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…Car elle arrive toujours

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Un couple se lance dans un voyage d'introspection

Bénédicte part au Vietnam sans prévenir son compagnon, Bernard-Hubert, attaché parlementaire à Besançon. De voyage touristique en voyage intérieur, l’un et l’autre voient leur approche de la vie remise en question.

Dans ce roman, Marie-Thérèse Renaud met à profit son passé de journaliste et porte un regard critique envers notre société fondée sur le sensationnel, l'instantané et le superficiel.

EXTRAIT

Un jour bleuté colore encore le rebord de la fenêtre mais la nuit commence à étendre son ombre. A l’instant même où ces mots lui viennent à l’esprit, Bernard-Hubert se dit qu’ils ressemblent à un poème de Bénédicte.

Il vient seulement de comprendre que la jeune femme est partie. Sa présence semblait naturelle, faisait presque partie de ce qu’on appelle, en langage syndical, les avantages acquis. En l’occurrence les siens. Il n’y prêtait plus grande attention. Lui est-il arrivé d’ailleurs de la regarder vraiment, même au début de leur histoire ?

Son absence le remplit d’elle soudain. Une sensation excitante et irritante aussi, qui le laisse un peu désemparé, à la limite de l’agacement.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Journaliste à l’Est Républicain, puis écrivain, Marie-Thérèse Renaud signe ici son cinquième roman. Plus que jamais, elle nous entraîne dans un voyage vers d’autres horizons, mais surtout au bout de soi-même, sur les ailes de l’écriture.

