Une nuit d’amour sans lendemain
Épisode 4
Liya
Je termine mon travail à 1 heure du matin. Je sors en hâte du bar pour attraper un taxi . Je devais, ensuite, marcher pour achever le trajet et rentrer enfin chez moi. Un voyage long et fatigant. Mais je n’avais pas les moyens de m’offrir un meilleur moyen de transport.
Une voiture passe dans la rue, une autre
s’arrête le long du trottoir. Les battements de non cœur s’accélérèrent. J’évite de regarder le véhicule. Ou je devais prendre mon taxi était proche, et je n’allais pas m’attirer des ennuis en envoyant promener un abruti dans une voiture de luxe . Ce n’était ni la première fois qu’un homme me harcelait ni la dernière.
— Je t’emmène ?
J’ai eu un coup au cœur. En me figeant aussitôt, je me tourne vers l’occupant de la voiture, assis à l’arrière, le coude sur le bord de la portière, dont la vitre était baissée.
— Non
J’ai su me contrôler, quelques heures plus tôt, et il valait mieux continuer sur cette lancée. C’était André ... Il ne servirait à rien d’entamer les hostilités avec lui. De plus, j’ai peur qu’il ne découvre l’existence de Erwan . Il supposerait sans doute que, ça aussi, je l’avais fait exprès ! Même s’il avait affirmé qu’il prenait toutes ses précautions…
— Il est tard, tu dois être fatiguée, dit-il de sa belle voix harmonieuse.
Comme je détestais cette voix suave ?
La voiture roulait au pas, accompagnant ma marche, et je suis irritée de le savoir confortablement assis tandis que je foule le bitume, les pieds douloureux.
— en effet Je suis fatiguée tous les soirs et je m’en accommode. Alors, je décline la proposition.
André eut un léger rire.
— Quel aplomb ! Te voilà loin de la jeune fille qui a débarqué à Abidjan avec des étoiles plein les yeux et des rêves de gloire…
Un élan de colère irrépressible me souleve et j’avance m jusqu’à la voiture. C’était plus fort que moi , j’avais besoin de tenir tête à cet homme. La voiture s’immobilise
— J’étais peut-être naïve, mais c’est terminé. Si j’ai de l’aplomb, comme tu dis, c’est qu’il l’a bien fallu. Dans ce monde de requins, je n’ai pas envie de me faire dévorer.
A vrai dire, j’ai plutôt le sentiment d’être dotée d’un fort instinct de survie. Je devais me battre pour rester à flot, parce qu’un petit être sans défense dépend de moi.
André ouvre alors la portière et descend. J’ai eu un mouvement de recul. Il était si grand, si large d’épaules, si… parfait.
Parfait ? Allons donc, c’était un pitoyable individu, ni plus ni moins !
— Monte, dit-il d’une voix autoritaire. Ne sois pas si têtue.
— Je n’ai pas d’ordres à recevoir de toi, André
Je dis son nom de façon amusante.je lui rappelais ainsi que nous avions eu des relations intimes, que je n’étais ni une de ses employées ni une petite amie qu’il pouvait régenter à sa guise.
— D’ailleurs, ta compagne sera furieuse si tu m’emmènes, non ?
— Inès n’est plus un problème, déclara-t-il avec hauteur.
— Pauvre Inès !. Chassé sans explications !
Laissant la portière ouverte, André s’approche de moi . Mon instinct me souffle de fuir, mais je refuse de lui obéir. J’ai affronté trop d’épreuves pour détaler à la première difficulté. Je suis beaucoup plus forte qu’avant, non ?
— Installe-toi dans la voiture, ou je t’y fais monter de force.
— Je voudrais bien voir ça ! Nous sommes en Côte d’Ivoire … On ne kidnappe pas les gens en pleine rue, ici.
Je ne sais pas trop ce qui m’arrivait. Je suis soulevée en l’air, et renversée sur son épaule avant même d’avoir pu esquisser un geste.
— Pose-moi par terre ! ( en criant et en lui martelant le dos de mes poings) tandis qu’il m’emportait vers la voiture.
La seconde d’après, je me sens basculer vers le sol, et je m’accroche à lui de crainte de tomber. Mais il me dépose sans ménagement sur le siège arrière, se glisse près de moi en un clin d’œil, puis claque la portière. Je me rue vers la portière opposée, mais celle-ci était verrouillée. La voiture se met aussitôt à rouler , en prenant de la vitesse. Je m’affale sur le siège en fixant mon ravisseur d’un œil noir. Il semblait content de lui.
Mon cœur battait la chamade, je suis tendue à l’extrême, prête à m’enflammer comme de l’amadou.
— De quel droit oses-tu… ?. Si on t’a vu, tu auras de sacrés ennuis…
— Ça m’étonnerait, répondit-il, son regard gris brillant dans la pénombre. Et maintenant, dis-moi où tu habites, et mon chauffeur te ramènera chez toi. C’est tout de même plus pratique, non ?
Je le foudroyé du regard.
— Allons, Liya , parle. Il est tard, et tu as l’air fatiguée.
Si grande que fût mon envie de refuser mais je consens à donner mon adresse. Je n’avais guère le choix… Et je devais récupérer Erwan . En voiture, j’arriverais plus tôt que d’habitude, et ma voisine ne s’en plaindrait sûrement pas.
