Léa n’arrêtait pas de lui dire que c’était trop, qu’elle n’avait pas besoin de tout ça, mais Flavia insistait avec un sourire doux et ferme.
— Tu mérites mieux que ce qu’on te donne. Moi je peux pas te promettre grand-chose, mais je peux te gâter un peu.
Avant de quitter le magasin, Flavia fit une dernière halte au rayon électronique et acheta un nouveau téléphone pour Léandra. Une fois dehors, elle lui glissa dans la main.
— Tu vas le cacher, d’accord ? On communiquera avec ça. Comme ça, peu importe ce qui se passe, je serai toujours là.
Léandra, les yeux brillants, hocha la tête.
Elles allèrent ensuite déjeuner dans un petit restaurant calme. Assises en terrasse, elles rirent, discutèrent, comme si rien ne pesait au-dessus d’elles. Flavia laissait Léa parler de l’école, de ses amis, de ses rêves. Elle écoutait, absorbait chaque mot avec une tendresse presque douloureuse.
Le soleil déclinait déjà lorsque Flavia appela un taxi. Sur le trajet du retour, elles restèrent silencieuses, main dans la main, chacune savourant la présence de l’autre. Le taxi s’arrêta à quelques rues de la maison familiale, pour éviter d’attirer les regards.
— Tu m’écris dès que tu rentres, d’accord ? murmura Flavia.
Léandra hocha la tête, le téléphone soigneusement dissimulé dans son sac. Elles s’enlacèrent une dernière fois, longuement, puis la petite sœur descendit.
Flavia la regarda s’éloigner, son cœur gonflé de douleur et d’amour mêlés. Puis elle donna au chauffeur l’adresse de son appartement.
Elle rentra dans son silence, les bras pleins de paquets, mais le cœur un peu moins vide.
Flaviana se glissa dans la cuisine, les bras chargés de sacs. Elle rangea les produits avec une forme de satisfaction nouvelle, celle de posséder enfin un espace à elle. Le frigo se remplit lentement de couleurs : des fruits frais, des bouteilles d’eau, des boîtes soigneusement empilées. Elle avait acheté de quoi tenir plusieurs jours.
Après une douche chaude, elle se prépara un petit plat simple, installa son assiette sur la table basse du salon et s’allongea dans le canapé, les jambes repliées. Elle zappait distraitement les chaînes quand un bruit la fit sursauter.
La porte s’ouvrit.
— Qu’est-ce que… ? souffla-t-elle en se redressant.
Alessandro entra, l’air tranquille, vêtu d’un pantalon beige et d’une chemise sombre entrouverte.
— Bonsoir, ma belle, dit-il avec un sourire. Je t’ai manqué ?
— Tu... tu as un double de la clé ?
— Évidemment. Cet appartement, c’est moi qui te l’ai offert. C’est autant chez moi que chez toi, non ? répondit-il en refermant derrière lui.
Flavia ne répondit pas. Il traversa la pièce et s’installa confortablement sur le canapé, à la même place qu’elle occupait quelques minutes plus tôt. Il attrapa la télécommande, baissa le volume.
— Je n’ai pas arrêté de penser à toi de toute la journée, ajouta-t-il sans la regarder. Et à ce corps.
Elle resta figée un moment, puis un sourire espiègle s'étira lentement sur ses lèvres.
— Je reviens.
Elle se leva sans ajouter un mot et disparut dans la chambre. Alessandro alluma une cigarette, l'air pensif. Quelques minutes plus tard, Flavia reparut.
Elle portait une des lingeries neuves qu’elle s’était offerte ce matin : un ensemble noir en dentelle fine, audacieux, découpé juste assez pour rendre fou. Ses cheveux flottaient librement sur ses épaules, ses yeux brillaient d’un éclat provocant.
— Tu pensais à ce corps-là ? demanda-t-elle en s’approchant, féline.
Alessandro laissa échapper un sifflement d’admiration, puis s’affala légèrement en arrière, les bras étalés sur le dossier du canapé.
— Exactement celui-là.
Sans un mot de plus, Flavia commença à danser. Lentement. Ses hanches ondulaient, son regard rivé au sien, intense. Chaque geste semblait le défier, l'inviter, le torturer à la fois. Alessandro ne bougeait pas. Il observait, fasciné.
— Tu me rends fou, murmura-t-il.
Elle s’approcha encore, posa un genou de chaque côté de ses jambes, s’assit à califourchon sur lui. Leurs souffles se mêlaient. Ses doigts se posèrent sur son torse, déboutonnant doucement sa chemise.
— Alors deviens fou, Alessandro.
Et il n’hésita plus.
Leurs corps s’entrelacèrent d’abord sur le tapis moelleux du salon, emportés par une fièvre qui ne voulait jamais retomber. Les mains de Flaviana glissaient sur lui avec précision, comme si elle avait appris chaque courbe, chaque point de tension. Alessandro, lui, se laissait aller, grognant parfois, la dominant souvent. Elle aimait ça. L’homme savait ce qu’il faisait, et elle aussi.
