Prologue

786 Words
Prologue Je suis ce môme perdu dans l’espace vide et noir qui l’entoure, un point fait au stylo bille au milieu d’une page de cahier. Je suis ce pion parmi tant d’autres qui n’a pas demandé à naître, mais qui sera forcé de vivre pour mourir. Je suis ce gosse que le destin n’a pas eu envie de gâter. Certains diront que je suis né sous une mauvaise étoile, moi, j’affirme que je suis né dans un tas de merde qui a voulu me noyer et contre lequel je me débats encore chaque jour. Quand la vie semble te mettre un doigt là où je pense dès la naissance, tu n’as que deux solutions qui s’offrent à toi : la première, tu sombres jusqu’au suicide ; la deuxième, tu te bats, avec un gun dans les mains — c’est mieux — et tu dresses ton majeur dans les airs pour bien faire comprendre à ce foutu destin que tu l’emmerdes. Ce que je fais. Né dans la mauvaise famille, avec de mauvais parents, voilà ce qu’il m’était réservé. Ma mère, prostituée pour se payer sa cocaïne, est tombée enceinte de moi, après s’être envoyée en l’air avec un flic. Lui ? C’était son plus gros client. Lorsqu’il a appris qu’elle était en cloque, l’enfoiré l’a battue et n’est plus jamais revenu. Toute mon enfance elle m’a rabâché les oreilles à quel point je n’étais qu’un p****n de minable, une vermine, une erreur de la nature. Peut-être qu’elle avait raison, après tout, seul Dieu le sait. J’ai grandi en la regardant se droguer, avachie dans le canapé. J’ai grandi en apprenant à fermer les yeux quand j’entrais dans le salon, pour ne pas la voir se faire sauter par les ordures qu’elle ramenait juste pour avoir quelques billets. J’ai vécu ainsi durant des années, dégueulasse et fouillant les containers du voisinage pour ne pas crever la dalle, et les mauvaises fréquentations ont commencé. Traîner dans la rue pour ne pas vivre chez moi, quitte à sympathiser avec les voyous du quartier. Regarder les rails se faire sniffer, apprendre le fonctionnement d’un flingue, à rouler avec des caisses plus agressives que leurs propriétaires, ce n’était que le début de ma nouvelle vie. Jusqu’à ce soir-là, quand j’ai découvert ma mère, le crâne explosé par une balle, l’arme dans ses mains. Son suicide m’a changé, m’a encore un peu plus entraîné dans le côté sombre de la vie. Un gamin de dix-sept piges, seul, puisque fugueur des foyers dans lesquels il était placé, ça ne pouvait que sentir les emmerdes à plein nez. J’ai bu, beaucoup, j’ai fumé de l’herbe aussi, puis j’ai gagné ma place dans le gang des Cobra, jusqu’à gravir les échelons un à un, en bavant un maximum possible, pour devenir onze années plus tard, le chef. Je n’ai jamais connu ce que sont les études, je n’ai jamais pensé à devenir autre chose, ni un autre mec. Je pourrais me ranger, me dire que la vente de stup’ et d’armes peut me faire croupir en taule, mais je n’ai pas peur. Je n’ai plus jamais eu peur depuis gamin. Et ce n’est pas maintenant que ça va commencer. Quand je vois le blé facilement amassé, je n’ai pas envie de cesser mes activités. L’argent facile, il n’y a que ça qui compte dans ce bas monde. Dans le mien surtout. La vie m’a bien appris à me méfier des gens, à ne pas m’attacher. D’ailleurs, après avoir vu crever plus de six membres du gang sur trois mois, je sais qu’il m’est impossible d’avoir des attaches. Des gens sur notre route, il y en aura toujours, des gens qui rêveront de nous voir clamser, il y aura pleins. Des gens qui partiront avant nous, aussi. Doit-on s’arrêter pour autant ? Non. Baisser les bras, c’est baisser sa garde, c’est permettre aux autres de deviner nos failles pour encore mieux nous poignarder une fois le dos tourné. Je suis un homme sans cœur. Le passé et le présent m’ont forgé ainsi. Je crèverai probablement seul, mais qu’importe. Je suis libre, je vais, je viens, je croule sous l’argent sale pour m’offrir une vie de pacha. Je suis le mec que l’on craint, je suis le mec dont personne n’ose prononcer son nom, je suis le mec pour qui on baisse les yeux et pour lequel aucune faveur n’est de trop. Je suis un leader. Soit on me respecte, soit on devient un ennemi. Aucune sympathie, aucune pitié. Et pour ces dames, aucune chance de faire palpiter autre chose que ma bite. Mon nom ? Ne réfléchis plus. On m’appelle A. Je suis celui qui prend n’importe quel type de contrats, tant qu’une belle masse de fric m’est donnée. Je suis celui qui te pistera comme ton ombre, je suis celui qui t’abattra d’une balle dans la tempe, sans l’once d’un remord, sans penser à la peur que je t’aurais f****e avant de te flinguer. Je suis le mec qui va te faire devenir dingue en moins de deux. Je suis son pire cauchemar et son plus beau rêve. Je suis son traqueur, son tueur même si elle me donne le sourire au cœur et les larmes à l’œil. Je suis celui qu’elle surnomme « A, mon Mystérieux ».
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