lui, n'est-ce pas ? Ce Matthieu. Tu es retournée avec lui. — Oui. — Après ce qu'il t'a fait ? Après t'avoir trompée ? Sa voix monte légèrement, attirant quelques regards curieux. — Alexandre, baisse d'un ton. — Comment peux-tu lui pardonner mais me rejeter ? J'ai été gentil avec toi. Patient. Je t'aurais traitée comme une reine. — Je sais. Et tu es quelqu'un de bien. Tu mérites quelqu'un qui te veuille vraiment. Quelqu'un qui t'aime. — Et tu ne m'aimes pas. Ce n'est pas une question. C'est une constatation amère. — Non. Je suis désolée. J'aime Matthieu. Malgré tout ce qui s'est passé. Malgré nos erreurs. Alexandre se renverse dans sa chaise, passant une main sur son visage. — C'était ma plus belle nuit, tu sais, dit-il finalement, sa voix basse. Être avec toi. Te tenir dans mes bras. J'ai cru que... j'ai cru que c'était le début de quelque chose. Mon cœur se serre de culpabilité. — Je suis vraiment désolée, Alexandre. Sincèrement. Tu ne méritais pas d'être utilisé comme ça. C'était cruel de ma part. — Tu ne m'as pas utilisé. J'étais consentant. J'espérais juste... Il s'interrompt, secouant la tête. — Peu importe ce que j'espérais. Tu as fait ton choix. — Je l'ai fait. Et ce choix, c'est Matthieu. Le silence s'installe à nouveau. Notre serveur apporte nos boissons, sentant la tension et s'éclipsant rapidement. — Il a de la chance, dit finalement Alexandre. J'espère qu'il le sait. — Il le sait. Et il essaie de se racheter. Nous essayons tous les deux. Alexandre prend une gorgée de son thé, évitant mon regard. — Je ne peux pas te promettre que je ne vais pas penser à toi. À cette nuit. Mais je respecte ta décision. — Merci. Ça compte beaucoup. — Chloé va me détester, non ? Un petit rire m'échappe malgré la gravité de la situation. — Probablement. Elle est très protectrice. — Je m'en doutais. Il se lève, sortant son portefeuille. — Laisse, je vais payer. — Non, j'insiste. C'est le moins que je puisse faire. Il pose quelques billets sur la table puis se tourne vers moi une dernière fois. — Sois heureuse, Léa. C'est tout ce que je veux pour toi maintenant. — Toi aussi, Alexandre. Tu trouveras quelqu'un. Quelqu'un qui te méritera. Il hoche la tête, puis part sans un regard en arrière. Je reste assise là quelques minutes, fixant mon café refroidissant, un mélange de soulagement et de tristesse dans la poitrine. C'était la bonne chose à faire. La seule chose à faire. Mais ça n'empêche pas de me sentir terrible.
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