Chapitre 7

1247 Words
Chapitre 7 Devin gardait ce visage sombre qui trahissait trop bien l’orage intérieur qu’il tentait de masquer. Cette histoire de grossesse représentait pour lui bien plus qu’une simple complication : c’était un éboulement en travers du chemin qu’il avait à peine commencé à tracer. Tout risquait de s’effondrer avant même d’avoir vraiment pris forme. — Je n’en reviens pas… Robin est au courant ? demanda-t-il enfin, d’une voix qu’il voulait neutre. Sabrina, qui percevait sans comprendre les tensions dissimulées derrière sa façade, attribua son trouble au seul choc de la nouvelle. — Cet homme attend déjà un enfant avec une autre. Je refuse que le mien tremble un jour à l’idée d’être relégué au second plan par son propre père, répondit-elle dans un souffle. Ses mots étaient calmes, mais son regard portait la trace d’une douleur encore vive. — Tu as bien fait de ne rien lui dire. Peu de gens savent que nous sommes frère et sœur, et nos noms de famille différents nous servent… Serre-toi de ça si jamais tu dois protéger ton bébé, lui conseilla Devin, dont la voix, cette fois, vibrait d’une résolution ferme. Sabrina sentit son cœur se détendre un peu ; elle avait cru qu’il lui en voudrait. Elle s’était trompée. — Merci, murmura-t-elle simplement. — Je dois filer, mais demain matin je t’emmène pour refaire les examens. On vérifiera tout ça, dit-il, sans l’ombre de son sourire narquois habituel. Il priait intérieurement pour que la médecine démente le test. — J’allais te demander la même chose, intervint Cobby. On ignore encore trop de choses. Lizzy, elle, ne disait rien. Elle observait Sabrina, pleine d’un espoir fébrile : aujourd’hui, le sort semblait enfin leur offrir une brèche de lumière. — Les femmes enceintes travaillent tous les jours, alors autant t’y remettre tout de suite, déclara Lizzy soudainement. Je te confie la gestion de l’entreprise. Sabrina resta interdite. Elle ne s’était pas préparée à reprendre les rênes de la société familiale après tout ce qui avait façonné sa vie. — Laisse-la souffler, Lizzy, intervint Cobby, attendri. Elle n’a jamais eu besoin de bosser auparavant. — Ça n’empêche rien, répliqua Lizzy. Elle est brillante, et je veux apprendre au côté de Devin. Je rêve d’être styliste depuis toujours, tu le sais. Elle lança un regard complice vers Devin, l’expression animée par sa passion. Celui-ci haussa un sourcil, puis soupira. — Dans ce cas… voyons ce que tu vaux vraiment. Je te donne cinq cent mille pour revoir complètement la garde-robe de Sabrina. Si tu fais mieux que bien, tu deviens mon assistante. Lizzy eut un petit cri étouffé, comme si sa poitrine se gonflait trop vite. — Quand est-ce que je commence ? — Tout de suite, répondit Devin. Elle pensa d’abord qu’il la provoquait, mais en détaillant la tenue de Sabrina, totalement dépassée malgré sa récente acquisition, elle dut admettre qu’il y avait effectivement urgence. Toutefois, un souci s’imposait. — Et qui dirige les affaires pendant ce temps ? — Tu décides comme tu l’entends, trancha Devin. Je t’ajoute même huit cent mille au budget. Et garde quelques tenues chez moi, pour vous deux. Je déteste que les femmes s’habillent avec des fringues d’hommes quand elles dorment chez moi. Lizzy pâlit sous la quantité de missions qui s’empilaient sur ses épaules, puis inspira profondément. — Bon… je commence par Sabrina. Le reste suivra. — Tu n’as que trois jours, mon ange, lança Devin avant de se tourner pour partir. Elle l’attrapa aussitôt par le bras. — C’est jeudi. Samedi, je n’ai rien. Je dessinerai entre deux tâches et je ferai les achats ce jour-là. Donne-moi ta carte noire. Devin sortit son portefeuille, en tira une carte prestigieuse, la lui tendit. — Tu me la rends. Pas question de l’oublier. Lizzy