Elena
Je retourne au bureau, toute dévastée de ne pas avoir obtenu ce que je voulais avec ce type. Dès que je passe la porte de l'entreprise, je sens tous les regards sur moi. Je mords l'intérieur de ma lèvre inférieure, consciente de mon retard.
Alors que j'avance pour regagner mon bureau, j'aperçois Adrian, assis sur mon fauteuil et faisant claquer le bout d'un stylo contre la table. Mes pas s'estompent aussitôt, et mes battements cardiaques commencent à résonner comme un tambour.
Je tourne d'abord ma tête autour de moi et remarque mes collègues qui me dévisagent avec curiosité. Certains même vont jusqu'à chuchoter entre eux. Je ravale ma salive, ne pouvant ni faire marche arrière, ni disparaître.
J'avise mon patron,qui me fixe du coin de l'œil, tout en continuant de trimballer le stylo sur mon bureau. Je prends une grande respiration et reprends lentement ma marche, en priant que la situation ne tourne pas au vinaigre.
Lorsque je me présente face à lui, je frotte mes mains et pince mes lèvres. J'essaie de me prononcer mais les mots meurent sur mes lèvres. Il pose nonchalamment le stylo, réajuste sa veste et daigne enfin me porter son attention. Il plante ses yeux tranchant comme une lame dans les miens. Un tressaillement glacial me parcourt l'échine.
___ « Où étais-tu passée, Cendrillon ? »
Son ton est froid et dur. J'entends quelques rires discrets résonner derrière moi. Mes joues s'échauffent et je vire à l'écarlate. Adrian ne me lâche pas et je sens qu'il se fera un grand plaisir de m'humilier encore.
___ « Je... j'étais allée prendre de l'air. » balbutie je, en rougissant.
Il fait un petit rire. Un rire jaune.
___ « Prendre de l'air. » marmonne Adrian.
___ « Je m'excuse pour le retard et je vous promets que cela ne se répétera plus. »
Je n'ai pas envie de subir encore une humiliation de sa part, surtout pas maintenant que je viens de m'épuiser à essayer de faire parler Gaël. Il se lève de mon fauteuil, contourne le bureau et vient se tenir près de moi. Je baisse la tête, embarrassée.
___ « Tu crois qu'on bâtit une entreprise avec des excuses ? Ici, ce n'est pas un supermarché ma chère, Elena. »
___ « Je m'excuse encore une fois monsieur. Je vous promets que cela ne se reproduira plus. »
___ « Bien sûr que cela ne doit plus se reproduire. À moins que tu as un autre poste qui t'attend dehors. »
Je lève les yeux et le scrute. Aucune once de plaisanterie. J'acquiesce juste la tête et il s'en va, sans rien rajouter.
***
Le reste de l'après-midi a été tendu pour moi. Non seulement, mes collègues commencent à s'interroger sur ce qui se passe entre Adrian et moi. Je m'y attendais à ce qu'ils aient des doutes un jour, puisque mon ex fiancé est toujours dans mes pattes et profite de chaque occasion pour me faire un scandale. Je suis pratiquement l'unique employée qui a des ennuis avec lui, donc c'est évident que cela éveille la curiosité de mes collègues.
Alors que je me dirige dans le parking pour récupérer ma voiture, une ombre passe derrière moi. Mon cœur fait un bond et je me retourne instinctivement. Rien. Je fronce les sourcils et inspecte autour de moi, mais je ne vois personne. Juste quelques voitures garées et moi, au milieu du parking.
Je me retourne, avec la conviction d'avoir senti une ombre derrière moi. Pourtant, je ne vois personne. Je suis seule avec ces voitures garées. Je réprime un soupir, me disant que c'est la fatigue et avance vers mon véhicule. Soudain, je remarque que l'un des pneus arrière de ma voiture est crevé. Je plisse mes yeux, étonnée et me penche vers celui-ci.
___ « Quelle galère ! » pesté-je en examinant le pneus crevé.
Alors que je me redresse pour trouver une solution, j'entends un bruit métallique au loin. Je sens une présence derrière moi et un étrange froid m'envahit. Par réflexe, je me tourne aussitôt et me retrouve nez à nez avec un homme au visage masqué qui me surplombe.
J’écarquille les yeux, mon cœur rate un battement puis commence une course folle dans ma poitrine. Je scrute l'homme masqué en reculant lentement, tandis qu'il se rapproche aussi à pas lents. Je lance un regard apeuré au couteau qu'il tient. Ma gorge se serre et tout mon corps se met à trembler.
___ « Qui... que voulez-vous ? » balbutie je en reculant toujours.
À force de faire marche arrière, mon dos finit par se heurter contre le coffre de mon véhicule. Son regard froid me donne la chaire de poule. Mes yeux balaient la pièce, espérant trouver une issue de secours. Mon cœur continue de battre plus vite.
Je le fixe, mes lèvres qui bougent frénétiquement. Cet homme dont je ne distingue que les yeux noisettes, brise la distance de sécurité qu'il y'a entre nous. Ma respiration devient irrégulière, il tend le bras et me saisit par le cou. Je lâche un hoquet, alors que ses doigts commencent à se resserre autour de mon cou.
