Chapitre 4

1358 Words
-Je vous repose la question. Comment les journalistes ont fait pour avoir vent de cette histoire, qui était censée être confidentielle? Personne n'ouvrit la bouche, se contentant de fixer la table d'acier ou le vide. Amir s'énerva. -Omar, Rafiq? Vous n'avez pas une idée de la façon dont l'affaire s'est ébruitée ? demanda-t-il en regardant tour à tour son conseiller financier et son premier ministre. Un rictus sévère étirait ses lèvres. Amir se mit à faire les cent pas dans la salle de réunion, puis, dans un brusque accès de colère, il se retourna et abattit violemment son poing contre la longue table d'acier. -Je vous ai posé une question, hurla-t-il. Il les fusilla du regard. Bon sang! Il n'avait que des incompétents à son service ! Quand il avait vu Tayla s'effondrer, une vive émotion s'était emparé de lui. Il ne savait pas ce que c'était et n'avait franchement pas le temps et le cran pour y penser maintenant. Il fallait s'occuper de démasquer le traître qui l'avait trahi et aussi de renvoyer le journaliste qui avait brusqué Tayla aux États-Unis. Trois personnes étaient au courant de l'existence de ses enfants: son premier ministre et meilleur ami Rafiq, son cousin Abdoul, ainsi que son conseiller financier, Omar. Il n'avait engagé ce dernier que quelques mois plus tôt, après que Mohammed, son ami et conseiller, se soit marié. Voilà pourquoi il le soupçonnait. Omar était jeune et n'avait pas totalement gagné sa confiance. Amir enfouit ses mains dans ses poches. Cette situation allait empirer s'il ne faisait pas quelque chose. Sans oublier qu'il devrait retourner aux États-Unis pour s'enquérir des nouvelles de l'enquête. Il jura abondamment. Il allait étrangler ces hommes qui le regardaient sans piper un mot comme s'ils étaient muets. Et il allait étrangler les américains qui étaient responsables de l'enquête s'ils n'avaient pas arrêté le coupable. -Votre Altesse, cela ne sert à rien de vous mettre dans cet état, observa Rafik. L'affaire était confidentielle mais elle s'est ébruitée... Amir le coupa: -Je connais l'histoire. Pas besoin de me la raconter. Il y a un traître parmi nous et il doit être démasqué. Et soyez sûrs qu'il le sera. Rafiq lui lança un regard noir. Visiblement, il n'aimait pas le ton qu'il avait employé. Il regarda tour à tour les treize personnes qui le fixaient. -Vous pouvez disposer, déclara-t-il, les dents serrées. Rafiq j'ai besoin du contrat de mariage, j'espère donc qu'il est prêt. Il n'attendit ni sa réponse ni que la salle soit vide pour sortir. Sans perdre de temps, il se dirigea vers les quartiers de Tayla. La jeune femme avait repris connaissance mais il ne l'avait pas encore vue. Seigneur, comme il avait eu peur! Il tenait à Tayla, c'était sûr. Il ne pouvait nier cette évidence. Rapidement, il longea les couloirs du palais et tomba nez à nez avec Briannah qui sortait de la suite de Tayla. -Comment va-t-elle ? demanda-t-il. Il eut un regard noir de sa part et soupira silencieusement. C'était accablant ! On dirait que tout le monde s'était ligué contre lui aujourd'hui. D'abord Tayla l'avait rendu fou de désir dans l'avion, ensuite sa mère avait certifié qu'il était hors de question que Tayla et lui fassent chambre à part- n'était-ce l'intervention de Briannah il aurait dû se plier à cette décision, et enfin personne n'avait pu lui dire qui était le traître. Et voilà que Briannah le toisait de toute sa hauteur. Elle allait lui passer un savon, c'était sûr. -Si tu veux savoir comment elle va tu n'as qu'à le lui demander. Elle est juste à l'intérieur, tu sais, rétorqua-t-elle en faisant un signe vers la porte. Et voilà, se dit Amir. Cette femme n'avait pas changé. Toujours prêt à dire tout ce qu'elle avait sur le cœur. -Je me demande ce que tu veux qu'elle soit, Amir, poursuivit-elle. Un objet ou ta femme ? Une marionnette ? Elle ne savait même pas que le mariage est pour après demain. -Je t'assure qu'elle