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Aperçu gratuit
Chapitre 1-1
Première partie La valise rouge En dehors du fait qu’ils laissent leurs économies là où ils passent, je crois que les touristes sont très utiles au monde moderne : il est très difficile de haïr ceux qu’on connaît. John Steinbeck – Un Américain à New York et à Paris 1Un jour bleuté colore encore le rebord de la fenêtre mais la nuit commence à étendre son ombre. A l’instant même où ces mots lui viennent à l’esprit, Bernard-Hubert se dit qu’ils ressemblent à un poème de Bénédicte. Il vient seulement de comprendre que la jeune femme est partie. Sa présence semblait naturelle, faisait presque partie de ce qu’on appelle, en langage syndical, les avantages acquis. En l’occurrence les siens. Il n’y prêtait plus grande attention. Lui est-il arrivé d’ailleurs de la regarder vraiment, même au début de leur histoire ? Son absence le remplit d’elle soudain. Une sensation excitante et irritante aussi, qui le laisse un peu désemparé, à la limite de l’agacement. C’est par un jour d’automne comme celui qui s’achève qu’il l’a rencontrée. On lui remettait le prix régional de poésie que lui avait valu son dernier recueil. Elle était connue sans l’être. Même ses collègues du collège étaient peu nombreux à savoir qu’elle était l’auteur des paroles d’une chanson que tout le monde avait fredonnée l’année précédente. Il est vrai qu’elle n’avait jamais cherché à ce qu’il en soit autrement. Ce n’était pas exactement de la modestie, plutôt une certaine forme de paresse nourrie de la certitude qu’elle avait, d’être peu douée pour l’autopromotion. Peut-être était-elle également assez sage pour penser que les enseignants, et pire encore l’administration, ne risquaient guère de juger convenable que les vers d’un professeur de français courent les ondes entre l’horoscope du matin et les publicités pour prix cassés de la grande distribution. Ils supportaient que certains d’entre eux publient, de loin en loin, quelque docte travail universitaire. Le roman, sauf s’il se parait d’habits historiques bien authentifiés, passait déjà moins bien. Alors, de la poésie, et qui plus est de la poésie pour chanson, vous n’y pensez pas… L’Académie française n’avait encore jamais accueilli ce qu’on devait appeler plus tard les arts frémissants, pour ne pas dire les arts de la rue. Bernard-Hubert Chalaine racontait souvent que les strophes de sa compagne avaient atterri sur le pupitre d’un chanteur à la mode simplement parce qu’à la suite d’une toquade amoureuse, l’une de ses anciennes condisciples avait quitté l’Education Nationale pour le show-biz parisien. Il ne manquait généralement pas d’ajouter que la gloire n’intéressait pas Bénédicte. Peut-être, préférait-il simplement qu’il en soit ainsi. C’était elle qui écrivait ses poèmes mais c’est lui qui en parlait le plus. Bénédicte écoutait, un léger sourire dans les yeux. Mais ce soir-là, ce premier soir, Bernard-Hubert ne savait encore à peu près rien d’elle. Il la revoit dans le grand salon de l’hôtel de Région, toute mince dans la robe noire censée lui donner la contenance de circonstance. C’était compter sans cet air de jeunesse et ce regard étonné qu’il lui avait souvent vus par la suite. Ce genre de cérémonie ne l’amusait guère mais il n’avait pas osé refuser au député François Guermare de le représenter. Il avait continué à travailler à la permanence lorsque le gros homme qui en était le suppléant avait succédé à Hélène emportée en quelques heures par un infarctus. Hélène Duriet était sa femme. Entre autres rôles. Elle se préparait à prendre la parole lors d’une réunion dont il avait oublié l’objet lorsqu’elle avait été terrassée par une douleur fulgurante. Malgré le peu de temps qu’avait mis le véhicule du SAMU pour la conduire aux urgences, elle était morte avant d’arriver et il avait été impossible de la réanimer. Un sénateur qui la connaissait avait raconté à Bernard-Hubert que, victime d’un arrêt des fonctions vitales alors qu’il venait d’être admis dans une clinique pour un examen banal, il avait dû d’être sauvé au simple fait de se trouver dans le bon endroit au bon moment. La vie tient à ce genre de détail. Bernard-Hubert énervé par ce flot de pensées désordonnées commence à tourner d’une pièce à l’autre. Son regard effleure un portrait d’Hélène. Le cadre est resté là, sur la commode de la chambre, une mince baguette argentée encadrant la chevelure courte mais abondante. La jeune femme était très brune avec un visage dont la minceur faisait ressortir les pommettes un peu saillantes. Le sourire à demi