Elle ne dit rien. Lui non plus. Il referma doucement la porte du bar derrière eux. Puis, sans un mot, l’emmena à l’arrière, dans une petite pièce discrète où le froid se heurtait à leur fièvre intérieure.
Il la soulève et la pénètre avec son queue déjà dure. Il commence ses va et vient.
Ils font l'amour là, entre deux mondes. Flaviana se laissa aller à ses gestes, à sa voix grave qui murmurait à son oreille.
— Tu mérites mieux, souffla-t-il alors qu’elle frissonnait contre lui.
— Tais-toi… b***e-moi... fais-moi oublier, répondit-elle en enfouissant son visage contre son cou.
Il était doux comme Alessandro, féroce comme Ruggerio. Il n’était ni l’un ni l’autre. Il était cet instant volé où elle pouvait exister sans rendre de compte. Leurs corps se mêlèrent dans une urgence tendre, un désir vrai, brut, mais sans violence. Elle se sentit enfin désirée sans être utilisée.
Lorsqu’ils eurent fini, elle resta allongée un moment contre lui, le souffle court.
— Je ne sais même pas ton nom, dit-elle en souriant faiblement.
— Paolo, répondit-il. Et toi, la fille qui boit comme si elle voulait disparaître ?
— Flaviana… Et je bois parce que je veux oublier que j’existe.
Il ne répondit pas. Il se contenta de lui caresser les cheveux un instant.
Flaviana avait les yeux mi-clos. Son cœur battait plus vite.
Mais elle recula d’un pas, secoua la tête doucement, murmurant :
— J’devrais y aller.
Puis il se leva, remit sa chemise à moitié, et l’aida à récupérer ses sacs de cadeaux. Lorsqu’ils sortirent enfin, le taxi était toujours là, le moteur tournant, le chauffeur grognant derrière son volant.
— Enfin ! cria-t-il. J’ai d’autres courses, moi !
— Deux secondes, grogna Paolo en l’aidant à charger les paquets.
Flaviana allait entrer dans la voiture, puis se retourna et attrapa son bras.
— Merci… pour tout. Même pour rien.
Il lui sourit. Un vrai sourire. Et cette fois, elle monta. Sans larme. Sans b****r de plus.
Elle rentra chez elle, monta dans son appartement silencieux, déposa les cadeaux sans même les regarder, et s’endormit là, sur le canapé, toujours habillée, le cœur un peu moins lourd.
Le lendemain, Flaviana émergea lentement du sommeil. Le soleil déjà haut tapait contre les rideaux entrouverts, mais elle restait allongée quelques minutes, les draps emmêlés autour d’elle, un sourire flottant sur ses lèvres. Elle repensait à la veille. Au bar. À la fatigue, à l’alcool. Et surtout à Paolo. À leurs corps emmêlés. À ses mains fermes et à sa douceur inattendue. Il avait été à la fois tendre et sauvage, comme un souffle chaud dans une nuit glacée. Un moment volé qu’elle n’avait pas prévu, mais qu’elle n’était pas près d’oublier.
Elle se leva, s’étira, et fila sous la douche. L’eau chaude lui coula sur la peau tandis que les souvenirs de la nuit lui revenaient par vagues. Elle avait adoré ça. Ce moment, cette connexion sans promesse, sans drame.
Une fois séchée, elle passa un pull large, attrapa sa tasse préférée et mit à chauffer de l’eau pour un café bien serré. Alors qu’elle s’apprêtait à le verser, son téléphone vibra sur le comptoir. Numéro inconnu.
Elle décrocha, encore dans une demi-léthargie.
— Allô ?
— C’est moi ! dit une voix familière à l’autre bout. Léandra.
— Léandra ?
— Je suis dans un taxi. Je viens chez toi. Mais je connais pas ton adresse.
— Quoi ? s’étonna Flaviana, la tasse en main. T’es sérieuse ?
— Oui, donne-moi vite l’adresse avant que le chauffeur perde patience.
Flaviana lui dicta rapidement l’adresse, encore surprise. Sa petite sœur, après tout ce qui s’était passé ? Mais un mince sourire apparut sur ses lèvres. Si Léandra venait, c’est qu’il restait encore un lien. Peut-être une chance de réparer.
Elle reposa la tasse et, sans même finir son café, ouvrit le frigo. Il n’y avait pas grand-chose, mais elle ferait au mieux. Elle voulait lui préparer quelque chose de simple mais bon, quelque chose de familier. Un plat qu’elles aimaient, petite. Elle commença à sortir les œufs, la farine, le lait. Pancakes à l’italienne, comme leur grand-mère les faisait.
Alors qu’elle fouettait les œufs dans un saladier, on frappa à la porte. Elle crut que c’était Léandra, un peu trop rapide pour être vrai. Mais lorsqu’elle ouvrit, elle fut, surprise. C’était l’homme qu’Alessandro avait envoyé pour son installation.
