Cover-1

2024 Words
Romance Editions « Arts En Mots » Illustration graphique : © Val CHAPITRE 1 - Toby. C’est encore une fois seul, que je marche dans les rues de Seattle. Sous la pluie battante, je m’arrête devant le bar qui a ouvert en bas de chez moi il y a plusieurs mois. Je pousse la porte de l’établissement, quand la musique, qui tambourine à tue-tête, m’envahit. Il n’est que vingt-deux heures, et pourtant, j’ère, encore, dehors. Il m’est impossible de trouver le sommeil. Quelle journée de merde ! J’ai cette femme dans la tête depuis que nos chemins se sont croisés, sauf qu’elle n’a d’yeux que pour Aiden. Rien n’y fait, je n’arrive pas à la chasser de mon esprit. Je ne veux pas risquer mon amitié avec lui, pour une fille. Alors je bois pour oublier. M’éloignant peu à peu de mes amis essayant d’occulter Ava coûte que coûte. Je pousse la porte du Masha’s et prends place au comptoir quand mon regard entre en contact avec la belle rousse qui tient le bar. La fille se tourne. Un sourire naît sur son visage quand elle me reconnaît. — Oh, vous êtes de retour ? dit-elle, surprise. — Comme vous pouvez le voir, réponds-je, en souriant. Ce regard vert, ces cheveux d’un rouge flamboyant et ce sourire pourraient faire tomber n’importe quel homme. Pourtant, elle a dans les yeux, comme une tristesse ou une rage non assouvie. Je ne saurais pas dire ce qui la rend particulière. Quand j’ai découvert ce bar, je n’avais envie que d’une chose, boire et oublier le fait que celle qui me plaît est amoureuse d’un autre. — Je vous sers quoi ? me demande la jeune rousse. — Une bière, s’il vous plaît. Elle part dans l’autre direction pour récupérer ma commande, quant au passage, elle se fait huer par un groupe de mecs, assis dans la salle. Mon regard se tourne vers eux, et je secoue la tête en me disant que de nos jours, les hommes n’ont plus aucun respect pour le sexe féminin. La jolie rousse revient vers moi et me dépose ma bière en me souriant. — Merci, dis-je doucement. — Ça n’a pas l’air d’aller ? demande-t-elle. — J’ai connu mieux, réponds-je en levant les yeux vers elle. — Vous voulez en discuter ? Il n'y a pas beaucoup de monde, ce soir. — Il n’y a pas grand-chose à dire en vérité. Je me suis fait jeter en beauté. Je m’en remettrai. — Le problème de beaucoup de gens, je crois. Donc, vous venez boire pour oublier vos malheurs ? — Tout à fait, et rencontrer de jolies demoiselles, ajouté-je en souriant. Elle rigole, posant la main sur sa poitrine et essuie le comptoir du bar. — Quel charmeur, vous faites ! — Vous le méritez. Au fait, Je suis Toby. — Jana, enchantée, me dit-elle en souriant. Elle se détourne et continue à servir ses clients, pendant que je sors mon téléphone de la poche de mon jean. Il n’arrête pas de sonner depuis une heure, mais je me refuse à répondre. Je décline une nouvelle fois l’appel, et rempoche le mobile. Plaçant mon visage entre mes mains, un long soupir m’échappe, tandis que d’une main, je porte la bouteille à mes lèvres pour en boire une gorgée. Mon cellulaire retentit à nouveau, je décroche avant de perdre patience. — Oui ? demandé-je. — Toby ! Tu fais quoi de beau, mon vieux ? me questionne Jeff. Jeff est mon meilleur ami depuis de nombreuses années, il a été d’un soutien sans faille depuis le début. Il a monté sa propre entreprise de management sportif et m’y a intégré de suite. Jeff et moi formons une très bonne équipe. J’adore travailler avec lui. Nous avons recruté des athlètes de qualité et la boîte ne fait que grandir. Nous pensons beaucoup à l’international et surtout, aller chercher de futures stars en Europe. — Je suis dans un bar. — Tu bois maintenant ? Et seul en plus, me demande-t-il en rigolant. — Y a de ça, oui. — Tu veux de la compagnie ? Serena n'est pas là, ce soir. — Elle t’a abandonné ? — Elle passe la soirée avec Ava. Je ne réponds pas et continue de m’enfiler ma bière à la vitesse éclair. — Toby ? — Oui, pardon. On peut se rejoindre si tu veux ? — Ça marche, on se retrouve chez moi. Dans vingt minutes ? — OK, je pars de suite. À plus ! Nous raccrochons. Je prépare ma monnaie pour régler ma consommation. Jana revient vers moi : — Vous partez déjà ? dit-elle