esquissé reste jeune. Aujourd’hui, son mari est presque aussi âgé qu’elle que la mort a mise hors du temps. Woody Allen qui était l’un de leurs réalisateurs-acteurs fétiches les avait fait sourire en déclarant un jour qu’il acceptait de vieillir parce que c’était la seule façon de ne pas mourir jeune. Et en regardant Hélène, toujours dans l’éclat de ses cinquante ans, son mari pense, lui, que la seule façon de ne jamais vieillir est de disparaître tôt. La soirée ne s’annonce pas vraiment gaie. Il y a des années qu’il n’a pas prêté autant d’attention au cadre qu’elle-même avait posé là et dont Bénédicte n’a jamais estimé utile, ou convenable, de manifester qu’il la dérangeait. Il y est resté. C’est presque un symbole. La maison est toujours celle d’Hélène et porte partout sa marque plus que celle de son mari que les objets encombrent vite. Elle, avait sans cesse l’envie d’en semer ici et là, qui lui rappelaient un pays, une rencontre ou un anniversaire. A l’inverse, Bénédicte ne laisse guère de traces de son passage. De la même façon, elle voyage avec une extrême économie de bagages. Lui suffisent, le plus souvent, deux tee-shirts et un pantalon, quelques-unes de ses écharpes préférées pour les transformer en fonction des circonstances, plus la petite robe élégante sortie miraculeusement au bon moment et dont personne n’aurait pensé qu’elle pouvait trouver place dans son sac. Cette idée de voyage conduit Bernard-Hubert dans la penderie. La valise rouge n’est pas à sa place mais rayons et penderie sont presque normalement garnis. De toute évidence, la jeune femme est partie. Elle n’a pas déménagé. Elle ne s’est pas non plus jetée dans la rivière ou sous un train. On ne se suicide pas en emportant une valise rouge. Dans le couloir, l’homme aperçoit un rai de lumière sous la porte des toilettes qu’il n’avait pas vu l’instant d’avant. Elle n’a pas éteint, pense-t-il. Mais, bien sûr, le distrait, c’est lui. Elle n’a pu éteindre ou allumer quoi que ce soit. Elle n’est pas là. D’un coup, son absence l’envahit d’un sentiment d’injustice si insupportable qu’il en tremble de colère. Une fois de plus, on l’abandonne. Comme lorsque son père et sa mère se sont dérobés aussi soudainement que le sol sous les pieds. Un accident de la route par une nuit de verglas, l’un de ces accidents bêtes qui ressemblent à tous les autres et qu’on n’imagine jamais pour soi ou pour ses proches. Son père est mort sur le coup, sa mère quelques heures plus tard, sans qu’il ait pu la revoir. Il allait avoir dix-sept ans et passait les vacances de février chez tante Aline. Les vacances avaient continué. Aline, célibataire en mal d’enfant avait été nommée tutrice de Bernard-Hubert que la mort et l’assurance de ses parents avaient rendu, pour un temps, riche et pitoyable. Le verglas aurait pu tout aussi bien le faire pauvre et orphelin. Et ni moins ni plus pitoyable. Tante Aline passait tout à ce grand adolescent un peu nonchalant que la moindre obligation rebutait, s’acharnant à vouloir remplacer ce qu’elle disait elle-même irremplaçable. Pour elle, son neveu n’était qu’un enfant blessé. De fait, il grandissait encore un peu mais consacrait déjà plus de temps à apprécier l’intensité des regards que les filles posaient sur lui qu’à travailler. Il séduisait naturellement, ce qui l’arrangeait sans l’étonner, juste assez charmant pour que cette implication minimum ne paraisse pas désobligeante. La tendance qu’avaient ses compagnes d’un soir ou de quelques semaines à le bercer et à le faire ronronner comme un chaton repu, ne le surprenait pas non plus au sortir des soins attentifs et dévoués de sa douce tante. Lorsqu’il avait rencontré Hélène Duriet, il lui avait parlé d’incertaines études qu’il était censé mener de front avec de petits boulots aussi peu charpentés. Et tout de suite, elle l’avait pris sous sa protection. Elle disait volontiers : Quand vous aurez mon âge, vous verrez ceci, vous aurez appris cela… Elle prononçait ces mots avec une légèreté rieuse, faisant des années qui les séparaient non un handicap ou une gêne, mais un plus, quelque chose d’indéfinissable et de troublant, une sorte d’atout inconcevable. La chose qui, dès le premier instant, l’avait frappé chez elle était ce summum d’élégance qui fait qu’une femme est, en toutes circonstances, dans le ton juste, jamais trop, ni trop peu habillée, capable d’être originale sans paraître exotique et encore moins déguisée, assez bien maquillée pour qu’on l’oublie, discrète mais pas passe-partout. Le garçon auquel ses trop faciles conquêtes n’avaient pas vraiment tourné la tête