Sous l'Emprise de ses lèvres

Chapitre 7

Chapitre 7 :

Les paroles de Gwen résonnaient encore dans l’esprit de Tristen comme une mélodie obsédante.

*Si tu l’abandonnes, un autre viendra la réclamer.*

Il répéta mentalement cette phrase jusqu’à en sentir la morsure dans sa poitrine. Puis, soudain, les yeux clos, il éclata :

— Non ! Jamais… Elle m’appartient.

Le cri jaillit de lui comme un coup de tonnerre, emplissant sa chambre silencieuse. Sa respiration saccadée témoignait de la tempête intérieure qui l’agitait.

De l’autre côté du battant, Gwen, qui avait plaqué son oreille contre le bois, esquissa un sourire malin.

— Voilà… je savais qu’il finirait par le dire.

Elle n’eut cependant pas le loisir de savourer sa victoire, car Gavin la surprit accroupie dans le couloir.

— Tu comptes espionner encore longtemps, sale fouineuse ?

Il lui attrapa l’oreille et la tira sans ménagement à l’écart.

— Aïe ! Tu ne pourrais pas être un peu plus délicat ? grogna-t-elle en se frottant.

Sans répondre, il fronça les sourcils, mais continua de l’accompagner jusqu’à sa chambre. Avant qu’elle n’en claque la porte, il insista :

— Dis-moi au moins ce que tu cherchais à savoir. Tu crois avoir percé le mystère de notre cher frère ?

Il tenta un sourire enjôleur, presque ridicule. Gwen haussa les épaules avec dédain.

— Tu es pathétique, Gavin.

Pourtant, elle le laissa entrer, comme toujours. Leurs chamailleries n’étaient qu’un rituel fraternel. Les jumeaux ne se ressemblaient guère physiquement, si ce n’était dans l’éclat identique de leurs yeux. Mais Gwen, deux minutes plus jeune, s’était toujours octroyé le rôle de l’aînée.

— Alors ? Pourquoi Tristen a-t-il finalement accepté la rencontre arrangée par maman ? demanda Gavin en s’installant sur le canapé.

Gwen s’assit sur le lit, jambes croisées, et répondit après un long silence :

— Parce qu’il pense qu’on ne peut pas forcer quelqu’un à aimer en retour. Voilà ce qu’il m’a confié. Après deux ans à tourner autour d’Ashley, il baisse les bras…

Sa voix trahissait son incompréhension. Pour elle, l’abandon de Tristen défiait toute logique. Gavin éclata de rire.

— Alors c’est ça ? Pas étonnant qu’il ait l’air d’avoir perdu la moitié de son âme.

Le regard assassin que lui lança Gwen l’obligea à se calmer aussitôt.

— D’accord, d’accord… Je ne me moque plus. Mais avoue, ça promet une belle tragédie.

Gwen détourna les yeux. Elle gardait pour elle le petit stratagème qu’elle avait mis en place pour réveiller son frère. Il était trop tôt pour révéler son jeu.

À l’autre bout du manoir, Grace contemplait une photo qu’elle tenait serrée entre ses doigts. Trevor, qui préparait le lit, vint s’asseoir à côté d’elle.

— Dois-je être jaloux de ce regard attendri ? Tu sembles oublier ton mari.

Elle rangea doucement l’image dans une enveloppe et soupira.

— Toi, je pourrais t’oublier ? Allons, Trevor… prépare-toi plutôt à devenir beau-père.

Il rit de bon cœur et prit une pose fière.

— Et qui a dit qu’un grand-père perdait son charme ? Même à quatre-vingts ans, je serai irrésistible.

Elle leva les yeux au ciel, amusée malgré elle. Puis ils s’allongèrent côte à côte, la chambre plongée dans l’obscurité. Avant de s’endormir, Grace murmura contre lui :

— J’espère que Tristen ne rejettera pas la jeune femme que nous avons choisie.

— Il n’en aura pas le courage, répondit Trevor d’un ton tranquille.

Ailleurs, la matinée d’Ashley débutait sous le signe d’une résolution nouvelle. Elle s’était juré de laisser derrière elle son histoire avec Greg et de ne plus tourner son regard que vers l’avenir.

Après s’être préparée, elle fut interrompue par la sonnerie de la porte. Sans surprise, elle découvrit Miley, rayonnante, qui lui tendait son thé noir préféré.

— Alors, as-tu vérifié la robe pour la séance d’aujourd’hui ? demanda Ashley en savourant la première gorgée.

— Tout est prêt, répondit son assistante avec assurance. Deux shootings ce matin, puis une interview. Ah, et… votre père m’a demandé de libérer votre soirée.

Ashley arqua les sourcils.

— Mon père ? Hier encore, il ne m’a rien dit. Pourquoi passer par toi ?

Miley haussa les épaules, incapable de lui donner plus de détails. Ashley ne chercha pas à insister. Elle connaissait trop bien l’autorité de son père pour s’y opposer encore. Elle se contenta de descendre à la voiture, résolue à se plier à ses exigences.

Pendant ce temps, au manoir Knight, Tristen n’avait pas fermé l’œil de la nuit. L’image d’Ashley dans les bras d’un autre l’obsédait.

Devant son miroir, il s’examina avec une pointe d’agacement.

— Comment peut-elle rester insensible ?

Il se pencha, changeant d’angle, et lâcha dans un souffle :

— Je refuse de croire qu’elle n’ait pas vacillé face à moi.

Pour se détourner de cette pensée, il prit son téléphone, parcourut les journaux en ligne, et constata que chaque titre mentionnait encore Ashley. Exaspéré, il jeta l’appareil sur le lit et s’enferma dans la salle de bain.

Un peu plus tard, il rejoignit sa famille réunie pour le petit-déjeuner.

— Bonjour, dit-il simplement en prenant place à côté de Gwen.

Autour de la table, Gavin et sa jumelle chuchotaient, mais se turent aussitôt sous le regard sévère de leur mère. Gwen, pourtant, observait son frère avec insistance. Elle espérait voir éclater la tension de la veille. Mais Tristen demeurait impassible, presque serein.

Elle finit par hausser les épaules et croquer dans une tartine, non sans lancer un coup d’œil à Gavin. Lui non plus n’y comprenait rien.

Quand Tristen se leva, il embrassa doucement sa mère, puis sa grand-mère, avant de déclarer :

— Je dois partir.

Grace lui rappela discrètement son rendez-vous. Il acquiesça d’un air neutre et s’éclipsa.

Gwen, déçue de n’avoir assisté à aucun éclat, poussa un soupir.

— Il reste de marbre…

Elle abandonna l’idée d’en tirer quoi que ce soit et termina son assiette.

À l’extérieur, Karl attendait déjà près de la voiture.

— Bonjour, monsieur, dit-il en lui tendant l’agenda de la journée.

Tristen monta sans un mot. La voiture démarra, emportant avec elle un homme résolu à ne pas laisser son destin lui échapper.