Le lendemain matin, alors qu’Élena se réveillait dans le loft de Ryan, enveloppée dans la chaleur de ses bras, elle sentit une légère angoisse l’envahir. Leur nuit avait été mémorable, mais elle savait que quelque chose d’inexpliqué flottait encore dans l’air. Ryan semblait distant, comme si la passion de la veille n’était plus qu’un souvenir.
Sans un mot, il venait de quitter le lit après l'avoir repousser et ce, alors qu'elle cherchait à poser sa tête sur son torse. Ce geste avait eu le don de réveiller la jeune femme telle une douche froide.
Elle resta là à fixer la fenêtre vitrée battue par des gouttes de pluie et à se demander si elle avait rêvé. Ryan était-il devenu subitement distant ou était-ce son esprit à elle qui avait mal interprété la chose ? Difficile à dire d'autant plus qu'elle n'avait pas eu le temps d'analyser son expression faciale. Cela s'était produit si vite.
Ce ne fut qu'en entendant du bruit provenant de la porte d'entrée qu'elle se décida à sortir. Enveloppée dans un drap blanc, elle quitta le lit avec la peur au ventre. Elle avait d'abord cru qu'il venait de quitter l'appartement mais en arrivant dans le salon ouvert sur l'entrée, elle le vit refermer la porte avec quelque chose dans les bras.
– Je nous ai commandé des vienoiseries.
Cette réponse aurait pu la rassurer mais le ton était si glaçant. Décidément il y avait un problème. Mais lequel ? Avait-il des regrets ? Avait-elle été... nulle ? S'était-il servi d'elle ? Elle aurait voulu lui poser ces questions dans l'immédiat mais le regard fermé de son amant lui cloua le bec. Elle, une avocate confiante qui n'hésitait pas à dire haut et fort le fond de sa pensée, elle était réduite au silence par la peur de découvrir qu'elle venait d'être réduite au rang d'une simple amante d'une nuit.
Ils déjeunèrent ensemble, mais la conversation était plus froide, moins fluide. Ryan évitait certains regards, et quand Élena posa des questions plus personnelles, il esquivait habilement ses réponses. Elle sentit que des murs invisibles se dressaient autour de lui.
– Tu as de la famille ? La presse en parle très peu.
Le regard de Ryan flancha en se durcissant et elle pensa qu'il allait briser la tasse qu'il tenait tellement il la serrait.
– Quelque part à Los Angeles, répondit-il finalement.
– Et... tu les vois souvent ?
– Non.
Il n'était visiblement pas à l'aise mais au risque de tout gâcher, Élena osa pousser le bouchon trop loin.
– Aurais-je le privilège de les rencontrer bientôt ?
– Ça suffit avec les questions Élena.
Un silence glacial s'en suivi et il continua de manger de façon mécanique et raide comme un robot. Élena retint à peine un soupir d'agacement. S'il était déjà fatigué d'elle, pourquoi ne le disait-il tout simplement pas ouvertement ?
Elle n'avait pas l'habitude d'être traitée ainsi, surtout pas après une première nuit d'amour avec un homme. D'habitude ils étaient attentionné et collant au point où parfois c'était elle qui mettait de la distance.
Elle aurait juste pu se rhabiller et partir d'elle-même avec la tête haute et ce qui lui restait comme dignité. Mais elle tenait trop à cet homme. Pendant qu'il lui faisait l'amour, elle avait commis l'erreur d'imaginer leur avenir ensemble. Un mariage, une grande maison avec un jardin, des enfants, un chien... Tout cela l'avait rendue amoureuse de lui en l'espace d'une seule nuit. Parce que oui, en plus d'être doué au lit, Ryan Amstrong était le genre d'homme dont on pouvait facilement tomber amoureuse. Il était rassurant mais avec un côté obscur.
– Je n'ai rien à faire aujourd'hui. Si toi non plus, on pourrait faire une petite balade. Qu'en dis-tu ?
Il sembla hésiter mais finit par accepter. C'était évident qu'il aurait préféré qu'elle parte sur le champ, pensa-t-elle de plus en plus refroidie. Mais elle connaît bien avoir des réponses quant-à son attitude étrange et vexant. Elle n'était pas un jouet qu'on utilise et balance au sol par la suite.
Plus tard dans la journée, alors qu’ils se promenaient dans les rues de Brooklyn, Élena ne put s’empêcher de le confronter. Il fallait éclaircir les choses et entendre une dure vérité plutôt que de continuer au risque de voir ses sentiments s'amplifier pour rien.
— Ryan, je ne comprends pas. Après tout ce que nous avons partagé… pourquoi te renfermes-tu ainsi ?
Il s’arrêta, la regarda longuement, puis soupira.
— Ce n’est pas ce que tu crois, Élena. C’est juste… que je ne veux pas te perdre à cause de mon passé.
Elle fronça les sourcils, ne comprenant pas.
— Que veux-tu dire ?
Il hésita, cherchant les mots.
— J’ai fait des erreurs, des choses dont je ne suis pas fier. Et je ne veux pas que ça te touche.
Elle était tout autant perdu. Qu'avait-il bien pu faire dans le passé et qui pourrait l'affecter elle ? Avait-il ôté la vie à quelqu'un ? Avait-il traîné avec des délinquants ? Vendu des substances interdites ? Elle s'imagina tous les scénarios possibles, des plus crédibles aux plus saugrenues.
– Ce n'est pas grave Ryan. Nous avons tous eu à faire des erreurs par le passé. J'ai moi aussi des squelettes dans le placard. Je suis sûr qu'on peut surmonter tes démons ensemble.
– Tu ne comprends pas, émit-il avec un sourire triste.
– Alors explique-moi ! Pourquoi tout doit être si subitement compliqué entre nous ?! s'écria la jeune femme.
– Tu veux de l'espace, tu auras de l'espace. Mais ne tarde pas trop parce que je ne vais pas t'attendre bien longtemps avant de tourner la page.
Sur ce, elle s'éloigna de lui, mettant ainsi fin à la promenade. Sous le regard impuissant de Ryan, Élena traversa la rue et pris un chemin menant à chez elle.
Elle n’insisterait pas. Elle préférait lui laisser de l’espace. Courir derrière un homme, elle ne savait pas le faire. Encore moins quand ce dernier soufflait le chaud et le froid avec elle comme Ryan le faisait.
Mais une question persistait dans son esprit. Quel secret cachait-il derrière ce masque de photographe séduisant et d’homme au charisme indéniable ?