était lucide quand elle a dit "oui" à ma demande, objecta-t-il. -Encore faudrait-il qu'on arrive à appeler ça une demande en mariage. Ce n'était même pas une proposition : c'était un ordre. -Je suis le cheikh Amir Tarek Hasan, Gouverneur de Zubran. Tu aurais voulu que je m'agenouille pour faire ma demande ? Elle le fusilla du regard. -Je ne répondrai pas à ta question. La seule chose que j'ai à te dire, c'est: prépare toi. Tayla n'est pas une femme faible et bientôt tu t'agenouilleras à ses pieds. Et crois-moi, ce jour tu oublieras que tu es un cheikh. Sur ces mots, elle tourna les talons. Amir se retint de jurer en prenant le chemin qu'il avait emprunté quelques minutes plus tôt. Il en avait eu assez pour la journée, pas question d'aller affronter Tayla aussi. Il consulta son téléphone. Il était une heure du matin. Il souffla entre ses lèvres. Tout ce dont il avait besoin c'était d'un sommeil réparateur. Le voyage l'avait épuisé et il ne s'était pas reposé. Deux heures plus tôt il était arrivé à Zubran et avait fait convoquer tous les ministres malgré l'heure tardive. Et dire qu'il avait fait tout ça pour rien! Il ouvrit la porte de sa suite et put enfin jurer abondamment sans risquer d'être entendu mais il se figea en voyant qui l'attendait dans son salon. -Que faîtes-vous ici? -J'avais besoin de te parler, répondit sa mère. Au sujet de ta fiancée. -Mère, ce n'est surtout pas le moment, commença-t-il en se dirigeant vers sa chambre. J'ai eu une affreuse... -Et quand ce moment viendra-t-il? Il se figea. Oui. Quand viendrait ce moment? Sûrement pas ce soir. Ni demain. Ni jamais ! Il retint un soupir. Il avait supporté la présence de Tayla pendant toute la journée, pourquoi fallait-il que sa mère choisisse le moment précis où il s'apprêtait à... -Quand j'ai épousé ton père, ce n'était pas par amour, déclara-t-elle, rompant le fil de ses pensées. Notre mariage avait été arrangé dès notre naissance mais nous étions deux étrangers l'un pour l'autre lorsqu'on s'est mariés. Amir se retourna lentement pour lui faire face. -Au début de notre union, on n'a pas cherché à se connaître. Il était prince à l'époque et s'occupait des affaires du pays, ne m'accordant de l'attention seulement quand il voulait satisfaire ses désirs charnels. S'adossant contre un mur, il enfouit ses mains dans ses poches. Vive Tayla, se dit-il intérieurement. Il avait trente-deux ans et sa mère ne lui avait jamais parlé de sa relation avec son père. Et dès le jour de son arrivée, Tayla avait suscité chez sa mère le désir de lui raconter l'histoire de son >. Tout cela était très comique ! -Je suis tombée amoureuse de lui dès les premiers mois mais je voulais que cet amour soit réciproque. Je ne voulais pas être une marionnette qui ne ferait que son bon vouloir. Je voulais occuper et son lit et son cœur. Marionnette! Sa mère avait dit marionnette. Cinq minutes plus tôt, Briannah lui avait répété le même mot. > Laïla poursuivit son récit: -Alors j'ai commencé à me refuser à lui quand il me rejoignait le soir, malgré le désir qu'il m'inspirait. Et tu sais quoi, il a changé. Et je ne regrette aucun des moments que j'ai passés avec lui. Son regard qui était comme perdu dans le vide se posa sur lui. -Alors laisse-moi te donner un conseil Amir: chéris ta femme tous les jours de ta vie sinon elle te quittera et tu n'auras que tes deux yeux pour pleurer. Elle se leva, prit son éventail et se dirigea vers la porte. -Dors bien, mon fils. Et pense à ce que je viens de te dire puis prends une décision avant qu'il ne soit trop tard. Je sais que quelque chose ne marche pas dans votre couple. La porte se referma derrière elle. Amir ferma les yeux en lâchant un rire sans joie. Quelle perspicacité de la part de sa mère! Sauf ce n'était pas les pleurs qui meubleraient sa vie s'il s'approchait de Tayla. Il dépendrait totalement d'elle et cela le ruinerait.
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