brillait déjà comme si un trésor venait de lui tomber dans les mains. Quelques heures plus tard, Lizzy initiait Sabrina aux bases de la société. — Le centre de traitement des pierres est en Alabama, mais tu n’auras jamais besoin d’y aller. Notre responsable te transmettra les rapports. Ton rôle, c’est de vérifier que chaque pierre correspond aux certificats avant qu’elle n’atteigne les boutiques, expliqua-t-elle. Puis elle ajouta : — On en reste là. L’entreprise ferme dans cinq minutes. Demain, je te présente tout le monde. Je vais appeler le chauffeur. La porte s’ouvrit aussitôt. — Pas la peine, je suis là, annonça Devin depuis l’entrée. Les deux femmes écarquillèrent les yeux. Il n’était parti que cinq heures. — Tu es revenu ? fit Sabrina, surprise, presque coupable. Elle avait peur qu’il délaisse son travail à cause d’elle. — Puisque je dois t’amener à l’hôpital demain, autant dormir au penthouse. J’ai déjà préparé des vêtements pour toi, dit-il, l’air bien plus léger que plus tôt. Lizzy hocha la tête, ravie. Cet arrangement lui simplifiait la tâche. — Parfait, je pars avec le chauffeur, dit-elle en se levant. Elle n’eut pas le temps d’atteindre la porte : Devin l’arrêta, intrigué. — Pourquoi si pressée ? — Shopping de nuit. Je dois récupérer quelques pièces incontournables. Pas dans ta propre collection, ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel. — Ne rentre pas trop tard, Lizzy. — Je ne suis pas seule. — Peut-être, mais reste prudente, insista-t-il, visiblement inquiet. — Très bien. À demain, Brina, lança-t-elle avant de filer. Devin guida Sabrina dehors. Arrivés au penthouse, il poussa la porte d’une chambre lumineuse. — C’est la tienne. Celle d’à côté appartient à Lizzy, précisa-t-il. Il s’était assuré que chacune de ses sœurs ait un espace ici, même s’il ne s’attendait pas à revoir Sabrina de sitôt. Les yeux de celle-ci se remplirent de larmes presque aussitôt. Trois ans consacrés à Robin… et rien, jamais, en retour. Quand Devin revint du fond de la pièce, il la trouva recroquevillée sur le canapé. — Tu pleures ? Ne me dis pas que tu repenses à cet imbécile, grommela-t-il. — Je… je suis juste heureuse d’être revenue, répondit-elle avec un petit sourire tremblé. — Alors mange, dit-il en déposant un plateau devant elle. Et souviens-toi que maintenant, tu travailles. L’odeur du plat la fit saliver. Elle mangea en savourant chaque bouchée, ravie. — Dis… Tu peux m’emmener quelque part avant le rendez-vous demain ? demanda-t-elle une fois son assiette vide. — Où ça ? — Chez la grand-mère de Robin. Je dois la prévenir. — Dans ce cas, on se couche tôt. Elle acquiesça. Le lendemain, elle passa près d’une heure chez Ceceila. Lorsqu’elle rejoignit Devin, elle s’excusa : — Désolée, elle était bouleversée par la nouvelle. Je lui ai donné mon nouveau numéro. — Ce n’est rien. J’ai un rendez-vous crucial, donc je te dépose à la clinique et j’enchaîne. La médecin est une amie : quand tu auras terminé, elle te trouvera où patienter. Sabrina, sublime dans la robe qu’il avait choisie, acquiesça. À la clinique : — Félicitations, Mademoiselle… — Mademoiselle James, la corrigea Sabrina. — Ah oui, pardon… Toutes mes félicitations ! Vous êtes enceinte de quatre semaines ! Sabrina accueillit l’annonce sans surprise. — Merci. Et je préférerais que mon ex-mari n’en entende pas parler. La médecin hocha la tête. — Devin m’a déjà mise au courant. Une fois les contrôles terminés, rassurants pour elle comme pour le bébé, on lui fixa un rendez-vous dans un mois. Elle sortit, prête à attendre Devin au parking. Elle n’eut pas le temps d’y parvenir. Une main la saisit brusquement. — Sabrina ? Qu’est-ce que tu fais ici ? La voix était lourde, tendue, furieuse.
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