— Bonjour, dit-il en lui tendant une enveloppe. Voici la double clé, et tous les papiers de l’appartement.
Elle le fixa sans comprendre. Il ajouta, d’un ton calme :
— Monsieur Alessandro n’est plus, mais il a tout prévu. Vous pouvez garder tout ça.
L’homme n’avait même pas pris le temps d’entrer. Il était resté dans l’encadrement de la porte, comme pressé d’en finir.
— Je suis juste venu vous informer, dit-il d’un ton neutre, presque détaché. Monsieur Alessandro avait payé deux mois. À partir de maintenant, c’est à vous de prendre le relais.
Flaviana le regarda, les sourcils froncés.
— Comment ça, deux mois ? Alessandro m’a dit qu’il avait tout réglé pour plusieurs mois. Qu’il vous avait donné l’argent directement.
L’homme haussa les épaules, le regard fuyant.
— Peut-être qu’il a dit ça, ouais. Mais moi j’ai reçu que pour deux mois. Le reste... j’en sais rien.
Elle le fixa. Il ne mentait pas bien. Il évitait son regard, grattait nerveusement son avant-bras. Et Flaviana comprit. Ce n’était pas qu’Alessandro n’avait pas payé. C’était cet enfoiré qui avait gardé l’argent.
— Vous avez pris l’argent qu’il vous a donné. C’est ça ? souffla-t-elle, la voix plus froide.
L’homme la fixa un instant, puis son sourire s’étira avec mépris.
— Alessandro est mort. Vous n’avez aucune preuve. C’est votre parole contre rien du tout.
Et sans attendre de réponse, il tourna les talons et s’en alla. Flaviana resta figée, la porte encore entrouverte. Puis, d’un geste vif, elle referma. Un coup sec, comme une gifle contre la réalité.
Elle s’assit sur le canapé, les papiers encore dans la main. Elle les étala sur la table basse. Contrat, échéancier, documents. L’appartement était beau, spacieux, lumineux... et hors de prix.
Elle avait un peu d’argent de côté, mais pas assez pour tenir plus de deux ou trois mois, surtout si elle voulait continuer à aider Léandra de temps en temps.
Elle laissa tomber sa tête en arrière contre le dossier du canapé, ses yeux levés vers le plafond. Pas un mot ne sortit de sa bouche. Mais à l’intérieur, c’était un feu silencieux. De la colère. De la frustration. Et cette angoisse glacée de se retrouver encore une fois seule, sans appui, sans filet.
Elle attrapa son téléphone, mais ne fit rien. Elle resta là, le regard dans le vide, la gorge nouée.
Un moment après, quelqu’un frappa à la porte. Flaviana, perdue dans ses pensées, sursauta légèrement avant d’aller ouvrir. Devant elle, Léandra se tenait là, sourire timide aux lèvres. Sans attendre, elle se jeta dans ses bras.
— Tu m’as manqué, murmura Léa.
Flaviana la serra fort contre elle, malgré la douleur qui la rongeait. Elle n’allait pas bien, mais retrouver sa petite sœur lui faisait un bien fou. Elles entrèrent ensemble.
— Wow… ton appart est juste magnifique, s’exclama Léandra, les yeux écarquillés devant le luxe des lieux.
— Merci, répondit Flaviana en esquissant un sourire. Elle commença à ranger les papiers que l’homme lui avait laissés plus tôt, les empilant méthodiquement sur la table basse.
Puis soudain, elle se rappela.
— J’ai oublié les pancakes ! Fais comme chez toi, je vais m’y mettre.
— Non, on les fait ensemble, dit Léandra en posant son sac d’école dans un coin avant de rejoindre sa sœur dans la cuisine.
Cuisiner à deux ramena un peu de chaleur dans l’appartement. Les rires se mêlèrent au bruit des ustensiles. Un instant suspendu, simple et doux.
— Je veux vivre avec toi, lâcha soudain Léandra.
Flaviana se figea un instant.
— Tu sais que les parents ne seront jamais d’accord. Et puis… t’es pas encore majeure.
— J’ai hâte de l’être. J’en peux plus de la maison. Ils sont… insupportables.
Flaviana sourit doucement.
— C’est peut-être vrai… mais tu sais, ils font ça pour notre bien.
Léa la fixa, un peu moqueuse.
— Tu dis ça alors que t’as fait tout le contraire.
— J’avoue, répondit Flaviana en riant doucement. Mais n’empêche, parfois, ils ont pas tort.
Après le repas, les deux sœurs s’étaient affalées sur le canapé avec un film en fond. Léandra, lovée contre Flaviana, avait fini par s’endormir paisiblement, les jambes repliées sous elle. Flavia, silencieuse, la regarda dormir un moment, le cœur serré par un mélange doux-amer.
A suivre