s’était senti subjugué. La classe. A peine l’avait-il entrevue que les deux mots lui étaient venus à l’esprit. Ils étaient restés jusqu’à la fin ceux qui la définissaient le plus exactement. Beaucoup auraient été tentés de dire que cela lui venait de ce que, très tôt, l’aile du pouvoir l’avait effleurée. Bernard-Hubert lui-même l’avait pensé. C’était faux. Même étudiante à moyens comptés, Hélène n’avait jamais fait pauvre. Question d’allure, de ligne, de goût aussi. Elle savait ce qui lui seyait, comme elle savait ce qu’elle voulait et où elle allait. Un don qui, à guère plus de vingt ans, l’avait fortement aidée à assumer son état de mère célibataire à une époque où la chose n’était encore, ni tout à fait banale, ni si facilement acceptée. Jamais personne n’avait su, à part elle, peut-être, qui était le père de Benoît. Et Bernard-Hubert, avec l’indéniable sens du confort qui l’habitait, avait vite trouvé sa place entre une femme maternelle et cet adolescent qu’il pouvait, à son choix et selon son humeur du moment, considérer comme un demi-frère ou un presque fils. Car Hélène avait assez rapidement décidé qu’ils devaient se marier. Je n’ai pas envie qu’on te prenne pour mon gigolo. Et toi non plus j’imagine, avait-elle dit. Plutôt flatté, le jeune homme s’était laissé faire. Et le naturel d’Hélène devenue Duriet-Chalaine, avait réussi à ce que très vite leur couple paraisse ordinaire. Les mauvaises langues avaient cherché ailleurs des proies plus faciles. Et puis, il y avait eu, quinze ans plus tard, ce mois de juin orageux, éprouvant, alors que la perspective du grand désert estival remplissait jusqu’à plus soif, les agendas des gens importants. Hélène en faisait partie. Soucieuse d’être toujours là où on l’attendait et aussi où on ne l’attendait pas, elle chargeait inconsidérément la bourrique, lui disait souvent Bernard-Hubert. L’expression, dans sa banale trivialité, ne manquait pas de justesse. Pour autant, personne ne pouvait imaginer que la jeune femme pût s’écrouler ainsi, même si cette façon de se rompre, de tirer sa révérence sans une plainte, sans un mot, lui ressemblait finalement assez. Mais en ces jours de deuil qui lui avaient paru d’une totale irréalité, son mari ne s’était pas demandé s’il existait des façons plus ou moins élégantes de disparaître. Il s’était simplement senti désorienté, plus trahi que si Hélène avait levé les yeux sur un autre homme, éventualité impossible à envisager tant elle était peu dans la manière de la jeune femme. Il était plus sûr d’elle que de lui-même, ayant oublié qu’on peut simplement cesser de vivre. A elle, il arrivait de penser qu’un jour elle mourrait et que, forcément, elle ne connaîtrait qu’en partie le siècle qui arrivait inaugurant un nouveau millénaire. Mais elle se donnait encore du temps. Elle avait tout juste cinquante ans et ne souffrait d’aucune des maladies qui font peur. Quant à l’infarctus, elle imaginait que c’était une affaire d’hommes. Pourtant, à la fin d’un bel après-midi, son cœur avait déclaré forfait. Peu de temps s’était passé avant que Bernard-Hubert rencontre Bénédicte et moins encore avant que celle-ci termine la nuit dans son lit sans qu’il ait eu besoin de la supplier. Comme Hélène, une bonne quinzaine d’années plus tôt, c’était sans doute elle, et non lui, qui avait choisi. Mais c’était là encore le genre de pensée qui ne l’effleurait pas et il aurait opposé les plus vives dénégations à qui l’aurait exprimée devant lui. Et voici qu’aujourd’hui sa jeune compagne, à son tour, semble s’être évanouie. Evanouie seulement. Bernard-Hubert se dit qu’elle doit être partie s’aérer l’esprit chez son amie Clotilde ou dans sa famille aux Etats-Unis mais, au fond, il n’y croit guère et ne se voit pas téléphoner aux uns et aux autres pour s’en assurer. Il n’a pas davantage envie de signaler la disparition de Bénédicte à la police. Que lui dirait-on ? Qu’elle est majeure, que si un accident la concernant était signalé, on ne manquerait pas de l’appeler…Que s’est-il passé de particulier ce matin ? Rien dont il se souvienne. Ils ont pris leur petit déjeuner comme à l’ordinaire. Il a feuilleté le journal et dit à Bénédicte Tiens l’opéra de Moscou vient au parc des expositions... Mais il ne se rappelle pas ce qu’elle lui a répondu. Il tourne en rond dans la maison, agacé par ses propres allées et venues de la chambre à la cuisine et surtout par ses pensées qui lui paraissent d’une affligeante banalité, deux mots qu’il associe presque toujours, machinalement, comme il fait trop de choses.

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