1:UNE NUIT, UN CHAOS
Cinq ans plus tôt
La nuit avait avalé Florence dans un soupir d’orages silencieux. Un vent tiède, collant, glissait entre les ruelles étroites, caressait les pierres anciennes, secouait les volets mal fermés. Je resserrai mon gilet contre moi alors que je longeais l’arrière du grand hôtel où je travaillais depuis six mois. Mon uniforme noir me collait à la peau, t et j’étais trempé de sueur et d’effort. Il était près de minuit, et je venais de finir son dernier service. Je n’avais qu’un rêve en tête rentré dans mon doux chez moi, prendre une douche bien froide, ensuite me préparé mon thé fétiche à la camomille rejoindre mon lit douillet et mon carnet de croquis. Les bijoux, toujours les bijoux. Une obsession qui me brûlait plus fort que tout le reste, plus fort que la faim plus fort que la fatigue et même plus fort que les souvenirs.
J’arriva devant l’entrée du personnel, tendit la main pour badge l’ouverture quand soudain on fut plongée dans le noir total. Ça devait sans doute être une panne car tout l’hôtel fut avalé par l’obscurité. Pas de veilleuse, pas de lumière d’urgence. Même les lampadaires dehors semblèrent vaciller. J’entendit aussitôt des bruits dans les étages, des voix, des pas précipités, un peu comme si les gens couraient. Et dans tout ce raffut je perçu tout de même un cri. Lointain, rauque. Et je me figeai puis un deuxième cri plus proche cette fois et un fracas. Comme si un meuble avait été renversé. Je sentis l’adrénaline grimper dans ma gorge. Mon instinct m’hurla de partir mais je restai là. Incapable de bouger comme si mon corps était pétrifié, il est vrai que je n’aimais pas le noir, l’obscurité tout ce qui nous empêchais de voir ce qui nous entoure car tout pouvait s’y cacher. Alors malgré la pénombre je pu distinguer dans le couloir une silhouette et si ma vue ne me jouait pas des tours il s’agissait d’un homme, il paraissait beaucoup plus grand que moi, mais aussi très mal en point si je me fis à sa silhouette qui avait l’air chancelante. Une main contre le mur, l’autre pressée contre son flanc. Il trébuchait plus qu’il ne marchait. Je voulus crier à l’aide mais il tomba à genoux juste devant moi
- Aide-moi, souffla-t-il. Ou peut-être avait-il dit autre chose. Tout était flou. Sa voix râpée. Ses yeux fous. Je m’agenouillai sans réfléchir. Mes mains attrapèrent ses épaules, chaudes comme de la braise. Il suait à grosses gouttes et il tremblait. Qu’est ce qu’il pouvait bien avoir
- Vous êtes blessé ? chuchotais-je Il secoua la tête, l’air perdu.
- Pas… pas blessé. Drogue… Quelqu’un… quelqu’un me poursuit. Il leva les yeux vers moi. Son regard était une tempête féroce et déchirée. Il ne la voyait pas vraiment. Elle en eut un frisson. Et là, des pas précipités, plusieurs, les gens montaient l’escalier. À quelques secondes à peine. Sans réfléchir, elle l’attrapa par la main.
- Par ici ! dis-je en le poussant vers une porte de service et le tira dans un réduit à balais étroit. On s’y engouffra. Et je refermai doucement derrière nous, je posant la main sur sa bouche quelques secondes pour diminuer le son de ses grognements retenant sa respiration. Les battements de son cœur hurlaient dans mes oreilles. La lumière du couloir filtrait à peine sous la porte. Les pas passèrent juste là. À quelques centimètres, je ne respirais plus.
Il tomba contre moi. Ses bras m’enveloppèrent sans force, cherchant un appui. Je le soutins, mon dos plaqué contre le mur froid et ma main toucha la sienne alors une décharge. Comme si quelque chose en moi reconnaissait déjà quelque chose en lui. C’était Inexplicable.
— Je… suis désolé, murmura-t-il. Je n’arrive pas… à réfléchir. T’es… chaude. T’es réelle. Ta peau est extrêmement douce. Je ne pus m’empêcher de sourire, sa drogue devait sans doute être très forte car ma peau collait à cause de la sueur de la journée de merde que j’ai passé à nettoyer chambre après chambre. Je sentis son souffle et je senti… son besoin. Un besoin primal. Une urgence dans ses gestes. Et puis, il me regarda. Cette fois, vraiment. Son regard me fixa, j’eu l’impression qu’il me voyait. Tu m’as sauvé, dit-il dans un souffle rauque. Tu sais ce que ça fait, d’être sauvé par un ange ? Ma bouche s’ouvris mais aucun mot ne sorti, je n’avais rien d’un ange. Tu trembles, murmura-t-il. Moi aussi. Regarde-nous… On dirait qu’on va exploser. Et il ne mentait pas, il faisait tout sauf froid dans ce placard à balais pourtant mon corps tout entier était recouvert de frisson et je tremblais de tout mon soul. Et soudain sans crier gare ses lèvres furent sur les siennes.
J’aurais dû le repousser. J’aurais dû crier. Mais il y avait quelque chose… ce quelque chose… cette tension dans ma nuque, cette chaleur sous ma peau, ce frisson qui remontait le long de mes jambes. Ses mains à lui tremblaient, mais elles me tenaient comme si j’étais du verre précieux. Alors je répondis au b****r c’était maladroit à tâtons mais je le fis. Je n’avais pas beaucoup d’expérience dans le domaine il faut avouer que je n’avais pas connu beaucoup d’homme non plus je ne les attirais pas millier encore moins par dizaine. Dans cette nuit sans lumière, personne ne me jugeait. Il ne me voyait pas. Il ne voyait pas mes hanches larges, ni mon nez tordu. Il ne voyait pas la fille à qui son propre père avait volé les rêves. Il voyait juste une fille une présence réelle à quoi se raccrocher dans son univers vacillant ou tout planait. Alors je paniquai et mes mains le repoussèrent.
- Je… je ne… suis pas belle, dis-je, essoufflée. Je ne suis… pas celle que tu crois. Il posa son front contre le sien. Son souffle chaud sur mes lèvres.
- Pourtant tu me rends incapable de me contrôler. Un sourire triste pris possession de mes lèvres, il ne le savait pas mais moi je savais que ça n’avait rien à voir avec moi, c’était la drogue qui lui faisait effet. Alors après m’être rassuré qu’il n’y avait plus de bruit de pas dans le couloir et que tout était de nouveau calme je me dégagea de son étreinte ses mains molles n’arrivaient pas à me retenir et je sortis du placard puis de la pièce avec précipitation. Soulagé que la pane n’ai pas été rétablis à temps et que je resterais un agréable souvenir dans son esprit.
Je couru et m’enfuit comme si le feu me dévorait. Parce que rester signifiait mourir et être vue… vraiment vue… signifiait tout perdre.
Je ne revis pas cet homme, pas cette nuit-là et pas le lendemain. Je quittai l’hôtel à la première heure et démissionna. Quelques jours plus tard, je m’envolai vers la France ou je pourrais enfin réaliser mon rêve grâce au fruit unique de mes durs sacrifices. Laissant derrière moi l’inconnu de l’hôtel, ma famille et ma vie d’avant.