Deux semaines plus tard – Hôpital Central
Le couloir de l’hôpital avait une odeur de désinfectant, mais pour Grâce, il sentait la victoire.
Sa mère dormait paisiblement, reliée à quelques machines, mais elle respirait mieux.
Son visage avait repris des couleurs, ses doigts étaient plus chauds.
Le docteur Kamanda entra, un dossier à la main.
— Mademoiselle Grâce…
Il sourit largement.
— L’opération a été un succès. Votre maman réagit très bien. Le rein s’adapte parfaitement.
Grâce porta ses mains à sa bouche, les larmes jaillissant sans prévenir.
— Merci docteur… merci infiniment… vous avez sauvé sa vie…
— Non, répondit le docteur avec douceur.
Remerciez plutôt Angélique… c’est grâce à elle.
Grâce baissa la tête.
— Oui… je sais…
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Funérailles d’Angélique – Deux semaines après l’opération
La petite chapelle du quartier Nord était remplie de fleurs blanches.
Une photo d’Angélique trônait devant l’autel : un sourire doux, un regard fatigué mais lumineux.
Le prêtre récita quelques mots.
— Angélique a quitté ce monde, mais elle a laissé derrière elle une lumière qui ne s’éteindra pas… Par son don, elle a sauvé trois vies.
Grâce s’assit au dernier banc, serrant la main de sa mère.
La fille d’Angélique, une adolescente, s’approcha du cercueil et posa une rose blanche dessus.
— Maman disait toujours qu’il fallait laisser une trace… elle a laissé un miracle derrière elle.
Grâce sentit son cœur se serrer.
Après l’enterrement, elle s’approcha discrètement de la famille d’Angélique et leur remit une enveloppe discrète.
— Ceci… c’est pour vous. C’est peu, mais c’est ce que je peux faire. Merci pour votre maman… merci pour sa bonté.
La sœur d’Angélique la prit dans ses bras, les larmes aux yeux.
— Vous êtes une bonne fille. Que Dieu vous garde.
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21h – L’Hôtel Émeraude
Un hôtel calme, luxueux, aux lumières dorées.
La nuit était douce.
Les couloirs couverts d’un tapis épais étouffaient les bruits de pas.
Grâce, vêtue d’une robe bleu nuit, simple mais élégante, entra dans le hall.
Elle inspira profondément.
Son cœur battait si fort qu’elle sentait ses côtes trembler.
Elle avait dit à sa mère :
— Je dors chez Anne ce soir. On doit préparer des choses pour son mariage.
C’était un mensonge.
Un lourd mensonge.
Mais un mensonge décidé pour sauver une vie.
Elle reçut un message d’Alex :
Chambre 407. Je t’attends.
Grâce monta.
Chaque marche d’escalier résonnait comme un rappel de ce qu’elle s’apprêtait à faire.
Elle n’avait jamais imaginé vivre une telle situation.
Devant la porte, elle hésita.
Elle ferma les yeux une seconde, souffla.
Puis frappa doucement.
La porte s’ouvrit immédiatement.
Alex se tenait là, vêtu d’une chemise noire, légèrement déboutonnée, parfum discret.
— Grâce… tu es magnifique.
Elle baissa les yeux.
— Merci…
Il s’écarta.
— Entre.
Elle entra.
La chambre était grande, délicatement éclairée, un parfum léger de vanille flottait dans l’air.
Une bouteille d’eau était posée près du lit, deux verres, et un bouquet de fleurs blanches.
Grâce resta debout, un peu nerveuse.
— Tu… tu vas bien ? demanda Alex en refermant la porte.
— Oui… juste stressée…
Il s’approcha doucement.
— Je comprends. Mais tu n’es obligée à rien. Si tu veux encore réfléchir…
— Non, répondit Grâce en le coupant.
— Je sais pourquoi je suis là. Et j’ai pris ma décision.
Alex l’observa longtemps, presque étonné par cette force qui émanait d’elle.
— Tu es courageuse, Grâce. Beaucoup de femmes auraient paniqué.
Elle eut un petit rire triste.
— Quand la vie de ta mère est en jeu, tu deviens une autre personne.
Alex hocha la tête.
— Je respecte ce que tu fais. Et je ne t’utiliserai jamais comme un objet. On a un accord, oui. Mais… je veux que tu te sentes en sécurité, d’accord ?
Grâce releva les yeux vers lui, surprise par la douceur dans sa voix.
— Merci… Alex.
Il s’approcha un peu plus.
— Tu veux boire quelque chose ? De l’eau peut-être ?
— Oui… juste de l’eau… s’il te plaît.
Il lui servit un verre.
— Alors… tu as bien dit à ta mère que tu dormais chez Anne ?
— Oui. Elle n’a pas posé de questions.
— Et Anne ?
Elle sourit faiblement.
— Anne va me couvrir. Elle sait mentir quand il s’agit de préserver quelqu’un.
Alex sourit.
— Bonne amie.
Un silence lourd mais pas hostile s’installa.
Alex s’assit sur le bord du lit.
— Tu veux t’asseoir ?
Grâce hésita… puis approcha lentement et s’assit à côté de lui.
— Je ne veux pas te mettre mal à l’aise, dit Alex calmement.
— On prend le temps qu’il faut.
Elle le regarda.
— Je suis prête. Mais… promets-moi quelque chose.
— Tout ce que tu veux.
— Quand j’aurais un enfant… tu le reconnaîtras ? Tu t’occuperas de lui ?
Alex posa une main sur la sienne.
— Je te le promets. Je ne laisserai jamais mon enfant dans le besoin.
Grâce baissa les yeux, émue.
— Merci…
Une longue pause.
Puis elle murmura :
— Alors… commençons.
Alex l’attira doucement à lui.
La scène se déroula dans une douceur inattendue, un respect silencieux, une tension mêlée de peur, de sacrifice et d’un étrange calme.
Ce n’était pas de l’amour…
C’était un contrat.
Un échange.
Une nuit pour une vie.
Quand tout fut terminé, Grâce resta allongée quelques minutes, les yeux humides.
Alex prit la parole le premier.
— Tu veux dormir ici ?
Elle secoua la tête.
— Non… je dois rentrer tôt. Demain, je dois être avec ma mère.
Il hocha doucement la tête.
— D’accord. Mais écris-moi quand tu arrives chez toi.
Elle se leva, remit sa robe, prit son sac.
— Bonne nuit, Alex.
— Bonne nuit, Grâce.
Elle quitta la chambre avec un poids immense dans le cœur.
Arrivée dans le couloir, elle s’arrêta un moment, les yeux fermés.
— Maman… tout ça, c’est pour toi…