Prologue Tome 2
TRAVOR
Je déboule en trombe dans le hall de l'hôpital, sans trop savoir où me diriger. Les murs blancs et impersonnels de la bâtisse me font froid dans le dos. Des gens déambulent tristement autour de moi, certains ont l'expression affecté, d'autres sont préoccupés. Toutes ces personnes sont dans ce bâtiment, à cause d'une personne qu'elles aiment.
Moi, je suis ici, pour les deux personnes qui revêtent dorénavant le plus d'importance dans ma vie. Je suis animé d'une telle hâte de la voir, mais en même temps, je redoute cet instant.
Et si elle perdait le bébé ? Et si elle était gravement blessée, et qu'elle ne s'en remettait pas ? Comment allons-nous surmonter ce nouveau drame, alors que nous commençons à peine à être heureux tous les deux ?
— Monsieur puis-je vous aider ?
Une infirmière, sans doute alertée par ma détresse se rapproche de moi.
— Je suis Travor McCoy et ma femme a été admise à cet hôpital suite à un accident. Pourrai-je la voir ?
— Monsieur McCoy ? C'est vous que je viens d'avoir au téléphone ?
J'opine de la tête, Gorge nouée, incapable de répondre par des mots.
— Alors, suivez-moi je vais vous conduire au médecin qui s'occupe d'elle. Reprend-elle, en pinçant les lèvres.
Il faut que je sache si le bébé va bien, si Kaylee est dans un état grave.
— Mademoiselle dites-moi s'il vous plaît si le bébé va bien.
— Le bébé ? Quel bébé ?
Quel bébé ? Sur quelle base les infirmières sont-elles embauchées dans cet hôpital de malheur ?
Du calme Travor. Me souffle ma conscience en alerte.
La crainte me noue de plus en plus la gorge. Mais la colère l'emporte.
— Comment ça quel bébé ? Ma femme est enceinte de dix-huit semaines. M'emporté-je, contre l'infirmière.
— Calmez-vous monsieur. Je ne connais pas les détails de la situation de votre femme, le docteur pourra mieux vous éclairer que moi.
Elle prend une pause et fronce les sourcils en m’observant. Je sens que la suite ne va pas me plaire.
…. mais je peux vous assurer que votre femme n'était plus enceinte quand elle a été transportée chez nous.
Termine-t-elle d’une traite, comme si elle craignait que je ne lui saute à la gorge.
C’est ce que tu devrais peut-être faire. Intervient une voix courroucée en moi.
Non, non, non ! Je me fige dans le couloir. « votre femme n’était plus enceinte quand elle a été transportée chez nous ».
La phrase me revient en écho, pour mieux m'achever. Elle a perdu le bébé. Kaylee n'est plus enceinte. Le désespoir qui couvait en moi rejaillit et détruit le peu d'espoir qu'il me reste sur son passage. J’ai l’impression que mon cœur cesse de battre pour la deuxième fois dans cette journée de m***e.
— Monsieur ? Je suis désolée, mais vous devez plutôt vous inquiéter pour l'état de votre femme. Des bébés, vous pourrez en avoir dans le futur.
La voix de cette infirmière incompétente me parvient par-delà la brume de tristesse qui s’abat sur moi.
Je commence à me dire que je ne suis pas fait pour avoir d'enfant, malgré mon désir d'être père. Pourquoi l'ai-je laissé y aller seule ? Pourquoi ? Tous mes rêves, tout ce que j'avais imaginé à propos de notre bébé, de nous, tout ressurgit dans mon esprit, et le sentiment de perte devient plus lancinant et plus douloureux. J'entame cette fois-ci, à la suite de l'infirmière une marche sans but, totalement absent, les épaules voutées, abattu par la nouvelle qui m'a comme dépossédée de toute volonté.
— Ah docteur, nous allions justement dans votre bureau. Ce monsieur est le mari de la patiente de la chambre 19.
Je relève la tête, pour voir le médecin. Il faut que je sache ce qui est arrivé à Kaylee et comment.
— Monsieur McCoy, vous vous décidez enfin à venir. M'apostrophe le médecin, un assez vielle homme bourru, qui me scrute derrière ses lunettes, d'un air réprobateur.
Enfin ? Mais que raconte-t-il ? Je suis venu aussi vite que j'ai pu ! Je décide de ne pas m'attarder sur ce fait et d'aller à l'essentiel.
— Comment va ma femme ? Que lui est-il arrivé ?
— Un accident. Mais venez avec moi, nous irons la voir, dans sa chambre. Elle sera très heureuse de vous voir. Son premier mot, après son réveil était votre prénom.
Oh Kaylee ! Je te promets que nous allons surmonter cette épreuve ensemble. Tu verras, je serai là avec toi.