— Serais-tu tourmenté par ta conscience ? Me lança-t-il lorsqu’il eut communiqué l’adresse au chauffeur.
Il éclate de rire.
— Et puis quoi encore ?
Sa réaction me blesse, mais ne me surprend guère. Ne m’avait-il pas jetée dehors sans l’ombre d’un scrupule, refusant ensuite tout contact avec moi ? Ce genre d’homme n’avait évidemment pas de cœur.
— Alors, pourquoi te montres-tu si généreux ?
Il promène son regard sur moi, et je sens sur ma peau une chaleur diffuse, très révélatrice. Je serre les dents, résolue à refouler toute attirance pour cet homme. Avant de rencontrer André , je m’étais cru maîtresse de mes émotions. En quelques instants, il avait pulvérisé cette illusion.
Et il la pulvérisait de plus belle à présent. Mon corps ne voulait rien savoir des sentiments que André m’inspirais depuis un an… Le mépris ! L’aversion pure et simple !
— Parce que j’ai besoin de toi, ma belle , répondit-il.
Je soupire , la gorge nouée. Il m’a dit des mots semblables, lors de cette fameuse soirée. Et moi, comme une idiote, j’ai mordu à l’hameçon. Cet épisode m’a fait définitivement perdre ma naïveté. Un milliardaire ne tombait pas amoureux, en quelques heures, d’une jeune fille sans sophistication, vierge par-dessus le marché.
Non, il n’y avait pas eu de coup de foudre entre nous
— Besoin de moi ? Désolée, mais la réponse est non.
— Tu n’as pas encore entendu ma proposition, fit calmement remarquer André .
— La réponse sera non de toute façon. J’ai déjà eu droit à une proposition de ta part. Je sais à quoi m’en tenir, merci.
Il secoue la tête comme s’il était déçu.
— Je te préférais à Abidjan
— Evidemment ! J’étais intimidée et faisais ce que tu demandais. Mais j’ai retenu la leçon.
— Tu aimes être serveuse,ma belle ? Tu aimes cette promiscuité avec des hommes qui se permettent des privautés parce qu’ils te croient à vendre, comme les boissons et les biscuits apéritifs ?
— Non, je n’aime pas ça ! . Mais je n’ai pas de qualification…
— Et si je te proposais une meilleure situation ?
— Je ne serai pas ta maîtresse!
Il me regarde d’un air interdit, puis éclata de rire une fois de plus, et je me sens rougir, mortifiée. Après avoir vu la femme qui l’accompagnait ce soir, je pouvais réellement imaginer qu’il s’intéressait à moi ? Il l’avait pourtant fait, un an plus tôt. Je ne l’avais pas rêvé : Erwan en était la preuve.
— Tu es charmante ! Je n’ai pas besoin de payer pour avoir une maîtresse. Si je te choisissais pour occuper cette… position, je suis sûr que tu ne refuserais pas.
Il était décidément d’une impolitesse sidérante !
— Tu fréquentes les bars , malgré ton manque flagrant d’intuition ? . Je m’étonne que tu ne sois pas déjà ruiné, vu la conclusion que tu tires alors que tout indique le contraire.
— chérie , soupira-t-il, tu es vraiment bête ! Comment avons-nous été ensemble dans le même lit, déjà ? Oh ! oui, ça y est, tu cherchais à m’embobiner…
Je rougis de plus belle au souvenir de nos ébats, et je ne donnais pas la peine de protester, persuadée qu’il ne me croirait pas, de toute façon.
— Tu aimes les femmes dociles, c’est clair. Et qui n’ouvrent jamais la bouche.
— Ce dont tu es incapable, grommela-t-il.
— Très bien, dis ce que tu as à dire. Qu’on en finisse.
Je me sens comme électrisée sous son regard intense. Malgré moi, j’étais tentée de me laisser happer par ce regard, de m’y noyer…
— Je veux que tu sois l’égérie de mon parfum audacieuse !
Audacieuse , je m’en souviens très bien, était le parfum emblématique de Néves cosmétiques . Celui pour lequel j’ai posé à Abidjan .
— Ce n’est pas drôle
— Je ne plaisante pas, Liya . Je veux que tu poses pour Audacieuse
— Je l’ai déjà fait, et ça n’a pas marché, il me semble.
— C’était une erreur de jugement. Que nous pouvons rectifier maintenant.
— Je ne crois pas que ce soit possible.
Comment je vais vivre à Abidjan avec un bébé de trois mois ? Ce n’était sûrement pas ce qu’envisageait André !
— Bien sûr que si, affirma-t-il. Je te paierai beaucoup plus que ne le fait le bar . Tu poseras pour les prises de vue, tu seras présente aux manifestations de promotion, et tu en seras généreusement récompensée. Tu as tout à y gagner, Liya .
Je pense à mon bébé qui dormait dans un berceau de seconde main, au petit appartement défraîchi que je partage avec angi, avec sa chaleur , ses tapis fanés, ses appareils ménagers toujours en panne… Ce n’était qu’un triste logement, et j’aurais donné cher pour le quitter, pour offrir à mon bébé de meilleures conditions d’existence.
Mais si André était en train de se moquer de moi ? S’il ne cherchait qu’à me punir de lui avoir dissimulé la vérité à Abidjan ?
A suivre .....
Aimez , commentez et partagez ❤️?