Puis, dans un éclat de rire étouffé, ils s’étaient levés, titubant jusqu’à la chambre, ivres de désir. Les draps volèrent. Les gémissements aussi.
Tard dans la nuit, nus et haletants, ils étaient restés allongés dans le lit défait. Flaviana tourna doucement la tête vers lui, caressa son torse du bout des doigts.
— Tu devrais rentrer, chuchota-t-elle. Ta femme... tes enfants...
Alessandro soupira, les yeux perdus au plafond.
— Ce soir, je reste. Je n’ai pas envie de dormir ailleurs qu’ici.
Un sourire discret s’étira sur les lèvres de Flavia. Sans un mot, elle se blottit contre lui. Le silence s’installa. Il était doux, presque irréel.
Au petit matin, vers 7h, Alessandro se leva discrètement. Flavia dormait encore, sa jambe nue posée sur le drap. Il resta un instant à l’observer, un sourire attendri au coin des lèvres, puis alla se préparer. Avant de partir, il s’approcha du lit et la réveilla d’un léger b****r.
— Flavia...
Elle ouvrit lentement les yeux, encore engourdie.
— Tu pars déjà ?
— Je dois. Mais... avant, tiens.
Il posa une liasse de billets sur la table de chevet. Encore plus que la dernière fois.
— Tu es vraiment la meilleure, souffla-t-il. Et tu sais comment me satisfaire mieux que personne.
Flavia, encore surprise malgré elle, murmura un merci. Il l’embrassa de nouveau, plus doucement cette fois.
— Habille-toi. On va prendre un petit déjeuner ensemble. Un endroit discret.
Elle hocha la tête, touchée. Il n’y avait plus seulement du désir dans ses yeux. Il y avait autre chose. Peut-être l’illusion d’être importante pour un homme de ce monde.
Ils se préparèrent rapidement. Flavia mit une robe sobre mais élégante, Alessandro opta pour une tenue décontractée mais chic. Et ensemble, ils quittèrent l’appartement, direction un lieu secret où, pour quelques heures encore, il n’y aurait qu’eux deux.
Après leur déjeuner discret dans un coin chic de la ville, Alessandro avait déposé Flaviana devant son immeuble. Il l’avait embrassée sur la joue, ses doigts s’attardant un instant sur sa main, puis il était remonté dans sa voiture et avait disparu dans la circulation. Flaviana, encore flottante dans une bulle de confort, était montée à son appartement.
Elle retira ses talons, passa une robe légère, puis se mit à ranger les sacs de shopping qu’elle n’avait pas encore ouverts. Robes, chaussures, lingerie… Elle sourit en rangeant chaque pièce dans son armoire, savourant cette impression d’abondance qu’elle n’avait plus ressentie depuis longtemps.
Son téléphone vibra soudain. Elle le prit aussitôt, et son visage s’illumina.
— Léa ! souffla-t-elle avec un grand sourire en décrochant. Ça va, ma chérie ?
— Oui ! Je suis trop contente de pouvoir t’appeler, dit la voix enjouée de Léandra. J’ai trop pensé à toi ce matin !
— Moi aussi. Dis-moi, les parents n’ont rien vu pour le téléphone ?
— Non, rien du tout. J’ai tout bien caché. Même les vêtements et les chaussures que tu m’as achetés, je les ai planqués dans un vieux carton, dit-elle en rigolant doucement. Maman fouille pas trop dans mes affaires en plus.
Flaviana riait doucement à son tour, attendrie.
— Et t’es pas à l’école normalement ?
— Si, mais là c’est la pause déjeuner. Je me suis un peu éloignée dans la cour pour t’appeler.
— Fais attention, hein, murmura Flavia. Je veux pas que tu te fasses prendre à cause de moi.
— T’inquiète, je gère.
Il y eut un petit silence complice, puis Léandra reprit, d’une voix plus douce.
— Vendredi… c’est mon anniversaire. Papa et maman veulent le fêter ce week-end. Mais moi, ce que je veux, c’est que tu sois là…
Flavia s’arrêta un instant, comme si le temps avait ralenti autour d’elle. Elle murmura la date à voix basse. Bien sûr. Vendredi. Le 21.
— C’est vrai... ton anniversaire…
— Tu vas venir, hein, Flavia ? dit Léa d’un ton suppliant.
— Oui, bien sûr. On va se voir vendredi. Et on va fêter ça comme il faut, juste toi et moi si tu veux. Comme avant.
— Promis ?
— Promis, ma sœur. Je serai là. Et on va passer un moment inoubliable.
— J’ai trop hâte…
Leurs voix se sont entremêlées dans un dernier rire. Flavia raccrocha, le cœur serré. Elle savait qu’elle ne pourrait pas éviter sa famille éternellement. Mais pour Léa… elle serait capable d’affronter n’importe quoi.
A suivre