— Le bébé... Commencé-je tristement avant de me taire la seconde d'après en me prenant la tête entre les mains. Nous n'avons plus de bébé, pourquoi insister ?
— Vous dites ?
— Rien.
— Je voudrais vous prévenir. Votre femme à subit un véritable choc. Elle a été projetée hors de sa voiture et sa tête a malheureusement heurtée le sol assez violemment. Ce qui a provoqué un traumatisme cranio-cérébral.
— Quoi ? Fais-je faiblement.
J'essaie de garder mon calme, mais je n'y arrive plus. Trop de mauvaises nouvelles en un coup. Il faut que je la voie maintenant. Elle a dû beaucoup souffrir, toute seule dans sa voiture. Et moi je... bon sang !
— Votre femme a...
— Je veux la voir, maintenant. Sans perdre une minute de plus. L’interromps-je sans trop de ménagement.
— Il faudrait que vous sachiez d'abord…
— Docteur, vous aurez tout le temps de m'expliquer ce qu'elle a. Tout ce que je veux, c'est voir ma femme ! Hurlé-je, sans trop savoir pourquoi. Il fallait que je me libère.
Le médecin hoche la tête, et m'indique d'une main, le chemin pour rejoindre la chambre de Kaylee. Avant d'ouvrir la porte, je prends une grande inspiration, essayant de me recomposer un visage serein. Il faut que je sois fort pour nous deux. C'est moi qui dois prendre soin d'elle, afin qu'elle arrive à surmonter cette perte.
Je pousse doucement la porte et mon regard est capturé par la vue de son corps, recouvert par une couverture. Ses cheveux sont retenus dans un bonnet d’hôpital, et son visage est tourné vers la fenêtre, et elle semble perdue dans sa contemplation.
J'avance de quelques pas, redoutant toujours sa réaction quand elle me verra, quand elle saura. Elle parait si calme.
Je me racle la gorge, et dans un murmure douloureux, je m'adresse à elle.
— Ma chérie, je suis là.
Elle retourne aussitôt sa tête vers moi. Un grand sourire illumine son regard, tandis que mon sourire à moi s'éteint et laisse place à un autre sentiment. Le cœur battant, je peine à concevoir ce que je vois. Est-ce possible que...
Mais qu’est-ce que ?? … je dois rêver, ça y est, le choc de la nouvelle me fait halluciner. Bon sang ! Que se passe-t-il dans cet p****n d’hôpital ?
— Travor, mon amour enfin tu es là.
S'enquit faiblement une voix que je reconnaîtrai entre mille.
Sonia.
C'est un cauchemar ! Je nage en plein cauchemar ! Que fait-elle ici ?
Sonia ? Où est Kaylee ?
Je pivote vers le médecin, pour voir s'il voit aussi ce que je vois. Il me dévisage comme si, tout était normal, comme si à la place de Kaylee je ne venais pas de voir Sonia.
Suis-je devenu fou ? La perte d'un autre enfant m'a cette fois-ci carrément fait péter un câble. Je sors de la pièce, presque en bousculant le médecin, qui lui non plus ne comprend pas mon attitude.
— Monsieur vous allez bien ? Me demande-t-il, la surprise se lisant clairement dans son intonation, d’une voix qui résonnait dans mon dos.
Je m'accote contre le mur, en maudissant mon esprit. Ce f****r me joue un sale tour, c'est certain.
Putain ! C'était Sonia ! C'était elle, pas Kaylee !
Des larmes de joie s'échappent aussitôt, de mes yeux.
Kaylee et notre bébé vont bien !
— Monsieur McCoy, vous semblez être sous un choc.
— Non ! Au contraire je suis heureux, très heureux ! Affirmé-je, partagé entre l'incrédulité et un bonheur immense.
— J'ai du mal à vous suivre, votre femme est...
— Elle, c'est mon ex-femme, pas ma femme ! Rectifié-je, encore sonné par ma découverte.
Une pointe d’espoir naquit en moi. Et dire que j'étais au bord du désespoir il y a quelques instants !
— Votre ex-femme ?
— Oui. Nous sommes séparés depuis plus de cinq ans. Assuré-je, en hochant frénétiquement la tête.
La mine, du Docteur, s'assombrit et il ôte ses lunettes, visiblement plus perturbé que moi par la nouvelle.
— Si ce que vous dites est vrai, monsieur McCoy, le cas de votre femme… enfin de votre ex-femme est encore plus grave que ce que je n’imaginais. Elle souffre d'une amnésie rétrograde. D'après mon échange avec elle, et ce que vous venez de me dire, je crois comprendre que pour elle nous sommes toujours à l'époque où vous étiez encore mariés.
— Quoiiiiii ?
Tu avais raison, Travor c’est un véritable cauchemar !
Mais où est Kaylee et pourquoi je n’arrive pas à la joindre bon sang ?