Après un bon repas, je sortais mon ordinateur portable et me mettais à faire des recherches sur ce fameux Sergent. Il est vrai que j’avais eu très peu d’informations concernant l’enquête, alors que la police et moi étions supposés être en étroite collaboration.
Sergent René Piniot. 20 ans d’expérience dans la police, est monté en grade plutôt tardivement, lors de sa seizième année de service. Il avait pourtant fait quatre fois la demande de passer Sergent. Quelles sont alors les raisons de ces refus ?
Je cherchais de nouveau et tombais sur un article dans le journal local, « Detroit News », datant du 20 septembre 2008. Une enquête dont l’« Officier Piniot » à l’époque, a été accusé d’avoir bâclé en proposant des pots de vin à un témoin. Pots de vin offert dans le but de déformer « quelque peu » sa version afin de boucler au plus vite l’affaire.
Tiens donc. Ce Sergent n’était pas très intègre à l’époque, et comme on dit, chasse le naturel il revient au galop. Peut-être a-t-il continué à offrir des pots-de-vin, ou est-il dans d’autres magouilles aujourd’hui, et mes clients en seraient les victimes?
Je décidais de garder à l’œil ce Sergent et de me méfier des informations qu’il me transmettrait à l’avenir. En attendant, je n’avais pas fait de lien entre le Sergent Piniot et Mathieu Toller, ni trouvé un mobile ou une raison pour cacher ces informations. Il allait m’en falloir plus si je voulais qu’on me prenne au sérieux.
Je m’arrêtais la pour la soirée et allais me coucher, faisant tourner en boucle cette histoire dans ma tête, jusqu’à m’endormir de fatigue.
Le lendemain était un jeudi ensoleillé. Je me levais étonnement de bon poil, prenant goût à jouer à l’inspectrice en cachette. Je m’habillais de ma légendaire jupe crayon, talon haut noir, chemisier blanc. Je comblais le tout d’un blazer gris, et de mon sac Chanel noir. Faites pas les étonnés ! Ce n’est pas qu’une idée reçue, les femmes privilégient les sacs à leur voiture… la preuve.
J’allais au boulot à l’heure, contrairement à ces derniers jours, thermos de café en main, et fonçais jusque mon bureau. Mathilda, ma plus fidèle amie et collègue, m’attendait assise sur mon bureau, jambe croisée, magazine « Voici » en main.
- « Je t’ai déjà dit d’arrêter de lire ces conneries ! Comment une avocate peut croire à toutes ces bêtises Mathilda ? », je la faisais sursauter en riant.
- « Tu m’as fait peur ! Et puis, qui es-tu pour commencer ? 4 jours que je n’ai ni le son ni l’image, ou étais-tu passée ? Avec qui ? J’espère que tu as une bonne raison de ne pas m’avoir donné de nouvelles ! », elle me répondait avec son air semi-sévère, qui me fait rire instantanément de plus belle.
- « J’avais besoin de me concentrer sur mon affaire ! J’ai eu des rendez-vous avec la police ainsi qu’avec mes clients, j’avoue ne pas être beaucoup passé au bureau. Comme on dit, le travail avant tout n’est-ce pas ? »
- « Comme tu dis, TOI ! Tu vas finir par faire une crise de la quarantaine quand tu te rendras compte que tu passes plus de temps à travailler qu’à t’amuser ! Sérieusement Morgan, il faut que tu rencontres quelqu’un. J’étais justement en train de penser à t’inscrire sur un site de rencontre ! », elle me balançait tout sourire.
- « Plutôt crever ! J’aime ma vie comme elle est, et descends de mon bureau avec ton gros boule et tes magasines à deux balles ! », je la poussais en rigolant.
- « 4 jours sans nouvelles et c’est comme ça que tu traites ta meilleure amie ! Tu finiras seule avec des chats. Bonne journée. », elle partait en boudant.
Je continuais à rire seule dans mon bureau, prenant le temps d’y remettre de l’ordre. Mathilda et moi nous sommes rencontrer à la faculté de droit de Détroit, il y a de cela trois ans. J’avais pour habitude de toujours me mettre au premier rang, fidèle à ma place de première de ma promo. Mathilda, au contraire, se mettait toujours au dernier, fidèle à son titre de « bavarde de service », loin de l’élève modèle que j’étais. Comment avons-nous été amené à nous rencontrer, allez-vous demander ? A cause –grâce ?- d’un homme.
Jordie Pinkefield était le beau gosse populaire de la promo à cette époque, mais aussi le second meilleur élève la promo. Pour faire court, il nous a berné toutes les deux. Il voulait la popularité de Mathilda et mon intelligence. On s’en est bien évidemment rendu compte et avions décidé de lui faire payer à deux. De la est née la plus belle relation d’amitié qui m’est été donné de rencontrer, bien qu’on soit opposés sur beaucoup de points.
Le petit « 28 » affiché sur ma boite mail me fait instantanément sortir de mes pensées. Mince ! 4 jours de retard, c’est vraiment ça le résultat ? Plus jamais !
Je passais la matinée à répondre aux mails, et aux remarques de mon patron qui paraissait-il, commençait à « s’inquiéter » de ne plus me voir au bureau, sachant que, mot pour mot, j’y « passais ma vie ». Je devrais peut-être réfléchir à ce que m’a dit Mathilda finalement… Finir avec des chats ne m’enchantes plus trop d’un seul coup.
Je mangeais au bureau avec Mathilda le midi, puis commençais mes recherches sur les deux infirmières qui s’occupaient de Mr. Toller le jour en question. Elles ne m’avancèrent pas plus que ça, comme pensé, et mettais dans un coin de ma tête l’idée d’aller les rencontrer dès que j’en aurai la possibilité.
Car malheureusement, il était clair que je devais retourner à l’hôpital. Premièrement, pour m’entretenir avec ces deux infirmières, afin de confirmer ou non leur ronde après la chirurgie de Mr. Toller ; et deuxièmement, pour réussir à avoir le nom de cette visite mystérieuse.
Je dérivais ensuite mes recherches sur le docteur, classant chacune de mes recherches, restant persuadée que ça mènera tôt ou tard quelque part. Le docteur en question était un jeune docteur du nom de Tristan Perquier, réputé à Washington, fraichement arrivé dans le Michigan. Pourquoi quitter Washington et une carrière déjà bien dessinée, pour venir dans le Michigan ?
Une bonne demi-heure plus tard, je comprenais qu’il était la seulement pour un remplacement de courte durée. Ça semblait louche. Vous pensez que je deviens parano, avouez ? C’est vrai je vois le mal partout, mais pourquoi accepter un remplacement quand on a un beau poste au chaud dans la belle ville de Washington ?
Je cliquais ensuite sur l’onglet « Image » et je découvrais un visage qui me semblait familier. Je n’arrivais pas à mettre le doigt sur cette familiarité et ça me tourmentait l’esprit.
Je regardais ma montre et me rendait compte que mon rendez-vous de 16h arrivait à grand pas ! J’éteignais mon ordinateur et remettais ces questions à plus tard. J’avais rendez-vous chez mes clients dans une petite demi-heure, il ne fallait pas que je traîne…