en penchant la tête sur le côté. — Non pas que votre compagnie me déplaise, mais je dois rejoindre un ami. — Au plaisir de vous revoir, bientôt. — Je reviendrai… Je dépose l’argent sur le comptoir quand ses doigts viennent toucher les miens. Nos yeux se croisent et une décharge électrique me surprend. Jana retire tout aussi vite sa main et me sourit en s’excusant. Il y a quelque chose de bizarre dans ce contact. Un sentiment me parcourt sans que je n’arrive à le comprendre vraiment. — Ne vous excusez pas. À bientôt, Jana. Son sourire se fait plus intense tandis qu’elle s’éloigne en continuant de me regarder. Je reste pantois quelques instants, avant de me lever, pour quitter le bar. Je retrouve la pluie torrentielle et commence à marcher le long du trottoir pour trouver un taxi. Cela fait des années que Jeff me répète de m’acheter une voiture, mais la marche m’est plus agréable que de m’encombrer d’une voiture qu’il faut entretenir. Un taxi s’arrête près de moi, j’y monte et donne l’adresse de Jeff. Une fois au pied de son immeuble, j’entre dans le hall et prends le premier ascenseur qui arrive. Sortant de l’appareil, je me stoppe devant la porte de mon ami et toque plusieurs fois. Jeff m’ouvre et me laisse entrer en me demandant ce que je veux boire. Soyons fous, buvons une autre bière. Nous nous installons sur le canapé et discutons de tout et de rien. — Bon, et toi avec la jolie Serena ? — Rien de neuf. Nous sommes amis. — Amis ? Tu me prends pour un idiot ? — Que veux-tu que je te dise ? J’adore cette fille, mais je ne suis pas capable de m’engager, tu le sais bien. — Ton histoire avec Adriana est finie depuis des années, Jeff. Tu dois tourner la page, dis-je, en insistant sur la fin de ma phrase. — Facile à dire. Adriana était l’amour de ma vie, et malgré tout ce que je pourrai ressentir pour Serena, je n’arrive pas à débloquer ce petit truc en moi. — Serena s’accroche à toi, tu le sais, non ? — Je sais. Je ne veux pas la perdre ni la faire souffrir. — Alors, arrête les frais. Cette fille est une perle. — Tout comme Ava, ajoute-t-il. — On ne parle pas d’Ava, là, mais de Serena. Alors si tu n’es pas capable de t’engager ou de lui dire ce que tu ressens, arrête tout et laisse-la faire sa vie. Jeff ne répond rien et boit une gorgée de sa bière. Je fais de même en ayant un œil sur la vue de la ville, par la baie vitrée. Nous finissons la soirée, par un mélange d’alcool peu recommandé, et je termine ma nuit sur le canapé de Jeff. Il n’y a qu’en me mettant dans cet état que j’arrive à occulter toutes les merdes de ma vie. CHAPITRE 2 - Jana. Ce fut encore une soirée calme, bien que l'établissement soit ouvert depuis un petit moment. Les clients se ruent dans la boîte à la mode. Tout le monde oublie le petit bar qui a besoin de faire son chiffre d’affaires. Quand Kendall m’a embauchée, l’excitation était à son comble. Depuis, je me familiarise avec la clientèle et leurs consommations. Mon patron est une patte, j’ai tellement de chance d’être tombée sur lui. Il m’a donné un boulot alors que je n’avais aucune expérience, m’a appris tout le métier de barmaid et me soutient dans tout ce que j’entreprends. Il faut dire que je n’ai pas fait grand-chose dans ma vie, à part quitter ma ville natale, Indianapolis, il y a maintenant trois ans. Fuir était ma seule possibilité. Quand on a vécu ce que j’ai vécu durant mon adolescence, le truc à faire c’est partir, le plus vite et le plus loin possible, sans se retourner. Je claque la porte de mon petit appartement et remercie ma voisine pour son aide. J’embrasse Karina, sur la joue, la raccompagne et ferme à clé derrière elle. Mon sac sur la console, j’enlève mes chaussures et me dirige dans le couloir menant aux chambres. Tout doucement, j’actionne la poignée et, dans le noir, observe cette petite masse blottie dans le lit. À pas de loup, je m’approche et m’assois à ses côtés. La couverture remontée jusqu’aux yeux, je contemple ce visage qui ne connaît pas la peur ni la souffrance. Je me nourris de sa beauté et me demande ce que je ferais sans lui. Je dépose un b****r sur son front et lui souhaite bonne nuit, avant de quitter la chambre. Semant mes habits