Je ne parviens plus à respirer, mon sac glisse de mon bras et tombe sur le sol. Je sens mon corps se soulever, mes pieds ne touchent presque plus le sol. Je me débats contre lui, je tente de me libérer de son emprise. Cependant, mon agresseur est plus fort que moi.
À force de battre contre lui, je m'épuise et sens mes yeux qui rougissent. Une perle de larme m'échappe et ruisselle le long de ma joue. Je sens que c'est bientôt la fin pour moi.
Alors que je suis gèle maintenant, je peine à respirer. Je ferme doucement les yeux et me résigne à accepter que c'est mon dernier moment sur terre.
___ « Je t'ai prévenu... On t'a bien averti, Elena. On t'a dit de cesser de fouiller, mais tu es si têtue. »
J'entends à peine sa voix grave et impassible. Son haleine qui pue la cigarette et l'alcool envahit mes narrines et me donne encore plus de nausées. Le son de la voix de ce type ne m'est pas familier, mais je connais maintenant la raison de ma mort.
___ « Hé ! » hurle une voix, qui me semble lointaine.
Mes yeux mi-ouverts, planent et je distingue ardûment la lumière qui éclaire la pièce.
___ « Elena ?? » rajoute cette voix masculine, un peu plus proche.
Adrian. C'est lui, il est là.
Je sens mon corps se propulser sur le sol, et je vois difficilement mon agresseur qui s'éloigne de moi en courant. La gorge sèche, je toussote en essayant de reprendre le cours normal de ma respiration. J'entrevois Adrian qui lui court après en hurlant.
___ « Elena, ça va ? Elena... »
Ma respiration est lourde et bruyante. Adrian, genoux au sol, il me relève avec délicatesse et je repose ma tête contre son torse. J'entends son rythme cardiaque, son cœur bat aussi fort que le mien.
___ « J'ai failli y passer... » dis-je entre deux sanglots.
___ « Chut ! Je suis là maintenant. »
Il me caresse doucement les cheveux pendant que je retrouve mes esprits.
___ « Ce s******d m'a échappé. » grogne t'il.
Je me détache de lui et il me donne un coup de main pour me tenir sur mes jambes.
___ « Qui est-ce ? Tu le connais ? Qu'est-ce qu'il te voulait ? »
La main sur ma gorge qui picote, je la caresse encore. Adrian ne me croirait pas si je lui parle encore de cette histoire. D'ailleurs, il ne veut plus en entendre parler. Je détourne donc mes yeux de lui et prends une profonde inspiration.
___ « Je ne le connais pas. Il... Il m'a agressé soudainement et... »
Je ne suis pas une bonne menteuse. Je ne devrais même pas lui mentir, mais il ne me croira pas non plus si je lui disais la vérité. En fait, il ne m'a jamais cru.
___ « Enfin, c'est un voleur. Il voulait de l'argent et tout ce que j'avais qui pouvait lui rapporter de sous. » rajouté je en évitant son regard inspecteur.
Du coin de l'œil, je le vois s'abaisser et ramasser mon sac à main.
___ « Tiens. »
___ « Merci. » lui dis-je d'une voix basse en prenant mon sac.
___ « Un voleur, hein ? J'ai vérifié dans ton sac et je doute qu'il ait pris quelque-chose. » remarque-t-il.
Je me pince les lèvres et lève les yeux au ciel, évitant son regard. Adrian se rapproche de moi et incline faiblement sa tête, puis il plante son regard dans le mien.
___ « Tu me caches quelque chose, Elena. »
___ « Qu'est-ce que tu racontes ? Pourquoi vais-je protéger une personne qui a essayé de me tuer ? » réplique je, un peu furieuse.
Mon ex fiancé se redresse et enfouie ses mains dans les poches de son pantalons.
___ « Peut-être qu'il est lui aussi, ton ex ou ton petit ami agressif ? » insiste t'il doucement.
Je hausse les sourcils, surprise. J'ai failli mourir et tout ce qu'il lui vient en tête, c'est un ex ou un petit ami. Incroyable ! Je fais un rire jaune et le fusille du regard.
___ « T'es incroyable, tu sais ? »
___ « Mais explique moi pourquoi tu me mens ? »
___ « Je te mens pas. Je ne le connais pas et je ne sais pas ce qu'il me voulait. Et puis, tu crois que j'ai la force pour me disputer ce soir ? »
Nous soupirons d'agacement en même temps. Je tousse encore et un mal de crâne m'envahit. Je tiens ma tête avec ma paume et m'appuie contre mon véhicule.
___ « Ça va ? »
Sa voix est douce mêlée d'inquiétude, et cela m'intrigue. Je fronce les sourcils et le scrute intensément. Je vois la peur sur son visage. Mais pourquoi a-t-il peur ? De quoi a-t-il peur ? Pourquoi se fait-il du souci pour moi ?
___ « Oui, je vais bien. J'ai juste la tête qui tourne et j'ai... »
Sans terminer ma phrase, je perds l'équilibre, mais Adrian me rattrape de justesse. Nos visages près de l'un et de l'autre, son regard s'accroche au mien et son souffle chaud caresse mon visage. Mon cœur recommence à battre un peu plus fort et mon estomac se serre.
___ « Je... t'emmène à l'hôpital. » finit-il par dire.
___ « Non, ramène moi à la maison. »
___ « OK. »