derrière moi, je me dirige droit vers mon lit et me plonge directement dans les draps froids. Il est plus de vingt-trois heures et mes yeux ne veulent pas se fermer. Le regard au plafond, j’observe les pales de mon ventilateur tourner. Le sommeil est quelque chose de crucial, mais il ne s’invite pas souvent dans ma vie. Morphée m’a lâchement abandonné depuis mon départ de la maison familiale, il y a plusieurs années. C’est cette peur qui me noue le ventre et m’empêche de dormir. Après plusieurs heures de somnolence, je finis par m’endormir d’épuisement. Mon seul but dans la vie, c’est de nous protéger, quoi qu’il en coûte. *** À sept heures quinze, une petite boule chaude se colle à moi, me demandant des câlins. Il m’enlace en passant ses bras autour de ma taille. — Maman ! Lait ! — Oui, mon chat. Maman va te faire ton lait, réponds-je, endormie. Encore tout ensommeillée, mon corps s’extirpe du confort de mon lit, mes pas me mènent à la cuisine où je prépare le petit-déjeuner. Pendant que le lait chauffe, je me tourne et vois mon fils arriver en trottinant, tenant son doudou bien fermement dans ses mains. Je l’attrape et le pose sur le comptoir de la cuisine, puis laisse mes doigts vagabonder dans sa chevelure rousse, tandis que mes lèvres embrassent son front. — Tu as bien dormi ? demandé-je. — Ça va. Tu es rentrée tard, dit-il en baissant la tête. — Je sais, mon chat, mais maman doit gagner de sous pour manger, tu comprends ? — Pour acheter des céréales ? demande-t-il en souriant. — Oui, bébé, pour acheter les céréales, réponds-je en rigolant doucement. Je souris, l’embrasse sur les deux joues et retourne à mes fourneaux. Ensemble, nous prenons le petit-déjeuner, confortablement installés sur le canapé, tout en regardant le dessin animé préféré de Paul. — Bébé, tu vas t’habiller pendant que maman range ? Il faut que je te dépose à l’école avant de partir travailler. Mon fils boude et me fait non de la tête. Je me place face à lui et relève son visage. — Qu’est-ce qu’il se passe ? demandé-je, inquiète. — Je veux pas aller à l’école ! répond-il, du tac au tac. — Pourquoi ? demandé-je. — Parce que Nicholas est méchant avec moi, il veut pas qu’on joue tous les deux. — Oh, mais ne t’inquiète pas. Tu vas en trouver d’autres des copains. — Non ! Je veux pas y aller. — Écoute, Paul, on n’a pas le choix. Tu dois aller à l’école, et moi au travail, d’accord ? Il ne me répond pas, alors je relève sa petite tête et dépose un b****r sur ses cheveux. — Ce soir, c’est moi qui viens te chercher, d’accord ? Ses yeux s’illuminent et il hoche frénétiquement la tête. Paul se redresse d’un coup et court dans sa chambre pour se préparer. Il est vrai que j’ai rarement l’occasion d’aller le chercher à l’école, mais Kendall a bien voulu changer mes horaires pendant quelque temps. J’irai récupérer Paul ce soir, et retournerai travailler quand il sera au lit. Heureusement que Karina, ma petite voisine, accepte de me le garder autant de fois que nécessaire. Cette petite est une perle, mais elle ne trouve pas de boulot, donc j’en profite tant qu’elle n’a rien de concret. Ils s’entendent à merveille avec Paul. J’ai beaucoup de chance. Sur le chemin de l’école, Paul me raconte sa journée d’hier et me dit ce qu’il a fait comme travaux manuels, avec Cynthia, sa maîtresse. Il est bon élève. Son avenir est ma priorité numéro un. Il doit réussir où je n’ai pas pu, son futur doit être brillant et surtout, très éloigné de l’univers que j’ai connu plus jeune. Je quitte mon fils au portail de son école et retourne chez moi me préparer, avant d’ouvrir le bar, vers onze heures. Il faut croire que boire est un passe-temps génial, vu que nous avons des clients si tôt dans la journée. Après une bonne douche et un peu de maquillage, je claque la porte de chez moi et descends les escaliers pour rejoindre l’entrée du Masha’s. Il se situe juste au pied de mon immeuble. Kendall a eu la gentillesse de me louer un de ses appartements, pour une somme dérisoire. Ce qui me permet de mettre de l’argent de côté. Quand le moment sera venu, je pourrai peut-être trouver quelque chose de plus grand.
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